De flocons et de neige

[Libre, 1er et 2nd posts pour Link et Llanistar (apres l'ordre m'en tamponne ^^)]

[ Hors timeline ]

[HRP : On se situe après les catastrophes, et après que Link ai récupéré son dernier sceau.]

La prêtresse arrive enfin. Où? Elle ne le sais pas vraiment.
Elle se prends la tête dans les mains, met un pied devant l'autre, et avance.
Chaque pas est difficile, chaque pas la fatigue encore davantage.

Elle se souvient du mont, elle se souvient de la chaleur des flammes, du bruits des explosions, des tremblements de la terres sous ses pieds. Elle le souvient des rencontres, d'abord de sa Sœur Farore, puis du troisième Champion. Elle se souvient des bruit d'une confrontation, entre un homme qui souhaitait les entrainer, elle et Farore, dans un lieu a frissons et le Seigneur du Désert. Elle se rappelle vaguement les cris de bête que poussait le Gerudo, alors qu'elle sombrait dans les limbes de l'inconscience.

Et puis plus rien.

Jusqu’à son réveil. Elle se trouvait alors dans un coin d'une ruelle de Cocorico. Au vu des bruits et de l'agitation qui régnait alentour, la prêtresse devina, que les bonnes gens du village, essayaient de faire de leur mieux pour que les flammes ne dévorent pas leur chez soi.

Flora avait alors fuit le village et ses habitants pour se perdre dans la plaine d'Hyrule.

Durant les jours qu'elle passât a errer, de sombres nouvelles et une plus joyeuse de firent connaitre. Mais la n'est pas le sujet de ce texte, et je passerais dessus, comme sont passés la pluie sur les montagnes, comme un vent dans les prairies.

Enfin bref, on est là, aux portes du Ranch, avec une petite prêtresse, toute échevelée, décoiffée, apeurée.
Sa robe et son manteau sont déchirés, probablement dut a une rencontre avec des ronces d'hiver, qui a aussi griffé sa peau.
Dans sa fuite, la petite miss a perdu ses chaussures.

C'est donc pieds, mains et visage bleuis de froids, que la prêtresse de Nayru tomba a genoux devant les palissades du ranch LonLon.
Suivant l’écorce polie de ses doigts engourdis elle trouva finalement l'entrée du domaine. toujours en se guidant de ses mains au toucher maintenant incertain, elle arriva a une porte (celle ou dans le jeux, Talon nous attends avec des cocottes), ou elle tambourina de ses maigres forces.

Pourtant ses oreilles l'avertirent d'une cavalcade et La prêtresse se recula, laissant passer un .... cheval?
Elle sentit le souffle d'air sur son visage, chargé de l'odeur de foin de la bête, perçut le "Olaa" du cavalier.

Qui est ce?


[J'ai crée une ouverture au cas ou l'un de vous deux voudrai arriver a dada ^^]

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Ses doigts se desserrèrent, laissant tomber les fines lanières de cuir qui formaient les brides. Il n'appréciait que peu monter le palefrois ainsi, mais force était de constater que si plus jeune il avait su parcourir des coudés et des coudées sans selle ni mords, il avait nettement plus tendance à ressentir les désagréments que pouvait impliquer de chevaucher aussi sauvagement qu'il l'avait toujours fait. Mais pis encore, il savait pertinemment comment Talon et Malon auraient réagi en le voyant arriver ainsi, aussi avait-il préféré harnacher et seller Epona avant de se rendre au Haras du Domaine Lonlon.

Son épaule le lançait. Il lui semblait que tout son corps lui disait la douleur à laquelle il se soustrayait le plus souvent. Plus d'une fois, la magie avait réparé ses os brisés, refermé ses chairs déchirées, remplacé ses tissus brûlés, lavé son organisme empoisonné et pansé les plaies qu'il n'avait eu le temps de soigner. Parfois, il avait l'impression de vivre avec un corps vieux. Un corps aux articulations mortes, au cartilage depuis longtemps disparu. Il poussa un profond soupir, avant de fermer les yeux, puis jeta ses bras au ciel. Besoin de s'étirer. Besoin de marcher, aussi, mais ça, il n'aurait le temps que plus tard.

Llanistar van Rusadir avait été clair, avant de s'en aller se coucher, la dernière fois qu'ils s'étaient vus. Ni lui, ni l'Officier ne savaient à ce moment là ce que comptait faire le blond. En fait, le Général s'était peut être posé la question – peut être pas –, mais le Vagabond ne savait pas même où ses pas allaient le mener, après cette soirée qu'ils avaient passé ensemble. La Forêt ; en flammes. Le Bosquet Sacré, vestiges surplombant des Bois millénaires devenus odieux marécages. L'Homme du Nord, sans formuler d'ordre (sans doute ne se le serait-il pas permis) avait demandé à l'Enfant-des-Bois de revenir au Ranch de Malon aussitôt qu'il lui en serait possible, aussi vite qu'il aurait terminé ce pourquoi il devait se rendre à la pointe Sud-Est du Royaume.

Le « Petit-Être » qu'il avait recueilli sur le parvis du Temple de la Forêt tournoyait autour de son avant-bras gauche. Léger, il flottait dans les airs, et en dépit de son apparence enflammée (mais bleue — Hyrule est contrée de magie), l'esprit ne brûlait pas. Peut être cela était spécifique au Héros, il n'aurait su le dire. Toutes ces sorcelleries lui étaient par trop étrangères, néanmoins, il aurait fallu qu'il soit le dernier des idiots pour ne pas remarquer que le tranchant de l'Épée de Maître s'était affiné, que sa silhouette s'était dessinée à nouveau. Purifiée, presque.

Alors qu'il laissait tourner tout autour de sa main d'épée originelle ce verrou qui maintenait en place il ne savait quel aspect de sa lame, il ramena l'autre juste en dessous de son front, au dessus des yeux pour l'improviser visière. L'astre du jour n'avait pas la force qu'il possédait en été, pourtant la neige qui s'étalait un peu partout faisait miroir parfait et reflétait la lumière. Il n'avait guère de moyen très efficace de s'en protéger, aussi faisait-til comme il le pouvait. Les plus grandes terres fermières n'étaient plus si loin, et de toute évidence, ils y seraient, la jument, la Fée et l'Hylien, avant la tombée de la nuit. Le Fils-de-Personne se doutait que le Rusadir n'avait pas attendu sur place depuis leur dernière entrevue — il l'espérait, du moins. L'état qui frappait son tout récent frère-de-sang aurait expliqué qu'il soit resté si longuement chez Talon, mais n'aurait jamais apporté l'espoir qu'il se devait de donner aux Hyliens. Ni redoré le blason par trop terni par les écrits qui lui avait été montrés.

Link reprit les rennes entre ses mains bardées de cuir, et éperonna (dans la mesure du possible ou cela peut être fait sans piques sur les bottes) l'animal.
« Yah ! » Lança-t-il avec vigueur, alors que ne partait au quart-de-tour la douce mais brûlante Epona. Avant même que ne fussent avalés les premiers pieds, le Sceau de Mémoire et de Pensée disparût comme il l'avait fait au Bosquet Sacré, et Navi se glissa dans le bonnet vert du Faux-Kokiri. Chaque galop soulevait des gerbes de neige qui restait encore, malgré la cessation des chutes. L'Hiver avait été froid et rude, il faudrait encore un moment pour que la neige ne disparaisse tout à fait du paysage d'Hylia.

Il avait vu juste, et la voute céleste se teintait d'un rouge orangé particulièrement chaud pour une nuit d'Hiver quand Epona passa les gorges de l'exploitation de Talon. Il ralentissait déjà le destrier depuis quelques lieux, mais n'hésita pas à la calmer plus encore. Il avait remarqué, depuis la fugue de Malon (dont Talon l'avait averti un peu plus d'une semaine plus tôt) que son amie devenait particulièrement angoissée quand elle se trouvait à nouveau sur ces terres qui avaient failli voir leurs morts, à tous les deux. L'incendie déclarée par les combats pour elle — le duel contre le Gérudo pour lui. Et comme à chaque fois qu'il y repensait, il serra le poing au point d'en faire craquer les articulations, et pâlir les jointures. Tant de choses inaudibles en raison des sifflements de l'air, et invisible de par ses gantelets-bracelet de force qui ceignait ses poignets et avant bras.


"Olàà... Tout doux ma belle." Murmura-t-il à l'adresse de l'équidé, alors que ne mugissait le vent dans son dos. C'est tout entier qu'il trembla, pris de frisson, quand une violente bourrasque s'acharna a faire chuter d'au moins huit degrés sa température corporelle. Fou eut-il été que de continuer sa route par un froid pareil, quand bien même Llanistar ne lui aurait pas demandé de le rejoindre ici ! C'est au pas qu'il la forçât cependant à continuer, jusqu'à distinguer une forme étrange qui perçait le lourd opercule blanc de cette saison meurtrière. Qu'était-ce ? Un tonnelet oublié par le vieux-Talon ? Certainement pas. Ca bougeait de toute évidence. Et ça reculait. C'était humain, et vivant. Comment cela pouvait resister par un temps aussi atroce..!

Il sauta à terre sans attendre plus longtemps, et vint s'agenouiller devant la demoiselle. Il découvrit le visage de l'inconnue, masquée tant par la neige que par un tissu malmené par il ne savait quoi.
« Là... » Fit-il, dans l'idée de la rassurer. Le froid qu'elle avait affronté l'avait forcément violentée, et il ne lui voulait que du bien. Il savait que parfois une simple présence pouvait sauver une vie. « Tout va aller pour le mieux, Flora. C'est fini. » Continua l'Hylien sur une toute petite voix, en reconnaissant la Prêtresse de Nayru. Il fit claquer sa langue à l'adresse de sa monture, qui s'approcha encore un peu, en silence, et sans quitter la Dame Bleue, il tira une couvrante qu'il passa sur les épaules de la jeune femme.

Ses propres doigts virèrent eux même au bleu quand le Fils-de-Personne les enfonça dans la neige pour soulever la sacerdoce. Elle lui semblait si légère, si fragile qu'il en avait peur de la briser. Le blond n'avait jamais ressenti cette crainte auparavant, que ce fut pour Zelda, Malon, ou même Saria. Bien sûr, il les avait déjà vues mals voir presque effondrées, mais qu'il s'agisse de l'une, de l'autre, ou de la troisième, quand bien même il les avait toutes trois protégées (et parfois dans des situations véritablement désespérées), il ne lui semblait pas avoir senti pareille détresse chez elles. Peut être était-il trop jeune pour ressentir celle de Belle, quand elle fuyait le Castel-Real ? Peut être portait-elle depuis bien longtemps déjà la responsabilité du Royaume sur les épaules pour laisser transparaître ses faiblesses, même auprès de lui ? Quel droit avait-il dessus, de toute façon ? C'était, jusqu'à peu, à Loireag de veiller sur elle. Pas à lui. Ca ne retirait rien à tout ce qu'ils avaient partagé, mais... Quant à Malon, il l'avait toujours connue ce sourire au lèvres, qui perçait les nuages noir mieux qu'aucun rayon de soleil. Parfois c'était elle qui lui remontait le moral, en réalité. Il l'avait connue désoeuvrée après la mutinerie d'Ingo, elle n'avait pas baissé les bras, et pour ça il l'avait admirée.

Il ignora son coeur qui se serrait et emboutit la porte d'un coup d'épaule qui lui laisserait surement la tête de l'humérus en morceaux. Link grimaça, retenant un gémissement de douleur. La peste soit cette guerre qui poussait les gens à se barricader chez eux. Il avait fait sauter son épaule gauche pour défoncer une porte qu'il s'était cru toujours toujours ouverte.


"Funérailles..." Souffla-t-il, haletant, mais à l'intérieur. « TALON ! » Hurla-t-il, en s'époumonant avec autant de force qu'il lui était possible de le faire. Son épaule le lançait, le Héros du Temps savait qu'il ne serait pas à même de garder l'avatar de Nayru dans ses bras des heures durant. « Talon.. » Reprit-il, baissant les yeux, et brisant la nuque sous le poids de la douleur.

"Tu m'as appelé p'tit-ga... — Oh ! Nom d'une cocotte !" S'étonna le vieux fermier quand il arriva, encore endormi, dans l'épaisse étoffe qui lui servait de robe de nuit. Ses yeux passèrent de la Prêtresse à l'Hylien, puis de l'Hylien à la porte. « Saperlipopette ! P'tit gars ! » Reprit-il immédiatement, surpris, interdit, presque. « Prends. » Lâcha Link, desserrant enfin les dents et mobilisant un bon nombre de ressources pour ne pas hurler au passage. Les Déesses seules savaient de quel bois étaient faites les porte du Ranch. « Je paierais. Trouve lui une chambre. Vite ! » Souffla-t-il à nouveau, en passant Flora à Talon, qui peina d'abord à la porter, mais l'emmena ensuite vers la chambre de Malon. Il ne pouvait de toute façon pas ignorer son état. Naïf et benêt, peut être, mais loin d'être un idiot.

Dès lors qu'il fut à nouveau seul, Link se laissa chanceler. Bien des gens diraient qu'ils avaient connus pire, certes. Quelques uns pourraient être des menteurs, d'autres dire vrai. Lui même avait survécu à d'autres blessures. Mais la peine, physique ou quelque soit la forme dans laquelle elle se manifeste peut parfois empêcher d'avancer. Ses genoux rencontrèrent le parquet, et il lui semblait qu'on lui avait scié les jambes.
« Funérailles... » Murmura-t-il à nouveau, éreinté. Par dessus les combles, le Soleil avait fait place à la Lune.

Quand Talon revint vers lui, il s'était relevé, avec tout le mal du monde. Sa main droite lui avait servi de béquille tout du long, et il s'était appuyé sur le mur qui faisait office d'escalier et menait jusqu'au chambres des propriétaires.
« P'tit gars... J'aimerais qu'tu m'expliques. J'y pige —
Plus tard, l'ami. Avant, j'ai besoin de toi. Tu peux écrire pour moi ? »

Talon le dévisagea, toujours aussi interdit. Il se doutait bien que son vieil ami ne comprenait pas la moindre des choses qui se passait sous son toit. « Pour sûr. » Le vieillard se mit à chercher un peu de papier, d'encre et une plume. « La petite est à l'étage. Je l'ai laissée dans la chambre a Malon. »

Vingt minutes s'écoulèrent avant que ne s'envole un oiseau en direction du Château d'Hyrule. Le Général Rusadir le recevrait dans le courant de la nuit, et arriverait très certainement dans la soirée du lendemain.


« Tout va aller pour le mieux, Flora. C'est fini. »

Elle reconnut le cavalier rien qu’a sa voix.
« Link ? » avait elle murmuré, alors qu’il la soulevait de terre, la protégeant de cette neige qui maintenant la brulait. Perchée là la prêtresse avait passé ses bras autour de la nuque du Héros, tremblant encore de froid.
Flora sombra doucement dans l’inconscience, alors que le jeune homme se brisait une épaule contre la porte, celle la même que la prêtresse avait tambouriné un peu plus tôt.


Tu m'as appelé p'tit-ga... — Oh ! Nom d'une cocotte !"

Dans un sursaut de conscience, elle gémit quand elle fut transférée, passant de la sécurité offerte par Link, a celle moins connue de Talon, homme un peu bourru qui s’occupa gentiment d’elle.
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La nuit passa, la prêtresse dormit, ou pas, fiévreuse, un peu. Agitée, non. Épuisée. Elle rêvât comme rêve une non voyante, en sons et en sensations. De Ganondorf, de sa Sœur Farore, de la Grande Nayru. Elle rêva de Hollowtimes et ses manigances contre elle….
Et bientôt le matin fut la.

La petite prêtresse se redressa et s’assit dans les draps, les mains posées sur ses genoux, la tête penchée de coté, comme elle lui pesait.


« Ah, t’es réveillée ‘tiote ? »

Elle releva la tête, la tournant vers la provenance de la voix.

« Qui est là ? »

« Rien d’plus que s’bon vieux Talon. » On pouvait entendre un sourire dans la voix du fermier rondouillard. Sourire auquel la jeune fille répondit sans y penser. "T’as fait une belle peur au p’tit gars hier, t’sais ? "
Elle ne répondit pas, ne sachant quoi dire. Elle levât ses yeux blancs vers Talon avant de se lever.

« Tiens, là ya qu’qu’chose pour toi. »

Elle sentit qu’on lui posait sur les genoux, un paquet de tissus et entendis la porte claquer. S’habillant de la tenue simple, la prêtresse se demanda où elle avait atterrit.

Puis elle ouvrit la porte pour descendre. En bas, il y avait plusieurs voix qui discutaient, se disputaient ? Descendant doucement et silencieusement les marches, la jeune fille tenta d’en saisir le contenu. Visiblement Link s’était blessé et refusait les soins. Elle s’avança :


« Peut être puis je aider ? »

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La neige continuait de tomber drue. Ses yeux se perdaient, son regard s'affaiblissait, loin, par delà les carreaux sales du bureau de Talon. Son oeil s'aventurait loin à l'Ouest, comme souvent. Et d'office, il était pris d'un de ses sentiments inexplicables et inexpliqués. Sans qu'il ne sache réellement ce qui l'influait autant, le blond laissait les questions tourner et tourner encore au plus profond de son être. En dépit des apparences, il lui arrivait souvent de se demander ce que serait le monde s'il n'avait pas commis toutes ses erreurs ; ce qu'il aurait été si la Souveraine ne l'avait pas renvoyé vers un passé alternatif au présent qu'ils vivaient tous dorénavant ; si son action n'était pas qu'une simple goutte d'eau chargée de lutter contre le brasero enragé. Il avait sauvé – du moins, il l'espérait – une vie ce soir, mais combien mourraient pour un de secouru ?

Le fermier avait eu la patience et la gentillesse de bander son épaule, malgré la douleur qui rendait le « p'tit gars » parfois irascible, presque atrabilaire. Le travail du bedonnant Hylien était toutefois plus symbolique qu'autre chose, mais il avait tenu à aider, et en dépit de la peine qui irradiait depuis son épaule jusqu'à partout dans son bras, le Fils-de-Personne ne pouvait qu'être touché par la dévotion de cet homme qu'il connaissait depuis si longtemps.

Il était accoudé sur le mobilier de Talon, abandonné dans une large pièce qui servait vraisemblablement au vieil homme à travailler sur ses comptes. Jamais il n'aurait imaginé que son ami disposait d'une telle surface pour de telles taches. Le cabinet devait bien mesurer plusieurs centaines de setiers, mais restait humblement meublé. Un pupitre rudimentaire, taillé grossièrement dans un bois qu'il soupçonnait être le même que celui qui avait servi à monter la charpente des corps de fermes, une fenêtre, et une cheminée aux braises encore rouges.

L'éleveur était parti attacher la lettre qu'ils avaient écrite ensemble à la patte d'un oiseau susceptible de supporter le voyage. Le seul contretemps dont pourrait dorénavant souffrir le message tenait du rapace ou d'un quelconque autre prédateur ailé et friand de corbeau messager. La simple présence des ces sieurs noirs chez Talon inquiétait plus avant Link : c'était le témoignage évident de l'insécurité qui régnait en maître sur les Terres d'Hylia. Le bretteur soupira face à cette nouvelle preuve qui l'accablait. Ce jour neuf en lequel il continuait à croire existerait-il réellement ? Et cette guerre ? Aurait-elle véritablement une fin ?

Son regard accrocha la lune au moment ou le vieillard fatigué entra de nouveau dans le directoire, l'air déconfit et les yeux lourdement cernés. Il n'avait plus cette impétuosité de la jeunesse qui lui aurait alloué la capacité à tenir toute une nuit sans dormir — ou à l'interrompre d'une façon aussi soudaine.
« La petiote est couchée, elle dort. J'y ai mis les couvertures les plus chaudes pour pas qu'elle chope une saloperie. C'te foutu hiver dure depuis ben trop longtemps s'tu veux mon avis. » Le Faux-Kokiri déporta la tête de façon à faire face à Talon, quittant donc le point de fuite qu'était devenu l'Astre des nuits. « C'est la Prêtresse de Nayru. » Lâcha simplement le tout-de-vert-vêtu, en se retournant une seconde fois. « Hein ? » Fit l'autre, sans doute trop endormi (ou ahuri) pour réaliser. « C'est la Prêtresse de Nayru. » Répéta l'autrefois Champion de Farore, sur un ton aussi neutre que la première fois, toujours sans regarder son hôte.

Talon commençait à l'agacer et bien que l'Hylien mettait ça sur le compte de la douleur que lui infligeait son os réduit en miette, les balbutiements ne l'aidaient pas. La fatigue, la route, la souffrance, ses tourments posés sous forme de questions sans réponse et la prétendue surdité de l'homme rendaient le Héros relativement acariâtre. Il avait conscience que le paysan lui offrait un toit, et qu'il l'avait déjà largement aidé par le passé, mais ne parvenait pas à se séparer de ce sentiment à son égard, en ce milieu de nuit.
« Tu devrais aller te coucher, Talon. Nul ne sait de quoi sera fait la journée de demain. » Il avait été sans appel, et son vieil ami l'avait compris. Murmurant un « prends soin de toi », il s'éloigna doucement, la tête basse.

Longue allait être la nuit.

La solitude revint quand claqua la porte. Le propriétaire du Ranch avait mis tant de douceur dans son geste qu'on aurait eu l'impression qu'une étoffe feutrée atténuait le choc. Et le masque que le Fils-de-Personne s'acharnait à porter tomba. Il cessa de garder la tête haute, se laissant aller à la douleur. Ses lèvres se pincèrent et pâlirent. Ses dents grincèrent, ses paupières s'écrasèrent sur ses yeux. De petites perles naquirent, dans le plus grand des silences. Et dans l'âtre mourraient les braises.

Un instant s'écoula, sans qu'il ne puisse le quantifier en unité de temps. La jolie sphère argentée avait pris ses distances avec les carreaux, mais dehors tombait toujours la neige. Sans sanglots ni gémissement, il se leva, perpétuant cette presque-tradition du silence qui s'installait dans le bureau de Talon, et s'avança jusqu'à la fenêtre. Un bras pendait contre son flanc, et chaque mouvement qu'il eu put faire avec lui aurait arraché un râle, sans doute. C'est donc l'autre qui se chargea d'ouvrir en grand les verres qui le protégeait des flocons. Irresistible envie de sentir les bourrasques lui secouer les cheveux, la neige fondre sur ses joues. Le désir de se sentir vivant.

Doucement et hésitant, son timbre de voix vint côtoyer les vents froids qui giflaient les bâtiments et son propre visage. Il fredonnait timidement, l'air qu'il fredonnait déjà auparavant, en pénétrant la Grand-Salle du Gérudo. Cet air qu'il avait appris de Malon sans que jamais elle ne lui donne la moindre leçon. La fatigue frappait lourdement à sa porte, mais il préférait faire le sourd, se refusant au sommeil. Il ne dormirait de toute façon pas cette nuit. Il le savait. Le Poisson-Rêve viendrait se rire de lui, sans jamais l'emporter.

Et comme chaque aube, au terme de chaque nuit, tout aussi tourmentées puissent-elles être, le Dieu-Soleil vint chasser tous les démons et toutes les peurs des Hyliens. Le Fils-de-Personne laissa sa lame reposer contre l'angle du mur – comme elle le faisait depuis qu'ils étaient montés au bureau avec Talon – avant de descendre, désireux de se laver le faciès et de grignoter quelque chose. Fatigue plus que jamais, faim et douleur le tenaillaient. L'étoile du matin avait partiellement effacé ses peines de la veille, mais il ne pourrait pas se servir de son bras avant des semaines.


"Déjà levé ?" S'enquit le fermier. « J'ai am'né d'quoi s'habiller à ton amie. Ca va-t'y mieux ton bras ? » Link se contenta d'un hochement de tête, avant que l'homme aux favoris n'élève le ton en lui faisant part de ses inquiétudes. Jusqu'à ce que ne perce la voix fluette et flutée de Flora.

"Aider à ?" Demanda-t-il simplement en se retournant, et en constatant l'effort qu'avait fait seul la Prêtresse. La sacerdoce avait su, malgré sa cécité, descendre un etage dans une demeure dont elle ignorait tout, impressionnante de par sa prestation. Et en cet instant le blond ne put qu'admirer la frêle enfant qui se dressait devant lui. « Je suis heureux de voir que tu vas mieux. » Ajouta-t-il, avant qu'elle ne réagisse à sa propre interrogation.

"Tu devrais faire attention à toi..! Par les Déesses, qu'est-ce qui t'as pris d'aller trainer de nuit par un froid pareil ?!" Soudainement, peut être s'était-il fait un brin moralisateur, mais l'inquiétude qui perçait dans sa voix était sincère. Il n'en dirait rien, mais la jeune fille avait eu de la chance que le Général Rusadir lui ai demandé de repasser par les terres du Domaine Lonlon. Somme toute ; c'était à son dorénavant-frère de Sang qu'elle devait la vie plus qu'à lui, ne put-il s'empêcher de penser.


"Tu devrais faire attention à toi. Par les Déesses, qu'est-ce qui t'as pris d'aller trainer de nuit par un froid pareil ?!
- Je me suis perdue…”


Elle avait prononcé ces mots d’une petite voix, baissant les yeux, se tordant les mains. Puis dans un sursaut de rébellion, elle redressa la tête, planta ses yeux qui ne voient pas, dans ceux de Link.

“Je me suis perdue. Tu ne sais pas, tu ne sais pas, ce que j’ai éprouvé ces dernières semaines, à être d’abord chassée comme un gibier, puis à me retrouver au mont du péril lors de son explosion, prise au piège par les flammes, Ganondorf et cette guilde des Âmes; dont tu ignore tout, et avec l'aide douteuse de l'Oracle Verte! Tu penses peut être que je suis une enfant fragile, mais, Link, mon ami, je suis la Prêtresse de Nayru, et malgré ceci – elle désigne ses yeux blancs – il faut que j’effectue mes tâches.”


Puis elle répondit, d’une voix douce à cette question restée muette entre eux trois
:

“J’ai pu descendre les escaliers, car j’avais entendu messire Talon le faire juste avant. Tout comme je sais où il se trouve, car je l’entends respirer.”


Sans hésiter, elle désigna d’un geste du poignet le fermier.


"Au fait, merci pour la tenue, elle est agréable a porter."


Pour le coup elle ne put voir la réaction de Talon qui sourit dans son coin, comme si voir Flora tenir tête au "t'it gars" ça l'enchantait l'air de rien. Comme si le vieux Talon se disait "Tiens celle ci elle te ferait courir gamin."
Enfin, l'oracle bleue s’approcha de Link la main ouverte.


“Montre-moi où tu as mal. Je l’entends quand tu parles, tu serres les dents et tu es de mauvaise humeur. Tu sais que je peux guérir. Link, laisse-moi t’aider, s’il te plait. Je te dois bien ça… "


Un sourire pâle sur les lèvres de la petite prêtresse. Son estomac émit un grondement sourd, du genre qui fait exploser l’assemblée en rires. Elle ouvrit grand les yeux et une mimique de surprise apparut sur son visage.


“Pardon ce n’est pas seyant pour une religieuse…. "


Avec une moue gênée, la petite prêtresse colla sa seconde main sur son abdomen, comme pour lui intimer de se taire. Puis elle redirigea ses yeux sur le Héros du Temps, de cette manière dont elle a le secret et qui donne toujours le doute quant à sa cécité.

“Link, j’aimerais vraiment t’examiner avant qu’on me force à avaler quelque chose.”

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Quoi qui puisse être prétendu, on ne lui ôterait pas du crâne que cette Prêtresse de Nayru était suffisamment fragile pour nécessiter une protection. Plus faible que ne l'avait été Nephilis autrefois, et pourtant elle lui semblait autrement plus impliquée que n'avait pu être sa soeur l'ancienne Dame Bleue.

La cécité qu'elle pointa du doigt dans son plaidoyer n'émut pas l'Hylien comme elle émouvrait d'autres. Sans être insensible au mal dont elle souffrait, il ne la prenait pas en pitié. De la pitié, il en éprouvait vraisemblablement plus pour le vieil homme qui se tenait non loin à sa gauche. Non pas que Talon fut plus faible que l'avatar de la Déesse (quoique...) mais la perte de cette unique perle qu'était Malon le laissait dans un état tel qu'il eu fallut être aveugle pour ne rien voir. Sa fugue restait inexpliquée et incompréhensible aux yeux des deux Hyliens.

Des mots raisonnèrent néanmoins avec une vigueur toute particulière dans l'esprit du blond. Si cette « guilde des âmes » qu'elle évoquait ne lui rappelait effectivement rien, c'était uniquement parce qu'il avait été coupé du monde trop longtemps. Ce genre de groupuscules avait tendance à se faire bien rapidement connaitre en Hyrule, il le savait d'expérience. Il avait vu naitre et mourir plusieurs de ces forces en plusieurs années. Qu'il s'agisse du Cercle des Élus, des Profondes Ténèbres ou d'Hibi, il leur avait toujours survécu. Et si les deux premières organisations s'étaient pérennisées dans le paysage politique et militaire du Royaume par le biais des Chevaliers du Phénix ou de Ganondorf, d'autres s'étaient purement et simplement éteintes sans donner suite.

Il grinça silencieusement des dents quand le Seigneur du Malin fut mis en exergue. Celui que de plus en plus voyaient comme un père ou un roi restait fermement ancré comme la source des maux d'Hyrule. Il n'oubliait pas. Qu'il s'agisse de la place du marché dévastée et en proie aux Effrois ou de – plus récemment – le carnage de la Grand-Salle au confins du Désert, c'étaient là deux des images qu'il ne pourrait jamais se sortir du crâne. Et s'il le savait libre, il ne pouvait s'empêcher de se reprocher l'ensemble des erreurs qu'il avait commise et qui menaient à un tel état de fait.

La personne de « l'Oracle Verte » dont il était question ne lui signifiait rien. Combien avait-il manqué ? Il restait tant d'éléments qui avaient évolués en si peu de temps qu'il en était presque découragé. Triste ironie du sort ! A moins que... Pas tant que ça, en réalité. Il n'était plus détenteur de la bénédiction de Farore, et pour beaucoup il aurait semblé logique qu'il en sorte affaibli, si pas brisé. C'était oublier à quel point il avait toujours et en tout temps été fermé au Fragment Divin qui brillait fut un temps sur le dos de sa main.

Ce non-changement dans sa perception des choses ou dans ce qu'il était intrinsèquement ne le dispensa pas de s'asseoir sur la première chaise qu'il trouva. Un tabouret grossièrement taillé dans du chêne ou du noyer qui remplissait néanmoins tout à fait son office, quand la fatigue faisait flancher les jambes d'un des convives. Et bien que la douleur s'était invité au repas, l'Hylien n'agit pas d'une manière si différée que s'il avait simplement été éreinté comme n'importe quel ouvrier agricole aurait pu l'être après une journée de labeur.

Personne n'ajouta quoique ce soit aux propos qu'avait tenu la demoiselle au visage encadré par deux colonnes azurs. Et si le fermier n'épargna en aucun cas un regard accompagné d'un sourire en coin au Fils-de-Personne, celui-ci gardait les lèvres pincées au point de les faire pâlir de peur de hurler son mal. Pour autant l'envie de rabrouer cette mimique et cet homme qui avait autrefois gagné son amitié et sa confiance grognait au fond de lui. Le « p'tit gars » dont l'humérus gisait, en miettes, sous les mailles et les étoffes préférait taire la souffrance qu'il subissait et laisser un voile rouge couvrir ses yeux.

Alors que le bedonnant commerçant d'étalons, de vaches, de cocottes et de lait amorçait une phrase destinée à trancher net dans le blanc que Flora avait laissé derrière elle, la jeune femme reprit, notamment à propos des escaliers et de Talon. Link tiqua quand il fut question de messire, et bien qu'il trouvait que la prêtresse en donnait beaucoup, il le concéda au Gérant du Ranch, conscient de ce que cette soudaine progression sociale provoquerait chez lui.

Non sans effort, mais toujours en silence et pendant que les deux autres discutaient, il hissa son bras jusqu'à la lourde table de bois – en hêtre, certainement, quoiqu'un pin commun aurait tout aussi bien pu être à la base de sa charpente – et laissa l'enfant s'approcher main ouverte, paume vers le ciel. Ses mâchoires restaient crispées quand s'éleva la voix dorénavant moins ferme et plus inquiète de Flora. Elle parlait peut être beaucoup, mais force était de constater qu'elle savait le faire avec justesse et sincérité — que même sans yeux elle parvenait à développer une acuité dans sa sensibilité que l'on ne rencontrait que rarement.


"Personne ne te forcera à avaler quoique ce soit." Lança-t-il, un peu sec sans doute, rendu acariâtre par la douleur, après que le ventre de l'avatar de Nayru ai fini de crier famine. « En grande fille que tu es, tu dois savoir manger à ta faim, non ? » Il continua sur la même lignée, en tâchant toutefois de radoucir son timbre de voix. Conscient qu'il pouvait être presque agressif mais désireux de lui faire entendre qu'elle décidait de quand elle mangeait. « Pour ma part, j'ai faim. Je n'ai pas mangé depuis un moment. »

Environ deux ou trois jours, mais c'était autant de détails sur lesquels il préférait tenir le secret complet. Talon s'éloigna pour aller chercher un pichet d'eau, quelques grains et miches de pain, tandis que l'Enfant-des-Bois se délestait progressivement de sa tunique, puis de sa chemise de maille. Avec autant de précaution qu'il lui était possible d'en prendre avec un humérus fracturé, il finit par se mettre torse nu, et saisit la main de Flora qu'il posa sur son épaule ; non sans une grimace.


La peau était chaude, enflammée sous la main de la prêtresse. Elle sentit le frisson de douleur du jeune homme, et eu une grimace compatissante.

« Je vais faire au plus vite. »


Doucement elle laissa sa magie découler d’elle, la laissant entrer dans le corps de Link. Doucement, car elle ne souhaitait pas traumatiser l’organisme, déjà bien malmené par les errances du héros.

Bien vite elle trouva l’os brisé. Alors elle sépara son flux magique en deux parties. De la main droite, qu’elle posa sur la nuque de son compagnon, Flora anesthésia le bras en question. Tandis que de la gauche, qu’elle mit sur la blessure, très légèrement, elle envoya directement la magie pour guérir Link. Sous ses doigts la petite prêtresse sentit l’os se reconstruire et se mettre en place. Puis quand elle fut sure qu’il était en bon état, elle passa sa paume sous le coude du héros.

« Lève le bras s’il te plait, doucement. »

Toute a sa tâche, la religieuse entrepris de vérifier que l’articulation fonctionnait bien, éliminant les douleurs de l’os et des tendons.

***********************************************************

Quand l’opération fut enfin finie, Flora battit des paupières, comme si elle sortait d’un long sommeil. Bien qu’elle ait l’impression d’avoir œuvré durant seulement cinq minutes, il s’était passé bien deux heures en réalités. Et toute l’énergie qu’elle avait récupérée s’était envolée, glissée sous la peau du Héros du Temps.

Mais cela ne la dérangeât pas. Link l’avait aidée, elle lui rendait la mise. Des bruits de pas, lui indiquèrent que Talon revenait, les bras surement chargés des fameuses victuailles.
Souriant elle se penchât sur son patient :


« Ca va mieux ? »

Elle sourit à sa réponse et se laissa choir sur le banc juste a coté, soupirant. Puis dans un geste tout à fait dépourvut de mauvaises intentions, elle s’appuya contre Link, paupières mi-closes. Là, elle soupira encore une fois, avant de se frotter les yeux.

Talon les observait, la jeune fille en était consciente. Elle avait aussi conscience de sa faim. Mais bon, là où elle se trouvait, elle était juste bien. Pour peu, elle avait envie de fermer les yeux … Et de dormir.

Puis un détail, qu’elle avait ressentit lui revint. Elle avait sentit la solitude du Héros. Cela était aussi profond qu’une coupure. Alors la jeune fille se redressa et dans un geste purement amical, elle passât les bras autour du cou du jeune homme, dans une brève étreinte, avant de lui déposer un baiser sur la joue.

Après cela, Flora recala son front sur l’épaule maintenant guérie du Héros.

C’est le «
Hum, hum. » un peu gêné de Talon et le claquement de la marmite sur la table qui la firent sursauter.

« Oh, pardon …. »

Puis elle tendit la main, avec l’intention de servir les deux hommes …

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Ce fut froid, comme à chaque fois. La magie avait toujours diffusé, aussi loin qu'il était en mesure de se souvenir, un flux glacé qui cristallisait ses plaies. Qu'elle fut pratiquée par Saria, les Grandes Fées ou même Zelda n'y avait jamais rien changé. Il avait toujours cette impression d'un Hiver intérieur qui s'abattait sur lui et gelait ses sangs. C'était comme si une longue tige de glace pénétrait chaque pore de sa peau, chaque parcelle de son bras. L'Hylien avait appris à connaître cette sensation, il ne la redoutait pas moins pour autant.

De sa nuque se distilla une sorte de voile protecteur, légèrement tiède. Il fut pris d'un frisson qu'il ne pouvait ni ne voulait dissimuler. Sa main droite, posée sur la table, sembla frappée de convulsions. Ses doigts agrippèrent le bois ignorant les échardes qui mordaient sa chair, ses jointures résonnèrent en un craquement sinistre, ses phalanges virèrent au blanc. Élégant contraste avec le violet sombre qui avait recouvert l'intégralité de son épaule. L'épiderme tendue par l'os brisé aurait pu évoquer un tambour tantôt noir, tantôt mauve. La main de l'enfant palpait avec douceur la multiple fracture, il grinçait néanmoins des dents. Chaque contact lui était aussi douloureux qu'un uppercut.

Une seconde vague de magie gagna son bras, et le blizzard se précipita. Un râle s'éleva de ses lèvres pourtant closes. L'anesthésie empêchait certainement les peines extérieures ; elle restait en revanche inefficace contre les douleurs de l'intérieur. Le Fils-de-Personne ne put tenir l'expression stoïque qu'il affichait. Sa bouche se délia en cri étouffé. Son bras droit connu un soubresaut subit, se relevant contre tout ordre, avant de s'écraser sur le hêtre.
« Unnnnngh... »

Avec le Froid venait la souffrance. Link sentait ses os se briser encore et encore, sous l'impulsion des doigts à l'aura bleutée de la Prêtresse, pour mieux se souder à nouveau. Mal nécessaire à la guérison, mais qu'il avait appris à craindre peut être plus qu'aucune épée. Douleur exarcébée qu'il n'avait jamais mieux connu que quand il revêtait les masques de Termina. Changer de forme, d'ossature et d'organisme ne se faisait pas sans mal, il ne le savait que trop bien. Et réparer un os était soumis aux mêmes lois. Il avait cette sordide impression qu'on lui perçait tissus et muscles pour en arracher l'humérus, le radius ou le cubitus. Nouvelle plainte sourde. La peste avait été cette porte verrouillée, maudite soit la neige !

Peut être plus que quiconque, il n'ignorait pas le prix que réclamait toute forme de sorcellerie. Cette guérison instantanée (ou presque) allait envers et contre tous les principes de la nature, malmenait chacun des nerfs qu'il possédait. Une pareille accélération drastique du processus de convalescence était une épreuve qu'un corps humain ne pouvait tout à fait supporter. Et chaque bribe de son être le lui hurlait avec autant de force qu'il leur était possible de mobiliser. Il entendait presque ses os le supplier de faire cesser une telle torture, sa peau et ses muscles de mettre fin au massacre. Et pourtant il savait quel bien naitrait de ces maux.

Le Héros déchu regretta de n'avoir sous la main – quand bien même il ne pouvait plus bouger réellement – un morceau de cuir à se mettre sous la dent. Non pas qu'il ai faim au point de dévorer une botte, mais il ne savait pas s'il serait à même de retenir d'autres vociférations. La douleur était coriace, mais l'avatar de Nayru savait sa tâche et faisait son office. Doucement mais sûrement, la tiédeur qui émanait de sa nuque commençait à repousser le givre qui calcinait ses tissus et son os. Un peu comme le printemps finissait par chasser la mauvaise saison.

Il haletait, comme un animal blessé l'aurait fait après une course pour fuir un prédateur. La sueur perlait à grosses gouttes sur son front. Son torse luisait, recouvert d'une fine pellicule humide, témoignant de l'effort – passif ? – qu'il avait eu à fournir. Décidément, il n'aimait pas la magie. Il l'estimait perfide, sournoise, pleine de malice. Dangereuse, tant pour celui qui la pratiquait que pour celui qui recevait les soins, impétueuse et sans maître réel. Il la voyait comme une espèce de serpent menteur et prompt à rejaillir contre celui qui tachait de la charmer.


"Tu..." Commença-t-il, avant de reprendre son souffle, presque épuisé. « Tu n'aurais pas du faire ça. Tu t'es mise en danger. » Reprit l'Hylien, non pas moralisateur, mais plutôt inquiet. L'enfant au cheveux de cyan ignora purement et simplement ses propos, lui demandant de lever le bras, ce qu'il fit sans vraiment protester, sans doute trop éreinté et trop affamé.

Talon revint, sans que l'Enfant-des-Bois ai la moindre idée de combien de temps s'était écoulé. Ses yeux de givre lisaient sans mal la fatigue qui s'installait comme un masque aux traits durs sur le faciès de la sacerdoce. Ca n'était pas un sourire qui dissimulerait à ses yeux l'épuisement qui prenait la fille de foi.

Il sentit ses joues se teinter d'un léger teint rose quand elle posa sa tête contre son épaule désormais guérie (quoiqu'encore engourdie), mais préféra garder le silence qu'il imposa aussi au fermier, en glissant un doigt sur ses lèvres pour lui indiquer le silence. La Demoiselle (il avait du mal à la voir comme une Dame) Bleu semblait morte de fatigue. Le blond avait encore le regard rivé dans les yeux du Gérant – ou naissait une forme de malice qui était sans doute la même que celle contenue dans le sourire en coin, deux heures auparavant – quand Flora l'enlaça avant de déposer sur sa joue un baiser.

Ce n'était plus un simple rose qui colorait ses joues, dorénavant, mais un vermeil profond, tandis que la gêne le gagnait. Les Trois lui disent quoi faire, si Elles ne l'avaient pas abandonné, comme il le pensait depuis des années déjà, bonté divine ! Son visage se décomposa pour mieux marquer son ressenti, aussi empli de pudeur qu'il n'était touché par cet élan d'affection amicale, et le vieux paysan ne sembla pas y rester indifférent. Simulant une quinte de toux, il permit à Link de se défaire d'une étreinte qu'il n'aurait su repousser, comme paralysé par la surprise.

La Ponte del Carmen (car il s'agissait somme toute d'une des grandes figures de l'Ordre des Trois et de la plus haute femme de l'Ordre de Nayru) s'excusa et s'éloigna de lui aussi vite qu'elle ne s'était approchée, tendant doucement la main dans l'espoir, sans doute, de les servir. Talon avait apporté une lourde marmite en fonte dans laquelle bouillonnait une soupe de potiron, ainsi que trois bols relativement ébréchés, taillés dans un bois simple. L'Hylien, après s'être levé, se saisit de l'un d'entre eux, et le trempa dans le nectar au doux fumet que leur avait préparé son ami.


"Tiens." Fit-il en déposant une cuillère de bois dans la main de Flora, et en faisant glisser le bol qu'il avait spécialement rempli pour elle. Après quoi, il se baissa pour récupérer au moins sa chemise et l'enfiler. Il s'occupa rapidement de servir Talon, qui avait pris la place en tête de table, pour présider cette assemblée miniature, avant de se servir soi même, et de s'asseoir face à la jeune femme. « Tu disais tout à l'heure, commença-t-il, avant de gouter du bout des lèvres le breuvage particulièrement chaud, tu parlais d'âmes, de Ganondorf et d'une oracle verte. De quoi parlais-tu, précisément ? »

La question était vague, vraiment, mais tenait plus de l'invitation à prendre la parole que de l'interrogation réelle. Il ne tenait pas à fermer la réponse de Flora en posant des cloisons au sein même de sa demande.


La soupe sentait bon, et elle dégageait beaucoup de vapeur, indiquant sa température. La cuillère pesait lourd dans sa main, rugueux était son manche.

Pourtant Flora gouta a son tour le breuvage. Face à elle Link avait commencé une phrase. Alors elle posa son ustensile et prononçât en même temps que le jeune homme :


« … Tu parlais d'âmes, de Ganondorf et d'une oracle verte. De quoi parlais-tu, précisément ? »
« Ecoute j’ai bien réfléchis, je crois que je vais faire un bout de chemin avec toi. … »

Tous les deux ayant parlé en même temps, Flora n’avait pas compris ce que l’homme des bois lui avait dis. Il s'installa un silence gêné.


« Excuse moi, tu disais ? »
et d’un geste elle l’invita à se répéter.

Cependant, alors que le Héros s’adressait à elle, la petite prêtresse porta une main à sa tête. Ses oreilles s’étaient mises à bourdonner, et si elle avait possédé la vision, le monde aurait tourné autour d’elle.

La jeune fille fronça les sourcils. Surement un effet secondaire de la guérison effectuée sur Link. Faut dire qu’elle n’y était pas allée de main morte.

Mais le bourdonnement ne passa pas comme il le fait en général. Une nausée la pris et alors qu’elle voulait se lever précipitamment pour sortir, ses jambes la lâchèrent.
La petite prêtresse tomba sur les genoux, le sang pulsant dans ses oreilles.

Une part d’elle ria de l’ironie. D’abord aveugle et là pour le coup, sourde. Quelle belle affaire.

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Sa langue et ses lèvres le brulaient encore, tant le potage était chaud. L'Hylien n'aurait su dire combien de temps le fermier avait mis pour préparer tout cela. Il avait, pendant toute la durée de son chemin de croix, perdu toute notion du temps, quelque soit la façon dont il se présentait. Un regard vers le ciel l'aurait sans doute éclairé (le soleil quittait tout juste le zénith et irradiait encore d'une lumière forte, après tout) mais la plus proche fenêtre était agencée de telle sorte à ce qu'il ne puisse pas voir les nuées depuis sa place.

Si l'enfant aux cheveux cyan n'avait pas entendu (ou du moins, pas compris) ce qu'avait dit l'Hylien, lui n'avait pas tant de doutes sur ce que voulait son interlocutrice. Et bien qu'elle ne pourrait pas le voir, il arqua un sourcil. Pris de court, intrigué, interloqué. Qu'était-ce donc que cette chansonnette qu'elle lui poussait, soudainement ? Quelle marotte la prenait de vouloir le suivre ? Il la ramènerait certainement à la Citadelle d'Hylia — jusqu'au parvis du Temple du Temps, s'il le fallait. Il se refusait à l'emmener plus loin. Trop dangereux, pour elle comme pour lui.

Il saurait certainement veiller sur elle, mais en plus de devenir un poids indéniable (malgré l'affection naissante qu'il lui portait, ce serait nier l'évidence que de dire qu'elle ne le dérangerait pas), il se fermait purement et simplement à l'idée d'une nouvelle collaboration avec les Hyliens. Il était de ceux qui avaient été abusés et sa naïveté s'était envolée pour rejoindre d'autres rivages alors même que les vies tombaient comme de simples gouttes de pluies dans l'imposante demeure du roi Gérudo. Que de vétérans qui avaient survécu aux assauts portés sur le Castel, la Sainte-Cathédrale ou encore le Ranch ne s'effondraient aux côtés d'adolescents à peine sortis de l'enfance. Pour un parjure. Un traître. L'amant de la souveraine, qui avait soudainement trouvé les jambes du Sire du Malin plus attirantes. Soudainement ? Sans doute pas.

Il était inconcevable au Fils-de-Personne de se laisser berner pareillement à nouveau. Non pas qu'il ne faisait pas confiance en Flora – il ne doutait pas de sa bonne foi, et son instinct l'avait toujours poussé à se méfier de Dun Loireag – mais la simple idée de s'associer à quelqu'un ne lui était pas familière, et de toute évidence ne le serait plus.


"Je..." Reprit-il, alors qu'elle l'invitait à s'exprimer, non pas dans l'idée de répeter ce qu'il avait dit plus tôt, mais plutôt de rebondir sur ce qu'avait amené la demoiselle bleue. « Non. » Concis, clair, simple. Non pas qu'il n'ai pas voulu développer – quoiqu'à la vérité, s'il pouvait se passer de pareil exercice, il ne le vivrait pas plus mal – mais...

"Flora...?" S'enquit le Héros déchu, l'air inquiet et la voix légèrement hésitante. « Est-ce que tout va bien ? » Question idiote, s'il en est, mais néanmoins nécessaire. La frêle petite prêtresse porta la main sur son visage tandis que son teint virait aussi blanc que la neige, là bas dehors.

Ses doigts lâchèrent prestement la cuillère de bois qu'il tenait, et il ne prit pas même le temps de s'essuyer les lèvres. Trop de signes annonçaient ce qui allait se passer pour qu'il ne soit pas mis au courant avant que les choses ne se déroulent. Talon ne verrait sans doute rien ; lui avait du apprendre à ne pas être aveugle pour ne pas se retrouver avec une dague au plus profond de la nuque.

Avant que ne défaille la pousse de Prêtresse, il s'était déjà élancé. Et alors qu'elle s'effondrait, son bras vint la soutenir. La sentant tomber, il accompagna en douceur sa chute, de telle sorte à ce qu'elle ne soit pas douloureuse, mais qu'elle ne pèse pas sur son bras fraichement guéri. Son regard polaire se posa sur le crâne presque chauve du père d'une si belle et si aimable rouquine.
***

La Sacerdoce avait été montée à l'étage et récupérait dorénavant sous les draps de Malon. L'Hylien s'était assis à la fenêtre, comme pour la veiller, en regardant les flocons tomber lentement, portés par le vent. Sa main droite supportait son crâne depuis son menton tandis qu'un air blasé se peignait sur son visage. Depuis combien de temps n'avait-il pas senti les yeux de Flamboyante se poser sur lui ? Depuis combien de temps n'avait-il pas entendu son rire ?
Il ferma les yeux. Bientôt, il serait temps de partir. A l'aube si le Rusadir n'était pas arrivé. Et l'avatar de Nayru n'allait pas couper à une explication de gravure.


C’était pathétique
Pathétique
Pathétique

S’écrouler comme ça ... Vraiment, Flora en rougissait de honte.
Allongée dans le lit de Malon, elle avait vaguement entendu les deux hommes en parler, elle ruminait, fulminait contre elle même. Dans sa précipitation, dans son envie que le Garçon-de-la-Foret lui dise oui, elle avait trop dépensé, trop brulé son énergie.
La nausée était encore la, mais globalement sinon la jeune fille se sentait mieux.
A part une démangeaison dans la nuque.
Flora agita un peu la tête sur l'oreiller pour chasser le chatouillis désagréable.

Elle sentait un regard inquiet sur elle. Qui? Talon? Link? Un autre chaperon?
Elle ouvrit ses yeux blancs, qui fixèrent le plafond, sans le voir n'est ce pas, et murmura :


"J'aurais dût faire attention. C'est lamentable."


Puis tourna la tête vers le Héros a la fenêtre.


"J'ai entendu ta réponse ... Tu as dis "non". Mais je ne comptais pas vraiment te laisser le choix, tu sais."

Doucement, pour ne pas provoquer un nouveaux malaise, Flora se redressa dans ses draps, s'installa en position assise et s'appuya au cadre de lit.
Pour ne pas vraiment provoquer de dispute, elle préférât changer de sujet :


"Ou est elle?"

Malon, bien sur. La prêtresse pouvait sentir le regret des hommes présents dans la maison. Quelque chose, quelqu'un leur manquait. L’évidence était trop immense pour passer a coté.....

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Son menton dormait, au creux de sa main. Le haut de son crâne s'appuyait tristement sur les carreaux translucides de la fenêtre. Froide fenêtre, pensait-il. Et dans le monde-du-dehors, au delà du verre refroidi par un Hiver en fin de vie tombaient les derniers flocons. Ceux-là même qu'il fixait, d'humeur aussi maussade que ne l'était ce ciel de nuages.

Il était inquiet. Tant pour Belle, pour Flamboyante que pour Flora. S'il savait que Zelda restait bien à l'abris derrière des remparts, il ignorait ou Malon pouvait dormir, si elle avait un toit seulement. Et un profond sentiment de culpabilité le saisissait sang et tripes alors qu'il jetait un regard vers la Sacerdoce. Non seulement il avait cette impression de voler à la Rouquine une partie d'elle même en plaçant une inconnue dans sa couche, mais en plus ; il la plaçait là par pur égoïsme. C'était pour lui qu'elle s'était ainsi sacrifiée. Il ne l'oubliait pas.

Son regard revint à la neige qui s'entassait à peine dehors. De toute évidence, elle aurait fondue (en grande partie, au moins), le lendemain. Si le spectacle avait toujours eu quelque chose de magique, il ne pouvait pas s'empêcher d'y voir avant tout le côté pratique. Moins de neige signifiait moins de difficultés, une fois en selle. S'il avait été seul à reprendre la route, cela ne l'aurait guère dérangé ou inquiété, mais avec une convalescente en passagère, il craignait non seulement que la chevauchée fut pénible à l'avatar de Nayru, mais qu'elle soit dangereuse pour la jument vermeil.

L'enfant sembla s'agiter dans son sommeil. Sans bouger la tête, il déporta ses yeux aussi glacés que le givre sur le lit dans lequel reposait la jeune fille. Lui aussi savait ce que c'était que d'être chargé d'un fardeau avant d'avoir connu l'âge adulte. Avant même d'avoir quitté l'enfance, l'insouciance et la candeur, en réalité.

Une certaine rougeur avait gagné les petites joues ténues de la fille-à-la-parure-cyan. Un petit espoir vint gonfler le thorax. Il était inquiet, certes pas au point de craindre pour la vie de la demoiselle, mais... La magie ne l'avait jamais rassuré. Il avait pu voir ce qu'elle avait fait de l'Arbre Mojo, du fils de Mutoh le Charpentier. Comment elle avait transformé les soeurs Koutake, comment elle avait plongé la Vieille de Cocorico dans l'horreur.

Son regard se fit plus appuyé, à mesure qu'il ne repensait chacune des images qui le poussait à se méfier de toutes les formes de sorcelleries qu'il connaissait. Il n'avait pas non plus oublié Jered Jakeson.


"Tu aurais du, oui." Lâcha-t-il, peut être un peu abrupt. Autant qu'il n'avait pu se faire un sang d'encre pour elle, certainement. L'Hylien quitta la fenêtre, et la chaise sur laquelle il s'était reposé. « La magie, c'est mignon, mais c'est dangereux. » Son timbre de voix était modulé par l'émotion, sans qu'il ne soit agressif. La bile perçait au fond de sa voix. « Je te suis reconnaissant ; mais je préfère avoir le bras brisé que ta mort à porter. » — J'en ai déjà trop sur les mains, de sang ; manqua-t-il d'ajouter. Chaque vie qu'il avait arraché le rendait un peu plus coupable à ses yeux. Évidemment, il ne se souvenait pas de tout ce qu'il avait tué, mais il savait qu'il avait déjà trop souvent tiré le fer au clair. Et surtout qu'il le reproduirait. « L'altruisme n'est une qualité que quand il ne te met pas en danger, parce que une fois que tu te retrouve dans une situation pareille, de dépendance, tu mets en danger tes compagnons aussi, Flora. »

Il était dur avec elle, indéniablement. Peut être ses mots allaient la blesser ou peut être allait-elle simplement réfléchir à ce qu'il disait. Il parlait d'expérience, et n'avait appris à compter que sur lui même, depuis qu'il n'avait qu'une dizaine d'années. C'était une des raisons, notamment, pour laquelle il ne désirait pas prendre quelqu'un avec lui. Il était plus efficace seul, qu'en veillant sur une jeune fille aveugle mais la tête pleine d'aventures. « Je ne te veux pas avec moi, si ça signifie t'avoir morte. » Conclut-il, moins sévère, soudainement. Link ne connaissait la jeune femme que depuis peu, mais il s'était pris d'affection pour elle, incontestablement. Sa colère (due à l'inquiétude et ce qu'il estimait être de l'irresponsabilité – c'était à elle de ne pas se mentir sur ses propres limites –) n'était pas tout à fait retombée, mais l'attitude de la prêtresse le fit stopper. Il préféra ne pas relever la question de celle qui succédait à Néphilis. Il n'avait aucune réponse, et n'avait jamais aimé s'épandre sur ses propres problèmes, ses peurs ou quoique ce soit qui s'en rapproche. De près ou de loin.

"Attends." Fit-il, doucement. Del Carmen ne cessait de gigoter, comme prise d'une violente démangeaison. Il s'approcha et tâcha de la redresser sans la brusquer. Ses bras enserrèrent Flora, et ses doigts se fermèrent sur elle. Les extrémités de ses index, majeur et annulaire rencontrèrent une forme de corne particulièrement tenace, et qui semblait courir tout du long de son épine spinale. Sans se permettre de jeter un regard, ou de laisser courir sa main plus, avant, il lança, non moins rassuré. « Flora...? Tu.. Tu as une cicatrice ? »

Il aurait mis sa main à couper qu'elle n'en avait pas, quand il l'avait retrouvée frigorifiée dans la neige. Il l'aurait senti.


"Je te suis reconnaissant ; mais je préfère avoir le bras brisé que ta mort à porter."

La prêtresse baissa la tête, un peu honteuse. Elle l’entendait marcher vers elle et sentit le lit ployer quand le Héros s’y assit. Le souffle du jeune homme vint effleurer son visage alors qu’il lui parlait :

" L'altruisme n'est une qualité que quand il ne te met pas en danger, parce que une fois que tu te retrouve dans une situation pareille, de dépendance, tu mets en danger tes compagnons aussi, Flora. "
« J’essaie de faire au mieux, tu sais. Mais ce n’est pas facile quand ceux qui t’entoure te voient comme une marionnette dont ils pourraient tirer les ficelles. Parfois, je me demande si c’est pas a cause de mes yeux et de mon âge que le Pontife m’a choisie … »

La prêtresse avait remonté ses genoux sous son menton et croisé les bras dessus, et son regard se perdait là ou lui seul pouvait voir.
Il ne lui laissa pas de répit, ne montra –a son grand avantage pour Flora –aucune pitié pour son handicape et lui assenât les quartes vérités bien en face :


« Je ne te veux pas avec moi, si ça signifie t'avoir morte »

Si Flora avait d’abord baissé les yeux, elle les releva vivement quand ces quelques mots lui arrivèrent aux oreilles. Link était trop dur pour le coup. Il ignorait de quoi elle était capable. Il n’y avait pas que la magie pour elle, non, même si elle lui servait d’arme et de fil conducteur dans sa pratique de la guérison. Elle connaissait les runes, savait créer des potions, charmer les foules avec ses chants ou ses sermons, attirer l’attention s’il le fallait ou au contraire être discrète. Et puis mine de rien, avoir l’avatar de Nayru pour alliée ce n’était pas commun !
Etre aveugle ne voulais pas dire, pour Flora, rester cachée entre les pierres froides d’un temple.

Elle serra les dents au lieu de répliquer vertement et murmura un remerciement et une phrase banale d’amitié. Au fond d’elle la prêtresse reconnaissait que le Héros du Temps avait en partie raison. Peut être devait elle apprendre à contrôler parfaitement sa magie avant de partir courir Hyrule ?

Et pis quoi encore ? L’eau était en elle depuis sa naissance ! Elle la contrôlait avant de savoir marcher !


« Hé ! Tu t’écoute parler ? Si je devais être un fardeau, je ne t’aurais pas proposé de te suivre ! Tu ne sais pas de quoi je suis capable, alors laisse-moi faire mes preuves avant de te braquer, s’il te plait !»

Flora hésita, un léger rose aux joues, puis lança :


« Toi et moi on est toujours tous seuls, alors je me suis dis que ça serait plus drôle d’être seuls ensemble. »

Durant toute la dispute, sa nuque et tout son dos s’était enflammé, et elle n’avait cessé d’y porter la main, gelée qui plus est, pour essayer d’en calmer l’incendie. Ce n’est que quand Link réagit en lui murmurant «
Attends. » que Flora réalisa que cela devait être énervant pour qui l’observait.

Elle se laissa attraper et tirer en avant, croisant rapidement ses jambes en tailleur, pour ne pas tomber nez contre le matelas.

Elle sentit les doigts du Tout-de-vert-vetu courir sur sa nuque et l’entendis hoqueter :


"Flora...? Tu.. Tu as une cicatrice ?"
« N … non … Qu’y a-t-il ? Qu’est ce que c’est ? »

Elle sentit le jeune homme s’avancer encore un peu, comme pour jeter un œil. Elle frissonna, se demandant de quoi il en retournait. A sa connaissance elle n’avait pas eu de blessure, mis a part celle de l’amour propre et a plus d’une reprise. Mais ceci ? Elle pressa alors le Héros a parler, l'angoisse dans la voix :


« Dis moi, ça me brule jusque dans le bas du dos ! »

Elle repensa horrifiées aux ragots des sœurs au couvent, celles qui parlaient des stigmates ne Nayru. On disait que celles qui accomplissaient la volonté de la Grande finissaient défigurées par d’horribles stigmates. Était ce déjà une chose semblable pour elle ?
« Link ? »

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Link

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(vide)

Il préféra ne rien ajouter, bien que les reproches lui brûlaient les lèvres. Sans doute par désir de ne pas tuer l'innocence, la candeur et l'insouciance de cette enfant. Il savait ce que réservait la vie, qu'elles en était les dangers. Il savait qu'une fois passées les portes du Ranch, il n'y aurait pas de phase d'adaptation, d'entre-deux. Le Monde-du-Dehors ne souffrait d'aucune transition, et la Mort pouvait survenir à chaque instant, chaque détour. La vie n'avait rien d'un jeu qui laissait aux joyeux lurons l'opportunité de prouver ce qu'ils valaient : il fallait être prêt avant le début des festivités. Bien avant, pour quiconque souhaitait rester en vie.

Mais en l'instant, ils étaient encore en sécurité (sécurité toute relative, Malon saurait le dire ; comme tout ceux qui avaient participé à la violente escarmouche, autrefois) et lui tiraillé par trop d'émotions contradictoires. D'une part il voulait offrir à Flora et préserver ce qu'on lui avait arraché trop tôt, tandis que... Il se devait (bien que la seule notion de devoir n'était pas l'unique qui l'engageait — peut être une forme de protection maladroite) de l'avertir, tout aussi douloureux que ça pouvait être pour elle. Cette maturité que lui avaient apporté l'expérience, qui avait petit à petit forgé sa vision de la vie viendrait à Flora en temps et en heure. Si elle vivait suffisamment.

C'était là aussi une source d'inquiétude. S'il la prenait avec lui, ne mettait-il pas leur deux vies en jeu ? Il était capable d'assurer sa propre survie, et s'était déjà illustré pour des taches incluants d'autres individus. Ca n'empêchait en aucun cas sa défiance vis à vis de ce genre d'épopées. Et Loireag n'y était pas étranger.

Elle le relança alors que ses doigts parcouraient cette marque - cicatrice qu'elle prétendait ne pas avoir. C'était légèrement rêche, mais lisse au toucher. Emaillé, aussi, il lui semblait. Comme si ça n'était pas quelque chose de continu, mais de segmenté.
Sa main arriva suffisamment bas pour que ça ne soit pas encore indécent, et l'Hylien s'éloigna légèrement d'elle, pour pouvoir s'adresser à elle.
« Ca court tout le long de ton dos. De la naissance de ta nuque au bas de tes reins. »

Même si elle ne voyait pas, il avait eu le réflexe de plonger au fond de ses yeux. Un regard réprobateur, autant qu'interrogateur, qu'elle ne sentirait certainement pas — mais il avait parfois l'impression de communiquer avec elle par ce chemin qui lui avait été interdit. Différemment de ce dont il était capable avec d'autres, mais tout de même. Un instant, il se serait pris à croire que la cécité de cette petite Dame Bleue n'était que partielle.

Le Fils-de-Personne esquissa un mouvement vers son amie, afin de satisfaire sa curiosité. Soulevant tant bien que mal le tissu sans que ça prete à confusion, son coeur manqua un battement. Les Déesses ! Qu'est-ce que..?!


"Oh, funérailles..!" Glissa-t-il, alors que son visage devenait livide. Il ne lui avait jamais été donné de voir ça, et les questions se bousculaient au fond de son crâne. Une ligne d'écailles translucides aux reflets bleutés. Le coeur de ces plaques animales semblait d'un bleu plus profond et plus royal que l'extérieur qui s'éclaircissait jusqu'à laisser voir la peau en dessous. Chaque vertebre était prolongée de cette protubérance non-humaine, qui lui inspirait de plus en plus la race Zora — à laquelle appartenait sa « fiancée ». « Tu... » Commença-t-il, encore estomaqué. « Ce sont des écailles. Ta colonne est couverte d'écailles..! »

Link n'y comprenait rien ; mais il savait qu'il n'y pouvait grand chose seul non plus. Raccompagner Flora jusqu'au Temple serait la première étape, car il lui parraissait logique qu'un des éléments de réponses viendrait du lieu Saint-Hylien. Ce qui ne l'empêchait pas néanmoins de pester contre la magie, et maudira les Trois avec autant de ferveur qu'elle ne pouvait lancer des suppliques ou des sermons.

"Encore un cadeau de ta chère Nayru, n'est-ce pas ? Jolie récompense pour une suivante dévouée !"

La rage et la rancoeur modulait allègrement son timbre de voix — sans que son courroux ne soit dirigé contre l'Avatar. Elle n'était que le receptacle de l'ire du Héros, celui là même qui revoyait à chaque mot les souvenirs lui revenaient, aussi sanglants qu'aucun coup de poignard dans la nuque ne saurait l'être.


"Ca court tout le long de ton dos. De la naissance de ta nuque au bas de tes reins. "

L’horrible soupons se fit de plus en plus présent dans le cœur de la prêtresse. Elle sentait le regard curieux et intense du jeune homme en face d’elle Son cœur se mit à battre plus fort alors qu’elle sentait le tissus lui comprimer la trachée quand Link jeta un œil dans son dos.

"Oh, funérailles..!"
Ce simple mot lui donna des sueurs froides et Flora s’arrachât violemment des bras du Héros du temps, tandis qu’il parlait avec une nuance de dégout dans la voix "Tu … Ce sont des écailles. Ta colonne est couverte d'écailles..!"

Flora se recroquevilla contre la tête du lit, la magie prête à jaillir de ses mains. Elle ne voulait pas s’en servir contre son ami, mais, maintenant il la verrait peut être comme un monstre et …

"Encore un cadeau de ta chère Nayru, n'est-ce pas ? Jolie récompense pour une suivante dévouée !"
« A la base c’est l’inverse, ca montre que la Prêtresse s’éloigne de la voix de Nayru, une sorte de rappel a l’ordre. »

Flora se leva et fit quelques pas vers la fenêtre ? Derrière les carreaux, le soleil tapais et réchauffait l’air. La prêtresse offrit sa peau aux doux rayons chauds avant de continuer :

« Mais, ensuite, c’est devenu une bénédiction, que celles qui portent ces marques sont dignes de Nayru. D’après ce qu'en disent les livres, en général, c’est plutôt discret »

Elle se retourna et haussa les épaules. Elle sentait la tension qui habitait le jeune homme et l

« C'est ma dame de compagnie qui me lisait tout ça. Dans mon cas, il est trop tôt pour le dire, mais je ne pense pas me tromper. Néphilis n’avait rien de tel pas vrais ? Je pense que ca n’évoluera pas, et que j’ai raison de vouloir te suivre. Je le ressens ici. »

La demoiselle montra sa poitrine, comme pour designer un intérieur profond. Ça lui venait des tripes, cette intuition. Son avenir devait être lié, pour le moment du moins, a celui du Héros.

Flora revint lentement, en comptant ses pas, vers le lit et s’y assit. Les deux derniers jours furent épuisants. Mais elle savait que son malaise n’était pas lié a la magie, elle en avait encore en réserve.

La jeune fille agita les doigts et se retourna vers son compagnon :


« Au fait, je n’ai même pas pensé a te remercier. SI tu n’étais pas passé dans le coin hier, je serais congelée a l’heure qu’il est. »

Elle saisit la main du Garçon-de-la-Forêt entre les siennes et lui serra doucement les doigts. Puis saisie d'une impulsion elle leva la tête et ses levres rencontrèrent celles du Heros en un timide et rapide baiser. Comment elle a sut ou il se trouvait? Fastoche, son souffle touchait la joue de la prêtresse, après ça, facile de se guider.

Tres vite elle detourna le visage, pour cacher ses joues toutes rouges tomates
Après un silence, L’enfant bleue leva ses yeux morts vers Link :


« Et dis moi, on part quand ? »


[Zelda & Malon : Je vous aime!!!! XD]

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(vide)

Il avait été nettement plus habitué à l'Hiver forcé qui s'imposait à lui chaque fois qu'on ressoudait ses os, ou qu'on refermait ses chairs meurtries. La sorcellerie dont il se défiait tant lui était autrement plus connue que ce contact tiède et délicat. Avant qu'il n'ai eu le temps de réaliser l'ensemble de ce qui se déroulait, avant qu'il n'ai pu calmer sa colère, fait taire son courroux, les lèvres galbées et chaudes de Flora se pressaient contre les siennes.

Ce fut court. Trop pour qu'il ne puisse esquisser le moindre geste — pour la repousser ou non, la surprise le saisissant aussi soudainement que la demoiselle n'était allée à la conquête de ses lèvres. Mais bien vite, elle se recula mettant fin à cette embrassade aussi impromptue que douce. Ruto lui avait arraché son premier baiser, l'Avatar de Nayru lui volait son second. Et hélas, il se retrouvait pour la seconde fois en porte-à-faux vis à vis d'un coeur qu'il lui semblait avoir dérobé sans le vouloir ; et surtout sans pouvoir offrir une contre-partie.


"Flora..." Souffla-t-il, alors qu'elle détournait le visage, sans plus oser le regarder (dans la mesure où le mot peut être employé pour une jeune femme victime de cécité). Il posa ses yeux sur la rougeur qui montait à l'assaut de ses joues. Toute l'ire qui s'était emparé de lui s'envolait depuis cette démonstration de tendresse, remplacée par le fervent désir de la protéger de tous les maux qu'elle pourrait rencontrer — lui compris. Puisqu'il n'aurait su lui rendre ce qu'elle lui offrait, il savait qu'en un sens il risquait de devenir un poison autrement plus virulent qu'aucun venin. « Flora, je... Je... » Reprit-il, tandis que la gène le gagnait et que le rouge s'amusait à venir titiller ses pommettes à lui aussi.

Il n'avait jamais su gérer ce genre de situations. Mille fois plus à l'aise pour repousser une épée que pour refuser une rose, il était pris au dépourvu. Les mots se coinçaient dans sa gorge et lui arrachaient le cou. Comment amener la chose sans...?
« Tu sais, je... ... — » Encore une fois, il pinça les lèvres, avec le puissant besoin de se laisser tomber sur le lit de Malon la belle, et d'évincer le problème, de le laisser sans répondre et de ne jamais affronter l'obstacle.

"Flora... —" Relança-t-il, prenant son courage à deux mains une once de pitié qu'il ne contrôlait pas dans la voix. Non pas cette pitié qu'on pouvait lire dans les yeux d'un homme confronté à un pathos sur lequel il ne pouvait rien, mais une pitié qui n'en était pas une. Une affection emplie de tristesse, pour une soeur d'existence. «— ... Je suis désolé. » Parvint-il enfin à lâcher, priant les Trois (l'image est parlante) pour n'avoir pas à s'expliquer plus avant. C'était une épreuve qu'il ne voulait pas affronter.

"À l'aube." Lança-t-il, quand elle éloigna d'elle même le sujet. « À l'aube. » Reprit-il, le goût des lèvres de la Demoiselle de Nayru encore sur les siennes. « Repose-toi. Je vais demander à Talon de te faire porter le dîner — la nuit est tombée depuis un moment. De mon côté, je vais apprêter Epona. » Termina-t-il, avant d'allonger l'Enfant-Icone, tout en douceur. Hésitant, et ne sachant comment lui témoigner l'amitié qu'il avait pour elle ; à défaut d'amour, il glissa un « Dors bien. » aussi timide que discret.

Le coeur lui battait quand il passa la porte, fuyant.


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