EVENT RP - Seuls les deux noms cités peuvent poster
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« Le théâtre est une tribune. Le théâtre est une chaire.
Le théâtre parle fort et parle haut »
- Plus que quelques minutes, les rouquines !
Aedelrik jeta un regard froid vers le jeune garçon au sourire narquois, qui disparu aussitôt, laissant le voleur retourner à son ouvrage. Quelques minutes avant le début du combat... Autant dire à peine un instant. Avec précaution, il tira un charbon chaud des braises en déclin, et commença à maculer ses mains de suie noire. Derrière lui, il entendait Lanre faire du tri dans un râtelier d'armes. Les deux hommes ne se parlaient pas depuis plusieurs minutes, non pas par froideur mais parce que leur préparation exigeait d'eux un soin particulier qu'une discussion frivole aurait risqué de perturber.
Pendant un assez long moment, Aedelrik avait observé son ami appliquer des pigments sur son corps, formant des symboles étranges, sans doute une tradition ancestrale. Au dessus de ces bizarreries, le Ceald porterait une cotte de maille surmontée d'une armure de cuir, typique du pays d'où il venait. Au final, le Renard connaissait très peu le peuple de Lanre et notamment sa manière de se battre. Heureusement, le Renard se moquait bien de cela en cet instant. Oh, son esprit était toujours curieux d'en apprendre plus, mais pour ce jour là, la technique guerrière de l'autre rouquin ne comptait pas. Pas pour ce qu'ils avaient prévu.
Ses mains à présent totalement sombres, en une couche unie visant à les empêcher de transpirer, Aedelrik enfila ses gantelets d'acier, se redressa sur son siège et rabattit sa capuche devant lui. La douleur de son bras à peine cicatrisé se réveilla, et il eut une soudaine envie de fumer, pour l'apaiser. Néanmoins, il refréna la tentation, fermement. La drogue pouvait l'aider pour un combat classique mais pour ce qu'il s'apprêtait à faire... Elle ne ferait que lui embrouiller l'esprit. Légèrement tendu par le manque, il se leva et se pencha au dessus d'une bassine d'eau qui traînait sur une table. Son reflet lui tira un sourire de satisfaction. A la surface de l'eau, un autre semblait lui rendre son regard. Une figure digne d'un conte, rasée de prés, dotée de traits avantageux, d'une chevelure rousse soyeuse et au crâne recouvert par une peau de loup rendant le tout intimidant. Mais soudain, le plastron du Renard se décrocha et vint percuter la bassine, troublant l'eau à l'intérieur. Un juron échappa à Aedelrik, attirant aussitôt l'attention de Lanre, qui approcha avec un sourire.
- Tu n'as vraiment pas l'habitude d'enfiler une armure pareille.
Une fine observation, aussi réelle que vexante. Cela se voyait donc tant que ça ? Aedelrik grommela en réponse, peu fier d'avoir besoin de l'aide de celui qu'il était sensé affronter dans quelques minutes. Son ami s'affaira et aussitôt, le voleur sentit le plastron revenir en place et l'enserrer fortement en dessous des épaules. Un contact de l'acier avec sa blessure du combat contre Swann lui arracha une grimace. Ainsi engoncé dans une caisse d'acier, il perdait presque complètement son assurance et son air arrogant. Mais c'était une nécessité à laquelle il ne pouvait alors se soustraire. Sa main glissa vers la poignée de sa masse en fer, toujours accrochée à sa ceinture. Avec un soupir, il la détacha et la posa. Elle n'allait pas avec le rôle qu'il s'était choisi. Lanre fit jouer l'épaulière, vérifiant l'articulation des pièces d'acier, avant de venir inspecter le gant droit. Lui faisant face, Aedelrik remarqua la mine soucieuse du Ceald, comme si il se sentait un besoin honteux de parler. Finalement, il s'approcha de l'oreille du Renard et lui glissa, à voix basse,
- Sûr de toi, mon ami ?
- Plus que jamais. Tu as bien serré la deuxième sangle ? J'ai l'impression que c'est un peu lâche.
- Je ne comprends pas bien... l'intérêt du déguisement.
- Pas un déguisement, un costume.
- Comme tu veux, ça n'en est pas plus clair.
Le Renard lança à son associé un regard d'où perçait sa propre incompréhension. Il pensait pourtant avoir correctement expliqué. Le reste n'était qu'évidence, mais Lanre restait perplexe. Il prit une seconde pour choisir les bons mots, attentif au fait que le Ceald maîtrisait toujours moins la langue Hylienne que lui,
Pourtant c'est simple. Aedelrik l'étranger s'est fait écraser au premier tour, et par une bonne femme en plus. J'ai eu beau être sauvé sur le fil, j'ai subit ma pire humiliation depuis longtemps. Tu crois peut être que le public va m'accueillir à bras ouverts ?
Ils t'ont choisit pour revenir...
Ils veulent me revoir perdre, pouvoir se moquer doublement de moi, me jeter des tomates comme ils n'avaient pu le faire la première fois. Si Aedelrik revient sur cette scène, il sera hué et j'aurais perdu toute chance de voir mes projets se réaliser. Cela ne peut arriver. Donc, je ne serais pas Aedelrik, ni l'étranger à l'accent bizarre. Je serais un autre, et ce costume est là pour m'aider à le leur faire croire.
Lanre haussa les épaules, une expression moyennement approbatrice sur le visage. Il ne semblait pas pleinement convaincu par de tels arguments. Il s'écarta du voleur, les mains sur les hanches, contemplant son œuvre, guettant le moindre défaut. Sans doute aussi constatait-il la différence entre l'aspect ordinaire d'Aedelrik, et celui qu'il revêtait pour cette occasion. Enfin, son jugement tomba,
- Bizarre, de vouloir être quelqu'un d'autre que soi, surtout pour se battre.
- L'important n'est pas de gagner et tu le sais très bien. Lanre, ce qui compte vraiment c'est d'emporter les cœurs. Si le coup marche comme prévu, c'est tout bénef : moi, ils m'adoreront, et toi tu passeras en finale où tu pourras gagner ce tournoi. De la renommée pour nous deux et de l'argent en plus pour toi. Chacun y gagne. Enfin, si tout se passe bien... Ca fait longtemps que je n'ai plus joué à l'acteur...
- Et si tu n'en es plus capable ?
- Dis tout de suite que tu ne me fais pas confiance
- J'ai du mal. Un œil aiguisé verra que tu simules, et on aura du mal à faire avaler le tout au public. Tu ne peux pas juste te coucher après avoir fini ton numéro.
- Ne t'en fais pas, frère. Faire illusion est ma spécialité.
- Je ne sais pas...
Lanre se retourna, le dos voûté. Visiblement, la perspective que le coup soit découvert l'angoissait, assez pour qu'il remette en question plusieurs jours d'organisations Il refusait de devoir abandonner ainsi. Lentement, il approcha du Ceald.
- J'ai entendu tout ce que vous avez dit. Je regrette, mais votre combat n'aura pas lieu.
La voix, inconnue des oreilles de Lanre le fit se retourner, une boule de peur au ventre, pour se retrouver nez à nez à Aedelrik, qui le fixait d'un air grave, un air qu'il ne lui connaissait pas. Ses traits étaient tendus d'une manière à en faire un visage différent. Sous sa peau de loup, il apparaissait comme un autre homme. Nulle magie ou étrangeté là dedans, mais un savoir faire d'acteur longtemps exercé, au fil des années, jusqu'à presque devenir un maître. Aussi vite qu'il était devenu quelqu'un d'autre, le Renard revint. Son sourire narquois, ses fines rides habituelles autour de ses yeux. Sa voix reprit son léger accent. Il posa alors une main sur l'épaule de Lanre.
- Tu me crois maintenant ?
L'air contrit mais plus rassuré, le Ceald opina du chef. Alors, une trompe résonna dans l'arène, à travers la grille qui les en séparait. Aedelrik se rendit alors rapidement jusqu'à la table où étaient étalées ses affaires, boucla sa ceinture couvertes de diverses bourses en cuir autour de sa taille, y noua également son habituelle étoffe rouge et enfin, s'empara d'une épée qu'il avait déjà remarqué, sur un râtelier. A une main, assez longue, et en bon acier. Pas une arme de noble, l'accessoire parfait pour son rôle. En un dernier regard, il considéra satisfait son apparence. Sans être bardé de métal comme le combattant Robert, il était mieux protégé que d'ordinaire, avec une armure de plaques légères dont il avait retiré la côte de mailles en dessous. Après tout, seul ce qui se voyait comptait, le reste n'était qu'encombrement. Par dessus son plastron, sur un tabard blanc était représenté l'oiseau Hylien volant au dessus d'un loup, de même que sur son bouclier, qu'il récupéra de contre un mur. Ce symbole peint, aucun des spectateurs ne pourrait ignorer. Il vint se placer à côté de Lanre. Ce dernier l'observa un instant et remarqua aussitôt,
- Tu trembles.
- C'est le trac. Je sais gérer ça. Fais moi confiance.
- … Qui seras tu une fois dans l'arène ?
- Un héros qu'ils connaissent forcément, et que l'enfant en eux adore toujours.
La trompe résonna à nouveau, et avec elle, le tonnerre de la clameur du public envahit le lieu. Lentement, comme si le temps suspendait presque son vol, la herse s'éleva.
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A l'instant où Aedelrik vint dans la lumière, devançant son ami, il ne tremblait pas. Sa démarche était celle d'un chevalier lumineux, fier et volontaire. Et pour cause, le voleur n'en était plus un : il avait laissé sa place à son rôle. Celui du héros d'un conte populaire, que beaucoup de mères avaient déjà récité à leurs enfants pour les endormir. Une histoire simple, mais belle, avec des gentils vêtus de blanc et des méchants parés de noir. Ce rôle, c'était celui du Chevalier des Chemins, un héros qui avait vu un démon massacrer sa famille sous la forme d'un mercenaire sauvage. Dépouillé de ses biens, il était tombé dans la misère, pour finalement retrouver la voie de la lumière sous l'inspiration de Nayru, et reprendre sa place. Simple, peut être un peu trop, mais le récit était connu de tous. Et quoi de mieux qu'un classique pour toucher les cœurs ?
Tandis qu'il avançait sur le pont qui menait à l'arène, pour la deuxième fois, Aedelrik s'efforçait de faire le vide en lui. Au fond, il ne parvenait pas à croire complètement en son idée. Son expérience dans les arènes de son pays lui donnait un savoir faire, autant pour le théâtre que pour le combat spectaculaire, mais il ignorait si les hyliens seraient réceptifs, si ils allaient entrer dans son jeu. Néanmoins, la peur n'était plus acceptable à présent qu'il se tenait sous tous les regards. Il continua d'avancer la tête haute, sans peur ni honte. Les clameurs avaient laissé place aux murmures surmontés de quelques cris. Comme prévu, la surprise et l'incrédulité semblait dominer. Les prochaines minutes allaient déterminer ce que le public lui enverrait : de la gloire, ou du ridicule.
Aedelrik et Lanre se placèrent chacun à un bout de l'arène. Aucun ne fit de geste vers l'autre, comme prévu à l'avance. Tous deux étaient déjà dans leur rôle. Car si le Renard était le personnage principal, son ami se devait, lui d'endosser la peau du méchant. Le démon brutal, que la lumière devait terrasser... Sauf que le final serait différent cette fois.
Les deux épées, banale pour Aedelrik, grande claymore pour Lanre, fut tirée dans un même mouvement. Dans la loge d'honneur, un homme se leva et fit sonner la cloche. Le combat débutait.
« Peuple d'Hyrule, écoutez ma voix,
Car présentement, je ne peux rester coi ! »
La voix du chevalier avait résonné, forte, dans toute l'arène, et le public s'était majoritairement tut. Quelques balourds hurlaient aux deux roux de combattre mais la plupart des spectateurs semblait suffisamment intrigués et curieux pour accepter de faire silence. Le regard d'Aedelrik parcouru les premiers rangs des gradins, comme si son personnage y cherchait un soutient, un visage familier. Et de fait, le renard y guettait des traits fins et juvéniles afin de pouvoir s'adresser au meilleur public qu'un acteur peut espérer : les enfants. Tout au théâtre était affaire de crédulité. Et si les adultes mettaient du temps à accepter de croire aux histoires qu'on leur racontait, les enfants plongeaient dans les récits comme dans des flaques de boues en Automne. Ayant repéré plusieurs bouilles aux joues rondes, il s'adressa spécialement à eux.
« En effet, je ne peux garder le silence,
Tandis que se retrouve devant mes yeux,
L'homme qui m'a pris ma descendance,
Et réduit en cendre le foyer de mes aïeux ! »
Presque aucune réaction apparente dans le public. Les spectateurs adultes soupiraient même, mais Aedelrik ne cessait pas d'y croire, car il lui suffisait de voir l'expression concentrée des quelques enfants qu'il avait commencé à toucher pour savoir qu'il tenait le bon bout. Afin de chasser les derniers doutes que d'aucuns pourraient garder quand à la pièce qu'il jouait, il leva son bouclier, brandissant le symbole du conte comme un étendard.
« Croyez moi, quand à ce que je prétends,
Je ne peux plus le cacher ni me travestir,
Ceci est est mon titre, ceci est mon sang,
Car je n'usurpe rien et ne saurait mentir
Je ne suis d'autre que le chevalier blanc,
Cette bête immonde, je m'en vais l'occire ! »
Cette fois, les enfants le suivirent pour de bon, et de frêles cris retentirent. Plusieurs autres, plus âgés les imitèrent, ouvertement moqués par leurs voisins. Le renard sut qu'il devait entrer dans le vif du sujet ou perdre cet entrain naissant. Cognant son épée contre son bouclier, il donna ainsi le signal à Lanre, et les deux amis s'approchèrent l'un de l'autre. La clameur du public avait reprit, car même les plus insensibles au jeu d'Aedelrik se satisfaisaient de voir enfin l'action qu'on leur avait promis.
Arrivés à distance de corps à corps, ils commencèrent à tourner l'un autour de l'autre. Soudain, le chevalier fit une brusque embardée, sur la droite de Lanre, ce que ce dernier reconnu aussitôt comme le premier pas de leur danse. Sa lame le para aisément, car le coup envoyé contre lui était trop lent pour le menacer réellement, mais l'impact produisit un grand choc sonore, qui fit son effet dans le public. Aussitôt, Aedelrik enchaîna avec quelques moulinets, chaque fois plus rapides mais toujours aussi inoffensifs. Enfin, il chargea vivement son ami et plaqua sa lame contre la sienne. Les deux combattants équilibraient leurs forces afin de faire croire à un accrochage plein de tension, mais finalement, le chevalier l'emporta comme prévu, et Lanre se jeta en arrière. Un peu gros, mais les plus naïfs commençaient à y croire et d'autres, à se laisser aller au jeu, consciemment ou non.
« Je n'ai que trop retardé ma vengeance.
Contre ce noir démon venu des enfers,
Pour les crimes qu'a commis cette engeance,
Je me dois de le passer par le fer ! »
Cette fois, un certain nombre de vivats lui répondirent. Plus seulement les enfants, mais également leurs mères, et d'autres qui se fondaient d'ordinaire dans la masse. Aedelrik excitait leur enthousiasme, brandissant son épée, poussant des cris guerriers. Une attitude peu chevaleresque, mais justement, ce personnage là venait du peuple, et c'était ça qui le rendait attachant aux yeux de tous. Jusque là, tout semblait aller pour le mieux... Excepté le regard d'un des maîtres du tournoi que le Renard croisa, et qui le glaça sur le coup. Lui n'y croyait pas, et il semblait prêt à révéler la supercherie. Si les deux amis continuaient ainsi, ils risquaient de tout perdre. Aedelrik eut un regard pour Lanre, qui s'était relevait et l'attendait avec un visage faussement mauvais. Évidemment, il ne pouvait lui passer le message... Il ne restait qu'à espérer que le Ceald comprenne.
Ils revinrent à distance de combat. Le chevalier se souvenait de ce qu'ils avaient prévu mais le regard inquisiteur du maître l'empêchait à présent d'agir selon leurs plans. Il fallait que ce combat fasse illusion.
Aedelrik se jeta alors sur le flanc de Lanre, contrairement à tout ce qu'ils avaient prévu. Ce dernier, surpris, réagit tardivement, et ne bloqua que maladroitement le coup de tranche de son ami, qui vint percuter violemment la claymore. Profitant de ce trouble, le Renard poursuivit sa course et jeta un violent assaut dans le bas du dos du Ceald, avec le pommeau arrondit de son arme. La puissance du choc, mal amortie lui tira un hoquet de douleur et il ne put empêcher Aedelrik de lui projeter sa jambe dans l'arrière du genou, le faisant chuter à moitié.
« Et bien, te voilà bien moins fier,
Toi qui pillait, brûlait toute... »
Il n'eut pas le temps de finir sa réplique. Le poing de Lanre venait de le percuter en plein visage, alors qu'il n'y faisait plus attention. Aedelrik eut un instant d'incrédulité, et il ne se retint qu'au dernier instant d'intimer au Ceald de le laisser jouer, puis il vit le regard de ce dernier. Lanre n'avait pas saisi son geste, et il semblait outré, en proie à une colère que son ami ne lui connaissait pas. Cependant, la vérité ne peut pas apparaître nue sur une scène de théâtre, et le renard ne pouvait donc pas s'expliquer maintenant. Il lui fallait trouver une occasion, un instant propice.
Cette idée en tête, Aedelrik revint pleinement dans son rôle et reprit sa garde. Lanre s'élança alors, son immense épée fauchant l'air en direction de sa tête. D'instinct, le chevalier leva son bouclier, masquant de fait le Ceald à ses yeux. L'erreur était grossière, mais prévisible étant donné son manque d'expérience au combat en armure. Comme on pouvait s'y attendre, cela n'échappa pas à Lanre, qui interrompit alors son coup, tandis que sa main venait saisir le bouclier. Avec fureur, il l'écarta et frappa de son poing ganté sous l'aisselle d'Aedelrik, là où une lame du Cygne Noir avait laissé une plaie encore vive. La douleur explosa dans tout le bras et toute l'épaule du Renard, qui manqua de chuter sous l'impact. Mais le Ceald le maintint et lui envoya un féroce coup de front qui le percuta au niveau du nez et de l'arcade. Enfin, il le faucha d'une de ses jambes et l'envoya au sol.
Dans un silence tendu, Aedelrik se redressa. Il parcouru des yeux la salle. Les spectateurs étaient à présent stoïque, et il lisait du mépris chez un grand nombre d'entre eux. Si un chevalier pouvait prendre pareille rouste, il ne valait pas qu'on le soutienne. Et même, pire que tout, le Renard vit sur le visage d'un enfant une intense et sincère déception. Son cœur en fut brusquement serré, comme écrasé entre deux pierres. Son regard se posa sur Lanre, qui semblait toujours parcouru par la même colère. Difficilement, le chevalier se redressa, s'appuyant sur son épée. Soudain, une tomate percuta son épaulière, éclatant sur le coup, son jus répandu sur le métal et la joue de l'acteur. Aedelrik cligna des yeux et regarda le déchet chuter sur le sol. Le fruit rouge écrasé lui fit l'effet d'une claque. Jamais on ne lui avait fait cet affront. Et bien, puisqu'ils voulaient un vrai combat, ils allaient en avoir.
Aedelrik glissa son bras dans les sangles de son bouclier et s'empara de son épée à deux mains, tremblante sous une rage nouvelle. Comme toujours, Lanre gardait le silence. Il n'aimait pas parler, jamais. C'était pas leur truc, aux sauvages, d'agir comme des gens civilisés ! Le théâtre, la poésie, la parole, ils n'y connaissaient rien. Comme de la lumière sur un miroir, la colère que lui assénait Lanre lui était renvoyée avec la même force par Aedelrik. Les deux hommes retournèrent au contact, et le chevalier fonça.
« Démon, fuis ou meurs par ma main ! »
Il avait hurlé, comme jamais depuis le début de ce combat. Sans compter sur une technique qu'il ne possédait de toute façon pas, le chevalier chargea sans finesse, prêt à donner un violent coup de taille à la force de ses bras. Mais lorsqu'il parvint à la distance nécessaire, la lame de Lanre vint pour le contrer. Alors, il mis à profit la meilleure maniabilité de son épée, plus courte et fit un grand moulinet afin de changer d'angle sans perdre son élan. Le Ceald ramena sa longue lame... Trop longue, trop lourde, trop tard. Le coup de tranche le faucha au niveau du flanc, perçant le cuir, appuyant fortement sur la cote de mailles. Sans perdre de temps, Aedelrik lui décocha un violent crochet du droit mais, devant la menace de sa claymore, qui lui frôla le bras, il s'esquiva en arrière.
Un peu de sang semblait percer à travers les mailles, sur le flanc de Lanre. La foule, elle, commençait à se laisser emporter. Le coup d'éclat de son chevalier avait relancé les premiers enthousiastes et en avait conquit d'autres. Comme si il avait juste fallu accepter de ne plus faire semblant pour que tous acceptent d'y croire. Et finalement, mêmes les deux amis y croyaient, Aedelrik plus que jamais. Un sourire plein de joie aux lèvres, il répondait de sa forte voix aux acclamations tout en ne perdant pas de vue son adversaire. Il n'aurait pas cru prendre autant de plaisir à malmener son compagnon, mais en vérité, chacun de ses coups était chargé de la rancune et la frustration qu'il conservait envers lui depuis cette fameuse nuit où le Ceald l'avait privé du repos tant désiré. Lanre l'avait voulu vivant ? Il allait comprendre ce que cela signifiait vraiment.
« Tu en as assez ? Ne t'en fais pas, je vais te montrer la sortie ! »
Aedelrik n'était plus simplement le chevalier, il mettait de lui même au personnage, sans vraiment en sortir. C'était une nouvelle composition, une improvisation comme il les aimait. La réplique provoqua de nouveaux vivats, et cela lui donna envie d'en jouer. La poignée de cuir de son épée fermement maintenue une de ses mains, il arracha de sa taille son étoffe rouge et, à la manière de ce qui se faisait dans certaines arènes avec des taureaux, l'agita devant Lanre, tout en lui déclarant,
« Viens donc, si tu as de quoi dans tes chausses ! »
Le visage du Ceald s'empourpra, et il fonça en avant, son épée en position d'estoc. Aedelrik le fixa, évalua sa vitesse, la distance et... d'un bond, il s'esquiva sur le côté, au dernière moment. Rendu peu agile par son armure de plaques, il se retrouva un genoux en terre. Aussitôt, Lanre revint à la charge, son épée au dessus de lui. Le chevalier eut à peine le temps de lever son bouclier au dessus de lui que la claymore s'abattait, à répétition, sans s'arrêter. Le bras d'Aedelrik souffrait à chaque nouveau coup, et il ne pouvait empêcher son adversaire d'enfoncer un peu plus sa défense au fur et à mesure. Alors, il déposa son épée sur le sol, glissa sa main en dessous de son plastron, et pria le premier dieu qui lui passa par l'esprit : Faites que cela marche. Un nouveau coup s'abattit et l'arme se releva pour asséner le deuxième. Alors, le Renard redevint ce qu'il était. Écartant son bouclier, il prononça d'une voix forte,
« Skor ! Que la lumière te terrasse ! »
La rune jaillit, et une immense lumière avec elle. Le flash frappa les spectateurs, mais surtout Lanre qui tituba en arrière, ses yeux aveuglés. Aedelrik se redressa alors, son épée à la main, sauvé par une astuce de théâtre. La foule explosa d'une clameur assourdissante, mais que le chevalier n'entendait presque pas. Seul comptait de mettre à bas le démon et d'en finir avec sa vindicte. Dans un cri vengeur, il se précipita sur le Ceald, le harcelant de sa lame. Rendu maladroit par l'aveuglement, ce dernier ne parvenait pas à parer efficacement et il laissa plusieurs touches au Renard, qui le fit finalement chuter, d'un brusque choc de son bouclier.
« Vengeance ! Justice ! »
Son cri fut largement reprit par le public qui était définitivement transporté, du plus naïf au plus incrédule. Les visages rayonnaient et même le maître s'autorisait un léger sourire en coin, satisfait. Aedelrik, extatique mais le souffle court, savourait sa victoire lorsqu'il se sentit chuter lui même.
Lanre venait de le plaquer au sol en enserrant ses deux jambes d'acier pour lui faire perdre l'équilibre. Engoncé dans sa cage d'acier, Aedelrik vit impuissant le sol venir à sa rencontre et le percuter lourdement. Avant même qu'il n'ait pu tenté de se retourner, Lanre vint se poser sur son plastron pour l'écraser de son poids. Il affichait expression inquiétante, que le Renard ne lui connaissait pas, et qui fit naître chez lui une profonde angoisse ; le Ceald perdait de vue que tout cela n'était qu'un jeu. La colère était en train de le faire dérailler.
Sa voix grave était pleine de colère lorsqu'il demanda,
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« Alors on veut jouer au ser ? »
Son poing s'abattit violemment sur le visage d'Aedelrik. Puis, ce fut sa blessure à l'aisselle, et le Renard ne put retenir un cri de douleur. Lanre continua en pressant sa main droite contre le bras encore mutilé du chevalier, tandis que son autre main continuait à le frapper au visage.
Aedelrik ne parvenait pas à réagir, pétrifié par ce déchaînement de violence. Au fond de lui, il ne comprenait pas comment lui et Lanre en étaient arrivés là. De bon camarade, le Ceald en était arrivé à lui infliger des douleurs digne d'un ennemi profondément haït. Son esprit ne comprenait pas. Que lui avait il donc fait pour qu'il lui en veuille à ce point ? Et puis il comprit. C'était parce qu'ils étaient amis que Lanre n'avait pas supporté son revirement inattendu. Parce qu'il lui faisait confiance qu'il s'était senti trahi et qu'il en tirait une telle colère. Le Renard se senti d'un coup aussi misérable que du purin, aussi pitoyable que le dernier des lâches. Lanre avait raison de le frapper ainsi, il le méritait. Mais dans un tournoi pareil, la justice ne comptait pas, elle n'avait même rien à y faire. Il n'était pas prêt à laisser la colère de son ami gagner, ni à perdre son amitié. Il y aurait un autre temps pour les explications, les justifications, et sans doute les excuses. En cet instant, il fallait l'arrêter pour que demain, leur camaraderie ait une chance d'avoir survécu.
« Pardonne moi, Feldr. »
Lanre fut stoppé net, en entendant le mot 'ami' prononcé dans sa langue. Ce fut l'instant de calme dans la tempête dont Aedelrik avait besoin. Son gant se glissa dans une de ses bourses, accrochée à sa ceinture et en tira une boule soporifique, qu'il brisa dans son poing. Aussitôt, il plaqua sa main sur le visage du Ceald, qui ne réagit pas à temps. La mixture était trop efficace et elle agissait trop vite. Avant même de l'avoir vraiment compris, la conscience de Lanre dériva en direction du sommeil, et un crochet du poing droit l'envoya au tapis. Il chuta, lourdement, sur le côté, et poussa un soupire endormi.
Aedelrik se releva, péniblement, le visage en sang, la douleur irradiant dans tout son torse et son bras. Un silence de mort régnait sur l'arène. Il ferma les yeux, huma la saveur de sa victoire et s'autorisa enfin à sourire. Son bras s'éleva alors et il hurla,
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« NAYRU VICTORIEUSE ! »
Le public entière lui répondit, d'un immense rugissement jaillissant de mille gorges. Chaque spectateur levait son bras en imitation de son geste, et exprimait sa joie sans retenue. Aedelrik s'efforça de tout retenir de cet instant : la lumière, l'odeur, le moindre détail capté par ses yeux, les cris, les vivats... Un bonheur pur, sans tâches, c'était ce qu'il s'efforçait de mémoriser.
Ce jour là, il avait gagné les cœurs, et son combat. Il abandonna son épée et son bouclier sur le sol de l'arène, mais sorti en portant son meilleur ami, suivit par un regard impérieux, mais pleinement satisfait. C'était sans doute la plus belle pièce de théâtre que le maître du tournoi avait vu de sa vie.
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