« Ne vous dérangez pas, le temps ne fait que passer. »

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Llanistar van Rusadir


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(vide)

Ce jour là, Llanistar avait cru mourir, par deux fois. Ce jour là, il avait combattu au delà de ce qu'il était capable de supporter et avait dû abdiquer lors des évènements finaux, à bout de forces. Ce jour là néanmoins, il se sentait mieux que jamais depuis plusieurs années. Le gout âpre et acide du combat, le son vivifiant de l'acier contre l'acier, la frénésie qui s'emparait de chaque combattant lorsque les épées étaient dégainées...Tout cela lui avait manqué. Elle était loin à présent cette époque où il menait plusieurs légions à la bataille en chargeant, devant la première ligne en hurlant le cri de guerre des Rusadir. Disparu le temps des bannières dressées, de la gloire auprès du peuple et du respect de ses hommes. Et cela lui manquait, il le savait à présent.
Enfermé dans sa mélancolie, sa déprime, il n'avait cessé de se poser la question : pourquoi suis donc si malheureux ? Et quand bien même la perte de son unique amour continuait de l'affecter, il avait conscience qu'autre chose le travaillait au plus profond de lui même. Maintenant, il savait. Le premier jour de son exil, l'amoureux et le général étaient tous deux morts et Llanistar ne s'était jamais trouvé de meilleurs rôles dans la vie. Son enfance n'était pas heureuse, être mage ne lui avait jamais plu et il n'avait jamais été seigneur ni père. Rien ne restait plus de lui qu'une épave, dérivant sur les flots de sa vie alors qu'il avait eu un jour, un temps le sentiment d'être le seigneur des mers. Et voilà que pour la première fois depuis une éternité, le nordique regardait sereinement le soleil se coucher.

Monté sur l'une des rares montures encore en état de supporter le voyage, Llanistar tenait le chancelier Orpheos devant et contre lui de sa main restante afin de l'empêcher de tomber. L'homme ne s'était pas éveillé à la suite de son combat et le nordique avait refusé de laisser à d'autres le soin de s'occuper de lui. Orpheos l'avait sauvé des ombres et une dette se devait d'être payée. Il avait donc commencé le voyage sitôt qu'il s'était senti en état de monter sans risquer de défaillir, laissant le prince et quelques hommes à la citadelle avec comme recommandations de quitter le lieu aussi rapidement que possible. Llanistar avait été le premier étonné lorsqu'il avait donné ses ordres. De quel droit pouvait il commander à des soldats ? Mais aucun d'entre eux n'avait émit d'objection et tous s'étaient exécutés sans attendre.
Et tandis qu'il dominait le désert de dunes sans fin, le calme l'avait envahit et même cette région inhospitalière lui apparaissait comme magnifique. Ses inquiétudes étaient pour son compagnon, qui n'avait pour l'instant pas encore montré de signes d'un réveil imminent. Dans quelles brumes oniriques pouvait bien se trouver Orpheos à cet instant ? Qu'avait il subit lorsqu'il s'était aventuré dans les ombres ? Sans doute le chancelier répondrait il à cette question mais il fallait encore regagner le château.

Llanistar fit signe à la colonne des Hyliens de continuer à avancer sur la piste de pierre. Car si Ganondorf avait su rendre le voyage d'aller ardu, son départ de la citadelle rendait le retour aisé. En effet, depuis le sanctuaire où le spectre les avait guidé jusqu'à la citadelle serpentait une large route composée de lourdes et imposantes dalles de pierres gravées. L'expédition reprenait donc la direction du château. Meurtrie, elle pouvait au moins se réjouir d'avoir réussit à libérer le prince...Néanmoins la peur tiraillait chaque combattant. La peur que la princesse n'ait été touchée par l'attaque sournoise de leur ennemi. Mais malgré cette angoisse, ils savaient que courir ne servirait à rien. Ils devaient faire au plus vite sans épuiser leurs forces. C'est dans cet esprit que la compagnie traversa puis sortit du désert à la nuit tombée. Après un sommeil court et agité pour beaucoup, ils reprirent leur route à travers la vallée gérudo puis la plaine d'Hyrule.

Le troisième jour se levait quand ils arrivèrent enfin au bourg d'Hyrule. Le pont levis était baissé pour leur passage et sitôt qu'ils entrèrent, plusieurs soldats vinrent aux nouvelles, s'enquérant d'un ami parti à l'assaut ou de nouvelles plus générales. Llanistar repéra ce qu'il devina être un officier et s'approcha de lui. Dés qu'il vit Orpheos, toujours inconscient sur la même selle que le nordique, ce dernier l'interpella.


"M'lord ! M'lord ! Etes vous Llanistar van Rusadir ?"
Bien qu'étonné qu'un hylien puisse le connaître, le nordique répondit sans perdre contenance.

"C'est bien moi officier. Es-ce vous qui commandez ici ? Le soldat hocha la tête et Llanista poursuivit.Bien. Je veille sur le chancelier, tombé dans le sommeil au cours du combat. Pouvez vous nous ouvrir les portes du château qu'il soit mit en sécurité et soigné ?"

Nouveau hochement de tête et l'officier transmit aussitôt l'ordre à ses hommes de former une ligne au devant de la compagnie pour faciliter leur arrivée à la forteresse royale. Llanistar essaya de retenir le visage de cet homme. Dans les mois à venir, Hyrule aurait besoin de soldats prompts à réagir et vifs d'esprits. Ce soldat en était un. Et le nordique pensait bien avoir affaire avec lui prochainement. Le cortège se mit donc en branle et sans qu'il en eut conscience, Llanistar se retrouva à sa tête. Alors qu'ils arrivaient à la place du marché, les habitants s'amassèrent autour d'eux et le nordique tenta de cacher dans son manteau sa blessure à la main. Nul n'avait besoin de voir cette marque de faiblesse. Pour eux, il était un noble, droit et fier sur sa monture. C'était tout ce qu'ils devaient voir. Ni sa fatigue, ni ses blessures. Un symbole se doit d'être glorieux et Llanistar s'efforçait de se souvenir comment l'être.

Dés qu'ils arrivèrent dans la première cour du château, la compagnie se dispersa. Certains suivirent des officiers pour faire leur rapport, d'autres semblèrent se réjouir à l'idée d'un repos bien mérité, d'autres repartirent vers la ville dans l'idée de se changer les idées et d'autres allèrent vers les jardins royaux en quête de calme. Llanistar démonta de cheval et, prenant orpheos dans ses bras malgré son unique main, se fit mander un médecin pour le chancelier. Ce dernier arriva sans délai et lui demanda de le suivre jusqu'au appartement de l'homme inconscient. Là, le nordique l'installa sur son lit et il s'assit dans un siège confortable qui se trouvait là. Il prit quelques instants pour se détendre pleinement en fermant les yeux. Depuis combien de temps n'avait il plus sentit le confort d'un pareil trône ? Une année, il lui semblait. Plusieurs jours de cheval ont le don d'épuiser n'importe quel homme et Llanistar n'était pas des plus endurants. Quand il sentit les douleurs de ses crampes s'apaiser, il prit le temps d'observer l'antre du chancelier.
La pièce était peu chaleureuse ; ni le sol, ni les murs de pierre n’étaient décorés. Droit devant l’entrée, seule une grande harpe dorée avait été placée près de la fenêtre, d’où le musicien pouvait admirer la vue du Mont du péril au loin. Le lit à baldaquin où il reposait faisait face à une cheminée dont le bois restait inusité. A gauche de celle-ci se trouvait une commode richement ornée ; à droite, le siège sur lequel il était assis, et devant, un guéridon qui croulait de livres poussiéreux. Des livres qu’il n’avait peut-être pas le courage de parcourir, qu’en savait-on.

Lorsque le médecin eut finit de l'examiner, il déclara qu'il allait chercher de quoi le remettre sur pieds et Llanistar accepta de rester pour veiller sur lui. D'après ce qu'il avait comprit, la princesse était occupée. Elle aurait surement le temps de l'accueillir plus tard. Il aurait surement à parler avec elle. Une idée lui trottait dans la tête. Une idée folle mais à laquelle il tenait. Avec lenteur il s'approcha du lit et examina son occupant. Sans aucun doute, Orpheos était beau. Plus encore même. Ce genre d'homme doté par les dieux d'un visage parfait que le sommeil rendait comme innocent. Et tandis qu'il observait son compagnon, Llanistar ne pouvait s'empêcher de se demander.


*Qu'as tu bien pu faire pour te trouver ainsi, béni des dieux ?*

Le regard du nordique descendit vers sa main...Ou plutôt là où elle aurait dû être. Tous, ils avaient laissé une partie d'eux même à la citadelle, ce jour là. Un sacrifice pour chacun. Le sien était élevé mais il n'était pas mort. Et tant que la vie subsistait, l'espoir ne mourrait pas. Et Llanistar ferait tout pour qu'il ne meurt jamais.


Orpheos


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(vide)

Il était derrière sa table de bureau. S’était assise en face une vieille dame encapuchonnée, dont la blancheur des yeux et des cheveux témoignaient de son âge avancé. Elle portait, aussi, un pendentif sur sa cape de voyage noire de saleté.

-Vous désirez ? demandait-il.
-Marquer notre union bien évidemment, répondait la vieille dame.

Tout à coup, il se sentait paralysé sur son fauteuil. La vieille femme se leva à ce moment de son siège, et contourna le bureau pour venir s’emparer de ses épaules, avec une vivacité insoupçonnée. Ses mains décharnées l’enserraient avec trop de force, et ses yeux laiteux captivaient bien trop les siens : il ne pouvait pas s’échapper.

-Vous avez scellé un pacte…
ricanait la vieillarde. Avec moi !

Ses lèvres desséchées s’étirèrent en un sourire édenté. Toutes les rides de son visage se creusèrent alors, et une haleine de tombeau s’exhala de sa bouche. Lui était soumis à son emprise, le regard captivé par le pendentif qui se balançait à son vieux cou. Une triforce noire.

-Et jamais plus, désormais, je ne vous quitterai… murmura-t-elle.

Puis, tandis que les ténèbres emplissaient la pièce, la sorcière se pencha sur ses lèvres pour l’embrasser…


-Lâchez-moi !


Le chancelier s’était écrié, brusquement, en se réveillant d’un bond sur son lit.


Il mit quelques instants à réaliser. A réaliser qu’il se trouvait assis sur son propre lit, et au fond de sa propre chambre. Il était donc au château d'Hyrule ? Depuis quand ?
Le cœur du chancelier battait la chamade, et des sueurs froides avaient commencé de perler sur son front. Ce rêve, ce n’en était pas un. Les Ombres qu’incarnait cette femme l’avaient poursuivi depuis la citadelle noire…

La citadelle… Dun !


-Dun ?!

Non, ce n’était pas lui. L’homme qui se tenait à côté de sa couche n’était pas le prince, mais Orpheos l’avait déjà vu quelque part…

-Vous… vous étiez avec moi face à Ganondorf…


C’était l’un des généraux qui avait mené l’expédition, là-bas. Celui que le musicien avait tiré des Ombres, dans la salle du trône Gérudo, et celui qui avait gelé les Flammes. En le voyant, le chancelier fut saisi de honte : cet homme l’avait vu inconscient et affaibli. Il n’oubliait pas sa place de dignitaire, ni qu’un dignitaire était symbole de pouvoir, et que de tels symboles ne devaient montrer aucun signe de faiblesse.

-Depuis combien de jours avons-nous quitté la citadelle, et sommes arrivés ici ?
demanda Orpheos, qui avait l'impression d'avoir tout manqué des évènements. Que s’est-il passé dans la salle du trône, après la disparition des Ombres ? Et le prince Dun Loireag, est-il sauf ? Je veux un rapport complet.

Mais le chancelier se rendit vite compte qu’être torse nu dans son lit, devant un général, pouvait le rendre encore moins crédible dans son rôle de dirigeant. Lui qui se tenait toujours très bien aux codes vestimentaires qu’il détestait pourtant, à l’instar de la princesse Zelda.
Et puis ses yeux verts partirent vers le moignon du soldat. Il ressentit alors une gêne supplémentaire : Orpheos, dont le torse malingre et les bras peu épais se couvraient de sueur, suite à ses cauchemars, était indemne de toute blessure. Cet homme avait laissé une main dans son combat, mais n’en était pas tombé inconscient comme lui.


-Je veux aussi votre nom, soldat, demanda ensuite Orpheos avec respect.


Llanistar van Rusadir


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(vide)

Llanistar recula d'un pas dés qu'il vit les yeux du chancelier s'ouvrir et son corps se redresser sur le lit. Une tension se lisait sur ses traits, signe évident que son sommeil avait été plus agité qu'il y paraissait. Le nordique connaissait les tourments qui pouvait infliger un cauchemar pour peu qu'il soit crédible et persistant, il en avait déjà subit bien assez. Ne voulant pas paraître intimidant à l'homme torse nu, il recula d'un pas et attendit que ce dernier reprit ses esprits, le visage fermé à toute émotion. Llanistar ignorait ce que son compagnon avait subit dans les ombres, à peine avait il des soupçons à ce sujet, et s'éveiller d'un sommeil si long ne se faisait pas aisément.

-Vous… vous étiez avec moi face à Ganondorf… Dit le jeune homme avec difficulté. Le nordique pouvait sentir encore chez lui de la tension, quand bien même sa voix avait tout d'un chanteur, belle et élégante.

Il hocha la tête. Effectivement, ils avaient combattu le même ennemi. Et plus important, ils l'avaient combattu ensemble. Là où certains combattants avaient fait cavaliers seuls, Orpheos avait su suivre ses ordres quand il l'avait fallu et Llanistar se plaisait par moments à penser qu'ils avaient eu leur rôle dans la chute du spectre. Un rôle certes moins important que celui tenu magistralement par le Héros du Temps mais qui avait compté. En vérité il s'accrochait à cette pensée, refusant l'idée que sa main lui avait été volée pour rien. Plusieurs soldats le remerciaient encore d'avoir permit aux soldats de tenir dans le hall mais lui savait que cette victoire était la leur. Lui n'avait réussit qu'à prendre des risques inutiles et se faire blesser. A une époque, ça ne serait jamais arrivé.


-Depuis combien de jours avons-nous quitté la citadelle, et sommes arrivés ici ? Que s’est-il passé dans la salle du trône, après la disparition des Ombres ? Et le prince Dun Loireag, est-il sauf ? Je veux un rapport complet.

Llanistar sourit discrètement. Visiblement le chancelier le prenait pour ce qu'il n'était pas. Un officier, un général peut être même ! Pourtant le nordique ne portait pas d'uniforme ni d'armure aux couleurs d'Hyrule et ses traits étaient trop typiques de ses montagnes natales pour être confondus avec les habitants de ce pays, aux oreilles pointues. Cette méprise était surement due à son attitude lors de l'assaut, attitude parfaitement hors la loi. Si le chancelier était à cheval sur les règles, il pourrait bien le faire emprisonner. Un étranger se permettant de donner des ordres à des soldats, ça ne devait jamais s'être vu dans ce pays. La dernière fois qu'un cas similaire était arrivé à Artensyr, il y avait eu un pendu de plus.

-Je veux aussi votre nom, soldat.

Les deux hommes se regardaient fixement. Llanistar tentait de percer le chancelier, de lire en lui quel genre de noble il pouvait être. Le genre qui le ferait pendre après l'avoir torturé pour son crime ou bien le genre à le féliciter pour l'aide qu'il avait pu apporter. Mais, et cela le troubla beaucoup, il fut incapable d'y lire quoi que ce fut. Orpheos possédait en lui un pouvoir étrange qui le protégeait de toute intrusion. Devant se résigner à obéir, il fit signe au chancelier de s'apaiser et il s'assit au pied du lit. Le nordique prolongea le silence de quelques instant avant de répondre, enfin. Il n'était pas dans l'armée, mais les ordres d'un chancelier s'appliquaient à tous, nobles et roturiers.

-Je m'appelle Llanistar van Rusadir. C'est moi qui vous ai transporté de la citadelle jusqu'ici, au château d'Hyrule. Vous êtes en sécurité à présent. Notre départ date de quatre jours environ, bien que d'autres membres de la troupe soient rentrés avant nous. Quand à ce qui s'est passé...C'est assez long à raconter. Essayer de ne pas perdre le fil. Il commença le récit des évènements. Le recul des ombres, la mort du spectre, la libération de Dun, le piège de Ganondorf et leur retour. Ayant remarqué l'état de faiblesse d'Orpheos, Llanistar racontait lentement, sans omettre les détails les plus importants. Puis il poursuivit, Nous sommes ici depuis moins d'une heure. Visiblement Ganondorf n'a pas fait de dégâts ici mais j'ai entendu le mot de guerre. Quand à Dun, les dernières nouvelles que j'ai de lui datent de notre départ. Il allait bien et s'apprêtait à nous suivre. Sans doute quelqu'un viendra t'il rapidement vous informer de la situation. En attendant, reposez vous. Et enfin, la gorge serrée et la voix faible sous la tension, d'ajouter Et je ne suis pas un soldat, lord Orpheos.

Son regard se jeta dans les yeux du chancelier, beau comme un dieu, tentant d'y déceler un indice sur sa réaction.


Orpheos


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Dès qu’Orpheos lui eût demandé un rapport, l’officier parut quelque peu gêné. C’était ainsi ce qu’il interprétait, à travers l’étrange expression que le militaire afficha.

Les deux hommes se jaugèrent intensément. Orpheos avait la faculté de déceler les traits principaux d’une personnalité à travers le regard des autres, mais il voyait bien peu de choses en celui du soldat. Solitude et détermination restaient les premières entités qu’il distinguait dans ses yeux gris un peu troubles. Son port et son manteau était ceux d’un noble, mais celui-là venait de loin. Ses oreilles normales attestaient de son origine étrangère. Grand et svelte, l’homme vint pourtant se mettre à la hauteur du chancelier en s’asseyant au pied du lit.


-Je m'appelle Llanistar van Rusadir,
déclara-t-il après un long moment d’hésitation. C'est moi qui vous ai transporté de la citadelle jusqu'ici, au château d'Hyrule. Vous êtes en sécurité à présent. Notre départ date de quatre jours environ, bien que d'autres membres de la troupe soient rentrés avant nous. Quand à ce qui s'est passé...C'est assez long à raconter. Essayez de ne pas perdre le fil.

Le récit des évènements manqués par Orpheos débuta alors. Llanistar eut même la sympathie de lui parler lentement, pour que toutes les informations soient assimilées par son cerveau embrumé, tout en lui donnant lieu de se satisfaire de la réussite de l’opération menée à la salle du trône Gérudo.

-Nous sommes ici depuis moins d'une heure. Visiblement Ganondorf n'a pas fait de dégâts ici mais j'ai entendu le mot de guerre, poursuivait Llanistar. Quant à Dun, les dernières nouvelles que j'ai de lui datent de notre départ. Il allait bien et s'apprêtait à nous suivre. Sans doute quelqu'un viendra t'il rapidement vous informer de la situation. En attendant, reposez-vous.

Orpheos était très satisfait de voir qu’il pouvait effectivement se reposer, n’étant arrivé au château qu’en ce jour, et ayant sauvé Dun après avoir fait battre les Croisés en retraite. Il avait hâte de retrouver son ami, le Prince.
Mais voyant que l’homme souhaitait ajouter quelque chose, Orpheos se tut. Rusadir, qui possédait déjà un teint aussi clair que lui, avait soudain blanchi.


-Et je ne suis pas un soldat, lord Orpheos.


Les regards se croisèrent une fois encore. Orpheos comprenait où ce Llanistar voulait en venir, et d’où partait sa crainte.

-L’armée hylienne est composée d’une partie d’étrangers qui n’ont pas les oreilles pointues, comme vous, mais vous ne possédez aucun attribut de cette armée sur vos habits. Comme vous le sous-entendez, vous n’en faites donc évidemment pas partie. Le chancelier marqua une pause, prenant le temps de se remémorer le comportement de Llanistar chez Ganondorf. Vous vous êtes pourtant permis de diriger les troupes envoyées à la citadelle noire ; aux côtés, notamment, de la Gérudo Nabooru l’exaltée. Et devant Ganondorf qui avait laissé place à son spectre, je vous ai laissé me donner des ordres…

Orpheos planta ses yeux émeraude dans ceux du soldat étranger, et l’ombre d’un sourire sembla se dessiner sur ses lèvres, très indistincte sur son visage impassible.

-Et j’ai bien fait,
le rassura-t-il d'une voix toujours mesurée mais plus amicale. Votre aide nous a été capitale, à tous, et je ne peux que passer outre votre attitude – normalement répréhensible par la loi, comme vous vous en doutez. Au nom du Royaume d’Hyrule, Llanistar Van Rusadir, je vous remercie. Et s’il-vous-plait, je ne suis pas un lord… Je ne suis qu’un homme égaré ici, murmura Orpheos avec un rictus très apparent cette fois. M’appeler chancelier reste le plus simple pour tous.

Du coin de l’œil, le dignitaire vit un serviteur passer l’entrebâillement de la porte. Orpheos lui fit signe d’entrer : le garçon tenait entre ses mains une tunique de lin. Il la lui donna sans un mot et ressortit tout aussi discrètement, pendant que le musicien recouvrait son torse de la tunique. Il était trop maigre pour être montré à un soldat.

-Ce royaume et moi-même -puisque vous m’avez ramené du désert- avons une dette envers vous, reprit-il d’une allure plus digne désormais qu’il était vêtu. Quelle que soit votre demande, elle sera exaucée. Mais je me demande bien ce qu’un homme d’Artensir peut bien faire en nos contrées du sud…

Sans doute Llanistar ne s'attendait pas à voir ce nom sortir de sa bouche ; le chancelier s’amusa intérieurement de sa réaction. Le nordique aux traits typiques de son pays ne le réalisait pas encore, mais il faisait face à un grand voyageur, qui ne s’occupait pas des arts et de la culture en Hyrule pour rien.


Llanistar van Rusadir


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Le regard d'émeraude du chancelier transperça Llanistar. Pour la première fois, le nordique parvenait à lire quelque chose chez son compagnon de bataille et il y a capta de l'amitié. Un embryon à peine mais qui pouvait promettre plus à l'avenir. Plus troublé par la confiance d'Orpheos qu'il ne le montrait, il écouta avec attention ce dernier évoquer son "crime" lors de l'attaque de la citadelle...Si l'on pouvait vraiment parler d'attaque. Ni béliers pour enfoncer les portes ni échelles pour rejoindre le haut des murs immenses de la forteresse du désert : le Seigneur du Malin leur avait ouvert ses portes, en grand et avec l'espoir qu'ils y fonceraient. Ce qu'ils avaient fait sans se poser de questions, ni envisager d'autres solutions. Comment l'auraient ils pu ? Grâce à son otage, Ganondorf avait un coup d'avance sur eux. C'était à lui de choisir son terrain et la manière de les accueillir. Avec une armée plus puissante, la monarchie Hylienne aurait pu le forcer à l'affrontement et raser son repaire...Mais l'armée de ce pays n'existait pas. Elle était comme l'amitié dans les yeux du chancelier : un bourgeon ne demandant qu'à éclore. Llanistar l'avait vu dans le regard des soldats lorsqu'il avait prit la liberté de leur donner des ordres : ils n'attendaient que cela. Tous, ils désiraient un chef capable de les guider. Et si il avait enfreint la loi, le nordique avait agit par instinct. Comme si une résurgence du passé s'était brusquement imposé à lui, le poussant à agir comme il l'aurait fait du temps de sa gloire passée, sous les bannières d'Artensyr.

-Et j’ai bien fait.

Llanistar se détendit. Si un chancelier répondait de lui, il ne risquait plus rien. Après avoir contemplé ses pieds pendant quelques instants de doutes avant la réponse d'Orpheos, il releva les yeux et recroisa son regard. Il fut comme pétrifié pour le souvenir que cela lui fit remonter. La dernière fois qu'il avait vu de pareils yeux, c'était sur le visage de Saad Ibn Naaman, lorsqu'ils se tenaient côte à côte, tous deux sur le pont du navire qui l'amenait de son pays natal à Hyrule pour fuir la tyrannie et les traitres qui avait voulu sa mort. Il chassa cette pensée. Saad appartenait au passé, pour l'instant. Aujourd'hui seul comptait Hyrule et son peuple.
C'est alors qu'un serviteur vint apporter de quoi s'habiller au chancelier. Du lin, pas le plus luxueux mais le tissu très fin laissait deviner une musculature discrète qui avait de quoi émouvoir de nombreuses dames à la cour. Les ragots n'étaient pas un intérêt de Llanistar mais il devina que le chancelier devait être au coeur de nombres de discussions de femmes au château. Là où les palais des Emirs de Markand comptaient autant d'amateurs d'hommes que de femmes des deux sexes, le nordique avait cru deviner un certain fondamentalisme dans le culte des déesses qui réprimaient de telles pratiques. En tout cas, on n'en parlait point. Bien qu'il eut écouté tout ce que le chancelier lui disait d'un oreille, ces dernières phrases le sortirent de sa rêverie.


"Ce royaume et moi-même -puisque vous m’avez ramené du désert- avons une dette envers vous. Quelle que soit votre demande, elle sera exaucée. Mais je me demande bien ce qu’un homme d’Artensir peut bien faire en nos contrées du sud…"

Llanistar perçu chez lui plus d'assurance. Une certaine noblesse, bien différente de l'arrogance de certains imbéciles bien nés. Celle du chancelier résultait plus d'une solide expérience de hautes fonctions, ce qui n'était pas pour déplaire au nordique. Du criminel ou du baron arrogant, il préférait largement le premier et voir un non-noble être parvenu aussi haut dans les affaires d'un état lui plaisait. Néanmoins le sous entendu qu'induisait cette dernière remarque lui noua la gorge. Il avait sauvé cet homme, tout comme ce dernier l'avait sauvé des hommes, mais un chancelier pense au Royaume avant tout. Si Llanistar lui disait la vérité, serait il livré au Kairn en guise de cadeau diplomatique ? Rares étaient les notables qui voyaient d'un bon oeil les hommes déclarés traitres à leur patrie. Troisième échange de regard. Il décida de lui faire confiance.

"Chancelier...Je tiens à vous rappeler un fait. J'ai prit soin de vous lorsque vous étiez inconscient, c'est vrai...Mais vous m'avez vous même sauvé auparavant. Lorsque j'ai franchit les ombres de la salle du Trône de Ganondorf, celles ci ont su me parler, me séduire. Elles m'avaient presque endormies quand je vous ai sentit arriver. Dans un dernier effort j'ai accroché votre bras et m'y suis tenu. Et vous m'avez guidé en dehors de cette tombe qu'on m'avait creusé. Je vous dois également la vie. Je pense que nous sommes quittes. Il sourit. Sincèrement et avec amitié. Ne pas révéler la vérité l'aurait placé en position de force mais il était las des mensonges et des calculs politiques. Il avait soif de franchise et de fraternité. Puis son regard revint à ses bottes et il déclara, plus gravement. Artensyr est en effet fort loin d'ici mais j'y suis venu poussé par une nécessité : rester en vie. Si vous demandez à un homme de mon continent si il connait le nom de Rusadir, vous le verrez blêmir d'effroi. Non pas que je pense inspirer du dégout à mon peuple mais... Je suis le pire ennemi du Kairn Jehovaren, le tyran de ces contrées. Mentionner en bon termes mon nom est puni de mort. J'ai été déclaré traitre à mon pays pour avoir aimé ma soeur et un autre homme, pour avoir été un général trop aimé du peuple et de ses hommes et enfin pour ne pas apprécier tant la guerre que mon souverain. Hyrule a été bon envers moi. Je veux lui rendre la pareille."

Sans vouloir observer la réaction du chancelier, trop angoissé à l'idée qu'elle soit hostile, il se leva du lit et s'approcha de la fenêtre. Le ciel s'était couvert depuis leur entrée dans la ville et une fine pluie tombait déjà, obligeant les promeneurs des jardins à s'abriter. Quelque chose n'allait pas et il le savait. Si le Prince les avait suivit sans rencontrer d'obstacle, il les aurait déjà rejoins. Or ça n'était visiblement pas le cas...Et les éclairs qui tombaient au loin au sud ouest ne lui évoquaient rien de bon.
Llanistar était un mystique. Bien que limité à une forme de magie, la glace, il ressentait les flux arcaniques parcourant la Terre et le Ciel et savait déceler les anomalies des phénomènes naturels. Cette tempête n'était pas pour le rassurer. L'horloge sonna en même temps que le tonnerre grondait au dehors et il réprima un frisson. Décidément, il n'aimait pas cela. Soudain la porte s'ouvrit en grand pour laisser passer le médecin. Le nordique sursauta aussitôt puis s'en voulu. Il n'était plus un gamin...Et pourtant il ne parvenait pas à s'apaiser.


Orpheos


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Orpheos avait bien visé : le regard de Llanistar, qui se dirigea un instant de plus vers le sien, s’était éclairé d’un intérêt soudain. Et puis, très vite après, le gris de ses yeux parut de nouveau s’assombrir.

-Chancelier,
hésita-t-il. Je tiens à vous rappeler un fait. J'ai pris soin de vous lorsque vous étiez inconscient, c'est vrai... Mais vous m'avez-vous même sauvé auparavant. Lorsque j'ai franchi les ombres de la salle du Trône de Ganondorf, celles-ci ont su me parler, me séduire. Elles m'avaient presque endormi quand je vous ai senti arriver. Dans un dernier effort j'ai accroché votre bras et m'y suis tenu. Et vous m'avez guidé en dehors de cette tombe qu'on m'avait creusé.

Les pensées du chancelier firent un voyage à travers sa mémoire, à la recherche des images concernées. Et, en effet, il revit celles où Llanistar lui agrippait le bras. A la suite de Link, ils s’étaient sortis des Ombres en ayant cru qu’ils en resteraient prisonniers pour toujours. Il n’osa tout de même pas lui dire qu’à ce moment, il n’avait pas ressenti l’emprise de sa main sur son bras. Orpheos avait perdu chacun de ses sens dans l’obscurité, et leur effet avait vraisemblablement été différent sur lui que sur Llanistar.

-Je vous dois également la vie. Je pense que nous sommes quittes.

Llanistar éclaira son visage sévère d’un sourire sincère. Orpheos acquiesça seulement, mais avec reconnaissance.
Et puis, se refaisant grave, le nordique s’expliqua sur les raisons de sa présence en Hyrule. Des exilés politiques comme lui avaient déjà comparu à la cour d’Hyrule, qu’on savait menée par la réputée douce et juste princesse Zelda, mais ils n’étaient jamais aussi francs que Rusadir devant Orpheos.


-J'ai été déclaré traitre à mon pays pour avoir aimé ma soeur et un autre homme, pour avoir été un général trop aimé du peuple et de ses hommes et enfin pour ne pas apprécier tant la guerre que mon souverain. Hyrule a été bon envers moi. Je veux lui rendre la pareille.

Tous ces mots résonnèrent dans sa tête, pendant que Llanistar partait contempler le paysage par la fenêtre de sa chambre. Orpheos avait également eu peur d’être puni pour un amour coupable, il y’avait bien longtemps, alors il ne comprenait que trop bien la détresse de l’homme. Il savait que ces choses restaient incontrôlées, et que c’était bien cela, qui les rendaient aussi belles que difficiles.


-Je ne peux, il est vrai, approuver la relation incestueuse que vous avez menée…
commença Orpheos, hésitant. Il ne l’approuvait réellement pas, mais il ne blâmerait jamais personne pour l’amour, qu’on ne contrôlait décidément pas. Mais cela ne concerne que vous, et cela s’est passé non pas en Hyrule mais en Artensyr ; ce ne serait même pas à nous de vous punir.

Le médecin entra juste à ce moment dans la pièce, faisant claquer la porte et sursauter Rusadir. L’homme du nord paraissait préoccupé par quelque chose qu’il semblait voir au dehors, mais le chancelier focalisa son attention sur le médecin.

-Mon état de santé est-il si urgent pour que vous ouvriez si brusquement la porte ? dit Orpheos d’un ton sec.
-Vous êtes donc réveillé, balbutia le médecin pris de court. Je dois examiner votre état.
-Je vais très bien.

Orpheos remis ses pieds déchaussés sur le sol froid, mais lorsqu’il voulut se tenir debout, ses jambes faillirent et il s’écroula. Il n’avait pas marché depuis quatre jours.

-Chancelier ! se précipita le médecin pour l’aider.
-Laissez ! répliqua Orpheos en masquant son embarras. Apportez-moi plutôt de quoi boire et manger, je n’aurai besoin de rien de plus. Merci.

Se rasseyant au bord du lit en évitant, un moment, le regard de l’étranger du nord, Orpheos écouta le médecin s’éloigner dans le couloir après qu’il eût refermé la porte. Dehors, la pluie et le tonnerre s’intensifiaient. Des gouttes commençaient à s’écraser contre sa fenêtre.

-Être déclaré traître à son pays pour ne pas aimer la guerre en plus est malheureux, poursuivit-il comme si rien ne venait de se passer. Surtout au vu du service que vous avez rendu au nôtre, à la citadelle noire.

Orpheos évita sciemment de revenir sur les affaires que Llanistar avait menées avec un autre homme.

-Et sachez que, même si je me trouve aux commandes de ce royaume, j’ai pourtant moi aussi planqué quelques vieux cadavres dans mon placard. Tout comme vous, et tout comme beaucoup d’autres hommes. Je suis donc plus apte à vous offrir ma protection diplomatique, qu’à vous condamner à un jugement arbitraire.


Le tonnerre conclut sa phrase, précédé de nouveaux éclairs. Orpheos put les voir à travers sa fenêtre.

Peut-être fut-ce pour une raison météorologique… mais l’ambiance extérieure paraissait s’être alourdie, depuis quelques minutes. Un étrange silence s’était abattu sur toute la cité, comme si un sentiment néfaste avait saisi tous ses habitants. Llanistar lui-même semblait en être victime, et Orpheos se mit soudain à penser au prince.


-J’aimerais avoir des nouvelles du prince Loireag… marmonna-t-il, pensif. Il devrait être revenu.


Llanistar van Rusadir


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(vide)

-Être déclaré traître à son pays pour ne pas aimer la guerre en plus est malheureux, surtout au vu du service que vous avez rendu au nôtre, à la citadelle noire...

Llanistar sentit un léger malaise s'emparer de lui. A la citadelle, il s'était imposé comme leader d'une troupe désorganisée et courant à sa perte mais la perspective de servir ce royaume ne l'avait jamais effleuré. Malgré plusieurs mois passés à Hyrule, le nordique sentait toujours son pays natal l'appeler à lui et il ne s'était pas attaché tant que cela à cette contrée. Belle en apparence, sans aucun doute mais dont les fondations très anciennes reposaient sur le sang et les ombres. Saad l'avait décrit comme un royaume paisible, en paix mais il s'était lourdement trompé. De conflit extérieur, aucun trace en effet mais les guerres civiles se succédaient depuis des siècles sans que les Hyliens n'en tirent aucune leçon. Ils se contentaient de vivre leur vie sans risque, avec une insouciance impensable de l'autre côté de la mer. Et pourtant, alors que cette attitude semblait suicidaire à l'Artensys, il devait avouer que le peuple hylien était plus heureux que dans bien d'autres pays. Une influence divine ? Peut être, Llanistar était trop ignorant en religion pour apporter une réponse toute faite.
Cependant, bien qu'il ne se soit pas battu pour Hyrule, sa participation à l'attaque de la Citadelle avait bien eu un but : Aider la princesse. Il n'aurait pas su dire exactement pourquoi mais il n'avait pas supporté le spectacle de la souveraine obligée d'en appeler à ses sujets pour sauver le prince des griffes de Ganondorf. De ce qu'il savait, elle était juste et bonne. Son peuple l'aimait et elle lui rendait cet amour de sorte que son règne aurait dû être un temps de joie. Et puis...Elle lui ressemblait tellement. Valenrya et Zelda, les ressemblances entre elles étaient flagrantes et Llanistar n'avait pas supporté de voir un tel visage au bord des larmes. Si il devait se battre pour quelqu'un à Hyrule, ça serait surement elle.


-J’aimerais avoir des nouvelles du prince Loireag…

Llanistar dû admettre qu'il commençait à être inquiet. Toujours pas d'apparition du prince aux abords du château...Que pouvait il donc faire ? Déjà le nordique regrettait de l'avoir laissé en arrière. Il avait obéit aux directives du monarque sans chercher à discuter, considérant qu'il avait déjà bien assez risqué sa tête comme cela mais...Dun avait subit des tourments atroces dans les geôles du Seigneur du Malin, il ne devait pas être dans son état normal.
C'est alors qu'un homme entra dans les appartements du chancelier. Dés que la poignée tourna, Llanistar sentit son sang se glacer. L'inconnu dégageait une aura glacial, militaire. Du type que le nordique ne supportait plus depuis son exil. Il se retourna lentement pour faire face à l'arrivant. Un vieil homme, indéniablement. Au moins trois quart de siècle et pourtant doté d'un maintien et d'une stature suffisante pour terrasser plus jeune que lui. Sa barbe blanche immaculée renvoyait également à la pâleur de sa cape. Un chevalier, et pas n'importe lequel : Ser Cerscastel, le chevalier personnel de l'ancien roi. Une légende parmi le peuple.
Celui ci l'ignora parfaitement et s'approcha d'Orpheos. Le chancelier ressentait surement la tension qui régnait à présent dans la pièce, encore renforcée par le silence du chevalier. Puis il prit la parole, de sa voix forte mais vieillissante.


"Chancelier Orpheos. Je ne saurais vous exprimer le soulagement qui est le mien de vous trouver ici, en bonne santé. Les nouvelles que nous avions étaient alarmistes et nous avons été très inquiets pour vous. Néanmoins...J'ai quelque chose à vous annoncer. Une information de premier ordre que...Certains ne sont pas sensés entendre."

Llanistar sentit son orgueil se froisser quand le regard du chevalier vint se planter dans le sien. Ainsi donc, il ne daignait le remarquer que pour lui signifier son obligation de s'en aller ? Le nordique eut du mal à encaisser pareil affront, même en sachant qu'il n'était qu'un inconnu en ces lieux. Il se redressa et croisa les bras sur son torse, montrant par là qu'il ne bougerait que si le chancelier le lui demandait.


Orpheos


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Orpheos repensait à ce qui s’était passé dans la salle du trône Gérudo, et à la dernière image qu’il gardait de Dun. Celle de son ami enchaîné par les poignets, suspendu dans les airs, couvert d’injures bleues ou écarlates…
Un homme entra juste à ce moment dans sa chambre.


-…Cerscastel ? s’étonna Orpheos.

Il ne s’attendait pas à ce qu’un dignitaire si haut gradé lui soit envoyé. Que pouvait-il bien se passer ? Le vieux chevalier, présent à la cour depuis de nombreuses décennies et témoin direct du règne de Daphnès Nohansen Hyrule, père de Zelda, était un homme populaire dans la cité mais inaccessible. De lui émanait toujours une prestance qui aurait impressionné nombre de Croisés du désert, et Orpheos lui-même éprouvait du respect pour tout ce qu’il faisait ici. Car sans ce chevalier, Zelda n’aurait peut-être pas si bien survécu dans le lac aux requins qu’était la cour royale.
Ignorant Llanistar, le fier chevalier s’approcha du chancelier. Quelque chose n’allait pas. Cerscastel était notoirement distant par nature, mais le musicien pouvait sentir la tension qui s’abattait en cet instant même sur ses épaules. Son visage était contracté, son regard étrangement vide.


-Chancelier Orpheos, annonça-t-il, je ne saurais vous exprimer le soulagement qui est le mien de vous trouver ici, en bonne santé. Les nouvelles que nous avions étaient alarmistes et nous avons été très inquiets pour vous. Néanmoins...J'ai quelque chose à vous annoncer. Une information de premier ordre que...Certains ne sont pas censés entendre.

Cerscastel eut alors un regard dédaigneux pour Llanistar, ce que celui-ci n’eut pas l’air d’apprécier du tout.

-Sir Rusadir peut rester, signifia Orpheos en voyant Llanistar croiser les bras. Sans cet homme, je ne serais pas ici à vous parler.
-Êtes-vous certain qu’il le peut ?[/b] hésitait le chevalier, qui eut un autre regard méfiant pour l’homme du nord. Chancelier, l’information-…
-Est de premier ordre, oui, mais il est en large position de l’entendre.
[/color]

Orpheos eut un regard pour Llanistar : aucune expression particulière, mais un sentiment de confiance exprimé. Il croyait peu en autrui, mais dans le cas de cet homme, il le sentait digne d’un minimum de cette confiance si rarement accordée par le musicien. Et il s’agissait également de diplomatie : le sauveur d’un dignitaire, qui avait été au front, pouvait très bien être tenu au courant de ce qui s’était passé concernant l’attaque de la citadelle.
Car lorsque le chancelier posa à nouveau ses yeux sur Cerscastel, il ressentit qu’il s’agissait de cela. L’attaque du désert.


-Très bien, chancelier,
s’inclina humblement Cerscastel. Mon information vient de sources sûres ; des espions postés près du désert nous ont déjà alertés…
-Quoi ? Que s’est-il passé ? s’impatienta le chancelier en masquant son effroi.
-Le prince Dun Loireag Hyrule ne reviendra pas.

Un silence écrasant s’abattit alors dans la pièce, tandis qu’au dehors, le tonnerre éclata avec plus de force. Pendant quelques instants, et avec les gouttes de pluie fouettant la vitre, ce furent les seuls bruits que l’on put entendre dans cette chambre.

-…Excusez-moi ?
se reprit Orpheos de son ton le plus glacial.
-Le prince Loireag est resté de son chef dans le désert, et a changé d’alliance pour rejoindre les rangs de Ganondorf. Considérez-le désormais comme traître à la couronne.

Cerscastel et Llanistar purent sans doute le voir, mais Orpheos devint plus blême que de coutume. Assis sur le rebord du lit, sa tête se mit soudain à tourner, et sa respiration commença à se faire irrégulière.

-Ce ne peut être qu’une plaisanterie du plus mauvais goût… ?! dit-il d’une voix blanche. Cerscastel, vous ne pouvez pas annoncer de telles choses avec de telles manières ! Expliquez-vous !

Le spectacle était très rare venant d’Orpheos, mais il était en train de perdre sa froideur et son calme, pourtant réputés. Peu lui importait la présence des deux autres hommes : l’information qui venait de parvenir à ses oreilles n’avait pas encore bien pénétré son cerveau. Comme si celui-ci la rejetait, et cherchait à la lui occulter.

Dun, un traître ? C’était si absurde ! Cerscastel se trompait forcément sur les raisons de son absence, et le prince ne tarderait pas à revenir victorieux au château, Orpheos en était certain !


Llanistar van Rusadir


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-Sir Rusadir peut rester. Sans cet homme, je ne serais pas ici à vous parler.

Llanistar fut tant surprit qu'un éclair de surprise apparu sur son visage tandis qu'il croisait le regard de Chancelier. Mais il sut lire la confiance d'Orpheos dans ses yeux d'émeraude et acquiesça d'un signe de tête. Lorsque le regard noir et méfiant du vieux chevalier vint rencontrer le sien, il eut un léger sourire de défi. Cerscastel tenta de protester mais un simple mot du chancelier le fit taire sur le sujet. Le nordique apprécia la marque de confiance qu'on lui accordait, même à contre coeur. Le vieil homme aurait pu le faire sortir par la garde, il en avait le rang mais visiblement la parole d'Orpheos lui suffisait. Au fond de lui commençait à renaître la fierté liée à la reconnaissance du labeur accomplit.
Agacé, le chevalier n'en resta pas moins très digne lorsqu'il reprit la parole. Le sujet de sa venue ne pouvait être léger. La solennité de ce soldat indiquait forcément une gravité inhabituelle.


-Très bien, chancelier. Mon information vient de sources sûres ; des espions postés près du désert nous ont déjà alertés…

Le désert. Llanistar décroisa aussitôt les bras et s'approcha du chevalier. De tous les sujets que pouvait concerner la nouvelle, la citadelle du désert et le sauvetage de Dun était le plus brulant...Et celui qui l'effrayait le plus. Orpheos sembla lui aussi alerté par les précautions de Cerscastel qui poursuivit alors :

-Le prince Dun Loireag Hyrule ne reviendra pas.

Le silence de plomb qui envahit la pièce acheva de mettre tous ses occupants mal à l'aise. On devinait un trouble évident même chez le chevalier, pourtant impassible auparavant. Sans doute n'aurait il pas souhaité être l'annonceur d'une telle catastrophe. Orpheos paraissait avoir du mal à respirer et sa voix glaciale ressemblait à son souffle quand il exigea à Cerscastel des précisions. Ce dernier sembla hésiter un instant puis déclara d'un voix grave :

-Le prince Loireag est resté de son chef dans le désert, et a changé d’alliance pour rejoindre les rangs de Ganondorf. Considérez-le désormais comme traître à la couronne.

Ce fut comme un marteau envoyé au visage de Llanistar. Dun Loireag, un traître ? Le prince, amant de Zelda, homme considéré comme fiable par tous, du peuple aux notables. L'homme apprécié, estimé, respecté était un félon ? Comment cela se pouvait il ? La nouvelle avait assommée le nordique, elle paraissait terrasser le chancelier. Orpheos était plus pale qu'un mort et sa voix se réduisait à un filet tremblant. Son regard se perdait dans le vide, comme si la mort venait de se pencher sur lui. Il ne paraissait pas y croire et ses paroles accrurent ce sentiment chez Llanistar. Lui même ne parvenait pas à avaler ce qui venait d'être dit. Le prince passé traitre alors qu'il veillait sur le héros du temps...Si c'était vrai, la situation était gravissime.

"Cercastel, vous ne pouvez pas annoncer de telles choses avec de telles manières ! Expliquez-vous !"
"Je n'ai pas l'esprit à plaisanter, chancelier. Aucun incroyable que cela puisse paraître, ce que je viens de vous dire est la vérité. Sortie de la bouche de Ganondorf lui même puis de celle des espions revenus de la citadelle. L'ex prince Dun loireag s'est rallié au roi des Gérudos et lui a offert sur un plateau le Héros du Temps. Ce dernier n'est que porté disparu mais la princesse nourrit les plus vives inquiétudes à son sujet..."

"C'est impossible. Impossible." Llanistar se tenait le visage d'une main, peinant à réaliser les conséquences de cette trahison. Hyrule était en danger immense. La couronne sortirait affaiblie d'une telle félonie, Ganondorf en tirait un fragment divin de plus et les soldats morts là bas s'étaient sacrifiés en vain. "Comment avons nous pu nous laisser ainsi berner ?"

Cerscastel eut un haussement de sourcils. Comme si le "nous" de la question le gênait. Il devait tenter de le reconnaître, effort bien inutile. Jamais Llanistar n'avait côtoyé les grands de ce pays. A présent, il se mordait les doigts de ne pas l'avoir fait. Peut être aurait il pu éviter cela ! Encore que, si personne n'avait vu venir cette fourberie, sans doute se serait fait avoir comme tous les autres. Néanmoins cette pensée était difficile à accepter. Le chevalier poursuivit alors.

"Nous avons deux hypothèses. Dans un cas, le traitre et son maitre ont joué finement un jeu ardu en taisant leur accord durant des mois avant l'enlèvement du prince. Une autre possibilité est que Ganondorf ait rendu fou Dun Loireag en le soumettant aux pires tourments imaginables. Dans tous les cas... Il se tourna vers Orpheos. Il nous faudra le ramener à la raison...ou l'éliminer."


Orpheos


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Orpheos avait l’impression de sentir le sol se dérober sous ses pieds, à mesure que Cerscastel lui certifiait la pseudo trahison de Dun. Rallié au roi Gérudo ? Sacrifié le Héros du Temps ? Viles sornettes que voilà. Cerscastel et ses espions n’étaient que des imbéciles !

-C'est impossible. Impossible, s’effarait Llanistar, traduisant la pensée exacte d’Orpheos. Comment avons-nous pu nous laisser ainsi berner ?

Pour la première fois, Orpheos lança un regard mauvais au chevalier du nord. Se "laisser ainsi berner ?" : qu’entendait-il par-là, cet individu ? Croyait-il réellement les dires de Cerscastel ? Pensait-il vraiment que Dun Loireag Hyrule aurait pu trahir son royaume, sa femme, son titre… et son ami ? Orpheos avait tout risqué pour lui, et Dun le lui aurait rendu. Llanistar ne le connaissait même pas, Dun ne pouvait être un traître !

-Nous avons deux hypothèses,
poursuivit Cerscastel. Dans un cas, le traitre et son maitre ont joué finement un jeu ardu en taisant leur accord durant des mois avant l'enlèvement du prince. Une autre possibilité est que Ganondorf ait rendu fou Dun Loireag en le soumettant aux pires tourments imaginables. Dans tous les cas...

Il se tourna alors vers Orpheos, qui sentit son cœur rater un battement.


-Il nous faudra le ramener à la raison... ou l'éliminer.
-…Non.[/b]

Un seul et unique mot avait pu sortir de sa bouche, d’une voix métallique que lui-même ne se connaissait pas. Un moment difficile passa alors, durant lequel Orpheos tenta de trouver ses mots.

-Vous ne pouvez pas… Mais… Il… Enfin, c’est insensé ! Vous ne pouvez pas accuser le prince de la sorte, et me dire dans les yeux qu’il y’aurait peut-être nécessité de le tuer ! Comprenez que je ne peux pas avoir si facilement foi en vous, Cerscastel. Je ne croirai en la trahison du prince que lorsque la princesse en personne me l’aura annoncée !


Orpheos avait froid, tout à coup, et un violent frisson s’empara de son échine. Le ciel, dehors, se déchaînait autant que ses pensées. Dun, un traître… il ne le croyait pas. Pourtant, Cerscastel était l’une des sources d’informations les plus sûres qui soit…

-Non… c’est impossible,
murmura Orpheos pour lui-même. Cerscastel, veuillez prévenir sa majesté Zelda que je désire la voir immédiatement. Où qu’elle se trouve dans ce château, je vais m’apprêter pour m’y rendre.

Cerscastel s’inclina devant Orpheos pour la seconde fois, mais on put clairement sentir la désapprobation qui régnait dans ses yeux noirs. L’ancien chevalier de Daphnès Nohansen Hyrule était comme un père de substitution pour Zelda, et il semblait peu apprécier l’idée qu’on vienne ennuyer la princesse, à un moment où elle avait sans doute besoin de se retrouver seule. Mais Orpheos n’avait cure de son opinion : il voulait la voir dans l’immédiat. Elle, elle comprendrait le pourquoi de cette entrevue précipitée – outre la nouvelle urgente d’une trahison à la couronne.

Elle comprendrait que sans Dun, et sans elle… Orpheos n’était plus rien. Et quand Cerscastel quitta la chambre, un nouveau tremblement saisit le musicien à cette pensée.


-Ce ne sont que des balivernes inacceptables !
s'écria-t-il en martelant son lit du poing, devant Llanistar. Le prince, un traître ?! Je n’ai pas fait ce que j’ai fait à la citadelle pour rien ! Je n’ai pas délaissée la princesse au château pour que l’expédition m’amène à… à ça !

Orpheos prit son souffle et serra les dents pour se relever du matelas, déterminé à partir voir Zelda dans l’heure qui allait suivre. Sa main ayant prise sur l’une des colonnes en bois du lit à baldaquin, ses jambes se remirent difficilement debout. On pouvait voir ses frêles mollets trembler comme deux diables, fragilisés par ces quatre jours de coma, dont Orpheos oubliait qu’il en sortait à peine.

-Le Héros du Temps. Ils doivent également se tromper sur son compte. Il est sans doute sur le chemin du retour,
poursuivait-il, frénétique.

Le médecin revint à cet instant dans la chambre, portant un plateau avec des oranges et une grande carafe d’eau.


-Chancelier ! s’affola le médecin en posant le plateau au chevet du lit. Vous ne deviez pas vous lever, reposez-vous !

Déjà entêté de nature, le musicien était devenu intenable et ne daignait pas répondre aux supplications du médecin. Il marchait à pas lents au milieu de la pièce, demandant mille efforts à ses jambes, afin qu’il aille enfiler ses bottes laissées près de la porte. Il comptait bien sortir d’ici. Personne ne pourrait l’empêcher de quitter cette chambre, et d’aller voir Zelda. Et peu lui importait que l’homme d’Artensyr ou le médecin le voient dans cet état inhabituel : le cas de Dun était de force majeure.

Il l’avait évoqué un instant plus tôt : il n’avait pas lié un pacte avec les Ombres pour cela. Pour se faire trahir par l’une des deux seules personnes d’Hyrule en qui il croyait.


Llanistar van Rusadir


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-…Non.

Orpheos ne tenait pas face au choc, c'était une évidence. Son teint pale avait viré au blanc, de légers tremblements le parcouraient et il semblait comme fiévreux. Llanistar comprit que lui et le prince devaient être bien plus proches que de simples hauts dignitaires normaux. Les deux hommes paraissaient du même âge... Sans doute étaient ils amis. En tout cas, la réaction de l'Hylien le laissait entendre. Et cette amitié qui les liaient semblait assez forte pour l'aveugler. Car si les yeux d'Orpheos ne permettait pas au nordique de s'engouffrer dans son esprit, Llanistar ne rencontra pas cette résistance chez Cerscastel. Et un instant de lecture mentale lui suffit, le chevalier disait la vérité, ou plutôt ce qu'il pensait être la vérité. La sincérité d'un homme ne prouvait pas la véracité de ses propos mais au moins, le dernier des Rusadir sut qu'il ne s'agissait pas d'une fourberie.
Le tonnerre éclata dehors et Orpheos fut prit d'un frisson nerveux. La situation devait être très dure pour lui...Aussi dure que les mots qu'il asséna au vieux chevalier. Jamais le nordique ne l'avait entendu employer un ton si glacial mais aussi fragile également. Comme du verre brut, le chancelier était tranchant et aisément brisable. Encore incrédule face aux propos sans concession de Cerscastel, il exigea de voir la princesse.


Cerscastel, veuillez prévenir sa majesté Zelda que je désire la voir immédiatement. Où qu’elle se trouve dans ce château, je vais m’apprêter pour m’y rendre.

Le chevalier eut un rictus désapprobateur mais il s'inclina. Juste avant de quitter la pièce, il se tourna vers Llanistar et lui jeta un regard noir d'où perçait une grande méfiance. Le nordique sut que Ganondorf avait doublement gagné cette bataille. Des hommes étaient morts pour rien, Link lui avait été livré mais surtout il avait su retourner le meilleur des Hyliens contre eux. Maintenant que le plus grand défenseur de la couronne avait trahit, la cour royale allait se déchirer en soupçons de complots et de traîtrises. Plus de sérénité dans le rapport aux autres, plus de confiance possible : Hyrule allait sombrer dans la paranoïa. De quoi aisément dresser les uns contre les autres et récolter le fruit une fois pourri de l'intérieur. Sans doute Llanistar avait il sous estimé Ganondorf.

-Ce ne sont que des balivernes inacceptables ! Le prince, un traître ?! Je n’ai pas fait ce que j’ai fait à la citadelle pour rien ! Je n’ai pas délaissée la princesse au château pour que l’expédition m’amène à… à ça !

Le chancelier avait presque crié, une expression outrée sur le visage. Llanistar pensa avec inquiétude que son compagnon était surement la première victime du plan de Ganondorf. En tant qu'ami proche du prince, la situation serait impossible à accepter pour lui...Et pour Zelda également. Pour chaque combattant de l'expédition, le constat serait amer. Le désespoir pourrait bientôt grandir en Hyrule, et le nordique savait bien à quel point ce fléau était destructeur dans les temps difficiles comme ceux ci. Orpheos se leva et tenta de se maintenir debout dans un effort démesuré. Dans son état, il ne serait pas capable de faire plus de quelques pas avant de s'écrouler. Il continuait de parler avec frénésie mais Llanistar se tenait prêt à le rattraper au moindre signe de faiblesse...Et à l'empêcher de faire quelque chose de stupide, comme explorer le château à la recherche de la princesse. Si il parvenait seulement à se présenter devant elle, il s'écroulerait sous le poids de la fatigue.

-Chancelier ! Vous ne deviez pas vous lever, reposez-vous !

Une parole sensée mais qu'Orpheos ignora clairement, dépassant l'érudit d'un pas maladroit, trébuchant à moitié. Il allait parvenir à la porte quand la main de Llanistar la ferma devant lui. Le chancelier eut l'air furieux mais le nordique soutint son regard et se plaça entre le dignitaire et la sortie de sa chambre. Il laissa quelques instants au chancelier pour faire sortir sa colère puis il déclara, calme et grave comme il fallait toujours être face à quelqu'un se mettant en danger par colère ou peur :

-Je vous ai sauvé à la citadelle, ça n'était pas pour que vous gâchiez cette chance. Non, taisez vous Orpheos. Si je ne vous appréciais pas, je vous laisserais franchir cette porte et vous mettre en danger car votre sort me serait indifférent. Mais vous m'avez témoigné de l'amitié quand je n'étais qu'un inconnu. Alors je vais vous faire la faveur de vous sauver de vous même, cette fois. La situation est rude pour tous, que les dires de Cerscastel soient véridiques ou non mais les explications viendront en leur temps. Regardez vous, chancelier : vous peinez à vous tenir debout devant moi. Comment pourriez vous rejoindre la Princesse ? De plus, cette dernière doit être occupée avec le millier de problèmes soulevés par notre expédition. Elle prendra surement le temps de venir lorsque le royaume lui laissera quelques instants de répit. Soyez raisonnable, et reposez vous... Je ne bougerais pas de devant cette porte, Orpheos. Et vous n'êtes pas en état de me passer sur le corps, alors même que j'ai perdu une main.

Il était à présent plus statue qu'homme et ses yeux gris évoquaient plus la glace que le ciel du nord. Il ajouta à l'attention du médecin de sortir et de prévenir la princesse du réveil du chancelier. Il veillerait sur son compagnon, même contre la volonté de celui ci.


Orpheos


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Orpheos trébuchait pour se diriger vers la porte, ses yeux fixés sur elle, ses oreilles ignorant tout ce qu’on tentait de leur faire entendre. Son cerveau n’était occupé que par une seule pensée : retrouver Zelda. Il devait avoir le cœur net de tout ce qu’on venait de lui apporter. Il devait savoir…

C’était sans compter sur Llanistar, qui surgit face à lui et referma brusquement la porte. Orpheos sentit alors la colère grimper sous forme de frissons brûlants sur sa nuque. Le front plissé et la mâchoire contractée, le regard qu’il lança à Rusadir aurait fait s’écarter bien des domestiques comme des dignitaires de son chemin.


-Laissez-moi passer.

Mais Llanistar préféra se placer entre lui et la porte, sous le regard interdit du médecin. Orpheos n’éclata pas en hurlements ou en vociférations, mais les tremblements dont il fut saisi témoignèrent de sa colère. Intense, presque destructrice, car il aurait très bien pu frapper l’un des deux hommes s’il avait été en état de le faire.

-BON SANG ! Je vous donne l’ordre de me laisser passer !

Llanistar n’en fit rien. De sa voix grave et austère, il s’adressa au chancelier sans baisser les yeux.

-Je vous ai sauvé à la citadelle, ça n'était pas pour que vous gâchiez cette chance.

-Mais je ne-… !
-Non, taisez-vous Orpheos. Si je ne vous appréciais pas, je vous laisserais franchir cette porte et vous mettre en danger car votre sort me serait indifférent. Mais vous m'avez témoigné de l'amitié quand je n'étais qu'un inconnu. Alors je vais vous faire la faveur de vous sauver de vous-même, cette fois. La situation est rude pour tous, que les dires de Cerscastel soient véridiques ou non mais les explications viendront en leur temps. Regardez-vous, chancelier : vous peinez à vous tenir debout devant moi. Comment pourriez-vous rejoindre la Princesse ?

Particulièrement énervé, Orpheos ne parvint pas à trouver les mots pour lui répondre. Sans doute parce qu’il marquait là un point contre lui.

-De plus, cette dernière doit être occupée avec le millier de problèmes soulevés par notre expédition. Elle prendra surement le temps de venir lorsque le royaume lui laissera quelques instants de répit. Soyez raisonnable, et reposez-vous... Je ne bougerai pas de devant cette porte, Orpheos. Et vous n'êtes pas en état de me passer sur le corps, quand bien même aurais-je encore mes deux mains.

Un tel culot exaspéra le chancelier, mais le surprit assez pour qu’il puisse se taire quelques instants. Le médecin partit à ce moment prévenir la princesse de son réveil, et Llanistar continua de se tenir immobile devant la porte.

-Vous ne comprenez rien ! lança Orpheos, fébrile.

Il frôla l’impolitesse, en manquant d’insulter grossièrement son propre sauveur. Mais se rappelant qu’il l’était justement, le musicien se calma un peu, et reprit doucement son souffle. Baissant d’abord la tête, comme vaincu, son orgueil reprit ensuite le dessus sur sa raison, et il fixa de nouveau Llanistar dans les yeux.
Il voulut à ce moment écraser cet homme du nord par les mots, mais ceux-ci refusèrent une fois de plus de sortir de sa bouche. Il fut, en réalité, perturbé par le regard de l’Artensys. Les yeux de Llanistar, intensément gris, avaient le reflet de deux minuscules océans de glace. Des yeux qui, étrangement, lui rappelèrent aussi quelqu’un d’autre.

Cette brève contemplation coupa Orpheos dans son élan agressif, si bien que la colère qui l’avait motivé s’était un peu tassée. Il hocha la tête, désappointé, et revint le plus dignement possible vers son lit.


-Vous vous préoccupez trop de moi…
dit Orpheos, redevenu à peu près calme une fois qu’il se fut rassis. Il y’aura bien un moment où je devrai sortir voir Zelda, tout à l’heure, et personne ne pourra m’en empêcher. Pour me présenter à elle et avoir les réponses à mes questions, je n’ai effectivement rien d'autre à faire qu’attendre. Attendre pour me remettre tout à fait sur pieds, et vous faire libérer le passage. Alors ne vous dérangez pas, le temps ne fait que passer.

Mais pour son plus grand agacement, Llanistar comptait rester devant la porte, et s’assurer que le chancelier ne la franchirait pas. Ses yeux gris, fascinants au demeurant lorsqu’on y prêtait attention, disaient tout de sa détermination à se déranger pour une question de temps.
Mais Orpheos finirait malgré tout par se relever ; puis dès lors, il partirait.