Posté le 20/08/2015 17:36
Tout se passa trop vite pour l’esprit fatigué et embué de Morgane. Le monstre bava, et quelques secondes plus tard, il n’y eut plus de monstre : il n’y avait que la raison principale de sa souffrance au quotidien depuis des années. La conscience de la sheikah savait, au plus profond d’elle-même que cette représentation de la reine n’était, justement, qu’une représentation. Mais le cœur de la jeune femme était au bord de l’explosion : se tenait en face d’elle la plus grande garce de l’univers à ses yeux, et elle mourrait d’envie de la faire souffrir en retour.
Morgane n’avait jamais vu la reine de ses propres yeux, mais son père lui en avait montré un portrait il devait y avoir deux ou trois ans de cela. Tous les sheikahs se devaient de savoir qui était l’hylienne qui bénéficiait du soutien de dame Impa. Pour la brunette, Zelda était la pire des esclavagistes : malgré son pouvoir, sa prétendu gentillesse et son soi-disant sens de la justice, elle continuait de profiter de la servitude des sheikahs, sans rien faire pour changer cela.
Les mots de la pseudo-Zelda vinrent marteler le fer déjà chaud de sa rage. Dans son esprit, Morgane n’était plus dans la caverne : elle était dans une des somptueuses salles du château, où dans un coin son père en haillon nettoyait le sang que répandait le cadavre encore chaud de sa mère. Les gardes commençaient à s’organiser, et une brise fraîche vint caresser Morgane, lui délivrant un conseil qui sonnait comme la permission qu’elle attendait. Il était temps de rendre justice soi-même.
La sheikah n’avait jamais combattu en temps réel grâce à la protection de sa mère. L’entrainement sur des mannequins de paille avait beau avoir été assidu et régulier, se trouver face à des ennemis bougeant et attaquant en retour était une toute autre histoire. Pourtant, pas un instant la main de Morgane ne faiblit. Elle se mit à danser entre les gardes, cherchant la faille dans les armures factices de son imagination. La pointe fleurait les morceaux de peau découverts, tranchait ce qui pouvait l’être. Des zébrures vinrent bientôt s’aligner sur ses bras, mais son esprit occulta la douleur : ses yeux étaient rivés sur Zelda. Alors elle continua, tuant plus de monstres, prenant plus de coup. Un des gardes réussit à la frapper par derrière, et Morgane tomba au sol genou en avant. Elle se releva rapidement, tuant dans le même coup celui qui l’avait fait tomber. Mais un second assaut la renvoya à terre. Elle essaya de se relever, mais déjà un autre monstre venait lui asséner un nouveau coup, et le cercle se resserrait autour d’elle. Les zébrures recouvraient totalement ses bras, son sang se mélangeant à la bave des monstres. Son visage écopa aussi d’un puissant coup, éclaboussant le sol d’une teinte vermeille. Morgane serra son fleuret contre sa poitrine, comme pour protéger le dernier lègue de sa mère.
"NAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAN !"
Le cri monta du plus profond de son ventre, chargé de haine et de chagrin. Elle allait mourir ici, sans même avoir eu le temps de commencer sa mission vengeresse. Elle allait rejoindre les autre sheikahs abattus dans l’ombre, et disparaitrait de la surface d’Hyrule non pas dans un combat épique au sein même du château, mais au fond d’une caverne sordide face à une Zelda d’illusion. Elle allait mourir parce que son cœur avait souhaité en découdre avec un fantasme plutôt que d’écouter sa raison et de fuir le piège tendu. Dans un dernier instant de lucidité ou de folie, Morgane se mit à espérer que la brise reviendrait lui caresser la peau une ultime fois, soulageant la douleur des blessures de ses bras, lui murmurant de dernières paroles.