Coeur de braises et regard de glace.

[PV Negaï / Après l'évent "Fléau de Din"]

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Laurent


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Cauchemar.


C'est un nouveau jour.

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Brûlé, détruit. Chaque mur tombait en ruine autour de lui. Les flammes, le sang, le chaos, les cris, les combats.  Tout se mélangeait dans son esprit embrumé par la fatigue. Il ouvrit à peine les yeux, à peine, et déjà, le « rêve » prenait le pas sur la réalité, le faisant sursauter et se redresser. Non… La chambre où il était ne prenait pas feu, fort heureusement. Ce n’était qu’un rêve. Ou en tout cas, un cauchemar. Un désagréable cauchemar dont il ne se remettait pas, et que son âme de faible ne cessait de lui montrer les images, encore et encore. La douleur fut vive, soudaine, et il gémit en posant une main sur son flanc. Comment s’était-il fait ça, déjà ? Dans une bataille, certes, mais il n’avait pas vu qui ou quoi. Il ne se souvenait que du sol égratignant ses mains alors qu’il rampait pour tenter de s’extirper des affrontements. Sauver sa peau. Cela avait été le maître mot de cette histoire, et il savait qu’en étant soldat, ce ne serait pas la dernière fois qu’il devrait y être confronté.

Lentement, il se cala à nouveau dans les coussins, soupirant. Ses cheveux roux étaient éparpillés en soleil tout autour de son visage, et ses lunettes tenaient hasardeusement sur son nez à cause de sa position semi-allongée. Depuis combien de temps n’avait-il pas osé quitter cette chambre ? Au moins quelques jours. Les plis des draps commençaient à le gratter, et sa chemise se mêlait presque à eux. Il disparaissait, enfoncé dans sa couche, et était plus pâle que jamais. La honte le brûlait tout autant que la blessure à son flanc. Oui, il avait honte. Honte d’avoir été si faible. Et il voulait protéger le royaume ! Il était ridicule, juste ridicule. Son regard encore troublé se posa sur la fenêtre ouverte. Les rideaux s’agitaient doucement et, de sa chambre, il arrivait à entendre les quelques bruits de la Place. Qu’il avait envie d’y aller… Mais chaque pas était une souffrance en plus à supporter, et son allure, qu’en dire. On aurait dit un Effroi tant il était livide, voûté pour atténuer sa peine, marchant lentement, les traits tirés… Pour sûr que si un enfant le croisait, il hurlerait de peur.

Pourtant, il parvint à s’asseoir, lentement, à son rythme, grâce à une motivation que lui-même ne comprenait pas. Il voulait voir des gens. Si l’idée qu’on le surprenne dans cet état était la pire qu’il puisse avoir à ce moment, celle de se mêler à l’agitation et, peut-être, voir quelques visages familiers était plus forte. Il se glissa au bord du lit, poussa sur ses jambes fatiguées pour se lever. La table de nuit lui servit d’appui, puis le pied-de-lit, le temps que l’habitude revienne. Un pas, puis un autre jusqu’à la porte. Il lui était déconseillé de sortir si tôt, mais il ne pouvait plus tenir enfermé dans cet endroit qui prenait feu chaque fois que sa mémoire lui jouait des tours.

Il traversa les couloirs, sortit, et se dirigea vers le cœur de la Citadelle. Là, un sentiment de soulagement le parcourut, le faisant soupirer. Enfin… A ses yeux se présentaient quelques commerçants tentant de vendre leurs marchandises à des habitants du bourg. Certains discutaient de l’attaque, d’autre de la vie quotidienne. De comment les prix grimpaient et descendaient, de comment se protéger… Un petit groupe de jeunes enfants lui passa devant, riant. Il enviait quelque fois leur innocence. Il se rapprocha plutôt des murs des bâtisses. Peut-être son allure de cadavre ambulant passerait-elle inaperçue, même s’il en doutait. Mais le simple fait d’être ici suffisait à le détendre, au moins un peu. En espérant ne pas être apostrophé par quelqu’un qu’il connaissait. Il ne se sentait pas de faire face à ça.


Negaï


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Dernièrement, les affaires avaient été difficiles pour le prostitué. Bien évidemment, les veuves éplorées  qui avaient vu partir leurs maris à Cocorico sans jamais les voir revenir avaient bien besoin de réconfort, sans parler de ces rares hommes qui pensaient rattraper la virilité qu’ils avaient perdu dans une blessure en dominant un autre homme d’une manière moins douloureuse que les coups, étaient disponibles et payaient. Mais dans un cas comme dans l’autre ces personnes étaient épuisées, et n’avaient que peu d’énergie à fournir.

Aussi le violet se fatiguait véritablement à chercher l’énergie censée lui permettre de ne pas être fatigué. Quelqu’un d’autre aurait pu s’en sortir, mais lui devait évidemment laisser sa petite commission à sa maîtresse qui supportait mieux de le voir dépérir que de voir apparaître une ride sur son joli visage.

Negaï ne s’amusait même plus dans les petits jeux de séduction. Dernièrement il n’était qu’un grand bout de viande qui n’avait qu’à se positionner au bon endroit pour qu’on le repère, l’utilise, et le paie. Et souvent, qu’on le jette presque par la fenêtre. Ca, par contre, ça n’était pas dérangeant. Compte tenu de son rythme de travail, il ne pouvait pas vraiment se permettre de trainer sous les couvertures ou faire semblant de déguster le petit-déjeuner gracieusement offert par il ne savait même plus qui.

L’alcool de la nuit et le manque de sommeil avaient fait germer de drôles de monstres derrière ses yeux, qui semblaient se battre et briser parcelle par parcelle les os de son crâne, le tout en écrasant les organes qui pouvaient quelque fois marcher dedans. Et bien qu’hivernale, la lumière était assez vive pour exciter ses fauves et le plonger dans ces migraines qui avaient le don de le miner pendant des jours entiers.
*T’as qu’à t’en prendre qu’à toi-même !* se laissa-t-il penser, avec une voix intérieure qui cependant reprenait les intonations de son amie Aalis. Et cette petite voix n’avait pas tort. Si l’alcool arrangeait l’humeur sur le coup, il était franchement dévastateur une fois la déshydratation avérée.

Se protégeant tant qu’il pouvait de ce maudit soleil, il rasait les murs, avide d’un peu d’ombre et d’un sol foncé pour fixer son regard. De temps en temps, un petit coup d’œil lui arrachait une grimace mais lui permettait de voir si un pignouf ne lui barrait pas la route. Manquait plus qu’il ne rentre dans quelqu’un pour couronner cette journée des plus absurdes, comme toutes les précédentes et probablement les suivantes.

Or cette fois il ne douta même pas un instant en apercevant cette affreuse tignasse orange à quelques dizaines de mètres. Pitié. Même si la séduction lui manquait affreusement, et qu’il avait fini par affectionner – très profondément au fond de lui (NON NON NON ON PARLE BIEN DE REPRESENTATIONS MENTALES ESPECE DE SALE PERVERSE) – ses petites entrevues avec Walder, il était bien loin d’être séduisant avec sa barbe de trois jours, ses yeux rouges et son air malade et endormi. Sans parler des vapeurs d’alcool qu’il devait dégager…

Sans faire de bruit, il se retourna et repartit dans l’autre sens. L’autre ne regardait pas dans sa direction, tout était parfait et…

« Bordel ! » cria-t-il un peu plus fort qu’il ne l’aurait souhaité en se cognant contre des tonneaux qu’il n’avait pas vu. Ceux-ci roulèrent et manquèrent de tomber, tandis que lui était déjà par terre à cause de sa pirouette pour les retenir. Le tout avait créé un tel brouhaha qu’une bonne partie des regards avait convergé vers lui, caché sous ses cheveux, et étalé par terre.
*Eh merde… *


Laurent


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Dans la paix et le calme que lui procurait ce petit coin d’ombre, le violent bruit qui s’en suivit le fit sursauter, accélérant son rythme cardiaque alors qu’il s’appuyait au mur, paniqué. Qu’est-ce que c’était ? Non, personne n’oserait attaquer la place à cette heure… Ou justement si, pour faire plus de morts ! Mais les morts n’étaient pas le but dans une attaque, seulement la conquête, alors… Alors… !

« - Bordel ! »

… Ce simple mot le fit revenir à la réalité. Non seulement quelqu’un cherchant la discrétion n’aurait pas hurlé ce juron et risqué de se faire aussitôt repérer, mais en plus, il connaissait cette voix, et il savait qu’à moins qu’un coup de folie ne dirige ses mouvements, cette personne n’aurait rien fait à personne. Pas dans une trop grande ampleur en tout cas. Malgré tout, cela ne suffisait pas à le rassurer. Car, il ne voulait vraiment voir personne. Surtout pas dans cet état semi-cadavérique, où son teint était plus livide encore que celui d’un Stalfos, et son regard fatigué et cerné parvenait difficilement à soutenir une lumière trop forte. Il songea, un instant, à rebrousser chemin, à faire comme s’il ne s’était rien passé. A rentrer dans sa chambre, s’allonger et dormir encore pour un long, très long moment. Mais il fallait être réaliste : sa vitesse de fuite en ce moment était sans doute égale à celle d’une tortue au plus haut de sa forme, soit au plus bas de la sienne. De plus, ce n’était pas être un homme que de faire face. Et même s’il n’avait pas trop envie d’être « un homme » à ce moment-là…

« - … Est-ce que ça va ? » dit-il finalement en s’approchant du violet. « Tu ne t’es pas fait mal, j’espère. »

Lui, en revanche, avait vraiment une drôle de dégaine, avec sa chemise blanc cassé et son pantalon brun, le tout pour cacher un bandage qui s’étendait tout le long de son torse, couvrant une blessure pas belle à voir.


Negaï


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«  … Est-ce que ça va ? Tu ne t’es pas fait mal, j’espère. »

Negaï chassa la méduse qui lui servait de chevelure et qui cachait tout son visage – et qui lui cachait par conséquent la vue. Il sursauta en tombant nez à nez avec deux verres ronds et, derrière eux, deux ronds verts. De près, le mage avait encore moins fière allure que le prostitué, ce qui rassura égoïstement Negaï. Mais sa petite – énorme ? – fierté le tortura à nouveau lorsqu’il se dit qu’il avait manqué une occasion de briller en comparaison de ce joli faire-valoir.

« L’homme parfait est incassable, c’bien connu. » grommela-t-il en se redressant, et pour mieux détailler son nouvel interlocuteur. Même si le manque d’énergie se lisait sur son teint gris, ses yeux cernés et son ossature qui ressortait, tranchante, sous sa peau, il gardait ce petit regard enjoué de l’enfant qui observe pour mieux apprendre. Et allongé par terre, à la merci de l’autre si celui-ci lui avait voulu du mal, il avait également ce petit air de chat qui regarde son maître en attendant d’entendre le mot ‘manger’. « T’as une sale tête, Walder… » railla-t-il immédiatement. Puis, parant une remarque sur son apparence à lui : « Et si moi j’te l’dis avec la crève que j’me trimbale, c’est qu’c’est pas pour rire ! ». Il insistait quelque peu, et l’autre risquait de se vexer. Mais au moins glisser quelques mots sur une maladie imaginaire éloignerait l’attention sur son apparence et son rapport avec ses activités lubriques. De plus, il était évident qu’aucun des deux n’était à l’aise dans cet échange, alors s’il voulait partir, Negaï n’allait pas le retenir.


En effet, il n’avait même pas la perspective de lui voler quelque énergie : s’il était un grossier personnage le plus souvent, Negaï n’était pas un meurtrier. Et compte tenu de l’état de faiblesse du rouquin, il ne voulait pas tirer la Cocotte par les plumes de la queue. Il finit enfin par se relever, prenant appui sur le mur, mur auquel il s’adossa pour mieux toiser le blessé.

« T’étais là-bas, alors ? Une chance que j’te voie en un morceau, ta bouille m’aurait manqué… » et devant l’air interdit de l’autre, il modéra quelque peu son propos. « …peut-être. » Trop de gentillesse n’était pas dans ses habitudes, après tout.  Mais il savait cependant que ce genre d’événements, ce genre de souvenirs pouvaient laisser des traces. Aussi, lorsqu’il leva la main pour chasser la mèche du garçon qui dansait au milieu de sa figure, il le fit tout doucement, et sans le surprendre. Pas gentil, mais pas encore méchant gratuitement.

« On raconte qu’y avait des Dodongos. J’espère qu’t’en as au moins massacré une dizaine ! » plaisanta-t-il. Puis ils songea à se taire, compte tenu du plat de ses mots, et de sa voix qui s’éraillait un peu plus à chaque syllabe. Par ailleurs, les vapeurs d'alcool qu'il continuait à dégager allaient bientôt rendre l'autre aussi saoul que lui la veille.

Le violet serra les lèvres après avoir passé un léger coup de langue dessus, et rejeta la tête en arrière pour l'appuyer contre le même mur qui soutenait déjà presque tout son corps. Il avait définitivement honte de se montrer sous ce jour à Walder, lui qui jusqu'ici avait réussi à entretenir son image d'odieux bellâtre.


Laurent


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Voilà. Ils étaient là, tous les deux, à se faire face, l’un et l’autre dans un état plus pitoyable encore qu’ils ne s’étaient jamais vus. Pour être honnête, Laurent en était surpris. Si lui avait une raison suffisante d’avoir l’air d’un Effroi traînant les rues depuis plusieurs années, Negaï… Eh bien, il avait tellement l’habitude de le voir beau, grand, – pas si – fort, charmant… Que cela l’étonnait de le voir si… Faible. Et on aurait pu croire que le voir avec ce teint, cette allure, d’entendre sa voix presque éraillée l’aurait définitivement repoussé. Mais non. Il n’arrivait pas à se sentir différemment avec lui. Et pourtant, il y aurait de quoi ! Pourtant, à ses yeux, il en devenait juste un peu plus humain. Et cela le rassurait. Il ne serait pas une sorte de loque aux côtés d’un modèle de beauté masculine. Non, ils seraient deux loques. Mais au moins seraient-ils ensemble.

Sa première occurrence n’eut que l’effet de le miner d’autant plus. Oui, il savait qu’il n’avait l’air de rien avec sa chemise assez ample et beigeâtre censée cacher un bandage disgracieux témoignant de sa faiblesse en combat, son teint livide et ses cheveux à peine peignés. Mais ça n’était pas une raison pour le lui ramener en plein visage ! Ce garçon n’avait aucun tact. S’il savait charmer en temps normal, cette fois, il avait juste réussi à lui donner l’impression de ne rien avoir à faire dans son aura de « beau mâle ». Pfeuh. Ca n’avait rien de surprenant, après tout ! Il se rappelait de leur nuit ensemble. Sans aucun regret, sauf peut-être celui qu’elle n’ait pas été plus longue. Car maintenant, voilà. Le violet avait eu ce qu’il voulait, lui aussi en quelque sorte. Il n’y avait plus de raison pour que ce petit jeu de séduction continue. Pas vrai ?

« - T’étais là-bas, alors ? Une chance que j’te voie en un morceau, ta bouille m’aurait manqué… Peut-être.
- Euh... Je... Tu... Merci...! »
balbutia-t-il en guise de réponse.

Même s’il avait tempéré ses paroles au dernier moment, Laurent n’arrivait pas du tout à croire qu’il pouvait lui dire cela. Pas honnêtement, en tout cas, sinon oui, il en aurait été capable. En voyant ses doigts se rapprocher de lui, il eut un léger mouvement de recul, se calmant lorsqu’ils ne vinrent qu’éloigner une mèche de sa tignasse rousse en bataille cachant son regard vert. Le pauvre Negaï devait être épuisé pour avoir une telle douceur, d’un seul coup. Surtout à son égard.

« - … Pour être honnête… » commença-t-il un peu hésitant. « … Je n’en ai pas vraiment eu le temps, vois-tu. »

Baissant la tête, il vint se caler contre le même mur que son interlocuteur, n’osant plus le regarder. Il avait honte. Et « ça », c’était soldat. Il n’avait même pas réussi à tenir jusqu’au bout. Sa bêtise aurait presque pu le tuer.

« - Je me demande si… Si je suis vraiment fait pour être soldat. Si je ne devrais pas plutôt tout arrêter. Enfin, je sais que tu dois t’en moquer, de mes états d’âmes. Tu dois te dire que, ça y est, tu peux compter le petit binoclard de l’armée sur ton tableau de chasse, et que tu n’as plus vraiment besoin de t’y intéresser, mais… Moi, j’ai besoin d’en parler à quelqu’un. »

Et s’il doutait que le violacé soit le meilleur soutien qu’il puisse avoir, il ne voyait personne d’autre à qui confier ses pensées.

« - Je me suis lancé dans la bataille, et j’ai été vaincu. Tous les jours, j’ai cette blessure à mon flanc qui me rappelle que je n’ai pas pu défendre mon pays parce que je suis faible. Quand je suis entré dans l’armée, je voulais… Je voulais être fort. Je voulais devenir fort comme ma sœur, et pouvoir protéger ce royaume que j’aime tant, dans lequel je suis né et j’ai grandi. Et je ne suis même pas capable de faire ça ! J’ai… Un peu honte, maintenant. »

Puis il releva assez rapidement son visage, soupirant avant de reposer ses yeux sur le sol.

« - Et encore plus quand je pense que je viens de t’avouer ça, à toi. Pardonne-moi. »

Le rouquin s’efforça de lever la tête, venant poser ses iris d’un vert pur sur Negaï. Il avait encore une fois parlé, trop parlé, et encore plus compte tenu du personnage face à lui. Il fallait détourner le sujet. Surtout qu’il ne lui avait pas posé de question… Enfin, « la » question qui lui venait.

« - Alors comme ça, tu es malade ? C’est étrange. Je ne savais pas qu’il était conseillé de boire à outrance pour combattre un rhume… ! » lâcha-t-il alors que son ton devenait plutôt neutre.

Le doux parfum « Haleine de poivrot » de ce bel homme qui avait conquis son cœur l’avait trahi. Et il comptait bien s’en servir. Ca l'amusait au moins un peu !

« - C’est mal de me mentir alors que je viens d’être le plus honnête possible. Je t’ai ouvert mon cœur, Negaï. »

Dans tous les sens du terme…


Negaï


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Encore une fois, le violet tâcha d’appliquer les précieux conseils de Luka et Aalis dans une situation de sa vie quotidienne. En l’occurrence, il tâcha de trouver du positif dans le fait d’écouter le pauvre petit soldat sans défense qui avait été sauvagement terrassé par une baleine de corset… Ou pire, mais quelque part c’aurait été crédible. Au moins se taisait-il pendant ce temps et reposait-il sa voix. Mais ses oreilles en revanche…

Il réactiva son attention en voyant que le débit de paroles du rouquin ralentissait, et arriva à reconstituer le discours approximatif qu’il lui avait tenu. Il se sentait faible, ridicule, honteux… Roux, aussi. Et désirait plus que tout autre chose devenir quelqu’un d’autre que lui-même pour être en mesure de satisfaire son petit complexe du héros.

Le prostitué souffla sur une mèche qui lui retombait négligemment devant les yeux, et essaya de trouver quelque phrase réconfortante, parce que sous ses grands airs, il n’était pas si mauvais, il n’aimait pas écraser ceux qui se mettaient déjà eux-mêmes plus bas que terre.
« Bah Walder, vois le bon côté des choses ! Tu pourrais déjà progresser en devenant aussi épais que les cloisons d’un bordel !... » Réconfortant pour Laurent ? Non. Jouissif pour lui ? Complètement.

« J’ai… Un peu honte, maintenant. Et encore plus quand je pense que je viens de t’avouer ça, à toi. Pardonne-moi. » répondit le mage. Peut-être l’avait-il mal pris ? Quelle susceptibilité, en quel cas… Mais somme toute avait-il été frappé par un éclair de lucidité, puisqu’il arrêtait enfin de parler de la chose la plus inintéressante pour Negaï en cet instant : sa personne.

Mais la conversation dériva sur un sujet certes bien plus passionnant mais nettement plus glissant aussi. Oui, l’incube avait peut-être quelques tendances alcooliques… Il était loin d’être le seul concerné sur le territoire, foutredin ! Puis cette espèce de numéro de charme que le rouquin lui servait… Il n’était déjà pas d’humeur fantastique, mais il sentit très nettement un pic de colère en lui.

Croisant son propre regard dans le reflet que lui renvoyait une vitre sale, il comprit qu’il ne pourrait jamais nier. Il se contenta de lui offrir sa tête à claques la plus réussie avant de lancer un
« Et en plus il est médecin ! » de la même manière qu’une mère un peu trop bourgeoise devant sa nouvelle future bru. « Je n’fais qu’me désinfecter de l’intérieur, et au moins ça soulage… » Il se gratta le crâne, comme s’il espérait chasser de cette manière la migraine qui le déséquilibrait presque. « …Sur le moment. »

Non, sérieusement, le violet ne parvenait pas à comprendre où l’autre voulait en venir ? Il s’attendait à ce qu’il lui dévoile toutes les subtilités de son absinthe préférée ? Ou alors tentait-il un peu bizarrement de l’orienter vers l’idée d’aller boire ensemble ? Pitié… Sa diarrhée verbale lui était déjà si insupportable lorsqu’il était sobre, mais alors possédé par les effets de l’alcool. Il ne put retenir sa grimace quand il imagina la scène.

« Mais puisque tu tiens à mon honnêteté, je peux te parler de mon nez qui coule, de mes yeux qui brûlent, de ma gorge encombrée. C’est si romantique que ça me fera peut-être frissonner plus fort que la fièvre. » railla-t-il à nouveau.


Laurent


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Ce type était vraiment… Ce type était vraiment une plaie ! Une plaie d’enfer, d’ailleurs, n’importe qui l’aurait quitté dès lors qu’il aurait commencé à se comporter de la sorte ! Ce n’était qu’un petit con vaguement charmant qui commençait à jouer les durs dès qu’on tentait d’en apprendre un peu plus sur lui. Le genre type qui plaisait aux pucelles en fleur, aux donzelles voire aux prêtresses qui n’avaient jamais touché un homme de leur vie. Et honnêtement, HONNÊTEMENT, il ne mériterait que d’être seul et de vivre sa vie de misère !

… Oui mais là, on n’est pas dans cet esprit-là. On est dans celui de Laurent. Celui qui n’a d’yeux que pour un certain bellâtre à la langue acérée. Et même là, alors qu’il lui avait tout de même fait mal, il n’avait pas le courage de lutter, le roux. Soupirant, il vint lever sa main pour la passer dans ses cheveux, les « coiffant » un peu. Tiens, ils avaient poussés… Dans l’immédiat, cela ne le dérangeait pas. C’était même mieux. Ca lui tenait chaud alors que la fatigue lui donnait un froid d’enfer.

« - Si tu réagis ainsi dès que quelqu’un se préoccupe de ton état, pas étonnant que tu sois toujours aussi désespérément seul. Même, que tu doives te saouler pour oublier. »

Peut-être que sa blessure le rendait désagréable. De mauvaise humeur. Mais il n’avait pas envie de faire avec les états d’âme d’un type comme lui… Il tourna les yeux vers lui.

« - Negaï. »

Le regard qu’il lui lança était indescriptible. Ou plutôt, il faisait passer une idée. Une idée grande, mais qui ne pouvait pas échapper à celui qu’il fixait, qu’il détaillait avec, encore, cette espèce d’admiration dans le regard. Une sincérité relativement pure.

« - … Si tu essaies de me faire fuir, c’est raté. »

Puis, comme si la honte venait encore l’envahir à nouveau, il se força à observer les pavés devant lui. Un très joli sol d’une ruelle dans laquelle diverses choses devaient se passer de temps en temps. Ahem.

« - Si tu veux être sauvé ou je ne sais quoi, je ne vais pas pouvoir y arriver si tu me repousses à chaque fois, tu sais ? »

Peut-être qu’il se faisait des idées. Peut-être que Negaï n’avait pas du tout envie d’être sauvé ? Peut-être qu’il voulait simplement voir un type perdu… Et être celui qui l’aiderait ?

« - Hmpf… Être ton « sauveur ». Peut-être que cela serait un bon moyen pour que tu me regardes… » souffla-t-il avant de se reprendre, un pauvre rire passant ses lèvres. « T’es qu’un pauvre type, Negaï. Un pauvre type qui ne mériterait même pas qu’on s’intéresse à lui. Parfois, je me demande combien de baffes tu as dû te manger à force de dire de sacrées c*nneries. Plus loin, je dirais même que tu es un gros c*n et un s***pard de premier ordre. »

… Ouais, c’était pas le discours le plus romantique qu’il pouvait lui servir. A moins que.

« - Et pourtant, je n’arrive toujours pas à te faire sortir de ma tête. Pendant les jours longs et pénibles où j’étais étendu dans mon lit, je n’ai pas cessé de penser à toi. »

Et ce fut un sourire presque tordu qui étira ses lèvres.

« - Tu ne veux pas savoir ce que j’ai fait dans ces moments-là… ! »

Oui, bon ben on va couper là, hein ! Non mais. Le rouquin se dévergonde. Note pour plus tard, ne plus le remettre sur un champ de bataille ! Le voilà tout détraqué ! Ou au contraire… Tellement naturel que ça en devient intéressant, va savoir ?


[spoiler="HRP"]Je suis désolée pour ce surplus d'insultes et de choses très étranges dans ce RP... Mais faut bien que ça sorte, non ? XD[/spoiler]


Negaï


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« Non, en effet, je n’veux pas le savoir. »

Non mais et puis quoi encore ? Imaginer cette pauvre petite chose noyée sous ses draps à défaut de pouvoir supporter la moindre petite goutte d’eau ? Ca n’était pas faute de l’avoir vu s’endormir d’épuisement une ou deux fois contre lui. En prenant trop de place. En le collant toujours un peu plus.

Mais jusqu’ici, le Violet n’avait vu les choses qu’en termes de performance et d’effets secondaires. Et lorsqu’il soutenait le regard du rouquin pendant qu’il lui sortait toute sa tirade, une autre idée lui traversa enfin l’esprit. Et si cet air paisible que le mage affichait, collé trop près de lui et les yeux clos, étaient davantage liés à sa présence qu’à ses prouesses ?


« N’importe quoi. » répondit-il, un peu à lui-même. « J’veux bien croire qu’tu sois frustré, Walder, mais t’accrocher au premier beau gars qui te touche, c’pas très mali, surtout si ça t’plait pas. »

Il ne ménageait plus vraiment son interlocuteur, ayant déjà pris une grande partie de tout ce qu’il pouvait prendre. Et ces grands yeux implorants l’effrayaient autant qu’ils le dégoutaient. L’affection n’était pas sa tasse de thé, et encore moins l’espoir.

Quand il voyait ces deux billes vertes dirigées vers lui un temps, fuyant vers autre chose, puis revenant, comme attendant quelque chose qu’elles n’auraient probablement jamais, Negaï avait de nouveau la nausée.
« Des salauds qui n’veulent que tremper leur biscuit, t’en trouveras des tas. M’suis jamais caché, alors ce s’rait bête que d’croire que tu peux faire pousser un peu de compassion là-d’dans. » Et en finissant sa phrase, il avait montré son cœur. Il avait parlé avec un sourcil relevé, une expression à mi-chemin entre la moquerie et la condescendance.

Il le détailla encore une fois, et libéra un rire gras, un peu nerveux aussi.
« Quoi, t’vas pas m’dire que t’es amoureux ? Tu s’rais encore plus con que c’que j’croyais. » S’il se trompait, l’autre serait certainement encore plus vexé, et s’en irait. S’il avait raison,  c’était une manière plutôt claire de lui montrer que la réciproque n’était pas et ne serait jamais vraie. Et sa fierté s’en verrait tellement brisée, qu’il partirait et ne reviendrait plus.

Dans tous les cas, sa tranquillité serait enfin à portée de main, et il pourrait se concentrer sur les innombrables autres proies dont jouissait Hyrule. Pourtant, sa contrariété ne diminuait pas, et ses légères suffocations devaient commencer à se voir, si on y prêtait particulièrement attention.


Laurent


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Trop dur et trop simple. C’était trop dur et trop simple à la fois. Trop dur d’entendre de telles choses, d’avoir de telles pensées. De se sentir un peu rejeté, aussi. Mais trop simple de comprendre, un peu, ce qu’il se passait dans cette petite tête violette. Il n’était pourtant même pas certain de ses propres pensées. Alors il allait juste… Parler.

« - Ca te ferait peur, hein ? Que je te dise que je tiens à toi. »

Mais dans son état, rien ne pouvait l’empêcher de se lâcher. N’était-il pas un homme libre, après tout ? … Hm, il commençait vraiment à se laisser un peu trop aller. Mais il trouvait presque Negaï mignon, à tant chercher à s’éloigner. Mignon et un peu crétin, mais ça, ça ne changerait pas de d’habitude. D’un mouvement lent, il se décolla du mur.

« - Alors je ne te le dirai pas. Ca risquerait de détraquer tout ton monde… Mais tu sais, on peut t’aimer pour d’autres raisons que parce que tu es une belle plante. »

Même si dans son propre cas, il avait du mal à voir ce qui lui plaisait tant chez l’autre andouille. Parce que bon, regardez un peu. Un soldat, fricotant avec un prostitué, qui lui-même le rejetait… C’était exactement quelque chose qui pourrait le faire quitter l’armée et devenir prêtre ! Et pourtant, il n’attendait rien de plus, si ce n’était une place de choix dans les bras de cet homme-là.

« - Ne t’inquiète pas, je vais te laisser en tête-à-tête avec ta gueule de bois… »

Il n’avait pas espéré trouver un semblant d’affection de la part du violet. Et au fond, tout au fond, très au fond – après ça devient pervers –, ça l’amusait même un peu, ce petit jeu. Cette danse bancale, un pas en avant, deux pas en arrière.


Negaï


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Son bras avait déjà bien entamé son geste lorsque Negaï se figea pour éviter de défigurer Laurent avec un beau bleu. Heureusement qu’il s’était juré de ne jamais battre un infirme, car la tentation avait été vraiment, vraiment forte.

Il commença à crier, le ton baissant au fil de la phrase quand des regards finirent par converger dans leur direction.
« Quand tu vois un comédien, t’as l’idée d’le prendre pour le rôle qu’il jouait ? » Bien en colère pour un homme qui vantait son indifférence, il continua « J’ai voulu jouer avec toi, et j’t’ai servi c’que tu voulais entendre pour avoir c’que moi j’voulais. Ma gueule, c’probablement le seul truc authentique que t’ait pu voir de moi. Alors toi et tes conneries fleurs bleues, laissez-moi rire. »

Le geste et le ton hargneux l’avaient encore plus fatigué, si bien qu’il se laissa retomber contre le mur, tenant debout par la tension de ses jambes. « Ne t’inquiète pas, je vais te laisser en tête-à-tête avec ta gueule de bois… » reprit l’autre, qui semblait enfin avoir un peu de jugeote.

Là, le Violet aurait du tourner les talons en criant « Bon débarras ! ». Pourtant, sa réaction traduisit une des nombreuses incohérences qui le constituaient.
« La différence, c’est que ma gueule de bois, elle, j’ai tout fait pour l’avoir. » …Et pas toi.

Dépassé l’aspect désagréable, cette réplique était criante de désespoir. Pourquoi lui, lui qui fuyait le contact ? A n’en pas avoir, il s’était convaincu qu’il n’aimait pas ça. Mais repousser ce qui nous a toujours manqué peut faire mal, parfois. Et si le Prostitué exprimait ça en colère, oui, il avait mal.


« Ouais, dégage. Dégage avant d’finir aigri parce qu’on aura joué avec ta pureté. » …Comme moi. « T’auras qu’à ramener le blé quand t’auras guéri. Là j’te casserais en deux, et c’est l’seul moyen qu’on ait de continuer. » Il se mordit tout de suite la lèvre. Oui, ‘on’.


Laurent


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La force des mots. Prouvée maintes et maintes fois, elle perdure à toutes ères, à tout instant. Cela peut être pour prouver son amour à sa famille, ou au contraire pour la détruire. Les mots ont causé des guerres et en ont évité. Il y a ceux qui les maîtrisent, ceux qui les craignent, ou les deux à la fois. Mais ici ? Qu’était-ce ? Un simple mot avait suffi à faire arrêter sa marche.

« On ». Un simple « on » dans une discussion pour le moins peu banale. Un simple « on » qui l’avait fait se retourner lentement.

« - Le seul moyen qu’on ait… De continuer… ? »

En trois pas, il revenait face au violet, venant le pousser de ses maigres forces. Pas assez fort pour avoir l’air crédible, juste assez pour faire passer l'idée. Bref, il n’était pas vraiment « héroïque » à cet instant. Un peu comme d’habitude, en fait.

« - C’est faux ! Tu le sais ! Si tu t’ouvrais un peu… Si seulement tu… ! »

Il recula finalement, l’observant. Il n’était pas de ces donzelles qui pleuraient pour un rien.

« - … Si seulement tu essayais d’avoir un cœur, pour une fois ! Si tu me trouves hideux ou ennuyeux, si tu trouves une quelconque once d’amour dégoûtante et repoussante, alors très bien, je m’en vais. Mais je t’en prie, par les Déesses, si tu as encore le moindre sursaut de sentiments… ! »

Un soupir. Non, il n’avait même pas envie de finir cette phrase, cette dispute, rien. Il voulait retourner se coucher, végéter entre ses draps. Ne penser à rien. Mais il se connaissait, il pensait toujours trop à tout…



Negaï


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Comme il l’avait craint, le Rouquin s’était accroché à la petite encoche que sa langue avait accidentellement creusée dans son masque de glace. Voyant ses mains arriver vers lui, le Violet courba les épaules en un réflexe protecteur, comme une bête prête à recevoir un coup. La faiblesse du coup sembla l’étonner, mais il se ressaisit assez vite par un soupir agacé.

« Si j’devais m’caser, ce s’rait pour un peu plus qu’trois coups d’reins toutes les trois nuits, et en flippant parc’que c’pas forcément bien vu. » Et là-dessus, il ne mentait pas vraiment. La minuscule partie de lui qui croyait encore à cette écœurante niaiserie appelée l’amour avait aussi des aspirations un peu plus durables et stables.

La stabilité… Sa vie en manquait cruellement, et ce depuis le départ. La seule figure à laquelle il se cramponnait désespérément pour ne pas tomber dans le vide était aussi celle qui l’y poussait, un sourire carnassier aux lèvres.


« Faut faire la différence, mon Chat. » commença-t-il. « M’offrir à tour de bras, c’est mon métier, et parfois, genre dans ton cas, c’t’agréable, parce que la bouille est jolie et le corps pas trop dégueu. » Dans sa forme la plus négaïesque, cette phrase pouvait s’apparenter à un compliment. Mais il fallait avoir l’oreille pour le repérer.

Soudain, un revirement s’opéra en lui, puisqu’il tomba le masque, prenant un air sincèrement désolé. Il haussa les épaules, en dévoilant une lorsque sa tunique trop grande glissa. Une grosse cicatrice près du cœur pointa le bout de son nez, avant qu’il ne replace le tissu.
« P’t’être bien qu’j’aimerais c’que t’es, si j’avais envie d’chercher un peu au fond de tes tripes. Mais j’ai pas d’intérêt à l’faire… » Une profonde inspiration, une fermeture lente des paupières, et il fallait se lancer. « J’suis d’jà engagé auprès d’une femme. »

Voilà. Le pourquoi du comment avait été posé sur la table. Même si les termes avaient caché une réalité bien plus sombre, Hortense était bel et bien la raison pour laquelle le Prostitué se refusait à abaisser ses barrières à qui que ce fut.


Laurent


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Il tiqua sur la cicatrice, mais une autre information l’occulta totalement. Une femme. Cette personne si belle, si charmante, qui lui plaisait tant, qu’il voulait posséder, ou plutôt, à qui il voulait complètement et consciemment appartenir… Etait liée à une femme. Ce fut comme un deuil accéléré qui serra son cœur. Le choc. Le déni. Ca ne pouvait pas être vrai. Il refusait que ce soit vrai, non, c’était juste une technique. Une technique idiote d’un homme séducteur qui cherchait se défaire d’un jeune homme un peu trop insistant. Pourtant, il le voyait. Son visage… Son si beau visage qui perdait enfin son masque, pour prendre un air désolé. Ce ne pouvait pas être un mensonge. C’était vrai. La colère l’envahit. Son Negaï était déjà pris… Par une femme, en plus de cela. Il ne pouvait pas accepter.

Aujourd’hui, il avait envie d’être égoïste.

« - Et… C’est un problème ? »

Il n’avait pas envie d’en arriver au stade la dépression, et encore moins à celui de l’acceptation. Non ! Il n’avait pas envie d’accepter ! Il avait envie… D’avoir ce qu’il voulait. De ne pas être raisonnable. D’accepter de faire les plus grosses bêtises de sa vie rien que pour atteindre son but. Et si cela fonctionnait… De continuer.

« - C’est peut-être ridicule, mais… Je n’ai pas peur. Je n’ai pas peur de me faire prendre, je n’ai pas peur des autres, je n’ai pas peur de ce qui peut arriver, et si toi tu as peur, alors je te jure de te protéger de tout cela. Je… Je peux faire ça. Je ne peux peut-être pas défendre tout un pays, tout un peuple, mais toi, je peux te protéger… Je veux te protéger. Alors ne me force pas… A te dire au revoir. »

Lentement, il osa avancer sa main vers la sienne. Sans la toucher, s’il ne le voulait pas, il n’allait pas le forcer.

« - Juste… Essayer ? Et si tu as peur, si tu ne veux plus, si ce que tu découvres en moi ne te plait pas… Alors je te laisserai partir, mais s’il te plait, pas si tôt… ! »

Son visage ne pouvait pas être plus rouge, à cet instant.

« - Moi, le simple roux binoclard essayant désespérément d’être un bon soldat ose te demander ça ! »

Quoique le violet avait sans doute dû faire pire que cela. Non ?



Negaï


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« T’es même pas foutu d’t’occuper d’toi-même, Walder, pourquoi c’t’à tes bras que j’pens’rais pour me réfugier ? » Le temps d’un petit monologue du rouquin, et le Violet avait eu le temps d’affuter sa langue. A mesure que l’autre se rapprochait, lui reculait, l’autre revenait, si bien qu’il avait fini acculé contre le mur. Cependant son air hautain avait disparu, et c’était une mine franchement contrariée qu’il affichait. Et pas forcement envers Laurent.

« T’crois qu’ça m’plait, d’te voir dans cet état ? T’es jeune, t’es beau, t’as la vie d’vant toi, qu’est-c’que tu vas perdre ton temps avec le premier connard qui s’est servi d’toi ? Parce que c’est c’que j’ai fait, et j’t’ai jamais menti là-dessus. » Au moins était-il sorti de son mutisme ponctué de quelques piques bien placées qui savaient faire mal. Quelque part, il était révolté que le jeune mage foute tout en l’air pour quelqu’un, et encore plus pour lui.

Ca n’était pas la première fois, mais voir ces grands yeux verts, aussi remplis d’espoir que de larmes, là, devant lui, le transperçait. Ce regard, lui aussi l’avait eu, il n’y avait pas si longtemps. Et face à ce spectacle, Negaï savait qu’il pouvait faire absolument ce qu’il voulait de ce jeune homme qui ne demandait qu’à se faire aimer de lui. Hortense, elle, ne s’était pas gênée.

Cependant, la seule solution qu’avait trouvé le Violet pour échapper à son chagrin l’avait conduit à se laisser mourir, à moitié vidé de son sang, dans un caniveau crasseux. Et lorsque son visage émacié se transformait en cette jolie petite bouille ronde qui le fixait, quelque chose bloquait. Non, s’il faisait ça mauvaise tête, finalement, ça n’était pas pour se protéger lui, mais pour protéger celui qu’il se refusait à voir mourir. A voir souffrir.


« Et c’pas la peine de faire cette tronche. On m’a pas donné ma chance, à moi. » Ce qui était profondément injuste, et expliquait en majeure partie cette frustration qui le rendait si exécrable au quotidien. Il ne se rendait même pas compte des incohérences qu’il enchaînait, à le repousser à coup d’arguments d’une femme dans sa vie, puis à coup d’une incapacité à aimer car personne ne l’avait aimé lui. Pourtant, s’il se noyait dans cet argumentaire bancal, c’était qu’il se refusait à le perdre, son rouquin, d’une manière comme d’une autre.

C’est d’ailleurs ce qui le fit tiquer lorsqu’il vit l’espoir se noyer dans les yeux du garçon.
« Putain, t’vas pas chialer ? » cracha-t-il, l’air plus effrayé qu’en colère. C’était le moment de jouer sa spécialité : s’écouter plutôt que d’essayer de manier les arts de la morale et de la vie en communauté. Pourtant, la fuite ne semblait pas être ce qui l’attirait en ce moment-même. « …tain, t’es chiant tu sais. Allez, viens. » Et, sans laisser le choix à l’autre, il l’attira à lui, en veillant à rester dans l’ombre du bâtiment, histoire de ne pas attirer davantage l’attention. Pas une étreinte franchement forte, mais qui, pour une fois, avait quelque chose de plus protecteur. Sans la moindre arrière-pensée.  *T’es dans la merde, mon pauvre vieux…*


Laurent


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Coeur de braises
et regard de glace.

Negaï & Laurent







Il aurait pu lui répondre qu’il avait raison. D’ailleurs, au fond, et s’il écoutait la petite voix dans sa tête qui lui disait exactement la même chose, il avait raison. Il avait toute sa vie, et de belles expériences à venir. Il était soldat, il en avait toujours rêvé. Il était mage. Il n’était pas des plus laids, ni des plus idiots, et il était encore jeune. N’importe qui à sa place aurait tout simplement oublié cette aventure, aurait mis cela sur le compte de la solitude, de la peur, du choc ou de la tristesse, d’une simple « erreur de jeunesse » qu’on cachait au mieux. Surtout que c’était dangereux. Ils étaient deux hommes, dont l’un « de mauvaise vie », alors que lui était dans l’armée.

Mais c’était connu qu’il ne faisait jamais rien comme tout le monde. Pourtant, il avait bien failli laisser tomber dans la seconde, en entendant cette énième excuse de l’homme pour le repousser, encore une fois. Tout lui semblait se contredire, mais peut-être était-ce seulement un stratagème douteux de son esprit pour lui donner encore une toute petite lueur d’espoir. Mais l’espoir repartait, lentement mais sûrement. Au fond de sa gorge était bloqué un « Très bien », et un « Au revoir », mais ils étaient précédés de larmes. C’était ridicule… Lui, pleurer comme une donzelle parce que l’élu de son cœur lui disait non. C’était stupide. Mais c’était le cas. Le visage de son amant de quelques soirs se troubla, se perdant dans ses yeux tout humides qu’il ne détournait pourtant pas.

Puis il sentit ses bras, cette étreinte douce, protectrice, dont il avait rêvé et qu’il n’avait jamais vu arriver, ou alors que par quelques rubis dépensés auprès de ce même bellâtre pour un simulacre d’amour qui s’était, finalement, concrétisé bien trop rapidement. Sa tête sur son épaule, il profita d’être caché pour se laisser aller, pleurant en silence, secoué de doux sanglots alors que ses mains venaient accrocher les vêtements sous ses doigts. Il n’avait plus rien à dire. Il n’avait plus de beaux discours, plus de jolies phrases sans aucun effet à lui dire. Alors il allait essayer le plus simple. La pensée et le sentiment le plus pur livré tel quel.

« - S’il te plait… Ne me laisse pas… ! »


©Codage by Mr. Chaotik from Never-Utopia


Negaï


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Dans ses voyages, serré au milieu des marchandises dans les endroits les plus moisis des bateaux ou en suivant des hordes de fuyards sur des milles et des milles, Negaï avait eu l’occasion de s’occuper des enfants. Comme lui, ils faisaient partie des faibles, des inutiles, mais qui pouvaient être agréables quand on n’avait plus rien à faire. Il avait fini par trouver du plaisir dans ce rôle, lui qui perdait de plus en plus l’espoir d’avoir des enfants, à l’époque. Aujourd’hui, bien-sûr, cette perspective était définitivement rayée. Au fil du temps passé auprès de ces petites créatures, il avait trouvé un certain plaisir à sentir leur poids se faire de plus en plus lourd au creux de son bras, alors qu’ils commençaient à sombrer vers leur vie plus intéressante : leur vie onirique.

Ici, l’enfant qu’il tenait contre lui était plus grand, mais il avait bien reconnu cette détente, comme s’il s’était légèrement liquéfié à son contact. Mais Negaï avait peur. Peur de tout, peur de lui, peur de l’Autre… Représenter un Havre de Paix ne correspondait pas à sa perpétuelle stratégie de fuite. Pour autant, imaginer quelqu’un d’autre occuper cette place et mal faire le travail auprès de ce gars qui semblait avoir été chié par les Déesses tant il était pur lui filait la nausée.


« J’vois pas comment j’pourrais partir alors qu’j’ai jamais été là, Gamin. » se contenta-t-il de railler, même si cette pique transpirait une forme de promesse. « Si y a qu’ça, j’veux bien m’occuper un peu d’ton cas, mais y a bien un jour où faudra grandir et placer tes espoirs dans quelqu’un d’mieux. » finit-il par concéder. Dans sa grande bonté, il alla jusqu’à déposer un petit baiser sur le crâne du rouquin, pendant qu’il commençait à le lâcher, un bras diluant l’éloignement en caressant doucement son dos.

« Mais là, t’fais vraiment peur, pauvre ‘tit chat, va. » Là je sarcasme était de retour. Fallait pas déconner, non plus. « J’te ramène, tu dois récupérer : m’est avis qu’tu vas avoir du boulot avec toutes ces merdes dragmires qui nous tombent dessus. » Au moins ça mettait un peu d’animation chez les soiffards de la rue. Mais l’idée de voir sa petite chose se battre ne le rassurait pas beaucoup, au vu de ses nouvelles considérations à son égard.

« Allez, avance, Banane, plus vite tu s’ras sur pied et plus vite tu pourras m’emmerder. » lui lâcha-t-il en le poussant dans la direction depuis laquelle il était arrivé.


Laurent


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Coeur de braises
et regard de glace.

Negaï & Laurent







En silence, il reprit le chemin par lequel il était venu. Il se sentait plutôt… Ridicule. Mais au moins, c’était fait et dit. Et ça l’avait rassuré, mine de rien. Autant que cet homme pouvait le rassurer, en tout cas, et ça n’était pas grand-chose, mais déjà un petit peu de gagné. Il ne comprenait pas. Il ne se comprenait pas lui-même. Pourquoi ses espoirs s’étaient-ils concentrés sur le fait d’être accepté et aimé par ce garçon ? Il n’avait rien de spécial… Ou plutôt si, il était trop spécial. Tout son opposé ! Une vie de débauche, criminelle, pauvre, sans aucune notion de justice. Tout le contraire de la vie à laquelle il aspirait, pleine de droiture et d’honneur ! … Peut-être s’était-il tout simplement menti depuis trop longtemps. Et peut-être que les opposés s’attiraient vraiment, finalement, enfin… S’il attirait bel et bien Negaï autant qu’il lui plaisait à lui. Ce qui était loin, mais alors très loin d’être sûr.

« - Tu as intérêt à garder ça pour toi… » conclut-il dans un reniflement léger.

Bien sûr… Il avait un semblant de réputation à défendre. Déjà, il n’aurait pas dû partir comme ça. Ensuite, surtout pas venir retrouver un homme et lui faire une sorte de déclaration d’amour enflammée. Et enfin, agir comme ça, passer pour un faible… Non, c’était certain, ça devait rester entre eux. Un secret qu’ils garderaient.


©Codage by Mr. Chaotik from Never-Utopia


[FIN !]


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