Au fond de son trou, il ruminait. Pourtant quelques semaines s’étaient écoulées depuis les évènements de la vallée … mais rien n’avait changé : son désir de vengeance était toujours aussi brûlant. Loin de tout ou presque, il s’était isolé dans les catacombes de Cocorico. On le disait mort pour sûr, seulement sa carcasse restait introuvable. Et pour cause, elle ne croupissait pas chez les gérudos mais dans ce dédale inhospitalier, se remettant péniblement de ses blessures.
Sa retraite aurait pu être paisible et calme. Il n’en fut rien. Son état à peine stabilisé, il s’exerça comme il savait si bien le faire, jour après jour. Un entrainement difficile, exigeant, imprégné de douleur et de sueur, qui le poussa dans ses derniers retranchements. Il devait devenir encore plus fort. Son corps était pierre, il devait devenir acier.
Il se permit néanmoins de faire une petite halte au ranch, cachant son identité. C’est alors que Cecilia le contacta via la pierre qu’il avait gardé avec lui. Elle avait un plan. Il était temps de sortir.
Il se prépara lourdement. Il se débrouilla pour trouver tout ce dont il avait besoin en un temps minimum. Il ne lésina pas sur les moyens, dépensant ses rubis sans compter, fouillant chaque échoppe ou presque des alentours à la recherche de l’article rare, consultant tout les marchants ambulants qu'il croisa. Il négocia même à bon prix une arme exceptionnelle. Quand il fut enfin prêt, il n'était déjà plus très loin du lieu de rendez-vous.
Une fois arrivé, le plan se mis en place sans plus attendre, et le garde prit position. Tout ce qu’il espérait, c’était que ses camarades puissent rentrer dans la forteresse sans encombre. Il resta silencieux, attendant le signal, qui finit par arriver.
L’épéiste sortit d’un bond de la paille, et mit enfin pied à terre. Le masque de lion recouvrait l’entièreté de sa tête, cachant son faciès et ses mèches vertes, tandis que l’ensemble de son corps était camouflé par une cape recouvrant non seulement l’arrière mais aussi l’avant. Ses bras n’étaient même pas visibles, dissimulés tout deux sous le tissu. Quant à ses jambes, elles étaient les seules à dépasser-avec la tête évidemment- du tissu. Autre signe notable, un carcan dépassait de son épaule. Il jubilait déjà d’avance.
"Il y a un inconnu dans la forteresse ! Attrapez-le !"
D'un coup net, il trancha les liens qui tenaient les deux canassons à la charrette. Il tendit ensuite le bras droit en direction de la carriole. Entre ses doigts, un briquet à silex. Son bras gauche vint enfin se placer perpendiculairement à son autre membre. Il avait judicieusement lié sur le dessus de ce bras sans main, un morceau de silex. Il enclencha le mécanisme, frappant la pierre avec l’acier. Une gerbe d’étincelle jaillit, se dispersant dans la paille. Le feu commençait déjà à prendre. Il rangea rapidement son briquet, car une femme du désert arrivait à sa hauteur. Il esquiva d’un pas latéral le coup de lance dirigé vers son abdomen, avant de se saisir de l’arme. Il la repoussa violemment vers l’arrière, avant de dégainer son arme fraichement acquise. L’arbalète qu’il tenait étincelait. Neuve, et surtout lourde, il devait la porter à l’aide de ses deux bras. L’avant-bras gauche lui servait d’appui tandis que sa main droite agrippait le manche. Elle comportait aussi la particularité de tirer trois carreaux à la fois. Il visa, son doigt enfonça la gâchette. Les trois pointes ne manquèrent pas leur cible, et l’attaquante s’écroula, perforée. Il déposa momentanément l’arme sur le sol, et sa main partit sous sa cape. Elle ressortit une seconde plus tard, accompagnée d’une boule de métal décorée d’une mèche. Il passa rapidement cette dernière au-dessus de la charrette, maintenant en proie aux flammes, avant de balancer le projectile vers un groupe de quatre gérudos. L’explosion ne toucha que deux ennemies, les autres s’étant écartées à temps. Profitant du léger délai, il avait déjà rechargé son arbalète, qu’il replaça aussitôt sur son bras gauche. Dans sa ligne de mire, de nouvelles assaillantes … Elles arrivaient de toute part.
« Nous sommes de retour ! »
Le coup partit et les carreaux filèrent.