Posté le 01/09/2010 18:00
[Désolée d'avoir pondu aussi long, les gars, il fallait que je trouve une raison de mon arrivée au ranch, et j'aime me perdre en explications inutiles... et encore, j'ai enlevé deux ou trois trucs parce que sinon c'était beaucoup trop gros. Bonne lecture ! =D]
Le hontomètre est un outil de mesure pour mesurer... la honte, comme son nom l'indique - méfiez vous cependant de ces déductions trop faciles, le chronomètre ne mesure pas la longueur des crocs et le parcomètre ne vous apprend en rien la superficie du parc que vous laissez vos enfants détruire le samedi après-midi en échange d'un petit temps de repos. Le hontomètre, donc, mesure la honte sur une échelle de un à dix - bien que parfois pour certains cas exceptionnels, on accorde un onze à ceux qui ont connu le pire - et se divise en trois grandes parties. De un à quatre, vous avez "les petites hontes", ces petits moments pas vraiment importants dans votre vie qui vous font rougir comme un abruti, où les autres se foutent bien de votre gueule, mais que en fait, vous ne vous en souvenez plus vraiment ; cela peut être l'erreur d'avoir salué votre nouvelle voisine par un "bonjour, monsieur !", par exemple. Au niveau supérieur, de cinq à neuf, vous avez les "la vache, la honte !", ces petites histoires que vous n'osez pas vraiment raconter devant tout le monde, qui, mûrissant avec l'âge, deviennent quelques décennies plus tard un sujet de rigolade qui vous en a bien fait baver pendant plusieurs années malgré tout ; citons le jour où vous avez oublié de mettre une culotte et que vous portiez une jupe plutôt courte au travail, ou encore celui où vous avez frappé une poule avec rage devant Anju, juste après votre demande d'adoption de poussin où vous vous affirmiez ami des volailles. Et il y a le dernier niveau, qui ne s’atteint qu’au chiffre dix. La Honte. Celle dont vous vous souviendrez toute votre vie, dont vous aurez l’horrible souvenir tous les matins au réveil, dont vous n’oserez jamais en parler – même à votre confident le plus proche diplômé de la plus prestigieuse école hylienne de psychologie. Elle est différente selon chaque personnalité.
Et Velvet était à deux doigts de vivre sa Honte.
En fait, tout ceci avait commencé par une simple remarque sur le nouvel époux de l’une de ses connaissances, qu’elle avait partagé avec la fille de l’oncle du cousin par alliance de l’ex-femme de son beau père, et amie, Kitha. Une simple, très simple remarque composée de deux très simples mots qui viendraient à l’esprit de quiconque rencontrerait l’homme en question, à qui justement Kitha avait rapporté les paroles de Velvet. Vous suivez ? Bon. Figurez-vous donc que l’homme ne s’en était point offusqué, mais qu’il l’avait dit à son épouse Calypso entre deux sujets de conversation, et que celle-ci l’avait en revanche très mal pris.
GROS ET MOUSTACHU ? TALON EST GROS ET MOUSTACHU ?
De fil en aiguille, Calypso somma son époux de répondre de cet affront, ce qu’il fit pour calmer la rage incontrôlable de sa compagne en envoyant Velvet travailler dans son ranch pour éviter de remplir une cellule de plus et récupérer de la main d’œuvre gratuite, car on ne traite pas une célébrité de grosse et moustachue, et puis aussi que depuis que Malon avait grandi, elle s’était distraite de ses occupations et préférait batifoler avec les jeunes clients plutôt que s’occuper de leurs montures, tâche à laquelle Ingo prétendait lui-même d’affairer nuit et jour, sans résultat véritablement remarquable.
C’est ainsi que Velvet se retrouva dans ce ranch minable, paumé au milieu de nulle part, à ramasser…
DE LA MERDE ET DE LA PISSE ?
Du crottin et du purin, la corrigea Talon, tandis que Calypso arborait un sourire triomphal derrière l’épaule de son époux.
Lorsqu’elle apprit avec quoi elle allait occuper sa prochaine semaine, Velvet retint d’abord de ne plus jamais dire d’un homme qu’il était gros et moustachu, mais plutôt musclé et viril, c’était moins risqué. Peu enthousiaste à l’idée d’aller travailler pour la première fois de sa vie sans même être payée pour le simple motif d’avoir énoncé – et pourtant discrètement – la vérité, la jeune femme décida pourtant de se comporter en citoyenne modèle et alla au ranch l’Hyliani suivant, jour où commençait son contrat de travail, habillée comme à son habitude en courte robe et escarpins à talon, tout en sachant qu’elle allait y rester pour toute la semaine, puisque dans son immense générosité, Talon lui avait promis une chambre et deux repas par jour. Elle regretta très rapidement d’avoir oublier plusieurs tenues de rechange et dut se résoudre à jeter ses vêtements et ses chaussures, irrécupérables, rongés par l’acidité des urines des animaux du ranch (acidité actuellement étudiée par les armées du Seigneur du Malin pour une utilisation en temps qu’arme de destruction massive des habits, de façon à ce que les soldats de la princesse, une fois mis à nu, fuiraient en courant les fesses à l’air face aux troupes des ténèbres). Après lui avoir aimablement noué les cheveux d’un bandana noir, Malon lui fit le don d’un immonde ensemble composé d’un pull et d’un pantalon en coton gris, resserré aux chevilles, signé du logo Naïque sur la fesse droite et la poitrine, ainsi que d’une paire de sabots de bois affreusement lourds et douloureux, qui obligeaient la séductrice à marcher les jambes arquées et les pieds en canard.
Honteuse de cette tenue ridicule, Velvet était tout de même rassurée par le fait que seuls les paumés et les loosers trainaient leurs guenilles dans ce taudis façon petite maison dans la prairie, et qu’aucun de ses bons partis n’iraient la voir accoutrée ainsi.
Elle ne remarqua pas le lendemain la magnifique créature assise à côté de cette nunuche de Malon, trop occupée à se préparer psychologiquement à ce qui l’attendait ; elle transportait d’ailleurs le crottin vers le tas de fumier au moment de l’attaque des cocottes – qu’elle détestait, d’ailleurs, les fientes étaient bien plus coriaces à enlever que les excréments des écuries. Sa journée finie, elle allait remonter dans son grenier, véritable petit coin de paradis une fois que l’on avait passé une dizaine d’heures d’affilée à ramasser la merde des autres, quand Talon lui demanda d’apporter des draps pour le client qui venait de se faire laminer par un escadron entier de poule. Elle laissa ses sabots à l’entrée du bâtiment et remonta son affreux pantalon jusqu’aux genoux après s’être lavé les mains au puits, prit un drap blanc dans une des armoires et alla le déposer dans la chambre, à côté du lit sur lequel était avachi le client. Oubliant que lui apporter le drap avait été une pure perte de temps, Velvet observa de plus près le jeune homme, dont le visage écorché lui rappelait vaguement quelque chose. Un chiffre lui revint soudain en tête.
150 rubis.
Diantre !
Le Prince, bien sûr ! Elle regarda un instant sa tenue et se dit que même s’il était marié, il pourrait toujours lui être utile et qu’il faudrait donc être présentable devant lui ; elle repartit donc rapidement chercher de l’eau au puits, passa avec un seau rempli devant un pauvre type qui parlait à une poule sans même le remarquer, versa celle-ci dans un baquet de la salle de bain et se fit une rapide toilette froide en mettant le plus de savon possible afin de se débarrasser de cette immonde odeur. Rincée, les cheveux à nouveau propres soigneusement attachés en un chignon improvisé, une serviette enroulée autour de son corps pour éviter de prendre froid le temps qu’elle choisisse ses vêtements, elle allait ouvrir une étagère pour voir ce qu’elle pouvait se mettre lorsque la porte s’ouvrit et se referma violemment sans qu’elle n’y ait touché, ayant laissé passer entre temps un jeune homme qu’elle put tout juste qualifier de splendide avant que celui-ci ne fasse un pas en arrière, face à l’entrée dont le bois se perça brusquement en de multiples endroits, laissant apparaître les becs des poules que Talon chérissait tant.
Bonjour, je voudrais un lait Lon-Lon, au shaker, mais pas à la cuiller. Mon nom est Tiduslegend, mais vous pouvez m'appeler Tidus...
Il lui avait beuglé ça comme à une serveuse, tentant tant bien que mal de couvrir par une feinte assurance son essoufflement et les tremblements de sa voix, comme si un monstre l’avait poursuivit à travers tout le ranch. A l’autre bout de la pièce, Velvet, nue sous sa serviette de bain, tenta d’improviser le tout pour le tout afin de tirer le plus de bénéfice de cette situation inconfortable et de s’en sortir sans dommages corporels ou psychologiques – devenir la risée du royaume était son pire cauchemar, sa Honte, quoi. S’appuyant sur un des murs de la salle, elle plaça ses épaules en arrière afin de mettre en valeur sa poitrine, regardant le nouvel arrivé dans les yeux tout en lui disant de sa voix la plus mielleuse :
Legend, Tiduslegend ? Le Tiduslegend ? J’ai souvent entendu parler de vous et de vos exploits, mais n’ai jamais eu l’immense honneur de vous rencontrer en personne… Mais pardonnez moi, je vous parle et j’oublie votre demande, suivez-moi je vous prie, je vais vous apporter votre lait.
Elle passa devant lui, promenant le bout de ses doigts sur le torse du jeune homme avant d’ouvrir la porte dans une nuée de plumes que les cocottes – toujours plantées stupidement dans leur planche de bois – avaient perdues en battant inutilement des ailes comme si cela allait sortir leurs becs de leur prison de chêne.
Au moins une bonne chose de faite, elles ne chieront qu’à un seul endroit, comme ça.
Velvet passa derrière le bar et servit ce que le client lui avait demandé, remontant de temps en temps sa serviette qui glissait.
32 rubis.
Devant le regard étonné du jeune homme, la blonde fit un geste de la main comme pour chasser une mouche avant de poser son coude sur le bar pour lui expliquer la raison de ce prix plutôt exorbitant pour à peine un verre de lait.
Je vous ai choisi le plus frais des laits, pas celui à demi caillé que l’on sert habituellement, et il y a aussi le shaker, il faut le faire, le nettoyer, tout ça…
Non, en vérité il n’était pas plus frais que les autres, mais elle tentait juste de ramasser quelques rubis de plus.
Enfin, assez parlé d’argent, parlez moi un peu de vous, Tidus… Comment un homme comme vous est arrivé dans un lieu aussi perdu ?
Elle s’en fichait complètement, à vrai dire, et s’il lui répondit quelque chose, elle ne l’écoutait déjà plus, attentive à d’autres voix venant de l’étage. Elle reconnut un des rires pour l’avoir déjà entendu deux ou trois fois à certaines soirées mondaines qui finissaient toujours bizarrement, et celui-ci lui remémora son objectif premier : le prince. Elle repassa donc dans la salle de bain, récupéra dans une des étagères une culotte à Malon qu’elle enfila en moins de deux, et hésita un instant avant de prendre une des chemises rouges de Talon, qui une fois fermée et les manches remontées lui faisait une parfaite robe, puisqu’elle lui tombait jusqu’aux cuisses – forcément, il fallait bien que le fermier fasse passer toute cette graiss… musculature quelque part. C’était déjà mieux que les accoutrements de sainte nitouche de Malon. Pieds nus, elle monta les escaliers quatre à quatre, s’arrêta devant la porte de la chambre de Dun, entrouverte, et osa passer sa tête par l’ouverture, ne sachant à quoi s’attendre avec ce que lui laissait envisager les rires fous qui en sortaient.
Prince… ? lança-t-elle d'une petite voix timide, les yeux fermés, craignant de les ouvrir et de regretter ce qu'elle verrait dans cette chambre.