Posté le 26/11/2010 21:02
« Qui sait combien de temps nous pourrons encore profiter de cette accalmie avant que la guerre ne nous sépare à nouveau. »
Cette phrase était remarquablement bien dite, et aurait pu être tirée d'une oeuvre de Shakespeare à l'image de Roméo et Juliette et de la guerre menaçant les Capulets et les Montaigus. Tsubaki aurait été une Juliette renfermée et soucieuse, se recueillant dans un lieu qui était plus apte à la violence qu'a la paix, et Soren aurait été un Roméo vaillant, son armure illuminée par la clarté de la lune qui résistait aux attaques des volutes sombres de la nuit. L'astre brillait de mille feux et attirait irrésistiblement le regard. C'était une belle soirée, une soirée aspirant le calme et la sérénité. A cet instant vous vous demandez pourquoi est-ce que je vous parle de ce décors quasi-idyllique?
Parce que la guerre allait arriver. Et vite.
En réalité ce n'était pas la guerre a proprement parler, mais plutôt l'incarnation de la malchance, du désordre et de la maladresse réunies. Et le nom de cette créature légendaire auprès des piliers de bars en manque d'histoire pathétiques après avoir descendus quelques verres tenait en cinq lettres.
T-I-D-U-S.
Oswald de nom de famille. Mais il se faisait appeler Tiduslegend. Pourquoi? Parce qu'il lui fallait un pseudonyme atypique. C'était sûr, contracter son nom avec le mot légende était plutôt atypique. Mais alors qu'il pensait il y a des années de ça que ce patronyme serait scandé par la foule en liesse qui tous les soirs parleraient de ses derniers exploits en date, il était repris en cœur par les habitués de l'auberge de NuttyK avec comme éternelle phrase de bienvenue: "beeeeeeeeaaaaaaaaah" ("T'as fait quoi comme bourde aujourd'hui?" en langage de poivrot). Mais malgré tout il gardait espoir. Un jour peut-être... Non. Un jour, il serait dans la légende d'Hyrule. Peut-être pas dans la même rubrique que Link, mais en bonne page quand même. Il s'imaginait de temps en temps feuilleter un énorme livre relatant les exploits des héros de ces terres, et pointer son doigt sur un nom de la section dédiée à la lettre T: le sien.
Mais ce n'était pas pour aujourd'hui. Aujourd'hui, en cette nuit sombre et radieuse à la fois, Tidus voyageait avec Campagnette.
Campagnette était une jument assez âgée mais qui malgré ses nombreuses bougies gardait un sale caractère et une forme olympique. Un canasson qui n'est pas à la portée de tout le monde. Une bête qu'il ne faut pas chevaucher quand on a pas des années d'équitation dans les pattes. En gros, quelque chose qui était hors de portée pour Tidus. C'est vraiment qu'il n'avait rien d'autre sous la main ce jour là.
"Allez, Uh Campagnette!"
Tidus tentait désespérément de faire avancer l'animal qui broutait les touffes d'herbes qui parsemaient son chemin. Il battait des pieds sur les flancs de la jument qui n'en avait strictement rien a faire.
"MAIS TU VA AVANCER OUI?!"
Aucune réaction.
"CAMPAGNETTE, AU GALOP!"
Toujours rien.
"Toujours a bouffer ce machin... Espèce de cheval obèse!"
Il y a des choses à ne jamais faire avec un cheval. Par exemple, il ne faut jamais de rester derrière, car nous risquons de nous prendre un coup de sabots douloureux, ainsi qu'un vol plané gratuit pour la peine. Et il y a des choses à ne pas faire avec Campagnette. Elle avait gagné le prix du défilé des équidés d'hyrule et avait obtenu le Crin d'Or, l'ultime distinction pour un cheval de concours. Et ce n'est pas cet idiot sur son dos qui moulinait des pieds qui allait critiquer sa ligne irréprochable.
Sans prévenir, elle se mit au galop, et le jeune homme n'eut même pas le temps de crier. Mais intérieurement, il était terrifié, et il pensait à toute sa famille qui en ce moment devait être au coin du feu chez eux. Une image rassurante. Mais ce n'était pas suffisant pour contrer la peur que lui inspirait Campagnette dans ces moments là. Après quelques centaines de mètres, le canasson s'arrêta, cabra et Tidus chuta. Sa rencontre avec le sol ne fut pas des plus agréable, mais il avait l'habitude. Les chevaux et lui, ça n'avait jamais été une grande histoire d'amour. Quelques secondes après, l'animal se remit à galoper, abandonnant son propriétaire à son triste sort.
Il tourna sa tête tout en suffoquant, la chute lui ayant coupé le souffle. Au loin, il pouvait distinguer difficilement deux silhouettes. Et voilà. Il allait encore être ridicule auprès de parfaits inconnus.
Une fois de plus une fois de moins, quelle importance? Après tout le ridicule ne tue pas... Du moins pas encore.