Maçons d'un nouveau monde

RP avec Arkhams et Tsubaki

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Astre


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« Je viens de lui envoyer une missive. Je suis allé au pigeonnier de Cocorico ; je me suis permis de débourser deux cent rubis pour un oiseau de choix, un faucon aux plumes aussi noires que la nuit. C’était le seul rapace que possédait cette basse-cour en hauteur. Je me demande si elle le recevra, et dans cette hypothèse-ci, je me demande si elle viendra. Le temps avance et n’attend pas. J’ai recouvré une partie de mon pouvoir, de mon influence ; je secoue les fils de nombreux pantins pour arriver à mes fins. Il est loin le temps où mon arrogance suffisait à me hisser aux plus hauts sommets. Aujourd’hui, nous sommes dans un monde de magouilles, et je suis forcé d’agir comme un vaurien, à faire des demi-sourires aux uns, à me prostituer pour récupérer quelque pouvoir. Si mon honneur personnel –et non celui que j’affiche si ostensiblement sur mon visage- en prend un coup, c’est un mal nécessaire. J’assume très mal toutes ces combines de banquier, de crocheteurs de serrures… tisser les toiles, se faire stratège des ombres, cela ne me sied guère. Je suis un chevalier, j’aime attaquer de front. L’art de la rhétorique au service de la franchise m’est indispensable, et dès lors que je renonce à ce principe de vie, je renonce à ma fierté, à ma dignité.

Pourtant, j’ai la conviction certaine que ce sacrifice me mènera à nouveau vers une céleste place. Je spécule ; je parie une partie de mon honneur de manière à le récupérer avec les intérêts. Les enjeux sont trop gros pour ne pas saisir cette occasion. Il y a le risque que je le perde à jamais, que je sois noyé par mes propres actions. Ce sont des choses qui arrivent, je dois tout faire pour ne pas laisser cela arriver. Les immondices dont je me couvre sont temporaires ; dès que je serai redevenu moi-même, en mon intégralité, seigneur puissant, le cœur noir d’Hyrule, alors je pourrai me laver de tous scrupules. Pour le moment je n’en suis qu’à la deuxième phase, tremblotante. L’incertain est le seul horizon que je perçois… Je doute, en permanence je doute… Il me faut garder confiance, il me faut continuer à montrer ma force inépuisable et inébranlable pour que l’opinion générale voit en moi ce que j’aspire à être (ce que j’étais) : un roi dans l’âme.

“ Ma chère Tsubaki,

Je t’écris pour te dire à quel point l’affection que je te porte est infaillible. Malgré cette époque sinistre où les jours défilaient sous mes yeux sans la moindre étincelle de joie, malgré l’espoir disparu, malgré les échecs, les défaites successives, les trahisons, les coups bas, je suis à ton service à jamais, chevalier-lige lié à toi pour l’éternité.

Il m’est récemment venu en tête de reprendre fermement ce qui me revient de droit : le pouvoir. Je manigance, je trame, je me prends pour un obscur paladin au service de nobles causes. Suffisent les faux semblants : je désire rétablir la situation que j’avais avant la catastrophe, avant que je ne vous sois enlevé pour le pire comme pour le meilleur.

Tu fais partie de la guilde du Seigneur Ganondorf, ton allégeance pour lui semble indestructible. Tu es –de ce que j’ai entendu dire- sa dignité. Je ne me permettrai pas d’abuser de l’encre pour poser mes arguments, mais cette crapule ne te mérite pas.

Viens donc demain, à la mort du jour, au lieu de nos retrouvailles impromptues.

Mon éternelle amitié,

Astre”

Je conviais également Arkhams, dans une missive rapide, de nous rejoindre. Voilà que j’attends, la peau glacée et le cœur serré, la venue de mes deux plus chers amis. Il est temps de mettre au point certaines choses ; la volonté et la force seront de mise. »
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Aurore


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(vide)

Cela fait quelques jours que j’ai quitté ma famille, mon maître. Je ne puis plus souffrir d’être la dignité de ce Ganondorf définitivement trop absent. Je n’ai même pas pu lui dire en face que je désertais ses rangs, j’ai laissé une lettre à son intention. Le genre de lettre qu’une fille écrit à son père. Le genre de lettre qui avoue à son destinataire que l’on n’est plus en accord avec ses projets.
Je serais ma propre Dignité. Je ne suis plus cette jeune fille de vingt ans naïve. J’ai trente ans à présent. J’ai confiance en moi. Je peux faire de grandes choses sans l’aide d’un quelconque maître. Je ne suis plus Tsubaki la louve perdue. Je suis Dame Tsubaki, le Dame louve.

Un faucon noir interrompt mes réflexions. Il se pose sur mon épaule, comme s’il en avait le droit. Je le laisse faire car je me rends compte qu’il a une missive accrochée à la patte.

Serait-ce une réponse du Patriarche ? Si rapidement ? Ce n’est pas bon signe.
Je déroule lentement le papier devenu raide et fragile par la froideur de cette saison peu clémente.
L’écriture est droite sans aucunes fautes, les lettres sont tranchantes et pourtant si bien écrites. Je peux y lire :

“ Ma chère Tsubaki,

Je t’écris pour te dire à quel point l’affection que je te porte est infaillible. Malgré cette époque sinistre où les jours défilaient sous mes yeux sans la moindre étincelle de joie, malgré l’espoir disparu, malgré les échecs, les défaites successives, les trahisons, les coups bas, je suis à ton service à jamais, chevalier-lige lié à toi pour l’éternité.

Il m’est récemment venu en tête de reprendre fermement ce qui me revient de droit : le pouvoir. Je manigance, je trame, je me prends pour un obscur paladin au service de nobles causes. Suffisent les faux semblants : je désire rétablir la situation que j’avais avant la catastrophe, avant que je ne vous sois enlevé pour le pire comme pour le meilleur.

Tu fais partie de la guilde du Seigneur Ganondorf, ton allégeance pour lui semble indestructible. Tu es –de ce que j’ai entendu dire- sa dignité. Je ne me permettrai pas d’abuser de l’encre pour poser mes arguments, mais cette crapule ne te mérite pas.

Viens donc demain, à la mort du jour, au lieu de nos retrouvailles impromptues.

Mon éternelle amitié,

Astre”

Il sera surpris me dis-je. Je relis les deux premières phrases du dernier paragraphe.
Qu’ai-je fait ? Cela me ressemble –t- il ? Je n’ai toujours fait que suivre des êtres chers sans jamais réellement me poser de questions.
Mais Astre l’a dit, je mérite mieux que ce que Ganondorf peut m’offrir pour l’instant. J’ai déjà une famille. Dans mon cœur rien ne pourra la remplacer. Profondes ténèbres. Voilà ma famille. Aucune autre n’a jamais pu m’offrir plus.

J’irais demain le voir. Je ne veux plus que nous nous rencontrions au hasard. Je suis heureuse qu’il me convie à regarder le soleil mourant avec lui.

...

Elle avait attendu avec impatience la fin du jour. Non pas que la pénombre l’attirait plus qu’un autre jour, mais elle allait retrouver son ami qu’elle n’avait pas vu depuis plusieurs semaines.
Elle se mit en route alors que le soleil n’avait pas encore commencé à se faire dévorer par l’horizon.
Elle revenait de la place du marché. Elle venait d’y acheter un poignard tout neuf, la lame de son ancien s’était émoussée.
Elle traversa la plaine à vive allure.
Lorsqu’elle arriva aux abords du Lac hylia elle le vit.
Il faisait les cents pas. Tsubaki se demanda ce qu’il pouvait avoir à dire d’important à ce point pour qu’il soit dans cet état de stress. Au fond d’elle une certaine crainte naquit.
Etait-il arrivé quelque chose à Arkhams ?
Astre comptait-il partir et la laisser là ?

Non ; dans sa missive il n’a pas laissé entendre cela. Elle se rapproche. Elle sait qu’il l’a vue arriver. Elle sourit en espérant que cela le rassérénera quelque peu.


«Me voici. » dit-elle avec fermeté et confiance, attendant la suite des événements.


John Doe


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(vide)

Le murmure polaire se fait entendre. La bête froide rampe sous les portes et cueille les faibles grelottants dans leur lit, transformant leurs duvets chauds en capitonnage givré, leur couche nocturne en cercueil et leur chambre en tombeau. L’arctique musique chantonne sa complainte et entame un funeste récital glacé …

L’encre brillait sur le vélin de mauvaise qualité, la tremblante bougie faisait refléter son sombre éclat bleuté. Je saignais ma haine pour cet univers en grattant le papier, je gâchais mon précieux fluide à écrire des frivolités dans l’unique dessein d’apaiser mon âme morose. C’est d’un revers de manche rageur que je repoussai ma médiocrité d’écrivain. Je me levai et fis tomber ma chaise branlante dans un sourd fracas de bois. Parmi les monticules de parchemins qui s’entassaient paresseusement sur mon bureau, un morceau de papier modeste attira mon œil triste. Je débarrassai mon plan de travail des cochonneries de mon invention pour pouvoir lire. J’y reconnus le mouvement de plumes d’Astre, aux lettres allongées. Elles tranchaient la feuille aussi bien que les mots ainsi formées tailladaient le lecteur. Je lus en diagonale son phrasé pompeux pour n’en tirer que l’essentiel.


« Depuis quand ce foutriquet me donne-t-il des ordres ? »


Je serrai le torchon autoritaire dans mon poing en colère. Mon diable de collègue a pris du galon alors que je décrépis dans ma jeunesse factice. J’en venais à regretter Conan, ce doux chef au sang tiède. Un foie jaune est manipulable, alors qu’un fanatique du chaos avait le caractère plus taquin. Une guerre m’aurait fait du bien, à cet instant, afin d’arroser de sang et de talents les précieux souliers vernis de ce nouveau Commandeur de délinquants.


« Qu’il soit damné lui et sa prostituée du Phénix. Je suis un Seigneur, bordel. »


La tension artérielle fit vibrer mes yeux de haine, j’en soulevai la table d’un mouvement et la renversai. La bougie s’écroula et répandit sa cire brulante sur les récents récits cathartiques que je venais d’élaborer. Elle les lia entre eux et forma un tableau étrange de tout ce que ma verve avait déféqué. Vexé jusqu’à l’oignon, je n’avais malgré tout pas le choix, je dus me rendre en bon soldat soumis au lieu qu’Astre avait défini.


C’est à pied, d’une marche lente et volontairement arrogante, que j’arrivais au rendez-vous. A ma gauche était en train de crever le Soleil, fatigué d’avoir illuminé douze heures durant cette contrée débilitante. Moi aussi, j’avais envie de me coucher, la fatigue perçait mes iris de minuscules dagues. Certes la vue de Tsubaki, le pêché de mes nuits, me donnait d’autres envies que celui du repos. Je balançai mon regard vers le Chef des Chevaliers du Phénix, dégoulinant d’autosatisfaction. J’enfonçai alors mes poings nerveux au fin fond de mes poches, attendant de savoir ce qui allait se passer. Je baillai au corneille, impatient et irrité.


Astre


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(vide)

J’étais en train de me dandiner sur place comme une gueuse farouche qui est à la fois impatiente mais peureuse de sa première fois, la croupe galopante et l’estomac enflammé. La nuit refroidissait les ardeurs, certes, mais j’avais peur qu’ils ne vinssent pas. Tsubaki s’était rigidifiée dans son rôle de dignité, peut-être ne prendrait-elle-même pas la peine de venir rejoindre le triste bouffon des anciens temps que j’incarnais, avec fioritures inutiles et grands discours fringants. Mes yeux se givraient, fixés sur un point vague, un arbre ou un épouvantail. Cette dernière éventualité fut la plus proche de la vérité, car c’est en réalité la douce amie que j’attendais qui vint me cueillir, le pas fier, la démarche convaincue.

« Me voici », fit-elle, et ces deux mots lancèrent dans le ciel mille feux d’artifices aux joyeuses teintes assassines, la rétine qui fond et la pupille qui se dilate sous l’agression des couleurs. Le sourire que j’eus trahit mon bien-être immédiat, et c’est d’un coup de poing mental que je stoppai mes effusions d’émotions. A la niche, crétin, urgeai-je mon bonheur. Je ne parvenais pas cependant à retirer cette note d’affection magmatique qui pétillait dans mon regard de chauve-souris. Je me redressai, et je lui dis d’une voix un peu raide.

« Bienvenue dans notre royaume, ma chère Tsubaki. »

Les noires ténèbres dilapidaient l’énergie des étoiles en suçant jusqu’au fin fond des galaxies toute la lumière du ciel. Eclaboussures çà et là de quelques nuages glacés qui brisaient l’uniformité de l’au-delà, mais rien de brutal, juste quelques accompagnateurs figés pondus par un dieu fatigué.
C’est dans cette humeur de fin du monde que j’aperçus le porte-étendard des noirs lendemains. L’ennui lardait son visage de blessures ridées et d’une moue d’enfant puni. Je dodelinai de la tête, déjà certain de subir quelques acidités caractéristiques de mon rachitique comparse. Il ouvrit la bouche pour extérioriser cette lassitude préliminaire à chacune de ses apparitions publiques. Volontairement insolent.


« Salut, vieille branche. Si la main avait quatre doigts, il n’en manquerait qu’un. N’houspillons pas en de vaines paroles l’absence de celui-ci, déclarons-le mort à jamais car le poids des destins incertains ne peut qu’entraver notre nouvelle ascension. »

Je pensai à Whithered, égarée je-ne-savais-où. En catégorisant sa disparition je nous permettais à nous trois survivants d’avancer sans boulet, sans scrupules. Probablement avais-je plus parlé pour moi que pour les deux autres, mais qu’importe, certaines choses méritent d’être clarifiées avec netteté.


« Tsubaki, plus d’épopées dans tout ce sinistre environnant. Hyrule voit poindre un soleil délavé sur sa carcasse malade. Nous sommes les derniers véritables guerriers de ce monde. Les Chevaliers du Phénix aux désirs altruistes ne sont plus, les Âmes sont des rigolards avinés sans grand intérêt, la Rédemption n’est qu’une réunion de nobles gamines aux doigts effilés. Ta propre guilde se meurt. A nous réside le devoir de reprendre en main cette nation en perdition, et de ramener sur le monde la fierté d’antan. »

Petite entrée en matière pour ne pas perdre notre temps en gloussements polis.


Aurore


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Nous ne finirions pas la soirée seuls, à contempler les lucioles comme je l’avais espéré. Mais la présence qui se rapprochait à pas lasses et pesants comblait un certain vide dans mon âme.
Mon mari semblait trainer un lourd fardeau derrière qui l’ennuyait et l’épuisait à la fois. Une expression douloureuse du se lire sur mon visage. Je ne supportais pas de le voir dans cet état.

Après avoir assuré aux membres restants de profondes ténébres de ne plus devoir pleurer d’anciens amis, Astre commença son discours :

« Tsubaki, plus d’épopées dans tout ce sinistre environnant. Hyrule voit poindre un soleil délavé sur sa carcasse malade. Nous sommes les derniers véritables guerriers de ce monde. Les Chevaliers du Phénix aux désirs altruistes ne sont plus, les Âmes sont des rigolards avinés sans grand intérêt, la Rédemption n’est qu’une réunion de nobles gamines aux doigts effilés. Ta propre guilde se meurt. A nous réside le devoir de reprendre en main cette nation en perdition, et de ramener sur le monde la fierté d’antan. »

« Assez !» Dis-je avec l’impertinence et la dureté d’une reine qui me revenaient de droit. Non pas que je fusse outrée des propos de mon ex comparse, mais plutôt qu’à une heure pareille je ne me sentais pas la force de subir un interminable vomis de lamentations sur le futur proche d’hyrule. Je m’expliquais :

« Nul n’est besoin de me convaincre à une hypothétique trahison de mes frères et sœurs. Il se trouve que j’ai renié mon père et mes frères depuis plusieurs jours déjà.
Assez de belles paroles et de projets douteusement machiavéliques et prestigieux.
Dis-moi simplement quel est ton plan et je te dirais si j’en suis ou non.
»
Je me tus quelques instants car ce que je m’apprêtais à dire aurait des conséquences. Peut-être ne voudraient-ils pas de cette Tsubaki qui fleurissait à nouveau.

« Mais tu dois savoir que je ne me contenterai plus d’être la dernière roue du carrosse, ni le larbin de quiconque. Je veux du prestige, je veux de l’honneur ! Je suis ma propre Dignité et tout cela me revient de droit ! »

Au fond de moi persistait ce manque d’assurance qui m’avait toujours caractérisée. Je n’en montrais rien. J’en avais assez que l’on me prenne pour une pâte malléable à souhait, la pierre angulaire de tout projet mais pourtant jamais remerciée.

S’il me voulait il devrait avancer les preuves d’une future récompense quelle qu’elle soit.
Que cette contrée me reconnaisse comme étant indispensable. Qu’Astre, me reconnaisse comme LUI étant indispensable. C’était le prix à payer.
N’était-ce pas lui qui n’avait pas hésité à fricoter avec cette jeune vierge effarouchée pour obtenir un peu de pouvoir ? Je ne lui en demandais pas tant. Juste un peu d’humilité. Juste un peu de respect pour cette chère amie à qui il demandait de l’aide…


John Doe


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Astre me gratifia de toute son hypocrisie nobiliaire, dont le seul mérite était d’ignorer lâchement mon humeur taquine. Lézarder la carcasse sous la Lune à évoquer la disparition d’un faible ou encore l’âge d’or qui devenait de plus en plus un mythe inaccessible eut tôt fait de faire voler en éclats toute la subtile diplomatie du noir chancelier. Tsubaki trop tiède, Astre trop niaiseux et moi-même trop lâche ; étions nous là pour se caresser mutuellement l’épaule et sécher nos larmes amères ? Ce cercle de dépressifs aux ambitions crasseuses nouvellement jaillies tel un phénix maigrelet de cendre vieille d’une décennie était en tout point lamentable. Je balançai ma nuque en arrière pour me perdre dans le vertige de la voie lactée. Là-haut, quelque part, la Force pissait sur notre déficience, la Sagesse crachait contre notre folie et le Courage se gaussait de notre inquiétude. Après l’interminable attente de la fin de ces minables amabilités de vieilles mégères ménopausées, ma tête se remit à l’horizontale, mes pieds soudains souillés par cette Terre que je trouvais alors indigne de me porter.


« Range ta flute à discourir dans ton fondement. Ce Royaume n’a plus besoin de pamphlet inspiré, mais de coups d’états flamboyants. »


La scarification forestière de la Gardienne Kokiri me picota, elle semblait percevoir avec réticence mes pulsions morbides. Ses craintes étaient justifiées, j’avais bel et bien changé. Salement changé. Jouer les roquets goguenards auprès d’une noblesse sans âme, humide de sa propre beauté dans le seul de but de respecter le contrat avec Saria était absurde. Même cette catin mineure en jupette de jade n’avait de considération pour moi, dont j’avais eu pourtant la faiblesse de solliciter son aide, son amitié et sa compréhension. Que dalle, que tout cela, à sa dernière rencontre, elle eut rapidement fait de me renvoyer dans les ronces, me considérant à l’instar d’une bête de foire. Jouer avec le feu, frôlant la sentence de la vieillesse en torturant les corps des infâmes Hyruliens était un divertissement beaucoup plus raffiné que de simuler la sympathie pour une jeunesse inutile.


« Tsubaki, fais nous le plaisir de prêter ton esclave pour notre cause. Astre chouinera moins avec une nouvelle compagne à nos côtés. En échange de ton cadeau, digne louve, tu n’auras rien. Tu ne mérites rien, pas plus qu’Astre et moi. Les déchets de notre acabit n’ont plus leur place ici, alors ne cherche aucune récompense, aucune gloire. En tout cas pas avant un moment. »


Lassé de parler et de devoir admirer sur leur visage tant d’expressions stupides, je m’éloignai du demi-cercle. Arrivé sur le rivage de l’étang qui serait bientôt glace, peut-être, je croisai les bras et entonnai ce qui allait devenir une routine malheureuse pour moi, pauvre Lord-Menteur déchu :


« Que fait-on demain matin, chef ? »


Volontairement bousculeur, je tentais avec le peu de conviction en mes tripes encombrées de doutes de réveiller l’instinct primal et dévastateur qu’ils possédaient jadis en eux. Je regardai cette lune grotesque, m’intimant que nous allions tout faire pour que sa sœur jumelle ne se relève plus jamais.


Astre


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Je les regardai, me prendre de haut, me parler mal, me considérer comme un grand enfant qui a pourtant atteint l’âge inévitable du radotage frénétique. Que pouvais-je y faire, si la situation ne changeait pas, si personne n’écoutait quand bien même on répétait cent fois le même message ? La lassitude me prenait, peut-être avais-je fait une erreur en les invitant. Après tout, ils n’avaient pas les mêmes convictions que moi, c’était sûrement cela : leur volonté était plus malléable que la mienne, cela leur permettait un changement de cap sans ultimatum, sans dangers ni risques que -malgré la tardivité de la modification de trajectoire- le bateau de leur opinion ne se heurte à d’autres navires. Ils pouvaient aisément passer d’une opinion à des opinions. Je me laissais emporter par l’amertume; ce n’était pas une bonne idée. Le rouge de mes yeux prenait une teinte violette, je pouvais le sentir ; la marée vomissait l’écume salée et salie du sang des marins morts en mer. Je me sentais imposteur, ici à cette heure tardive, à comploter sur le sort du monde, à m’imaginer en dépit des milliers de périls lancés par les saintes putains sur mon triste destin. Que pensais-je ? Que les choses allaient changer, que mon heure de gloire allait sonner une seconde fois, après tout ce temps ? L’abattement faisait ployer mes épaules finement ciselées ; pourquoi fallait-il que mes humeurs changeassent sans prévenir, comme indépendantes de ma propre conscience ?! Cela semblait injuste : je crois qu’en réalité, les Déesses ne voulaient simplement pas que je réussisse. Jalouses, ou bien alors elles m’avaient déjà vu avancer et les dégâts qui s’annonçaient ne leur plaisaient pas, alors elles avaient choisi un autre héros. Qui cela pouvait-il être, dans ce cas-là ?! Il n’y a plus aucun homme de grandeur qui ne foulât le pied sur ces terres déchirées. A moins qu’elles, privées de toute tradition à l’instar de leurs créatures dépravées, ne se soient mises dans l’idée de mettre un bouffon analphabète à la tête de leurs obscurs desseins. Les hypothèses ne servaient à rien, je faisais mieux de faire taire mes pensées…Ma conscience m’accorda le droit (que dis-je, le privilège) de reprendre en main cette situation que j’avais initialement mise en place et qu’on avait détournée sans m’en demander mon avis. D’une voix obscurcie par une colère contenue, je me mettais à leur brosser un tableau bien grossier de ce que j’escomptais : cela, Arkhams le savait déjà, mais Tsubaki devait être mise au courant

« Tous voués à de grandes ambitions, n’est-ce pas ? Ce que dit Arkhams est vrai, nous sommes des déchets, lui plus que tout autre sait à quoi les reconnaître. Maintenant oui, avec la volonté nécessaire nous pouvons accéder à un avenir un peu plus grand. » Le sarcasme plus que l’ironie grésillait mes intonations vocales, car j'étais fatigué qu’on me prît pour un demeuré.

« Pour aller droit au but, je veux récupérer le pouvoir qui nous est dû ; j'ai débuté cette entreprise par le biais d’un Phénix lépreux de ses plumes d’or. Libre à toi de nous rejoindre ou non, je ne te promettrai rien ni ne te garantirai la sécurité de l’emploi, tu sais très bien qu’en me rejoignant tu risques plus de perdre que de gagner. »

Je leur tournai le dos, mains croisées derrière moi, mes yeux scrutant l’horizon brouillé par la nuit… incertain. Les paupières à moitié closes, j’inspirai un peu d’air. Mon impatience était à bout.




Aurore


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(vide)

Bien des choses avaient été dites depuis que j’avais pris la parole mais je n’en retins qu’une seule à laquelle je décidais de répondre.

« Pour aller droit au but, je veux récupérer le pouvoir qui nous est dû ; j'ai débuté cette entreprise par le biais d’un Phénix lépreux de ses plumes d’or. Libre à toi de nous rejoindre ou non, je ne te promettrai rien ni ne te garantirai la sécurité de l’emploi, tu sais très bien qu’en me rejoignant tu risques plus de perdre que de gagner. » Me dit Astre.

Chacun lui avait tourné le dos, devenant des proies faciles pour quiconque aurait voulu les trahir. Je ne savais pas ce qu’ils comptaient faire. Quels plans ils avaient imaginés mais je décidais de leur donner une chance.


« Bien. Je suis des votre. Après tout je n’ai plus rien à perdre alors… »