Épouvantable épouvantail et affreux freux

Libre.

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Gris


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(vide)

Des arbres, des arbres, des arbres, des arbres, des arbres, des arbres, des arbres !

« Marre, marre marre ! »

Plus personne avec qui jouer. Tristesse. Forêt de malheur. Agréable et triste. Allons nous-en. Où des feuilles plus mortes crissent. Ouiii !
Le vent les fait bruisser. Doucement, plus fort, doucement.
Un village. Plein d'arbres et d'enfants, et de fées. Mmh ! Oui, une bonne idée, ici.

Crac, crac

Eeeh, non. Trop de monde. Dangereux. Rester caché pour le moment. La grosse face jaune dans le ciel. Elle s'en va derrière les cimes. Se cache aussi. Patience, patience...
La nuit. Les étoiles. Laides ! Et la lune. Belle ! Belle lune, ça oui !
Moi aussi, je suis beau !
Hors de mon antre, hors des arbres. Sortons.
Pas légers et furtifs. Je suis silencieux, comme une feuille qui tombe.

Crac crac

Nooon, ça craque trop ! Vilaines jambes.
Une maison... arbre ? Quelqu'un dort ici. Krr krr krr...
Une échelle. Savons grimper, savons grimper ! Montons !

Crac, crac

Doucement... ils dorment, ils ronflent, ils n'entendent pas, n'entendent pas ! Doux rêves dans leurs têtes, doux rêves... et bientôt un cauchemar ! Patience...
Oh... un enfant dans la maison. Tout vert. Il dort. Réveillons-le... Non ! Tais-toi !
L'égorger alors ? Oh ça oui, ouiii !
Une fée. Dort aussi sur la table. Ça se mange ? On a faim.

Crnch crnch

Mmh, bon. Comme la cendre. Même bruit que les feuilles mortes. Reviendrais en chercher d'autres. Bonnes fées.
Pas de bruit, je suis silencieux, comme une tombe.

Crac, crac

« Chuuuuuuut ! Tais-toi, j'ai dis ! Maudite jambe qui craque ! Vilaine !

- Mh... qui êtes-v... ah, AAAH !

Crac, crac

- J'ai dis chut. Et toi, arrête de couiner, sale rat de fumier !

- À... à l'aide ! »

CRAC

Déjà fini... sale petit monstre. Devait pas se réveiller. Fait nuit. On dort quand il fait nuit. Non ?
Son cou chantait mieux que le mien. Krr krr krr. Belle musique. À moi. On le garde, oui.
On s'en va, loin. Humph, lourd, lourd ! Vilain garnement. Mais joli, pour la musique.
Et quel son fait le bras, mh ?

Crac

Oooh ! Oui, très joli. On le garde ! Partons.

***

La face jaune dans le ciel. De retour. Laide et jaune comme un oeuf.
Ah, fini, les arbres ! De l'herbe, plein, plein ! Les corbeaux me suivent. Je les aime bien, eux. Crôa, crôa !
Il n'y a personne. Personne pour jouer ?

« J'ai une poupée qui traîne derrière moi, et elle regarde dans son dos. Les bras tordus, et les jambes, comme moi. Une qui ne craque plus. Dommage. Mais c'est drôle ! Très. Qui veut jouer ? »


Abel Del Naja


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(vide)

-Mais Monseigneur, vous ne pouvez pas nous expulser ainsi ! Ces terres nous appartiennent !
-Silence, gueux, et retiens bien ce que je m’apprête à te dire.

Abel venait de lever une main impérieuse, son beau visage plein d’une arrogance insupportable. Face à lui s’élevaient les bâtisses en bois d’une petite ferme, dont le passage était barré par un paysan seul et de toute évidence de condition modeste. Abel se pavanait ouvertement, vêtu d’une belle chemise en lin dont le blanc éclatait sous le soleil, ainsi que d’un pantalon violet paré de fils d’or brodés sur les côtés externes.

-Je suis riche, et toi t’es pauvre, lança grossièrement le noble. Je fais les lois et tu obéis.
-Mais-…
-Les pauvres, c’est fait pour garder la bouche étroitement fermée ! Si je souhaite réquisitionner ta ferme pendant une durée indéterminée, alors que j’en suis le propriétaire -il ne faudrait tout de même pas oublier que je te l’ai achetée- c’est là tout mon droit.
-Mais où voulez-vous qu’on aille pendant ce temps, ma femme, ma fille et moi-même ? répondit l'homme effaré.
-Prenez des vacances ? Ou allez mendier dans les rues pour voir qu’il y’a pire que vous ? Je vous rendrai votre ferme, un jour !
-Ce… ça ne se passera pas comme ça ! s’exclama le paysan qui rougissait de colère.
-Ah non ? Abel leva un sourcil, et prit sa voix la plus onctueuse. Parles-en à la cour si tu le souhaites, paysan -Abel renifla- mais la justice Hylienne sera de mon côté. J’ai tous les droits ici. Ta ferme n’est plus entièrement tienne depuis que j’en ai fait l’acquisition.

Le paysan ouvrait et refermait la bouche comme s’il souhaitait répliquer, mais aucun son ne parvint au dehors, sinon des bégaiements furieux.
Abel fit volte-face et remonta élégamment sur son cheval.


-Je te veux toi et ta famille hors de la ferme dès demain, au lever du soleil ! Salut !

Abel et son cheval délaissèrent alors un homme en proie au désarroi, immobile devant sa ferme qu’il devrait abandonner jusqu’à nouvel ordre. Le blond éclata de rire en solitaire lorsqu’il se prit à imaginer la tête de ce paysan, s’il savait ce qu’allait devenir sa ferme dès le lendemain. Elle allait devenir une cachette… pour la plus jolie proie qu’il ait jamais attrapée, mais aussi la plus sauvage.
Des jours et des jours s’étaient écoulés depuis la dernière bataille de Cocorico, dont Abel tirait une immense satisfaction malgré la défaite des Dragmire. Il avait non seulement gagné son duel, mais avait en plus mis la main sur l’une des plus importantes personnalités de l’Eglise. La prêtresse de Farore, qu’il appelait « Dame Vipère » parce qu’elle refusait obstinément de lui communiquer son prénom, n’avait plus revu la lumière du jour depuis qu’Abel la trimballait de cachette en cachette une fois la nuit tombée. On ne l’avait plus beaucoup revu au château ces derniers temps, ni même à la Forteresse Gérudo, tant la Dame lui prenait son temps.

Mais il en avait assez, de toutes ces planques précaires ! Une invitée de son rang méritait meilleur accueil. Abel préparait donc un lieu où il pourrait profiter pleinement de sa compagnie. Un lieu où personne n’entendrait ses cris de douleur.


C’était une très belle journée pour se promener avant de rejoindre sa prisonnière. Le soleil brillait dans un ciel aux nuages cotonneux, les hautes herbes se balançaient sous un vent léger, les corbeaux croassaient… Et les monstres se promenaient.


-Hein ?

Abel écarquilla les yeux lorsque son cheval approcha d’une étrange silhouette qui marchait devant eux. Un autre monstre de la plaine ? Sans doute… il portait en tout cas une enfant morte aux membres atrocement tordus sur son dos – ce qui expliquait éventuellement la présence d’autant de corbeaux. Elle était habillée en vert tout comme l’était la prêtresse.
La créature s’exprima d’une horrible voix aigüe:


-J'ai une poupée qui traîne derrière moi, et elle regarde dans son dos. Les bras tordus, et les jambes, comme moi. Une qui ne craque plus. Dommage. Mais c'est drôle ! Très. Qui veut jouer ?
-Moi, peut-être ?

Abel dépassa la créature avec son cheval, et lui barra le passage de toute sa hauteur. Même pour quelqu’un d’aussi ouvert d’esprit que lui, il ne pensait pas avoir croisé plus laide créature que celle-ci depuis des lustres. Sa tête lunaire et ses yeux vides devaient le rendre terrifiant en pleine nuit, et d’ailleurs, Abel était surpris de le voir alors que le soleil inondait sa face grisâtre de lumière. On aurait dit un squelette d’enfant malformé.

-Ta poupée ne craque plus ? Essaye de me faire craquer, moi.

Comme s’il comprenait les intentions de son cavalier, le cheval eut un mouvement de recul. Prévoyant une attaque imminente, le noble étranger remit pied à terre, la main posée sur la garde de son épée, et regarda le monstre au niveau de ses grands yeux. Avant qu’Abel ne frappe soudain dans ses mains pour provoquer la créature, et fasse un mouvement de côté pour commencer le jeu avec elle.

Abel allait la saigner non sans grand plaisir.


Gris


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(vide)

Crac

« Hein ? Quoi ? Qui ?
Tu veux jouer, toi, grand dadet ? »


Drôle de type. Avec un cheval. Ils n'ont pas peur. Bizarre.
Mais il veut jouer ! Ouiiiiiii !
Il veut craquer, le grand dadet. Il a une grosse aiguille. Tranchante. Elle nous fait peur. Je veux pas jouer avec l'aiguille !

« Tricheur ! Ta vilaine aiguille pointue ne me plaît pas ! Lâche-la ou va-t-en ! Tricheur ! On n'en a pas, nous ! »

Pas de castagne, on ne sait pas y jouer. Et pas drôle, ça.
On préfère tordre le cou des enfants qui dorment.

À quoi va-t-on jouer ? Réfléchissons, réfléchissons...
S'asseoir pour réfléchir, c'est mieux. L'herbe s'affaisse et flétrit sous mes os. Amusant.
Le jouet dans mes bras squelettiques. Belle poupée. Je fais craquer ses doigts. Phalange après phalange. Une par une. Est-ce qu'il aime cette musique, lui aussi ?
On se lève brutalement.

Crac

« Est-ce qu'il aime la musique, le grand dadet ? »

Voix sifflante. Râle aigu.
Je lui jette ma poupée à ses pieds. Pliée en deux. Les vertèbres chantent joyeusement.
Prêter mon jouet, quelle chance il a, lui. On est gentil. Hein, qu'on l'est ?
Il comprend ? Non ? Mh. Personne ne joue aux mêmes jeux que nous. Peut-être.

Murmure silencieux.

« On va la faire craquer. Krr krr krr... Celui qui fait le plus beau craquement a gagné.
Je perds, tu me fais craquer. Tu perds et c'est toi qui va craquer ! »


Sourire carnassier, figé. On va bien s'amuser. Ouiii !

« Un seul essai. Sinon, perdu. Tu commences ! »


Abel Del Naja


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(vide)

Les énormes yeux globuleux de la créature s’attardèrent un instant sur l’épée qu’Abel tira de son fourreau.

-Tricheur ! Ta vilaine aiguille pointue ne me plaît pas ! Lâche-la ou va-t-en ! Tricheur ! On n'en a pas, nous !
-Oh, très bien, très bien !
rétorqua Abel avec mauvaise humeur tout en rangeant son épée.
-Est-ce qu'il aime la musique, le grand dadet ?

La créature de vilaine apparence faisait maintenant craquer les doigts de la Kokiri dans un bruit sinistre. Etait-ce cela qu’il nommait "musique" ?
Il jeta la pauvre gamine aux pieds d’Abel.


-On va la faire craquer. Krr krr krr... Celui qui fait le plus beau craquement a gagné. Je perds, tu me fais craquer. Tu perds et c'est toi qui va craquer ! Un seul essai. Sinon, perdu. Tu commences !

Abel tâta le corps mort du pied, une moue clairement dégoutée sur son beau visage, et il se demanda soudain ce qu’il fichait là. Il n’avait jamais demandé au Ciel de lui envoyer un monstre amateur de jeux morbides usant de petites filles mortes ! Non pas que l’idée le dérangeait, mais enfin, il avait d’autres choses à faire ! C’était un homme très occupé !
Cependant, le monstre était ostensiblement d’un mental dérangé, et Abel ne savait pas encore jusqu’à quel point il pouvait se révéler dangereux. Par précaution, mieux valait jouer son jeu avant de songer à passer son chemin.


-Tu veux un beau craquement, hein ? dit Abel comme s’il proposait une glace à un enfant.

Ses mains aux ongles soigneusement limés ramassèrent le petit cadavre en le saisissant par la tête, ses doigts fouillant ses cheveux blonds presque blancs. Puis, sans aucune répulsion ni même aucune hésitation, Abel fit tournoyer la tête de la gamine sur son cou de sorte à provoquer un craquement sonore.
La Kokiri fut à nouveau jetée au sol sur le ventre, bien que son visage inanimé soit tourné vers le ciel.


-J’ajoute une règle, dit Abel avec une lueur inquiétante dans le regard. Si tu perds, tu viens en promenade avec moi.

Le monstre pourrait s’avérer utile, notamment avec certains paysans qu’il n’avait pas encore terrorisés pour obtenir des terres supplémentaires. Abel ne s’attendait cependant pas à ce qu’il le suive sans résistance, et il gardait son épée prête à fendre l’air – si elle ne fendait pas le crâne rond et gris du petit épouvantail lui faisant face.
Le noble préparait d’autres arguments au cas où.


Gris


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(vide)

Une promenade ? Krr krr... on aime bien les promenades.

CRRRAC

« Oh oh...
Oh oh oh !
Ohhhhhhh !!!
»

Magnifique. Somptueux. Grandiose. Immonde ! Quelle musique !
Claquement de dents intempestifs. Tressaillements.
Mes os frissonnent, ils brûlent d'excitation jusqu'à la moelle !
Ce grand dadet, un artiste.

« Êtes-vous mélomane, messsssssire ? »

Je fais ramper ma carcasse vers celle qui gît dans l'herbe. La regarde.
Elle est triste.
Ce n'est pas bien.

Sourire carnassier.

Il ne faut pas être triste.

On n'aime pas ça ! On préfère quand nos jouets sont joyeux !

« Mon tour ! Mon tour de jouer ! Ouiiiiiii ! »

Tu vas t'amuser.
Son regard vers le ciel. Pâle, comme les vieux rochers des montagnes solitaires.
Mes articulations manuelles squelettiques sur sa bouche, frêle, petite.

Mes doigts s'insinuent, vils et insidieux comme des serpents, dans son bec de gamine.
Sa bouche s'ouvre comme celle d'une marionnette, inanimée.
Maintien de la mâchoire supérieure.
L'autre main sur la mâchoire inférieure...

CRRRAC

« Ooohhh ! Voilà un beau sourire ! Regarde ! Elle n'est plus triste maintenant !
Krr krr... elle apprécie notre musique ? Hein, qu'elle apprécie ? »


Ssss... le grand dadet est doué. Son craquement a duré plus longtemps.

Les corbeaux se sont rapprochés. Eux aussi, la musique leur plaît. Et on aime celle qu'ils font.
Crôa crôa !

« Le grand dadet a gagné ! Ssss... très fort, ça. Alors on va se promener avec lui, oui ? »

On trouvera bien d'autres jeux. En chemin. Krr krr...