Les histoires de Yuri

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Withered


Inventaire

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(vide)


Le vent soufflait avec force sur les différentes maisons bordant les ruelles, émettant un sinistre et long hurlement semblable à celle de spectres hantant le cimetière. L'été partait au fur et à mesure que les jours s'accumulaient, comme s'il entamait un voyage vers d'autres contrées. Et les feuillages olive ornant autrefois les arbres commençaient doucement à prendre une teinte orangée et menacer de s'effondrer au sol. Que dis-je ? Que vois-je ? Une jeune femme au teint blafard sortit en trombe de sa demeure et verrouilla précipitamment la porte, uniquement vêtu d'une veste et... Par les Déesses, c'était un homme. Ah ah, pardonnez-moi. Ne m'en voulez pas, il avait les cheveux légèrement longs et était fin, de quoi s'y méprendre...

Yuri Vassiliovitch avait toujours aimé l'ordre. Un véritable maniaque, sans plaisanter vous dis-je, ce jeune homme avait cette logique que tout se devait d'être placé dans un ordre méthodique et lorsqu'il nettoyait sa demeure, il avait la fâcheuse manie de devenir irascible si l'on avait le malheur de déplacer ne serait-ce que d'un pouce l'un de ses objets entreposés sur son bureau. Tu touches, je t'encastre dans le mur. Surtout depuis qu'il avait obtenu ce métier d'écrivain qui lui faisait accumuler nuit blanche sur nuit blanche. Les écrivains avaient très peu de vacances. Et lorsque sa soeur et son frère le retrouvaient pour la plupart du temps, affalé sur la table, la tasse de thé coulante par dessus la table, ils ne voulaient en aucun savoir qui était son chef. En parlant de son chef, la voilà qui sortait aussi de chez elle. Qui l'aurait cru, la jeune Withered dont l'allure ne mettait pas beaucoup en confiance, en plus d'avoir un serpent albinos constamment enroulé autour du cou. Beaucoup de gens commençaient à se poser de questions quant à l'équipe qui s'occupait du Journal d'Hyrule lorsqu'ils savaient qu'un Vassiliovitch et une partisante de Ganondorf y étaient.

Ganondorf ? Lui ? Il n'avait pas de vacances. Et oui ! Lui préférait s'attarder à kidnapper la princesse et dérober la Triforce plutôt que de se résigner à aller se faire pomponner par ses sbires. Sur un divan. Imaginez ces pauvres Stalfos condamnés à patrouiller sous un soleil de plomb, sans avoir leur salaire du mois. Qu'entends-je ? Comment ça ils n'ont jamais eu de salaire ? Faisons grève, camarades ! C'est une infâmie ! ON. VEUT. NOS. CONGÉS. Sur un ton militant.

Withered rencontra en chemin la Prêtresse de Din qu'elle n'appréciait guère et les deux se regardèrent en chiens de faïence pendant un instant. Avant de lever le menton, l'air hautain et de s'éviter. BAM. Deux peaux de banane jetées par Vanitas de passage et toutes les deux firent la plus fascinante des chutes du siècle. Withered glissa sur quinze mètres, telle une patineuse artistique, avant de tomber dans les escaliers de la place sous les regards ébahis des passants. L'autre femme aux cheveux rouges qui avait écarté grand les bras, entraîna deux personnes dans sa chute, à savoir Yuri et Klara qui venaient de sortir de chez eux, avala une mouche à force d'avoir la bouche grande ouverte et les trois se prirent magistralement le mur d'en face.

C'est ainsi donc que la journée se passa. Danzet, l'aveugle de service, pour on-ne-sait quelle raison, se cogna trois fois contre un mur, bouscula une grosse mémé et écrasa le crottin d'un cheval de Malon. Il pesta contre le ciel, maudissant une bonne fois pour toutes les Déesses puis se prit de plein fouet une porte ouverte à la volée par Esar qui sortait d'une taverne. Autant dire que le pauvre jeune homme n'avait point de chance. Esar évita le cadavre par terre, puis en titubant, traversa les ruelles, éméché. Sa dernière cuvée. Il promettait. La rentrée approchait, le travail allait reprendre, une dernière cuite pour fêter ça et il allait arrêter. C'était sans compter l'envoi du Masamune de Valheim qui atterrit pile derrière son oreille. Esar s'effondra, faisant de l'écume. Non, il n'était pas un froussard, seulement après deux bouteilles, il fallait faire attention à son coeur. Un petit sursaut pouvait parfois être fatal. Oh les jolies bubulles que ça engendrait.

Maintenant, la question se posait. Pourquoi donc Valheim avait été pris d'une telle pulsion pour agresser un simple passant ? Il visait seulement une mouche il fallait croire. Cela faisait quelques minutes qu'elle bourdonnait dans ses oreilles et il n'avait trouvé rien de plus intelligent que de balancer son sabre de deux mètres pour la tuer. Ce qui avait bien entendu marché, mais bon. Esar avait eu le malheur de se trouver dans la trajectoire du sabre. L'homme aux cheveux blancs récupéra son sabre sans se soucier de l'homme évanoui, puis repartit vers d'autres contrées.


« Hé toi ! Oui toi ! Corrige-moi ça et que ça saute ! Mets pas tes bras sur le bureau, range tes papiers dans le bon ordre, mets les articles dans un ordre alphabétique, dessine-moi ça et colore-moi ces dessins ! Hop hop hop ! »

Et Yuri avait une sainte envie d'étrangler la rédactrice-en-chef qui était déjà couverte de bandages. Lui aussi en avait un autour de la tête depuis sa chute magistrale, mais apparemment, Withered avait été rendue beaucoup plus exécrable et exigeante depuis le coup de la peau de banane. Bilan de la journée : le pot d'encre renversé sur les articles alors qu'il avait mis trois heures à corriger les fautes, coupure à la main avec le presse-papier, tasse de thé renversée dans le couloir, avait écrasé Liuda qui se promenait, avait planté une plume de cocotte dans le bras de Mary, bref. La totale. Son orgueil en avait pris un sacré coup. Vive la rentrée.


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