Posté le 05/01/2013 03:36
A mesure que le temps passait, il semblait au général que la chaleur des cuisines lui montait à la tête, et les nombreux feux de cuisson n'en étaient sans doute pas entièrement responsables. La réalité était moins avouable : il trouvait la gérudo de plus en plus attirante et devait concentrer toujours plus de son esprit à refouler son désir naissant. Bien sur, sa chevelure rousse tombant en cascade sur ses épaules l'envoûtait. Bien sur, l'insolence de son regard et de ses lèvres avait quelque chose de fascinant. Bien sur qu'il était par instant si facile d'aventurer le regard sur cette poitrine généreuse. Mais il n'en oubliait pas moins son amant, Orpheos, et la promesse faite de ne pas le trahir. Céder serait une faiblesse, et Llanistar n'en pouvait plus d'être faible. Il fut tenter de se baffer, conscient néanmoins que ce geste lui ferait perdre du terrain dans ce duel si particulier avec la jeune femme.
A mesure que celle ci parlait, le nordique commença à assembler les pièces du puzzle. Une parenté et une éducation noble, à la cour d'un souverain. Un panier de crabes détesté, vous poussant à prendre la route. Un père qu'on aime. Excepté ce dernier point, Llanistar dut bien s'avouer qu'il comprenait Tali. Après le pire de ses crimes, il avait vécu à la cour du Kairn. Il avait apprit la fourberie, la tactique politique, l'amoralité. Il avait détesté ces armes déshonnorantes de tout son coeur mais s'était résolu à les employer, pour son bien et celui de sa soeur. Dés qu'il avait pu, il avait fuit la cour pour devenir un général d'empire auréolé de gloire, héros du peuple et aimé de son souverain. Mais il n'y a pas de gloire dans des guerres comme celles qu'il avait mené. Pas d'honneur à devoir massacrer à tour de bras. Pas de réconfort à se sentir aimé d'un peuple qui ignore tout des actes ignobles que le devoir nous a imposé de faire. Et surtout pas dans la méfiance grandissante que nous porte notre roi.
« On m’a exilé d’Aslzey. Mon seul salut est de ramener la Triforce à sa majesté la Reine d’Aslzey. Voilà ce qui explique ma présence à Hyrule, mais jamais je n’aurais cru y arriver de sitôt, ou tout simplement y arriver. »
L'exil. Oh il ne connaissait cela que trop bien. Combien de fois s'était il réveillé après avoir rêvé de son ancienne vie, croyant l'espace de quelques instants que toutes ces souffrances n'étaient que cauchemars passés, avant de se rendre compte de la réalité. Waundel était bien loin, sa demeure détruite, son héritage parti en fumée et son amour, bien loin derrière lui. Mais au moins Tali avait elle un but, une mission. Que n'aurait il pas donné pour que les dieux ne lui confie une quête, un sens à sa vie ! Quand bien même il s'agissait de dérober la Triforce. Il repensa à ce qu'il savait de cette légende : selon les hyliens, leur terre serait le sanctuaire que les trois déesses créatrices auraient choisi pour y déposer leur pouvoir. La Force, la Sagesse et le Courage, les trois grandes vertus, seraient cachées quelques part, attendant l'heure où un élu au coeur d'or les découvriraient. Alors, la terre verrait la naissance d'un âge d'or. Llanistar n'y croyait pas réellement. Bien sur, il savait que de grands pouvoirs existaient en Hyrule, pouvoirs dont se réclamait assez souvent Ganondorf et qu'aurait perdu Link à la citadelle noire...Mais il ne pouvait croire que des déesses aient été assez sottes pour laisser un tel danger aux mains des Hommes. Que Tali les recherche, cela la regardait mais il n'y voyait pas de réel péril pour Zelda et la Couronne.
« Mais dites-moi, Llanistar, vous avez été trahit ? »
La question, simple, n'était qu'une invitation à en raconter plus mais Llanistar hésita longuement. Devait il jouer franc jeu à ce point ? Se compromettre devant cette inconnue, quand bien même étaient ils seuls dans ces cuisines ? Cependant, elle lui avait fait confiance au point de lui révéler ses intentions. Il n'était pas obligé de poursuivre le jeu, mais l'honneur l'imposait. Il remplit donc une coupe de vin, puis la vida d'un trait et se resservit. Il allait lui en falloir plusieurs pour avoir le cran de révéler son passé.
« Avez vous déjà eu la chance d'aimer, Tali ? Un véritable amour, plus ardent que le coeur d'un volcan, plus puissant qu'un torrent déchaîné ? Moi, j'ai eu cette chance. Avec une femme, une unique femme au monde. J'ai eu la chance qu'elle me rende cet amour, et les moment passés ensemble sont empreints dans ma mémoire d'un bonheur que je n'ai plus jamais retrouvé et ne retrouverais jamais. Cette femme, je n'avais pas le droit de l'aimer, la loi des hommes me l'interdisait. Mais comment aurais je pu me refuser le bonheur quand je savais qu'il n'existait pas ailleurs qu'à ses côtés. J'ai vécu heureux, plusieurs années durant. Heureux, mais dans le mensonge. Peu savaient, excepté une personne, qui s'est caché de moi et que j'avais fini par oublier. A cette époque, j'étais général de l'empire d'Artensir. J'avais maté une rébellion, conquis trois pays voisins et repoussé un envahisseur. Personne n'avait jamais fait autant pour le royaume que moi depuis...mon grand père. Et tout comme le Kairn eut peur de Veren van Rusadir avant moi, la peur s'insinua en lui en me voyant auréolé de gloire. Dés lors, il chercha à m'évincer, par tous les moyens. J'avais évité tous les pièges quand la personne qui savait pour mon amour et moi reparue...Et ruina ma vie. » Il dût prendre une seconde pour se calmer, tant la colère et la peine qui montaient en lui commençaient à se voir. Sa main de chair tremblait, son regard ne décollait plus de son verre sur la table. Après plusieurs instants, il put reprendre.« Ils m'ont tout prit. Mes titres, ma fortune, ma gloire, mon honneur...Même elle. J'ai tenté de la sauver ! J'ai fait au mieux, j'ai galopé aussi vite que je le pouvais, franchit les centaines de lieux qui nous séparaient alors à la vitesse du vent...Mais ça n'a pas pas suffit. Lorsque je l'ai rejoint...Elle n'était plus. Alors, j'ai décidé de m'enfuir. L'exil, pour éviter la mort, avec l'unique et mince espoir de revenir un jour, pour faire tomber le glaive de ma justice. »
Llanistar bouillonnait à présent. Il n'avait jamais oublié cette dernière tache, cet objectif ultime qu'il s'était fixé. Seulement, ses pensées l'en avait éloigné, ces derniers temps. Penser à Hyrule, à son serment d'en être le protecteur, à comment repousser Ganondorf...Tout cela avait atténué sa douleur et sa rage. Il n'en voulait d'ailleurs pas à Tali de l'avoir réveillé : il ferait dés lors tout pour ne plus se rendormir. Pour venger Valenrya, sa sœur, la femme qu'il n'aurait pas dû aimer mais sans laquelle il n'aurait pas connu le bonheur. La venger de Jehovaren, roi sénile, dément et de leur frère, larve peureuse et sournoise...Saïon. Au fond de lui, le nordique se sentit un peu coupable de ne pas avoir révélé son péché d'inceste à Tali mais il savait que personne au monde ne pouvait le comprendre, hormis quelqu'un ayant connu le malheur de ce fardeau : se voir interdire d'aimer celle que notre cœur a choisit. Brusquement, il vida une dernière fois son verre, avant de déclarer.
« Je n'ai plus rien à vous dévoiler, Tali N. Thorlak. Et je n'exige pas plus de vous que ce que vous m'avez dit. Je vous crois digne de confiance. Honorez cette confiance et je vous promet un excellent séjour en Hyrule. Si vous le désirez, je vais vous montrer votre chambre. » Il commença à se lever avant d'ajouter. « Cherchez cette Triforce si vous le désirez...Mais posez vous cette question : Si vous réussissez, une fois de retour chez vous, votre vie sera t-elle meilleure ? »