Posté le 06/02/2013 15:19
Alphabet vrillant l’oreille, syllabes dégoulinantes de méchanceté, diction hautaine de la bonne société, tout autant d’indices qui montraient que son collègue était arrivé. Non content de le haïr, il lui balançait ses vilenies au visage sans répit. Noblesse est parfois discrétion, Kuro en était peut être dépourvu, ou alors possédait il trop de jeunesse arrogante, de témérité, de sentiment d’impunité. Arkhams porta une dernière fois le verre aux lèvres et le reposa calmement. D’un geste ample, il débarrassa son tabouret de sa cape, afin de se lever avec la grâce d’un gentilhomme, l’alcool toujours en bouche, tiédi pour son haleine colérique. D’une demi-toupie, le Lord au Mille Casaques fit face au nouveau Phénix tout en plumes de paon et en fanfaronneries. Le Traitre cracha sa liqueur sur le plancher usé du bar, provoquant le grognement guttural du tenancier.
« C’est cela que notre Chef m’envoie ? Mon breuvage est devenu aigre à ton entrée, ce n’était donc pas surprenant. »
Salut acidulé contre réplique hostile, les présentations étaient ainsi faites. L’histoire commune de ses deux hommes totalement différents amenait forcement quelques politesses nauséabondes d’usage. Arkhams posa un pied dans la souillure avinée qu’il avait éructée, hache de guerre à présent enterrée. Il tendit sa main vers Kuro.
Il lut sur le visage de ce dernier, cireux tableau de grandiloquence et de charmes subtils, une absence totale de réaction. Allait-il recevoir une poignée de main ou une volée de claques ? Impossible de le savoir, d’autant plus que leur amicale altercation était impoliment interrompue par un être obscène. Dans sa vie, Arkhams avait commandé une foule d’invocations cadavériques de Ganondorf, mais jamais il n’avait vu pareil monstre squelettique. Un paysan, bile aux lèvres et famine au ventre, le tenait en joug avec un goulot de bouteille, arme des alcooliques. Son discours aux accents de petit peuple était inaudible aux délicates oreilles du Lord. Le plébéien se rua vers lui, l’œil ensanglanté de celui qui a tout perdu et le sourire de celui qui croit son action justifiée.
Le Mille-Casaques esquiva le brutal et mortel estoc du pouilleux puis d’un coup de coude entre ses omoplates saillantes de crève la faim, le plaqua contre le comptoir. Son épée engainée encore sur le bar, il l’a pris et étrangla sa victime avec. De la dextre gauche, Arkhams fit glisser son arme hors du fourreau, encore plaqué contre la gorge du paysan.
« Je ne me serais jamais contenté de bruler ton champs, imbécile. Sois ravi de n’avoir pu croiser mon chemin, remercie les Déesses de cela. »
Toujours en joug, le pauvre bougre ne semblait plus bouger, réfléchissant peut être à comment s’en sortir. Arkhams jeta un coup d’œil au statique Kuro, contemplant la scène comme un spectateur d’un théâtre de mauvais gout. Le regard du Traitre ne laissait aucun doute, il criait au collègue Phénixien de l’aide. Il le supplia presque de venir découper le téméraire agresseur, car lui, Arkhams, allait trancher cet idiot par simple amusement, oubliant totalement le risque qu’il prenait en commettant un meurtre.
Le Sceau de Saria se mit à se liquéfier presque, lave incandescente, le long de sa nuque. Arkhams exigea des Déesses que Kuro le sauve de sa malédiction bientôt libérée.