De trèfles et d'acier

[Privé]

[ Hors timeline ]

Lanre


Inventaire

0,00


(vide)

Son regard balaya brièvement la foule, avant de grimper sur les bâtisses de Pierre qu'Aedelrik lui avait conseillé de scruter, à la recherche de quelques uns des symboles que son ami avait vaguement représentés plus tôt. Il avait parlé de noms de rues, d'adresses et d'avenues. Des concepts qui lui étaient étrangers quelques heures plus tôt à peine, mais qu'il comprenait sans mal. C'était ce que son peuple avait plus sobrement appelé un point de repère. De toute évidence, le voleur se servirait de toutes ces informations pour retrouver les objets qu'il lui demanderait. Si tant est qu'une seule des armes qu'il avait aperçu jusqu'à lors trouve grâce à ses yeux. La Citadelle – puisque c'était ainsi qu'on lui avait dit de désigner l'intégralité de ces chaumières de pierre – comptait plus de forgerons qu'il n'en avait vu durant toute sa vie. Pour autant même ceux installés à Hiim faisaient du meilleur acier que celui que proposait les ferronniers d'ici. Aucune des épées qu'il avait pu saisir n'était équilibrée, et il était rare qu'elles soit véritablement affûtées. Les haches, quand elles ne ressemblaient pas d'avantage à des bêches, étaient avant tout taillées pour couper du bois. Quant aux arcs... Il était bien content d'avoir su arracher celui de la chasseresse qu'il avait dépouillé il y a quelques jours déjà. Il manquait de flèches néanmoins.

Il grinça des dents en soupesant un sabre comme il en avait vu des centaines. Et pourtant, l'arme était lourde — trop. Une dizaine de livres, au bas-mot, quand une bonne épée pesait au pire moitié moins. Pour une arme qu'il pourrait manier des deux mains. Sans un mot, il jeta le fer forgé dans la corbeille d'osier qui en accueillait quelques autres. L'artisan éleva la voix, mais il ne l'écoutait pas. D'un coup d'oeil, il décortiqua l'atelier. Deux masses d'armes, un sabre, une épée à deux mains, trois canifs et... des dizaines de fers à cheval. Le Ceald toisa l'ouvrier d'un regard mauvais et l'homme récupéra doucement le marteau qui lui servait à battre l'alliage. L'espace d'un instant, il soutint les yeux de l'étranger, avant de reprendre sa besogne. La tension baissa suffisamment pour que le paria décide de partir, au risque de présenter son dos. De toute évidence les peuples qui savaient bâtir au sein même de la roche en oubliait la nécessité de savoir se défendre.

Bientôt son épaule accueillait une main étrangère. « Tout doux, garçon. » Lâcha l'homme de mailles et de plaques qui se tenait derrière lui. « Toi et moi, on va rester copains et tu ma suivre bien sagement, d'accord ? » S'enquit-il, de la même façon qu'il aurait pu l'ordonner. Son compagnon l'avait alerté, plus d'une fois, attirant son attention sur ce qu'il appelait des "représentants de l'Ordre Royal". S'il ignorait ce qu'était ce fameux ordre royal et s'il n'avait jamais souhaité le savoir, il tolérait nettement moins qu'il vienne le brider. Il ne lui avait fallu que quelques instants pour comprendre que les seuls hommes à disposer d'acier digne de ce nom étaient également ceux qui jouissaient d'une autorité reconnue par les âmes désarmées qui erraient çà et là, tout autour d'eux. A l'arrêt, comme son poursuivant, il ne desserra cependant pas les mâchoires. Un bref regard en arrière suffit à rencontrer la gueule casquée du Veilleur. Un coup d'épaule suffit, également, à se soustraire à la poigne de métal. « Héla ! Où tu comptes aller comme ça ? » Cracha l'homme d'Ordre, alors que le rouquin reprenait simplement son repérage.  « Tu ne va pas t'échapper ainsi, crois moi ! » Hurla-t-il, en bondissant pour rattraper l'Occidentin. Pivotant sur sa jambe, il envoya son poing ganté dans la partie découverte du casque. Le fer qui barrait ses doigts percuta le nez de l'homme. Le cartilage et les os craquèrent et le visage du garde se teinta d'un carmin sanglant.

Sans demander son reste et avant que le soldat ne se perde en insulte et en coup dans le vide, l'homme de l'Ouest avait déjà disparu. Il ne reconnaissait aucune légitimité à ces gens mais conservait suffisamment de plomb dans le crâne pour savoir qu'il ne faisait objectivement pas le poids. D'autres petits bonshommes d'aciers patrouillaient les allées de façon tout à fait irrégulière. Du moins... Il n'était pas vraiment parvenu à trouver un semblant de logique dans la façon dont ils se déplaçaient. Sans doute parce qu'il ignorait tout de cette Lo'heìm dans laquelle Foxclaw l'avait plongé en l'invitant à rejoindre le tournois. Le nombre ne jouait pas en sa faveur, indubitablement, et il ignorait quand il pouvait tomber sur l'un des camarades de celui dont il avait brisé le faciès. Profitant d'une charrette pleine de paille oubliée à croisement, il se jeta dans le foin. Ses doigts partirent à la recherche du coutelas de Blanche, unique arme qu'il avait amené avec lui. L'étranger se ménagea un petit cratère dans la chaume pour pouvoir observer les passages. Bientôt, l'homme qu'il avait frappé s'engouffra dans la ruelle que lui n'avait pas prise. Après quelques minutes, il s'extirpa du chariot et s'éloigna à son tour. La foule serait le meilleur des écus. Il la perça et commença a voguer dans ces troubles eaux. Insidieusement, il avait réussi à semer son poursuivant mais aussi à perdre sa route. L'agacement naissant qui s'était emparé de lui chez le ferronnier n'avait pas faibli, d'autant plus qu'il avait bien saisi pourquoi le griveton s'était intéressé à lui. Plus qu'asservis, les idiots d'Hyrule étaient prompts à la délation. S'il n'avait été entouré de la sorte, il en aurait sûrement sifflé d’irritation.

Il continua de se perdre dans les artères de la Citadelle, jusqu'à ce qu'un étal attire son attention. Installé dans une bâtisse de pierre brune, l'appentis qui avait capté son regard se décomposait de deux façons. A l'extérieur, sous une large toile fixée au mur et tendue par deux échalas de bois, l'armurier avait installé son échoppe. Plus d'une lames pendaient aux râteliers, tandis que sur des établis sommeillaient les arcs et les masses d'armes. Contre la façade avaient été entreposées nombre de carquois et dans de petits écrins, il avait installé les dagues les plus précieuses qu'il proposait. L’intérieur, en revanche, brillait d'une lueur à la fois rouge et terne. Le foyer de la forge n'était plus alimenté que par les braises, mourantes. Il distinguait quelques armures installées sur des mannequins. Un demi-sourire étirant ses lèvres, il recula pour imprimer au fond de sa mémoire le symbole qu'il devrait restituer à son camarade d'armes. « Vous partez d'jà ? » Lança un homme que la forge sembla régurgiter quand il sortit de l'atelier, s'épongeant le front sur son tablier crasseux. « 'Trouv'rez pas meilleur acier ailleurs qu'ici, m'est avis. Sauf p'têt au Castel. Mais z'avez pas l'air d'y passer tout l'jours si j'puis m'permettre. » Cracha l'artisan, jetant un œil sur le Ceald. Quand il eut fini de se débarrasser de la sueur qui perlait sur son front chauve et de celle qui collait à sa barbe, il s'approcha de l'étranger. « Vrai qu'elle est belle, eul'là ! » S'amusa-t-il, suivant le regard de Lanre. Les deux hommes contemplaient une épée longue, à deux mains. La lame devait avoisiner les trois pieds et demi tandis que la fusée comptait presque un pied. La garde était composée de deux quillons simples, couronnés de trèfles, qui remontaient. « A l'Ouest, y disent qu'on appelle ça une claymore. C't'un ami qui m'a appris à les faire. » Ajouta le commerçant, comme pour rompre le silence. « 'Souhaiteriez l'essayer ? » Souffla-t-il, la décrochant de l'armature de bois à laquelle elle était accrochée. Les doigts du maraudeur vinrent enserrer la hampe et suivre la gouttière.

De toutes les lames qu'il avait soulevé ce jour, elle était de loin la plus équilibrée. Élégante, légère – moins de cinq livres, sans aucun doute – et meurtrière. Le rouquin se laissa aller à un moulinet, alors que le vieil homme était secoué par un petit rire.


Pyrope


Inventaire

0,00


(vide)

La matinée avait été calme, sans encombre. Tout juste quelques problèmes en bas de l'immeuble qu'il occupait avec son grand-père, à l'étage. C'était moins cher, et surtout, ainsi en hauteur, le vieux espérait démontrer son détachement du peuple. Il ne les aimait pas, point. C'était comme ça. Jamais il n'avait vraiment expliqué ses motivations à son petit-fils, toutefois. Si lui ne les supportait pas, les jugeant trop cérébraux et pas assez acteurs - ou parfois le contraire -, le plus jeune les craignait. Pas toujours, mais assez souvent pour se trouver des excuses afin de ne pas avoir à rencontrer le monde de la Place.

Malheureusement pour lui, l'ancêtre n'était cette fois pas de cet avis. Sans doute pensait-il qu'à force de s'isoler, il se rendait vulnérable. Le blanc comprenait bien son inquiétude : il n'était plus tout jeune, et sa seule descendance - même pas directe ! - se bornait à préférer être seul que mal accompagné. Et si par malheur l'ancien venait à périr plus tôt que prévu, qui s'occuperait de son petit bout de chou ? Personne. Et ça, il ne pouvait pas se le permettre. Sans doute était-ce la seule chose qui le tenait encore en vie. Ca, l'alcool, et la pêche !

"- Et cinq pommes pour vous...!"

Salacia remercia le commerçant d'un mouvement de tête, ce dernier le toisant de façon si habituelle que l'androgyne préféra l'ignorer, baissant aussitôt le regard sur ses pommes nouvellement acquises. S'il était sorti aujourd'hui, ce n'était que pour faire plaisir à son grand-père. Sinon, il serait resté chez lui, à lire ou à s'occuper de la maison. Mais, comme par hasard, son aïeul avait eut une envie fulgurante de pommes. Là, maintenant, tout de suite, alors que le déjeuner venait à peine de se terminer, et qu'il avait englouti le poisson qu'il avait pêché lui-même en moins de deux. Il savait bien que ce n'était qu'une excuse. Une tentative désespérée de sociabiliser son enfant, sans pour autant réellement y arriver. Il était comme un lapin au milieu des loups.

Lorsqu'il se décida, rapidement, à bouger du stand qui venait de lui vendre les fruits tant convoités, il ne put s'empêcher d'observer tout autour de lui. Encore, certains le fixaient avec mépris, d'autres avec une envie des plus perverses qui le fit accélérer sa course, baissant la tête sur les pavés et son panier bien rempli. Plus que l'indifférence qu'une majorité pouvait lui porter, il ne supportait pas ces regards indiscrets, s'attardant le long de ses fines jambes tatouées, sur le rougissement que prenait la peau mate de son visage aux traits des plus charmants, sur ses cheveux longs et immaculés qui battaient le bas de son dos et ses hanches. Il ne voulait plus voir ça. Ces sourires provocateurs qui lui laissaient deviner les pires images dans l'esprit de leurs possesseurs... Non, rien qu'à y penser, il avait la nausée.

Il se stoppa soudainement, ses iris bleus accrochant un reflet d'acier bougeant non loin. Il les releva, passant outre la foule qui, de toute façon, passait elle aussi outre sa présence, et guida son attention vers la source de cet éclair blanc. Ouah... Une épée... Et un homme qui la maniait. Il avait l'air de savoir ce qu'il faisait, ce n'était sans doute pas un petit jeune qui voulait se la jouer héros. Un instant, il repensa à Aurore. Elle aussi savait y faire avec une lame, et cela l'avait toujours impressionné. Elle était si forte, belle, intelligente et courageuse... S'il pouvait être ne serait-ce que la moitié de ce qu'elle était, il aurait été fier de sa personne. Mais il n'en était rien.

Sans le vouloir, il détaillait à présent celui qui tenait l'arme en main, avec un certain intérêt. Il avait de longs cheveux roux et ses yeux brillaient de vert. Toute son allure était très atypique, il n'avait jamais rien vu de tel dans les rues du Bourg. Son regard glissa le long de l'imposante carrure de l'épéiste, avant de revenir sur son visage, et surtout vers le marchand à ses côtés. Peut-être le dérangeait-il à les dévisager de la sorte ? D'ailleurs, peut-être que l'homme armé était lui-même importuné par sa présence. Comme tous les autres, en somme...

Pourtant, Salacia avait bien du mal à détourner ses grands yeux dégradés de bleu et de vert, tout son intérêt s'y lisant clairement, ainsi que dans le léger mouvement qu'opérait ses oreilles animales, remuant avec douceur, de même que sa queue pelucheuse qui caressait ses jambes. Même s'il n'était pas du genre à vouloir se battre, il se demandait comment il était possible de tenir une telle lame... Elle avait l'air grande et lourde ! Jamais ses bras si fins n'auraient pu manier une telle épée... Et puis, personne n'allait le lui apprendre. Ce n'était juste pas pour lui, sans doute...


Lanre


Inventaire

0,00


(vide)

L'acier formait une véritable extension de son bras. Sous le masque roux qui lui rongeait le bas du visage, il ne put réprimer un début de sourire. Depuis qu'il était arrivé, c'était sans doute la première arme digne de ce nom qu'il trouvait. Il ignorait complètement comment un peuple capable de bâtir au travers des montagnes ne savait pas dompter l'acier. C'était quelque chose qui lui semblait tout à fait inconcevable. L'esprit plein d'interrogations auxquelles il ne parvenait à trouver de réponse logique, il porta le fer devant lui, menaçant de l'estoc un adversaire invisible. Ses doigts se desserrèrent alors de la hampe qu'ils avaient épousé un instant plus tôt, jusqu'à la quitter presque totalement. Une vieille méthode qu'Aaricia lui avait enseigné pour estimer l'équilibre d'une lame et celle-ci lui apparaissait une fois de plus de la meilleure qualité qui soit, au vu de toute la ferraille qu'on lui avait proposé jusqu'à lors. D'un petit mouvement de la main, il ramena la claymore entre ses doigts puis la raccrocha au râtelier d'arme sur laquelle il l'avait trouvée. « Elle plait pas à m'sieur ? » Lâcha innocemment l'artisan, le détaillant sous toutes les coutures d'un regard qui n'existait pas chez lui, mais qu'il avait appris à comprendre et il savait dorénavant ce que cela voulait dire. Au Sud du Mur, les citadins ne le regardaient pas ainsi : il n'était alors qu'un esclave bon à batailler dans le sang et la boue des arènes d'Ainsley. À bord de la galère qu'il avait coulé, les regards étaient touts autres également. Souvent, on l'avait détaillé, mais il n'y avait qu'ici que les gens cherchaient après une pochette remplie d'or qu'il ne possédait pas.

Son regard croisa celui du ferronnier. L'homme n'insista pas immédiatement, mais avait déposé les poignards qu'il nettoyait un instant auparavant. Derrière lui, il laissait l'âtre mourir tandis qu'un garçon s'affairait à ranger le matériel de la forge un peu plus loin dans l'établi. « C't'une ben jolie épée, savez ! » Lança le vieil homme en tournant le dos au Ceald, qui le contempla à son tour. Le vert-de-gris de ses yeux ne tarda pas à bondir entre deux étals sur lesquels sommeillaient couteaux, haches ou masses, avant de revenir au dos du commerçant. L'espace d'une seconde, il réalisa à quel point il lui serait simple de récupérer l'un des gourdins et de fracasser la nuque du vieillard puis s'en aller avec n'importe laquelle des pièces d'alliage, pour peu qu'elle lui convienne. Ca n'était pas ainsi que Braig lui avait appris à traiter avec les gens mais plus que le meurtre, il rejetait l'or que s'échangeaient les hommes ici. La pulpe de ses doigts vint caresser le petit meuble de bois, avant d'effleurer le cuir qui gainait une hachette. Ses yeux restaient fixés sur l'échine de l'inconnu. Il se garda de conserver sa main si proche des tranchants comme des maillets, se dirigeant plutôt vers un petit arc étrange, dont la forme l'intriguait particulièrement. Monté sur une tige de bois et de fer gravé, la courbe était autrement plus étriquée qu'il n'était habituel. Ses sourcils se froncèrent, tandis qu'il se demandait comment une voute aussi chétive pouvait donner lieu à suffisamment de puissance pour projeter une flèche.

"Ca, c't'une arbalète. Encore qu'on dit aussi qu'c't'une baliste.  C'comme un arc normal, mais ça fait beaucoup plus mal. Les Chevaliers de Zelda savent de quoi j'parle !" Ricana le forgeron, une lueur malicieuse dans l'oeil. Et s'il ignorait ce qu'était un chevalier comme il n'avait pas idée de qui était Zelda, il comprenait le trait d'humour qu'avait tenté son guide au sein d'une armurerie qui lui paraissait bien étrange quand il repensait à celles de son peuple. Il se racla la gorge. L'hylien ne lui était toujours pas naturel, quand bien même il progressait un peu plus à chaque occasion. « Comment ça fonctionne ? » S'enquit-il simplement, sans prétention. Le mécanisme l'étonnait particulièrement. « Ben... Dans les faits c'est un arc, mais il n'y a pas besoin de maintenir la corde en tension. » Il pointa du doigt une petite languette de métal qui perçait le fût de bois. « C'est cette pièce là, l'arbier, qui le fait pour le tireur. Du coup, c'est nettement plus facile à utiliser. Vous voulez tester ? » Le ferronnier était déjà parti, lui arrachant presque la chose des mains. Le Ceald grogna, presque agacé, mais se laissa conduire jusqu'à l'atelier où le chauve remontait un treuil, avant d'encocher un carreau. A peine-eut-il fini qu'il la lui glissa dans les bras à nouveau avec un clin d'oeil, non sans s'essuyer le front une seconde fois.

Il laissa son regard glisser le long de la silhouette de la baliste, en longer la courbe et en jauger l'aspect avant de la prendre véritablement en main. Sous ses doigts, il sentait le métal froid de la détente. Il ne lui en fallait guère plus pour saisir le fonctionnement de l'appareillage. Jetant un coup d'oeil rapide sur l'officine dans laquelle il se trouvait, il porta l'arme à son épaule et inspira comme il avait l'habitude de le faire à chaque fois qu'il ciblait un adversaire. Fut-il monté sur deux pattes ou sur quatre. Un rapide pas sur le côté l'écarta du pilier de bois qui soutenait l'armature. Lanre pivota ensuite pour faire face à la ruelle dont il venait. Envahie par une horde d'individus tout à l'heure, il n'en restait pratiquement plus en l'immédiat. Tout juste quelques badauds qui se hasardaient et paressaient entre les échoppes. L'un d'entre eux, particulièrement frêle, tenait un panier d'osier ou de paille – il n'aurait su le dire – rempli de fruits. Les pommes qu'il put apercevoir lui rappelèrent des jeux d'enfants qu'il avait pu avoir avec Bjorn avant que leur amitié ne se dégrade d'autant plus subitement qu'elle lui avait toujours semblé immuable.

Le trait fila immédiatement quand il pressa le ressort. Dans un bruit assourdissant, le carreau prit son envol, tandis qu'il grinçait des dents, aussi surpris que dérangé par le vacarme de l'arbalète. Les cailloux qu'ils lançaient, gamins, avaient le mérite de ne faire de bruit que quand ils déchiraient une fenêtre ou percutaient un de leurs amis. Ils ne leurs vibraient pas non plus en main. Le paria n'aurait pas parié sa tête, mais il était pratiquement sûr que l'arme du forgeron avait essuyé un choc quand il avait tiré. Il l'avait senti lui glisser entre les doigts, ou presque. Baissant les yeux vers l'arme, il laissa les traits de son visage se durcir, marquant son mépris et sa déception. « C'est tout...? » Cracha-t-il, l'oeil mauvais remontant vers l'artisan dont le faciès se décomposait. « C'est.... C'est de la folie ! Vous auriez pu tuer quelqu'un ! » Grimaça-t-il avant de se jeter sur le Ceald en grommelant qu'il souhaitait récupérer son arbalète. « C'est tout l'objet d'une arme, il me semble. » Asséna-t-il, simplement, le regard sévère, avant de le déporter vers la gamine qu'il avait pris pour cible. Le panier qu'elle gardait avait explosé et l'intégralité de son contenu s'était déversé au sol. Plusieurs fruits, percés de part en part par le dard de fer forgé s'étaient déchirés avant même de rencontrer les pavés.

L'homme insista, les deux mains cramponnées au fût de la baliste. « Rendez-moi ça ! » Mugit-il, l'air paniqué. « Rendez-moi ça ou je fais appeler la garde ! » Le rouquin finit par lâcher l'arme, tandis que l'apprenti du forgeron se précipitait vers la pauvre enfant dont le panier lui avait fait office de cible.  Après tout, en ne la touchant pas, il avait sans doute démontré son habileté ? Il aurait été plus à l'aise avec un véritable arc, sans nul doute, mais il avait réussi sans mal à faire mouche et n'atteindre que ce qu'il souhaitait atteindre. Les deux hommes s'échangèrent un dernier regard, polaire, avant que le Ceald ne s'éloigne d'un pas aussi rapide qu'énervé. Quand il passa le porche, l'assistant se baissait plus bas que terre pour récupérer les fruits qui pouvaient l'être. Lanre le toisa également, la gueule comme boucanée par une colère naissante. Il ne s'arrêta cependant pas, laissant le trio qu'il avait formé bien involontairement et s'engagea dans l'artère pratiquement désertée désormais.

[HRP : Lanre n'est pas parti et le RP n'est pas terminé, hein. XD N'hésite pas à l'arrêter :p]


Pyrope


Inventaire

0,00


(vide)

Lorsque son regard bleu d’azur croisa celui du roux non loin, il se sentit faillir. Certes, il n’y avait eu aucun contact, ni même de paroles prononcées, mais déjà, le blanc ressentait une aura des plus particulières. De toute façon, toute aura était particulière pour lui. Lui qui n’avait aucune habileté physique… Il ne savait tenir aucune arme sans trembler, et ne savait évidemment pas s’en servir, même en cas d’urgence. La plus petite dague lui paraissait se mouvoir avec lenteur et maladresse lorsqu’il la tenait entre ses doigts fins, et ne parlons même pas d’une épée, dont l’art de son maniement lui valait la pire gaucherie. Un arc lui apparaissait comme un instrument barbare dont l’utilisation était floue, et les armements plus compliqués lui figurait comme faisant partie d’un arsenal où chaque part voyait son nom un peu plus compliqué à chaque fois.

Ouf. Voilà que l’homme se concentrait de nouveau sur sa petite affaire, l’oubliant. Et d’ailleurs, Salacia pensa à s’en aller dès la première seconde en voyant cela. Pourtant, il avait du mal à s’y autoriser. Allez savoir pourquoi, ses yeux restaient inlassablement figés sur chaque mouvement de celui en face de lui, ignorant peu à peu le monde autour de lui. Peut-être était-ce de voir une nouvelle fois une personne capable de se battre ? On ne détaillait pas ainsi un équipement lorsqu’on était inexpérimenté, du moins pas à son avis. Tous ces objets étaient si dangereux… Brr. Un mauvais mouvement et… Il ne voulait même pas imaginer !

D’ailleurs, il n’en eut même pas le temps. Du bruit fit siffler ses oreilles qui se baissèrent sur l’instant, un léger cri franchissant ses lèvres au brouhaha ambiant. Ses tympans étaient aussi fragiles que tout son être, peut-être même plus, et lorsqu’il reprit ses esprits, ses iris couleur de ciel et d’eau se posèrent sur la silhouette rousse, s’éloignant à grands pas. Oubliant la situation – qu’il ne comprenait de toute façon pas vraiment, ses oreilles bourdonnaient encore tellement… –, il s’élança à la poursuite du combattant, arriva non loin. Il hésita à le toucher, avança sa main, la recula, puis passa finalement rapidement devant lui pour lui barrer la route.

« - Vous… ! »

Son idiotie lui arriva comme une claque en plein visage. Et maintenant, qu’allait-il bien pouvoir faire ? Il ne savait même pas pourquoi il lui avait couru après de la sorte ! Enfin… Si, bien sûr qu’il le savait. Mais comment formuler cela ?

« - … Vous êtes de ceux… Qui savent se battre, n’est-ce pas ? … »

Son regard de saphir finit au sol, honteux. Il se sentait si ridicule à présent.

« - C'est tellement impressionnant… » déclara-t-il, se rappelant des quelques guerriers qu'il avait pu croiser. « Est-ce que… C’est compliqué, d’apprendre ? »

Il n’avait jamais pensé, un jour, combattre. Mais les temps devenaient durs, pour tout le monde, et son Grand-père, tout énergique qu’il était et plutôt débrouillard, n’allait pas pouvoir les garder hors de danger pour toujours… Et – même s’il n’avait pas envie d’y penser – le jour où l’ancêtre le quitterait, il faudrait bien trouver un moyen de se défendre… !

… Non, en fait, il n’avait aucune excuse. C’était une question bête.


Lanre


Inventaire

0,00


(vide)

Le mot résonna près d'une seconde à ses oreilles avant qu'on ne lui passe devant. Il ne l'avait plus entendu depuis si longtemps qu'il ne put s'empêcher d'en douter. Personne, ici, ne parlait le Cealth. A l'exception de Foxclaw, il n'avait rencontré personne qui ne connaisse un mot de sa langue, qui n'ai jamais entendu parlé de ses terres. Avant même que l'enfant qui avait prononcé l'ordre – puisque de toute évidence, un timbre si aiguë ne pouvait appartenir qu'à un gamin – ne l'ai devancé, son visage s'était tiré, ses traits s'étaient durcis. Ses genoux, fléchis et ses poings fermés, il cessa simplement de bouger. Son regard vint d'abord à la rencontre de l'être qui lui faisait face, avant de sauter sur les toits, pour ceux qu'il pouvait distinguer. Son oeil passa une fois, puis deux, sans rien distinguer. Aucune âme ne semblait errer, arc en main, par delà les combles des masures. En silence, il grinça des dents alors que le gosse continuait à déblatérer.

"Ferme-là." Grogna-t-il, plus froid que les arêtes de givre qui perçaient les bicoques des pécheurs de son clan. Alerte, il continuait de chercher les tireurs embusqués. S'ils n'étaient pas au dessus des demeures, sans doute se cachaient-ils dans les ruelles. Mais petit à petit, son instinct le détournait de cette même voie sur laquelle il avait été poussée. Et si ce qu'il avait pris pour sa langue n'était qu'un mot Hylien dont il ignorait le sens ? Le marmot devant lui n'avait ni l'air, ni la voix, ni quoique ce soit d'un leader. Ceci étant, c'était précisément pour cela qu'il s'en méfiait. Le Neìdr avait cet air bienveillant même quand il perçait les coeurs, enfonçait les poitrails, rasait les villages. « Qu'est-ce que tu... — », débuta-t-il, ramenant l'orage vert-de-gris qui battait ses yeux sur ce qu'il avait cru être un enfant. Ses mots s'éteignaient et mourraient dans sa gorge, sitôt qu'il commença à détailler l'être qui lui faisait face.

Le Ceald ne put s'empêcher de remarquer les oreilles qui trônaient sur une tignasse d'un blanc argenté. Elles avaient une forme comparable à celles de certains canidés où d'autres animaux plus proches des félins. Elles portaient la même parure, également. Le genre qu'affectaient les trappeurs puisqu'ils pouvaient aisément en faire des pelisses pour l'hiver ou bien les troquer. Au regard des druides, en revanche, la queue et les oreilles aurait fait de la créature un esprit à bannir loin, par delà les limites du monde. Et si l'abomination y résistait, le sel et le fer sauraient en venir à bout. Lanre renifla son dégout, sans chercher à le cacher. « Tu es infect. » Siffla-t-il, non sans cracher la bile qui demeurait jusqu'à présent au fond de sa gorge. Il n'avait plus besoin de s'enquérir sur la nature de ce qui lui faisait face, maintenant qu'il en avait saisi toute l'aversion, malsaine et profondément immonde.

Sa main droite vint attraper l'épaule de la chose. L'os rencontra sa paume si vite qu'il se questionna sur l'existence même de chair. Peut-être l'infamie n'était qu'une carcasse, de vent et de restes. Le fruit d'un sortilège ou l'incarnation d'An Dr qui ne cessait de le hanter. Il grinça des dents, avant de pousser brutalement cette presque charpente, presque convaincu qu'il pourrait lui briser l'humérus simplement en fermant le poing. Jamais il n'avait vu un être avec un squelette si léger, sinon les plus jeunes et les animaux qu'il chassait. « Hors de mon chemin. » Vociféra-t-il. Son visage, si serein qu'il soit, trahissait son agacement. Particulièrement quand son regard captait le scintillement de la lumière sur l'acier, et ses oreilles le bruit des bottes qui martèlent le pavé. Un peu plus loin, une patrouille de trois soldats bloquaient la rue.


Pyrope


Inventaire

0,00


(vide)

Rejeté, réprouvé. Traité comme un monstre, encore, toujours. Si la réaction, violente, l’avait fait trébucher, le jeune homme ne se sentait pas abattu pour autant. Pas cette fois. Il se sentait différent, face à cette évocation du dégoût qu’une personne dite « normale » pouvait ressentir en le voyant. Sa poitrine brûlait autant qu’un véritable feu, se soulevant rapidement et se rabaissant à peine au rythme d’une respiration incontrôlée. Le bruit porté à ses oreilles animales était à la fois clair comme un chant de prières et digne du pire des brouhahas de fête. Il se releva, lentement, ses longues mèches d’un blanc virginal caressant doucement ses marques tribales dispersées sur son corps, ses épaules, ses hanches, ses joues. Le voile de son bas flottait à mesure que sa queue battait l’air derrière lui. La brise fraîche qui parcourait les rues ne lui parvenait pas, et il sentait une chaleur d’Enfer en lui, jusqu’à rendre sa vision à peine floue, l’espace d’un instant. Puis tout se calma, soudain.

« - Et si… Je ne veux pas ? »

Il revint à sa place, ignorant tout. Toute la scène autour d’eux n’était qu’un décor en arrière-plan de cette personne aux cheveux couleur d’aube et au regard d’un émeraude vieilli, terne, grisé. Ses propres iris au dégradé de ciel et de mer s’accrochèrent aux prunelles vertes, les soutenant comme jamais auparavant il n’avait pu le faire avec un homme lambda. Qui plus est que celui-ci n’était pas n’importe qui : c’était un combattant, il savait se servir d’une arme, et, accessoirement, il faisait bien deux fois sa propre carrure en largeur – car Salacia n’était décidément pas bien épais –. Ses doigts se crispèrent un moment. Etrangement, il ressentait une légère envie d’unir ses griffes à la peau de celui lui faisant face. Mais ce serait lui donner raison sur son horreur, et peut-être un peu trop exagéré, quoique sur l’instant, cela lui sembla une solution des plus adéquates.

« - Je te dégoûte… Je suis un monstre… Mais de nous deux, c’est toi qui te bat ! C’est toi qui tue ! C’est toi qui fais souffrir les autres ! C’est toi qui blesse tes semblables, ceux de ton espèce ! Tu es celui qui utilise des armes pour faire primer ta vie sur celle des autres… Alors, de nous deux, le monstre infect, c’est toi ! »


[Désolée du temps et de la qualité, je n’arrive pas vraiment à faire mieux pour cette fois ^^’]