« Quand vient la fin du jour » [Semi-Privé, MP pour participer !]

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Il plissa les sourcils, tandis que le vent rejetait poussières et cendres sur ses yeux. Son visage semblait changé, tant par le masque de sang qu'il y avait appliqué que par les rides du lion qui déformaient ses traits. Si certains l'avaient parfois décrit comme un gamin au faciès hérité d'anges venus du ciel, il ressemblait d'avantage à une incarnation violente, sévère ou impitoyable, en vérité. Un homme d'arme, forgé par le fer, la sueur et la mort. Un guerrier à la gueule rougie de peintures sanglantes et au regard aussi austère que polaire.

Le cuir qui bardait ses poignets, le dos de sa main, sa paume et les premières de ses phalanges ne tarda pas à chanter alors qu'il laissait danser ses doigts fatigués et usés par les combats. Ses deux bras pendaient le long de ses flancs, tandis que dans son dos reposait l'acier sacré et le Pavois de la Princesse. Des yeux, qu'il avait plus froids encore qu'usuellement, l'Hylien parcourait les allées ravagées et souillées du Fief d'Impa. Les corps se comptaient par dizaines, ça et là. Dans d'autres ruelles, les cadavres s'empilaient jusqu'aux lucarnes et aux oeils-de-boeufs. Il renifla, alors, sans se soucier de troubler le lourd silence qui pesait sur Cocorico, maintenant la tempête passée.

Cette même peur qu'il avait si souvent lu dans les yeux des autres – à commencer par ceux de la gamine qu'il avait tiré des décombres – avait saisi son coeur, une fois de plus. Comme toujours en vérité. Et s'il lui était arrivé de ne pas supporter semblables spectacles (tous signés de Ganondorf, évidemment), c'était à force de s'y retrouver confronté qu'il finissait par savoir comment lutter contre. Son estomac se nouait toujours autant ; et la bile s'acharnait contre ses lèvres. Ses dents n'en restaient pas moins serrés et sa bouche n'en démordait pas. Qu'importe quel fut le malaise dont il souffrait, il ne ploierait pas le genoux devant les coups que portaient ses ennemis. Que portaient son ennemi. Qu'importe que celui-ci ai la bassesse de s'en prendre aux veuves, et aux orphelins. Qu'importe qu'il s'attaque aux vierges, aux fils et aux filles. Qu'importe les sillons écarlates qu'il tracerait sur les champs et les cultures Hylienne. Il ne le ferait plus ployer comme jadis. Nul ne le ferait.

Ses doigts cessèrent la gigue qu'ils avaient entamés, alors qu'il fermait le poing. Du haut du toit, relativement intact, le blond contemplait avec autant de colère, de détermination que de tristesse l'énième sac que le Seigneur Gérudo menait sur les terres qu'il avait eu la si mauvaise idée de chérir à ce point. Droit et rigide comme un roc, immobile pour mieux le rester, il s'escrimait à ne pas défaillir. Les oeuvres macabres laissées par le Boucanier de Din lui inspiraient la même amertume, les unes après les autres, et il ne s'y habituerait vraisemblablement jamais. Tout serait autrement plus simple, s'il parvenait un jour à troquer son humanité pour le pragmatisme militaire qui animait certains chef de guerre. Tout deviendrait plus facile, si jamais il abandonnait toute compassion. Tout serait plus aisé, et tout serait autrement plus gris, si pas tout à fait noir.

Tout debout qu'il était, l'Enfant-des-Bois savait qu'il lui fallait se lever. Ne pas se laisser aller, attendre la fin du jour pour enfin chuter. Il s'en était tiré aujourd'hui, comme toujours. Encore une fois, il s'était arraché aux doigts osseux et glacés de cette vieille amie qu'il s'obstinait en permanence à éviter. Un jour, oui, il pourrait chuter. « Quand vient la fin du jour », fredonnait l'air qu'il avait chipé à Malon.

Le Sang-Lignage cracha le peu de sang qui dormait encore au fond de sa bouche. Il lui fallait se lever, et en premier lieu il devait retrouver Impa. Basculant en avant, il se laissa glisser sur les tuiles, pour mieux bondir quand il gagna les combles. Six mètres le séparaient du sol encombré et carmin. Cinq. Sa main se referma aussi soudainement que prestement sur la branche d'un des arbres qui avait survécu à l'incendie qui avait rongé le Premier Hameau du Royaume. Laissant son élan le guider il ne se balança qu'une unique fois avant de se lâcher. Trois mètres. Ses bottes tintèrent sur les pavés entre lesquelles coulaient des rigoles de sang. Ses genoux se fléchirent en lui tirant une légère grimace. Link se hissa à nouveau avant de s'engouffrer dans un des axes perpendiculaires. Il ignorait où il était supposé rencontrer la Sheikah, et savait pertinemment qu'ils ne se croiseraient pas nécessairement. Il y avait bien trop à faire, et pas assez de deux paires de bras supplémentaires pour aider, pour qu'ils ne se retrouvent pas l'un et l'autre à s'employer au plus urgent.


"Excuses-moi... —" Glissa-t-il en abordant un vieillard avachi dans la boue. La main du jeune vagabond se présenta comme un support que le pauvre homme ne tarda guère à saisir. « Je recherche plusieurs personnes. Aurais-tu vu... —
A chacun ses morts, gamin. Je ne suis ni moine, ni recenseur, tout juste un ancêtre fatigué. Je n'ai rien vu, à part le chaos qui jaillissait de partout. Puissent les Déesses nous oublier ! »

Le Fils-de-Personne ne se sentait pas le coeur à lui donner tort, pas plus qu'il n'aurait su le faire. De nombreuses fois auparavant il avait souhaité que son nom s'égare dans les poussiéreux recueils que les Trois gardaient peut être. Souvent avait-il voulu n'être qu'un homme parmi tant d'autres. Souvent aussi, avait-il souhaité pouvoir effacer les quatre caractères qui formaient son nom de la Pierre des Dieux. Mais si, à ses yeux, le véritable héros qu'Hyrule réclamait à corps et à cris, le bouclier qui saurait la sauver et dont elle avait plus besoin que jamais se dessinait doucement en la personne de Llanistar, il prenait peu à peu conscience qu'il lui restait tant à accomplir. Quand vient la fin du jour.


L’air de la nuit était froid, vif. La prêtresse de Nayru resserra les pans de sa cape en frissonnant. Un instant elle regretta d’avoir quitté la tranquillité de sa chambre d’auberge. Enfin … tranquillité relative, compte tenu de la dispute entre Wolfy et Perla. Alors qu’elle errait dans les rues, l’enfant divin s’interrogea.

Car si la Déesse l’avait guidée pour sortir de l’auberge, Flora avait voulu attendre la Plaine. Mais juste devant les portes de Cocorico, la main de la Sagesse s’était à nouveau emparée de son cœur et la jeune fille avait du reculer. Même chose auprès de l’accès au mont du péril et cette fois ci, on ressentait comme de l’agacement dans le geste divin. En effet la douleur était beaucoup plus violente et Flora en eu le souffle coupé ainsi que les larmes aux yeux.

Pourtant elle recula, sage et docile.

« Mais enfin Dame, murmura l’enfant de foi, comment puis je savoir ou vous voulez que j’aille ? »
Ca n’était pas vraiment une prière. Flora avait laissé tomber le ton cérémonieux depuis le désert, préférant s’adresser a Nayru comme a une vieille amie. En général elle ne recevait en guise de réponse que des intuitions ou des rêves, mais c’était la première fois que la Déesse agissait ainsi. La jeune fille en était effrayée et déambulait sans but.

Bon déjà un point : Sa tache devait se trouver dans le village. Peut être soigner les blesses et prier ? D’un pas maladroit et hésitant, Flora retourna sur la place du marché. La main divine ne se manifesta plus, la marche de la Servante de Nayru se fit plus sur.

On avait entassé tout les morts et les blessés sur la grande place, tout prêt du puits. Flora voulu se boucher les oreilles. Partout des gémissements, des murmures, des pleurs.


« J’ai soif.
-Pitié.
- Aidez-moi.
-J’ai mal.
-M’man … viens me chercher.
-Je t’en prie, chéri, respire …
»

Bientôt, elle trébucha, sur les jambes d’un vieillard et s’étala de tout son long dans la poussière imbibée de sang. Alors qu’elle se redressait, l’homme lui donna un coup pour dégager le pied qui était resté coincé sous elle.


« Hey ! Mais t’peux pas faire attention non ? » Au ton, Flora sentit qu’on avait embêté cet homme tout la journée et que sa chute avait été la goutte d’eau de trop. Elle voulut balbutier des excuses, s’emmêla dans ses paroles et ses pensées. L’homme grommela : « Pfff, puissent les Trois m’oublier ! Je ne leur ai rien fait, et elles ne font rien qu’a m’ennuyer ! »

« Mais … je … » Flora s’accroupit, essuyant ses mains pleines de terre. « Je cherchais juste mon ami. Il sent le cheval et …
-Ecoute ma p’tite, des écuyers, yen pas plein cocorico. Y’en a même plein Hyrule. Autant chercher une aiguille dans une botte de foin. Maintenant, fiche moi le camp ! »

Lentement, Flora s’écarta du vieil homme. Son cœur se faisait à nouveau lourd. Elle ne comprenait pas la volonté de la Sagesse, elle ne comprenait pas pourquoi elle se devait de rester auprès de cadavres. Tout le corps de la jeune fille se mit à trembler. Et si ? Non ca serait trop cruel de la part de sa Divinité de lui infliger ceci. Celui qu’elle cherchait ne pouvait se trouver parmi les sans-vies.

Mais elle ne quitta pas la place pour autant, préférant se trouver un endroit a l’écart, d’où elle se mit a chanter les psaumes et les prières du couvent. Ca la rassurait, lui remontait le moral. Sa voix d’abord basse et timide prit un peu plus de force au fur et à mesure que les textes sacrés furent récités. Flora sentit du mouvement, capta la présence d’autres personnes. Une voix s’ajouta a la sienne, un peu éraillée mais sincère. Flora eu un sourire. C’est dans ces cas la que le Pontife devrait être présent. Qu’il voie un peu comme elle guidait les Hyliens.

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Il ferma les yeux, tandis que son esprit s'éloignait doucement mais sûrement du vieillard et des regrets qu'il pouvait exprimer. Il connaissait la chanson et n'avait pas la moindre envie de se laisser embarquer dans ce genre de refrain ou de couplet, alors qu'il restait tant à faire et plus encore à espérer. Sans oublier non plus à quel point il pouvait être fervent, parfois, évidemment. Sans renier les Déesses ou même démentir jusqu'à leur existence, comme l'avaient fait certains Chevalier de la milice du Phénix, autrefois, il devait avouer n'avoir pas toujours été très... Proche des Trois. En vérité, plus loin il en était mieux il se portait.


Oh, certes, l'Hylien avait toujours eu la foi. Il était trop de gens comme Zelda ou la Prêtresse pour lui rappeler qu'il devait croire. Ce en quoi il avait cessé de compter et ce qu'il n'espérait plus, c'était une espèce de protection divine, ou d'intervention en faveur des démunis. Bien longtemps qu'il avait compris à quel point Elles étaient, toutes, désintéressés de ce qui pouvait arriver ça et là, ici où ailleurs. Il ne les aimait pas et avait cessé de les craindre. Dès lors, Elles avaient perdu tout son respect.


Ses doigts effleurèrent une poutre à moitié carbonisée, tandis que ses pas le guidaient jusqu'à divers décombres. Déjà, les hommes et les femmes s'activaient. Certains avaient remontés leur manches, d'autres déchiré des pans de leurs robes pour mieux bander les blessés et éponger les enfants. Il y en avait qui hurlaient, d'autres qui travaillent en silence. D'autres encore souffraient trop pour bouger, et pour ceux là, des femmes et des enfants montaient des brancards. Et tandis qu'une toute jeune adulte réconfortait tant bien que mal un récent orphelin, tandis qu'un vieillard s'essayait douloureusement à la fente de buches, tandis que Cocorico s'éveillait d'un éveil de suie et de sang, l'Enfant-des-Bois réalisait que tout retrait (qu'il avait jadis cru véritablement salvateur ; au point de partir en exil volontaire) ne le mènerait nulle part — et ne guiderait pas Hyrule ailleurs que dans une impasse dont ils prenaient le chemin, doucement mais sûrement.


Un instant ses pensées retournèrent au vieillard de tantôt : peut être l'homme avait-il été vacciné par la vie, mais le Fils-de-Personne eu l'intime conviction qu'il se fourvoyait. A chacun ses morts ? Non. Certainement pas. Ca n'était pas ainsi qu'il voyait l'avenir — pas plus qu'il ne voyait le présent. Une bien étrange ironie peut être, pour un loup solitaire comme celui qu'il était ; mais plus passait le temps et plus s'amoncelaient de sombres nuages, plus le vagabond comprenait certaines nécessités qui lui passaient autrefois bien des lieux au dessus du crâne. Il avait beau parcourir seul les forêts, les plaines et les sentiers, il ne pouvait plus ignorer l'importance d'une meute. Il avait, jadis, réussi là où elle avait échoué et désormais c'était à elle de remporter la victoire là où lui s'embourbait. Aux confins de ce désert et de ses sables mouvants qui ne cessaient de l'aspirer et de le tirer vers le fond.


Ses doigts quittèrent la poutre ravagée, en silence, tandis que la pluie commençait à tomber sur le Fief d'Impa. Bientôt la terre se transformerait en boue et tôt où tard tout cela prendrait fin, pour mieux recommencer sans doute. Il laissa de côté ses craintes : il n'était plus temps de penser aux sacrifices que tout un chacun se devrait de faire. Aussi discrètement qu'usuellement, il gagna l'un des billots. Sans un mot, il referma la main autour de la hache que tenait un enfant. Les deux se comprirent d'un regard, et dès que le petit se fut écarté, le jeune adulte leva le fer noir haut dans le ciel. L'eau ruisselait déjà sur son visage et s'insinuait entre mailles et tissu quand il arma son bras.


La bûche se brisa en deux dans un bruit désagréable mais il réitéra l'opération, encore et encore. Le cuir qui bardait ses paumes grinçait d'abord, avant de venir coller sa peau, comme le reste des étoffes qu'il portait. Le masque de sang qui maculait sa gueule ne tarda pas à disparaitre, comme si l'orage qui tonnait dans les cieux venait purifier son être. Et à mesure qu'il s'acharnait sur les rondins, il laissait ses émotions et ses pensées glisser, elles aussi emportées par les larmes du ciel. Loin d'oublier le rendez-vous qu'Impa lui avait donné, il préférait néanmoins – et restait persuadé que la Sheikah le comprendrait – venir en aide à la mesure de ses moyens.


Le froid était mordant, et la pluie glaciale. Le vent le frigorifiait. Mais il en allait ainsi pour tout ceux qui bravaient l'Hiver pour mieux reconstruire — ou au moins mettre en place des abris de premiers secours. Peu importe que la nuit tombe, peu importe que ses mains le brûlent où que sa gorge ne commence à s'enrouer. Autour de lui, aucun ne faiblissait, aussi ne faiblissait-il pas lui même. Et de cette attitude, ils n'en ressortaient que plus forts. Ils communiquaient entre eux sans avoir besoin d'élever encore la voix, et s'encourager mieux qu'aucun tambour ou qu'aucun cor de guerre. Quand la lune vint bercer les plus petits de rayons d'argent, les mères les lovèrent contre leur seins et vinrent batailler leurs époux aux friches. Les bras finirent par lâcher les haches, les marteaux et les peaux tannées pour se refermer sur les femmes encore apeurées et secouées. Aussitôt les larmes se mélangèrent aux rires quand des familles entières se découvraient épargnées.


Et la boue se fit plus vaseuse.

"Pose moi ça, gamin." Lâcha un des travailleurs, dans son dos. Une main gagna son épaule droite et la serra fraternellement. « Y'a beaucoup à faire, 'core, j'sais bien. Mais faut s'ménager un tant soit peu. Serait fâcheux de doubler le nombre de morts parce qu'on a pas pris le temps de se reposer et d'avaler un peu de pain et de bière. » Le blond stoppa son mouvement, en l'air. Le cuir chantait mollement, tandis qu'il accrochait le bois trempé de la hampe. « Pffff... » Souffla-t-il en réalisant qu'il n'avait pas encore su convaincre. « Écoutes, p'tit gars... S'tu veux encore te rendre utile t'ferais bien d'apporter tout c'bois là bas à l'auberge. Eul'vieux NuttyK aura bien plus de clients que d'habitude, et bien plus de chambres à chauffer. J'espère bien qu'c'radin leur f'ra un prix. »

Link laissa son bras gauche retomber contre son flanc, et la hache de bucheron avec. Il se redressa, avant de se retourner vers l'homme. Grand ; d'au moins une tête et demi plus que lui, les cheveux et la barbe hirsute et couleur corbeau. La peau basanée et l'oeil perdu récemment — de toute évidence. Les mains calleuses et énormes – suffisamment pour abriter le visage d'un adulte entre ses doigts –. Drapé dans des vêtements simples, mais rougis par les récents évènements. Un fermier, un ouvrier ou un rémouleur sans doute. « Très bien. » Glissa-t-il, avec un regard sur le tas qui l'attendait. « Prends ça. » Murmura-t-il ensuite, en glissant ses maigres économies entre les mains du borgne. « Vous en aurez plus besoin que moi. »
*

Il était plus dur que jamais de se perdre dans les ruelles du village dorénavant, puisqu'un certain nombre n'étaient plus véritablement, tant certains bâtiments s'étaient effondrés. De la ville qu'elle avait pu être, Cocorico n'en avait plus grand chose. En vérité l'ensemble du hameau ne ressemblait guère plus qu'à une bourgade dévastée par les âges et les sièges. Les ruines glorieuses d'une bataille comme celles que l'on contait dans les légendes sanglantes des terres d'Hyrule. Celles qui marquaient ce Domaine des Déesses au fer rouge, comme aucune tête de bétail ne le serait jamais. D'aucun croyaient le Royaume en paix depuis le début des temps, mais face aux récents massacres, le Héros ne pouvaient ignorer l'âpre goût amer qui tamisait sa langue, pas plus qu'il ne pouvait se voiler la face. Sans pouvoir se le justifier, un puissant sentiment de déjà-vu se saisissait de lui. L'éphémère et l'éternel s'imbriquaient et se séparer pour mieux se rejoindre tandis qu'il n'avait l'impression que sa vue se troublait. De luxuriantes forêts défonçaient un instant les toitures des pauvres masures, qui une seconde plus tard n'avaient plus rien.

Le Faux-Kokiri secoua la tête et prit un instant pour souffler. La charge, en plus d'être encombrante, commençait à lui tirer sévèrement sur les bras et les deux derniers jours n'avaient objectivement pas été de tout repos. Sans doute la fatigue se jouait-elle, une fois de plus, de lui. S'il avait disposé d'une main de libre, il se serait frotté les yeux, pour les stimuler et les pousser à rester en éveil. Au lieu de quoi, il s'engouffra tant bien que mal sur l'avenue qui menait à la plus que fameuse auberge de Cocorico.

A mesure qu'il n'avançait, il se prit à se croire arpentant les Bois-Perdus du Val Sylvestre de l'Arbre Mojo. Comme lorsqu'il s'aventurait à la recherche de Saria, l'Hylien s'était laissé bercer et guider par les quelques notes que le vent d'Ouest avait pu lui porter. Sans réellement s'en rendre compte, il s'était mis à siffler pour accompagner. Doucement, mais sûrement, d'autres voix s'élevèrent pour chanter avec la première. Il ignorait pertinemment ce qui se chantait, mais ça ne l'empêcha pas pour autant de déposer la pile de buches fendues contre les murs d'une bâtisse encore stable, quand il entr'aperçut furtivement sa jeune amie qui s'était choisi la rivière pour chevelure. En quelques mouvements il se retrouva sur le toit qui la surplombait de quelques mètres, un petit sourire sur les lèvres, tirant l'Ocarina de Belle.

Il ne lui fallut que quelques secondes pour s'accorder à la gamme chantée et se lancer dans une improvisation aussi simple et sobre que diablement entrainant. Des mains se mirent à claquer les unes contre les autres et des clameurs plus joyeuses que celles du matin retentirent. Alors, quand d'autres musiciens prirent le relai, il se laissa chuter derrière la Prêtresse. Sa main gauche se posa sur l'épaule de l'enfant, tandis qu'il s'approchait de son oreille.


"Tu danses ? ~" Lâcha-t-il, tout innocent, alors qu'il était heureux de constater qu'elle s'était sortie sans vrai séquelle de l'échec de la riposte sur la Forteresse. Elle lui avait manqué.



Flora chantait, chantait et chantait encore. Sa voix s’éraillait parfois, mais on lui passait alors un broc d’eau. La jeune fille devina que le dit broc devait tourner dans la troupe qui lui faisait face. Elle souffla un coup, tandis que le chœur des rescapés entamait un autre refrain, un autre chant.

Flora écouta, un sourire plein d’espoir sur son joli visage. Cocorico n’avait pas dit son dernier mot. Cette bourgade avait encore de quoi donner une leçon aux grands de ce monde, de par sa simplicité et sa ténacité face aux coups dur. Flora se sentit émue devant tant d’envie de vivre et de solidarité.

La prêtresse allait se lever quand les notes d’un ocarina résonnèrent. Elle ferma ses yeux-qui-n’y-voyent-pas, un autre sourire naissant sur ses lèvres. Un tout autre type de sourire. Mêlant soulagement, tendresse et joie. Bien sur, elle avait reconnu le son typique de l’ocarina du Temps, cadeau de Zelda a Link. Elle savait qui se cachait, là haut. Le bougre devait surement bien sourire de sa farce.



A moins que ca ne soit une ruse ? Un piège grossier ? Link pouvait tres bien s’être fait dérober le précieux instrument. Non, non, non, c’est impossible ! Le jeune homme tenait trop à cet ocarina pour se le laisser prendre ainsi. Et puis la foule ne semblait pas s’inquiéter outre mesure. Les voyants devaient distinguer la silhouette sur le bord du toit, qui s’amusait à transformer un moment de communion en un bal communal. Voila bien qui ressemblait a Link, si peu respectueux des Trois qu’il était.

Un bruissement d’air, le choc sourd d’un poids sur le sol, une main qui étreint doucement son épaule …
« Tu danses ? ~ »

Flora fit volte face, un peu maladroite et noua ses bras autour du cou du héros. Dans la manœuvre, la jeune fille remarqua que l’opération lui était maintenant plus aisée. « J’ai grandis » songea-t-elle son sourire se faisant plus large. Danser ? La Prêtresse ne savait pas danser. Pourtant, elle se recula un peu, consciente des regards des villageois sur eux. Que devaient-ils penser tiens ? A voir l’Enfant de Nayru sauter au cou du Héros du Temps. C’est à se demander si le sable ne remontait pas dans le sablier …


« Avec plaisir » murmura la jeune fille, tandis que les musiciens improvisés se lançaient dans un air entrainant et joyeux. Un moment, la Demoiselle se demanda si elle n’aurait pas du descendre le capuchon de son manteau, pour épargner a son cavalier la vue de ses Marques. Elle savait que le Tout-de-vert-vêtu s’en voudrait une fois qu’il aurait constaté que le Désert l’avait abimée.

« Tu vas bien ? » s’enquit Flora au détour d’un pas de danse maladroit et hésitant. Aie ! Voyons ma fille, on ne séduit pas un homme avec des banalités !!! Flora avait l’impression de faire gaffe sur gaffe, et que sa Dame Nayru la jugeait en secouant la tête de désespoir la haut dans le ciel.

« Pardon ma Dame, je fais au mieux … »
Et pour cacher son trouble, Flora se mit a sourire, les joues toutes rouges.

« Tu m’a manqué. »

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L'homme de roc avait repris ses esprits bien après la bataille. La dernière chose dont il se souvenait était une chute, suivie d'un coup porté sur son crâne. Il ne se souvenait plus comment tout cela était arrivé et quelle était l'arme qui l'avait frappé. Il se souvenait aussi vaguement d'un puissant homme-bête dont il ne possédait plus la silhouette exacte en mémoire. Peut-être était-ce cette créature qui l'avait frappé ? Un homme de carrure standard n'était pas en mesure d'assommer le Goron avec une simple épée.

Mais il ne servait à rien d'essayer de se remémorer les événements de la précédente bataille. L'important était de consacrer tous les bras disponibles à la reconstruction du village. Pour cela, Darunia avait fait appel à trois de ses forgerons et cinq autres Frères. En plus du matériel de la forge, ils avaient apporté avec eux un grand chariot rempli de pierres de la montagne déjà taillées pour bâtir de nouveaux murs et de nouvelles habitations. Les deux autres Gorons déjà présents au début de la bataille étaient toujours sur place, et aidaient les villageois à transporter les matières premières aux quatre coin du hameau.

Fatigué de sa longue sieste artificielle, le Goron en chef, prit de courbatures et de bâillements se dirigea vers l'auberge du célèbre NuttyK dans l'espoir de pouvoir s'accorder un léger moment de répit.
Au fur et à mesure, se rapprochant de la place, quelques notes se firent entendre. Des chants, des instruments...
« Mais quels fous peuvent bien s'amuser à faire de la musique en ce moment, alors qu'il y a tellement mieux à faire ?! » , se dit-il, tentant de presser le pas et d'arrêter ces hommes bayant aux corneilles.

Suffisamment près, Darunia s'approcha un peu plus. Il se souvint de cette magnifique voix, celle d'une jeune fille qu'il rencontra sur la place du marché il y a quelques temps. Il dansa d'ailleurs sur le flot de notes que les lèvres de cette même jeune fille fredonnèrent, à cette époque.
Il ne lui suffit en revanche que d'un simple coup d'oeil pour reconnaître le seul et unique véritable fou qui animait toute la place. Son "frangin", comme il s'amusait à l'appeler était bien là. Voilà une éternité qu'il ne put lui parler ! Il se remémora une nouvelle fois ce jour-là, sur la place du marché. Link disparut bien trop vite pour que le Goron ne puisse lui adresser ne serait-ce qu'un simple "salut, frérot !".

L'homme de pierre ne put s'empêcher d'esquisser un large sourire en observant le spectacle qui se déroula sous ses yeux. Les courbatures l'empêchant de danser correctement au rythme des notes, il commença par taper le rythme dans ses mains. Puis un peu plus tard vint un autre musicien Hylien, accompagné de deux tambours. Darunia lui demanda s'il pouvait se joindre à lui, d'une tape dans le dos accompagné d'un signe de main et d'un sourire. Cet Hylien lui tendit son second tambour, quelque peu ébahi devant l'étrange acte qui se jouait devant lui. Force est de constater qu'il ne verrait plus jamais cela ; un concert après une bataille ? C'était la représentation du pouvoir de Link : où qu'il passe, sa silhouette est et restera porteuse d'espoir pour le peuple d'Hyrule. Il avait le pouvoir d'apporter la joie aux plus démunis et l'espoir aux plus désespérés.

Le précédent Hylien regardait le visage de Darunia, perdu dans le vide. Un sourire était dessiné depuis maintenant quelques minutes sur son visage, contemplant la scène.
De la paume de sa main, l'homme toucha l'épaule de son collègue musicien qui lança aussitôt son regard dans sa direction. "Jouons", lui fit-il comprendre en tapotant légèrement la peau de son instrument. En réponse, il s'accroupit et plaça le tambour entre ses jambes. Plutôt petit pour ses grandes mains de roc, il hésita à frapper avec force afin de ne pas déchirer la peau de frappe, puis prit confiance en l'ustensile et frappa d'une force suffisante pour ne pas camoufler les autres musiciens. Prenant plaisir à accompagner les acteurs, il attendit que la représentation se termine, impatient d'aborder son vieil ami et de l'inviter à boire un verre chez NuttyK. Paradoxalement, le Goron souhaitait perpétuer ce court instant de joie qui venait de faire sa soudaine apparition, dans une époque pourtant si sombre...

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Il la laissa se presser contre lui, à mesure que ses bras ne dessinaient de douces arabesques dans sa nuque. Sur ses lèvres, un petit sourire qu'elle ne verrait pas, mais qu'elle ne manquerait vraisemblablement pas d'entendre. Cette petite fille lui avait manqué, et il savait apprécier le confort que formait l'alcôve dans lequel elle le capturait tendrement. Cette petite fille..? L'Hylien ne put s'empêcher, alors qu'ils tournaient l'un et l'autre au rythme des tambours et des talons, du courage et de l'allégresse d'un peuple toujours en deuil mais prêt à fêter les vivants, de la regarder. Ses yeux longèrent les courbes du visage de la Prêtresse, avant de poursuivre vers épaules, d'épouser innocemment les rondeurs qu'elle présentait involontairement, et réalisèrent qu'elle n'était plus cette enfant qu'il avait connu et secourue lors du dernier Hiver, à la porte du Ranch. Si rien n'avait fondamentalement évolué, l'attitude et le port qu'adoptait l'Enfant de Nayru n'étaient plus les mêmes. Elle ne devait tenir de l'enfant que ce que les hommes et les femmes de foi se devaient de garder, mais il ne doutait pas à quel point elle était devenue femme. Peut être était-ce la guerre qui l'avait changée ? Peut être était-ce, encore une fois, sa faute ? Peut être avait-elle perdu ce charme et cette naïveté par essence qui avait toujours fait d'elle ce qu'elle était ; au yeux du vagabond ?

Un léger silence s'installa entre les deux amis, portés par une musique qui n'avait plus grand chose de l'éloge aux Déesses. Et puis, Flora se risqua à ouvrir les lèvres, comme pour monter à l'assaut de tous les doutes de l'Enfant-des-Bois. Quoiqu'elle puisse avoir laissé derrière elle, il savait désormais qu'elle n'avait pas abandonné sa maladresse. Non pas qu'il eut été lui même plus adroit dans une situation semblable — ses pensées l'amenèrent à toutes les fois où la gène avait dicté ses mots plus que de raison, mais le ton de la jeune religieuse était aussi hésitant que ne l'étaient ses pas de clerc. Le sourire qui s'était dessiné sur le visage ne s'effaça pas, et touché par son amie, il l'attira doucement contre lui, profitant d'un rapprochement de chorégraphie.


La Danse dictait à leurs pieds là où ils devaient aller, à leur bras jusqu'où ils devaient se hisser, et tandis que cet art dont il ne connaissait que quelques bases – tantôt enseignées par Saria, tantôt découvertes au gré de ses voyages, tantôt appris au contact de Zelda – les emmenaient valser, ils subirent un nouveau virage. Du coin de l'oeil, le blond distingua une carrure particulière, imposante ; unique. Il n'eut guère besoin de plus pour reconnaitre Darunia. L'ivresse de coeurs meurtris enflammait à nouveau les cendres du brasier qui prenait Cocorico aux tripes quelques heures plus tôt. Ses doigts glissèrent jusqu'à se détacher de la Prêtresse, brisant ainsi l'étreinte qu'elle avait tendrement initié. Pour autant, il tâcha aussi bien que faire se peut de ne pas perdre le contact : sa main flirta d'abord avec l'épaule de la jeune femme, avant de couler sur son bras, comme l'eau coulait parfois le long de ces petites écailles qui parsemaient sa peau, et coloraient ses joues d'un éclat bleuté. Et quand il arriva à la main de la demoiselle qui chutait presque, il laissa de côté la subtilité pour l'attraper ouvertement et commencer à la faire tournoyer sur elle même. Un tour, puis deux. Pas trois.

"Toi aussi. ~" Souffla-t-il à l'oreille de l'enfant-qui-n'en-était-plus-une, alors que la vitesse la propulsait à nouveau contre lui. La gigue les sépara à nouveau, pour mieux les rapprocher ensuite. Un instant ses esprits filèrent vers Zelda, et il se demanda quand il reverrait sa tendre amie. Ils allèrent aussi à Malon, et cette fougue si douce et si flamboyante qui l'avait toujours habitée. Une fois n'est pas coutume, il repensa à une époque révolue sans qu'il n'ai eu le temps de la connaitre. Cette enfance qu'il n'avait vécu qu'à moitié lui manquait. Ce temps tout juste assez présent dans sa mémoire pour qu'il s'en souvienne les impressions. Couleurs, odeurs, formes, chaleurs et joies. De ces relents de fête et dans ce sourire, il retrouvait la flamme de ses souvenirs. « Et pour te répondre... ~ » Commença-t-il, avant qu'un tambour ne claque aussi sèchement que précisément. D'un instant à l'autre, les sonorités changèrent du tout, à mesure que le Roi-dans-la-Montagne ne s'invitait sur scène. Bientôt, les chants populaires Hyliens se mélangèrent aux rythmes traditionnels et ancestraux des Gorons. Deux autres frères du Brise-Roc commencèrent ensuite à chanter et marquer leurs vocalises de percussions aussi typiques du peuple de Pierre que les songes n'étaient l'attribut du Poisson-Rêve. Le festival improvisé se teinta irrémédiablement d'une couleur résolument métisse, tandis que deux peuples s'unissaient pour devenir le Hyrule qu'il avait toujours connu.

"Pour te répondre, jeune femme ... ~" Lâcha-t-il, un peu plus fort pour qu'elle l'entende par delà tout ce vacarme musical, tout en accentuant sur sa nouvelle condition, comme désireux de lui tirer un nouveau sourire. « Je vais bien, jeune dame. ~ La journée a été longue et harassante, mais j'en suis sorti en un seul morceau. » Et il espérait que ce fut le cas pour Malon aussi. S'il n'avait aperçu sa chevelure nulle part, il avait été rassuré de voir que le bâtiment dans lequel il l'avait laissée la veille n'avait pas brûlé. Tout aussi fou que cela puisse paraître... Il avait arpenté les rues et les ruelles à la recherche d'un signe de vie, mais à défaut d'en trouver, il n'avait rien discerné qui soit preuve de sa mort. L'angoisse existait encore, il était cependant bien plus serein, sans pour autant cesser de s'inquiéter. Sans doute ne le pourrait-il jamais.

Comme pour cacher son trouble, le vagabond qu'il était emmena à nouveau Flora dans une valse, souhaitant garder ses craintes et ses peurs pour lui même. — Comme à chaque fois, en vérité. S'il était quelque chose de dur à lui arracher, il s'agissait bien de confidences, ou d'appréhensions. Peut être était cela qui lui avait valu, de la part des hommes du Jarl, le surnom de brave. Cette capacité à murer son effroi derrière un mur de pragmatisme, factice quand les vies des êtres dont il était le plus proche étaient en jeu. Factice, mais apparent néanmoins. 

La peau tendue sur la structure creuse résonna de nouveau, marquant la fin de la danse. Dans une mimique presque ridicule, tant elle était satyrique vis à vis des manières qu'il tâchait d'adopter, il effectua une courbette digne des plus maladroit des parangons de la cour de Zelda. « Voilà qui marque la fin de notre rencontre, ma Soeur ! » Continua-t-il, toujours en jouant sur ce protocole qu'il n'avait jamais accepté, au fond. La sueur sur son front luisait à la lumière du feu et drapait son visage d'une douce parure d'or et de sang. Secrètement, il échangea un regard avec le Goron aux allures et aux réflexes de vieil ours, avant que ses yeux ne reviennent à la Ponte del Carmen. Un petit air amusé tira ses lèvres un instant, avant qu'il ne se redresse. « Joyeuse danse, Flora ! » Susurra-t-il à son oreille, en s'éclipsant sur le côté, tandis que ses doigts se fermaient tant sur l'Ocarina de Belle que sur la petite statuette de Flamboyante.


Que dire ? Il serait peut être judicieux de souligner qu'elle riait et en même temps tremblait. Que sa peau se couvrait de chair de poule, et qu'elle était secouée de délicieux frissons.
Son cœur de jeune fille s'affolait a chaque bond, pas un peu plus grand que le précédent, chaque frôlement de la main de son ami sur son corps.

Son âme de dévote, elle s’étonnait de l'impudence du Héros, s'en outrait ? Non pas outrer, le mot est faux. Mais disons que la part de Flora qui avait retenu les leçons du pontife n'aimait pas trop ce jeu de corps.

« Mais au diable la convenance » songea la Fille de la Sagesse, tandis que ses oreilles avisée captaient les paroles de celui qui lui faisait virevolter a la fois le cœur et les sens. Jeune femme, venait il de lui glisser, les joues de la Prêtresse virèrent a ce rouge qu'elles aimaient tant arborer. Flora tourna son visage aux yeux blancs vers cet homme qu'elle n'avait jamais vu autrement que du bout des doigts, ses lèvres se parèrent d'un ravissant sourire.


« Je vais bien, jeune dame. ~ La journée a été longue et harassante, mais j'en suis sorti en un seul morceau. 
-Voila qui me rassure, Messire … »

Flora savait que son ami n'aimait pas les titres de noblesses, qu'il ferait la moue avec ce simple mot. Mais elle savait aussi qu'il saurait lire la joie et la plaisanterie dans son regard mort, que cette complicité que tout deux partageaient finirait de parachever cet échange subtil entre amis.

La voix de son ami, soudain, lui parut distante. Un peu surprise, la Prêtresse leva le visage vers Link, se demandant a quoi ? a qui ? il pouvait bien penser. Mais plutôt que de poser des questions, Flora préféra faire comme si elle n'avait rien sentit, rien entendu, savoura plutôt le contact du torse du Héros sous sa joue, inspira le parfum de celui ci, mélange de transpiration, de cheval, d'un peu de sang et un autre petit quelque chose sur lequel elle ne put mettre le doigt dessus.

Bientôt la musique s'acheva, et avec elle, la danse. Les bras de la Prêtresse revirent a leur place le long des flancs de celle ci. Un souffle d'air vint caresser son nez :
« Voilà qui marque la fin de notre rencontre, ma Sœur ! » Il était donc temps, temps qu'elle lui remette le présent qu'elle avait fait préparer pour lui. Flora porta les mains a son cou, cherchant la petite chaîne d'argent qui courait sur sa peau, a laquelle était fixée le bijou. Gravée aux armes de la Sagesse, on la nommera plus tard « Pendentif de la sagesse ». Mais aujourd'hui ça n'était rien de plus qu'une écaille prélevée sur les reins de la jeune femme, autour de laquelle elle avait tissé un sortilège de soins, guère puissant, mais néanmoins efficace.

Mais aussi vite que le Héros lui était apparut, tel un feu follet, Link disparut des sens de l'Enfant Divin. La bouche de Flora s'entrouvrit en une expression de déception. La main hésitante de la Fille de Foi vint chercher le bras de son ami. Elle poussa un soupir de soulagement en le trouvant.


« Attends » murmura Flora, se demandant si il l'entendrait malgré le brouhaha, avant de lui passer les bras autour du cou, en une nouvelle étreinte. Mais celle ci ne dura que le temps de faire passer la chaîne d'argent d'une nuque a l'autre. Une seconde, la Prêtresse songea a profiter que le Heros soit son prisonnier pour lui dérober un baiser. Mais Flora ne le fit pas, soucieuse des apparences, avec cette foule amassée autour du duo. Si le Pontife avait des yeux et oreilles ici, la jeune fille aurait bientôt bien des ennuis. Toutefois, les lèvres de la jeune femme se posèrent, telles un papillon sur la joue de son ami, aussi légère que la plume ou la soie.

« Dommage que je ne puisse profiter du spectacle. » sourit la jeune fille en reculant. « J'espère qu'elle te portera chance. »

[Désolée Daru, mais ca fait un moment que je poireaute pour la fin de ce post  
J'ai envie de jouer!!!! XD]

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Une simple musique pour donner un peu le ton de ce qui se joue dans mon post... !
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Un dernier accord du flûtiste vint terminer la représentation. Le goron rit grassement tout en regardant son collègue percussionniste, puis lui donna une grande tape dans le dos qui ne manqua pas de le faire tomber face contre le sol. Ce dernier regarda le goron à son tour d'un air à moitié en colère, à moitié apeuré, le visage plein de boue. Il voulut rendre la pareille à Darunia, mais sa carrure bien trop imposante l'en empêchait. Finalement, il ricana honteusement tout en essayant de dégager toute la crasse qui le recouvrait.
Le chef goron se relevait en laissant son instrument avec le percussionniste. Il observait tranquillement la scène qui se déroulait devant ses yeux, ricanant pour son ami.
« Avait-il trouvé quelqu'un ? » songeait-il, souriant en les observant gesticuler.

Deux luthistes, d'un seul échange de regards, reprirent le spectacle en mains, doigts contre cordes. Plaçant eux aussi le bout de leurs doigts -mais dans leur cas, en face des trous- deux flûtistes, se concentrant afin de trouver le meilleur moment pour introduire les partitions qu'ils eurent en tête, se joignirent aux deux autres. Ils jouèrent cette fois-ci une rhapsodie bien plus joyeuse et entraînante, qui à travers cette dernière réchauffèrent un peu plus les coeurs gelés par cette sombre époque.

Les yeux du Goron s'ouvraient plus encore. Ils brillaient d'envie et d'excitation. Il sentait son corps brûler, bien plus que de coutume. La chaleur montait tellement qu'elle faisait rougir la peau de roc du vieux chef de la montagne. La mélodie que les musiciens jouaient lui était destiné, il en était persuadé.
Les musiciens tenaient un long refrain toujours aussi joyeux, vif et entraînant. Après quelques minutes, le public connaissait maintenant ce thème, une sorte d'hymne au renouveau. De leurs mains, les spectateurs battaient le rythme. Les pères qui se trouvaient au fond de la foule asseyaient leurs enfants sur leurs épaules. Profitant du spectacle, même les petits souriaient alors qu'ils pleuraient encore le décès d'un parent, pour beaucoup d'entres eux. Trop jeunes, ils ne comprenaient pas, mais la musique avait ce pouvoir de vous rendre aussitôt joyeux et motivé, aussitôt triste ou mélancolique. Et c'était ce que Darunia aimait dans la musique, les sentiments. Et la danse était son seul moyen d'exprimer les siens. Qui croyait que le vieux Goron aigri par ces dernières années savait encore s'amuser ?

En réponse à cette invitation à danser, il s'élança ni une, ni deux au milieu de la foule, tout près des musiciens. Il traversa la "scène" pour inviter quelqu'un à danser, de l'autre côté de la masse de population.


« Mwaha ! Tu ne t'en iras pas comme ça ma grande ! cria-t-il, tout en s'esclaffant grassement. Il prit la main de cette jeune fille aux cheveux d'un bleu clair envoûtant. Allez, viens, j'ai vu que tu savais danser ! un jugement un peu hâtif pour un Goron qui lui-même, eut du mal à prouver ses compétences dans le domaine... »

Ils étaient maintenant tous deux au milieu de la foule, observés par les spectateurs et les musiciens. C'est ainsi que Darunia, sur cet hymne au rétablissement et au renouveau, entamait une danse disgrâcieuse qui ne jurait pas le moins du monde avec sa corpulence démesurée. Malgré tout, c'était ainsi qu'il se sentait bien. Il exprimait ses sentiments dans la plus honnête pureté, et sans aucun scrupules.


[Et bien, désolé pour l'attente !]

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(vide)

La musique avait toujours été, tant à ses yeux qu'à ses oreilles, une espèce de clef. De celle qui ouvre parfois plus que de simples serrures, et de celles qui pousse parfois plus que de simples portes. En vérité, son cœur était persuadé que tous ces airs, toutes ces mélodies, parfois si insignifiantes, parfois si grandiloquentes ou parfois si simples représentaient des passerelles. Des ponts vers un ailleurs, qui bien que vraisemblablement insondable, s'était quelque fois dévoilé sous son pied. Il ignorait peut être moins cet (ou ces !) ailleurs que d'autres, mais persistait à penser qu'il n'avait eu la chance que d'en découvrir une infime partie. Finalement l'existence ne lui semblait pas être ce ruisseau que certains se plaisaient à en faire. Il avait cessé de croire le temps comme un chemin à sens unique. En fait, il avait tout simplement cessé de croire à chemin.

Un bras se saisit du sien et avec son cou se déporta son regard. Ses lèvres s'étirèrent un peu quand il vit la Prêtresse qu'il pensait avoir laissé aux mains de Darunia. Et s'il était tracassé autant qu'il n'était inquiet et assailli de doutes, il était heureux de la savoir en vie et en un morceau. « Oui ? » Souffla-t-il alors qu'elle l'implorait d'attendre encore un peu. « Tu ne voudrais pas rater ta danse, jeune fille ~ ? » Ajouta-t-il, taquin et affectueux. Mais l'Enfant de Foi ne tarda pas à lui voler une étreinte, et l'espace d'un instant, il se ne put s'empêcher de penser à Romani et la façon dont elle entourait de ses bras Cremia. La fin d'un monde avait beau approcher que la petite ne demandait guère plus qu'un peu de tendresse et de lait. Et alors que ses propres bras allaient gagner le dos et la tête de son amie, celle-ci s’éclipsa pour lui voler un baiser — plus innocent que le dernier. Elle lâcha alors quelques mots qu'il entendit à peine : le Roi des Montagnes les avait rejoint et s'était emparé de la main de la sacerdoce pour l'inviter à danser. Il éclata de rire, en les regardant s'éloigner et en imaginant la surprise de Flora. Sans doute lui avait-il joué un "mauvais" coup, mais il doutait qu'elle n'en sorte pas aussi amusée qu’essoufflée.

Son regard tomba alors sur ce qu'elle lui avait glissé autour du coup. Un petit pendentif, qui lui rappelait sensiblement les écailles Zora qui lui avaient été confiés plus jeune. Un deuxième petit sourire vint étirer légèrement son visage, alors qu'il glissait le présent sous les mailles et les étoffes qui le couvraient encore. S'il ne pouvait pas jurer que le cadeau lui attribuerait une quelconque chance - il y croyait assez peu, en vérité - il appréciait indéniablement l'attention.

Ce fut son tour de s'éloigner, et bientôt, il vint prendre appui sur le puits pour ensuite s'asseoir véritablement sur le rebord. La journée avait été longue. Elle n'était pas finie à ses yeux, comme aux yeux de tant d'autres dont les familles avaient été décimés au pire, déchirées au mieux. Il n'envisageait pas de s'attarder bien plus longtemps, soucieux de mettre la main sur une rouquine toute spécifique. Pour autant il avait conscience qu'il ne pouvait pas et ne pourrait pas abandonner l'avatar de Nayru de la sorte. S'il avait été, un temps, capable de s'extirper seul de près de l'ensemble des situations (quelques fois, il avait préféré ne pas procéder comme à son habitude), il savait également que ce n'était plus tout à fait le cas depuis qu'il voyageait avec la Prêtresse. Jouant des épaules, comme pour chasser de vieux rêves de liberté qu'il avait toujours nourris, il se laissa aller jusqu'à laisser plonger son dos en arrière légèrement. Et ses doigts, comme aspirés par le gouffre béant qui s'enfonçait dans l'ombre derrière lui, glissèrent silencieusement jusque sous le rebord de pierre froide. L'Hylien soupira, fatigué. « Jusqu'à ce que vienne la fin du jour.. » murmura-t-il simplement, pour lui même. Tant de choses restaient à faire, et déjà la fête était loin dans son esprit.

La pulpe de ses doigts rencontra une matière qui lui était inconnue. Tant et si bien qu'il ne tarda pas à mener sa main devant ses yeux, curieux et intrigué. Et si cela avait le noir de la suie, ça n'en avait pas du tout la texture. Quelque fluide dont il n'aurait su délimiter la part de liquide et la part de brume — parce qu'il lui semblait véritablement qu'il faisait face à quelque purée de pois obscure. Son visage se teinta d'un intérêt terni par une forme de méfiance naturelle. Mais l'Enfant-des-Bois ne tarda pas à secouer son poignet pour s'en débarrasser. Un masque de défiance brossé sur le faciès, il se hissa sur ses deux jambes avant de chercher la jeune femme des yeux. La foule était si dense que même le Goron continuait de lui échapper. Alors, sans plus d'hésitations, il s'avança jusqu'à la façade d'une masure encore debout. Le bout de ses doigts effleura doucement la roche, et ses yeux se lancèrent à l'escalade, brièvement, de la voie qu'il s'était choisi. Prestement, il monta son pied jusqu'à une première irrégularité, et détendit soudainement la jambe, s'élevant du même coup plus haut que quiconque à Cocorico. Ses doigts agrippèrent des barreaux en fer forgé qui barraient une des fenêtres. Sa seconde jambe monta à l'assaut ensuite, pour l'aider à mieux continuer l'ascension. Et c'est sans mal qu'il finit par atteindre les combles puis les tuiles si typiques du fief d'Impa.

Son regard de givre finit par croiser celui, sombre, du Sage du Feu.Le Fils-de-Personne soutint les yeux de son frère-de-sang un instant, dans l'espoir que celui-ci comprendrait ses intentions. Qu'il guide la Dame Bleue en sécurité, tandis que lui s'effaçait dans la nuit.