Nabooru peinait presque à suivre le rythme.
Le voleur était sacrément rapide, sinon elle devrait déjà l'avoir rattrapé après quelques foulées ! Mais il n'en était rien, et s'il ne creusait pas la distance, il arrivait néanmoins à conserver une avance suffisante. La reine des gérudos soupira profondément au détours d'un énième embranchement à prendre ; le Bourg et ses sinueux passages ne lui étaient pas spécialement connus, du moins pas assez pour concurrencer à la course un brigand expert en raccourcis. La chance qu'elle avait, en un sens, consistait en le fait de ne pas encore avoir été remarqué par celui qu'elle chassait. Une chance que voila ! En d'autres conditions, peut-être aurait-elle perdu sa trace beaucoup plus vite.
Elle gagna au final un quartier bien loin du centre. Celui-ci était pratiquement déserté, seuls quelques passants se risquant dans cet endroit visiblement appauvris, loin de la splendeur et la richesse de la Place du Marché. D'ailleurs, les quelques gens qu'elle croisait ne manquaient pas de presser le pas rien qu'en la voyant ; il fallait faire remarquer que si les gérudos étaient déjà rares dans le centre, en voir dans cet endroit beaucoup plus reculé avait de quoi nettement surprendre.
Le visage de Nabooru s'assombrit légèrement alors qu'elle avait déjà cessé de courir depuis quelques minutes maintenant. Son regard passait sur les murs sombres des habitations, pas bien hautes et assez mal entretenues à première vue. Elle se retourna, semblant chercher son chemin dans cet endroit sombre et où régnait une odeur d'égout désagréable.
Alors que seul le vent s'engouffrant dans les étroites ruelles et les sons de volets et de portes grinçant et claquant contre les murs se faisaient entendre, elle remarqua la présence d'un petit chat à l'autre bout de la rue. Il la fixa un instant, avant de partir aussitôt. La Sage de l'Esprit se remit en mouvement vers l'endroit où se tenait le félin quelques secondes plus tôt, puis bifurqua dans une rue sur la droite. « Qui êtes-vous et que faites-vous ici ? » Tança une voix dans son dos. Le ton n'était ni inquiétant, ni agressif ; la femme du désert se retourna pour enfin voir une jeune adolescente hylienne - ou sheikah, peut-être ? - qui la fixait sans la moindre émotion dans les yeux. Ses lèvres se séparèrent lentement lorsqu'elle comprit, à sa surprise, qu'il ne s'agissait ni plus ni moins de cette jeune fille qui avait volé le marchand sur la place. Elle la reconnaissait à son accoutrement.
« Je suis Nabooru, reine du désert ! Mais qui es-tu, toi, pour me demander mon nom ? » Lança fièrement la gérudo.
De ses yeux d'or, la rouquine scruta les moins faits et gestes de la jeune fille, prête à réagir si la situation devait lui échapper. Néanmoins, ses traits finirent par se radoucir ; elle ne voulait pas se montrer hostile envers elle, d'autant qu'elle n'était pas bien âgée à première vue. L'effrayer ne lui servirait à rien. Et puis... c'était une voleuse. Aux yeux de Nabooru, cela n'en faisait pas une criminelle pour autant.
« Tu as le pas plutôt léger, tu sais », fit-elle dans un sourire qui trahissait son amusement. « Tu ne te débrouilles pas trop mal. Mais tu es tombée sur moi, et si en temps normal je t'aurai volontiers laissé tranquille, je vais aujourd'hui reprendre ce que tu as volé à la marchande, et le lui rapporter. »
La gérudo fixa intensément la voleuse, prête à prendre les mesures nécessaires si la situation devait s'envenimer. Pour autant, la jeune fille ne semblait pas vouloir absolument en découdre ; elle avait même l'air un tantinet lunatique, comme si la situation ne la touchait pas tant. Mais Nabooru abandonna bien vite l'adolescente, son regard se déportant derrière elle, sur un abri constitué de quelques pièces de fer rouillé et de bois pourri. Intérieurement, la reine se désola de la situation dans laquelle la brigande se trouvait. Contenant son émotion, elle demanda, d'un doigt levé pour désigner cet abri de fortune : « Est-ce là que tu vis ? » La question était un brin rhétorique et Nabooru le savait.
Elle s'avança au devant de la jeune fille et la dépassa pour s'approcher de l'abri et y regarder de plus près. Son sourire l'avait quitté ; elle avait de la peine que des gens soient ainsi obligé de vivre de la sorte. Son peuple sans foyer, et opprimé plus loin à l'ouest, dans le désert, l'appelait. Et pourtant elle ne pouvait pas ignorer ce qu'elle voyait sous ses yeux.
« Depuis combien de temps cette situation dure-t-elle ? Où sont tes parents ? » Demanda-t-elle, un brin inquiète. Mais elle se gardait bien de trop le montré ; après tout, elle avait quelque chose à reprendre à la voleuse.
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