Fléau de Din [Cratère]

début du printemps - 1 an avant (voir la timeline)

Plein d'une profonde satisfaction, Ganondorf observait les traînées de fumée noires qui montaient depuis le village en contre bas. De là où il se tenait, haut sur les contreforts du volcan, le gérudo pouvait presque entendre les cris de peur et le fracas qui résultait de la guerre et de son terrible cortège. Fermant les yeux, il s'enivra de cet instant qui le voyait redevenir le rôle qu'il avait dû laisser de côté pendant un temps, celui qui lui allait le mieux : celui d'un guerrier sans pitié. L'état de paix qu'il avait dû laisser s'installer ne lui avait apporté au final qu'un ennui mortel... Et le repos nécessaire pour se dresser là, en cette nuit sombre et sanglante. A travers la fente de son casque, le gérudo dardait un regard de chef de guerre, de maître dans cet art si noble, si complexe et si exaltant. Aucun obstacle ne saurait l'arrêter, il en était persuadé. Pas même... ce vers quoi ses yeux se tournèrent.
Ganondorf connaissait bien cette montagne. Pendant plusieurs mois, il s'y était réfugié afin de surmonter la perte de la dernière femme qui avait véritablement compté dans sa vie. Lorsqu'ils avaient tué sa prêtresse, son amour, sa colère et sa peine avaient explosées et le Lion avait failli massacré plusieurs de ses soeurs sous le coup de la rage qui avait envahit son coeur. Et comme certains provoquent une explosion pour souffler un incendie, il s'était plongé dans des flammes plus ardentes encore que celles qui le dévoraient de l'intérieur. Il avait plongé dans le sang de la terre, y avait dormi le temps que sa blessure se referme, pour finalement en jaillir comme un phénix, ou un dragon. A présent, il retrouvait la silhouette massive et familière du volcan périlleux afin de porter un nouveau coup à ses ennemis. Un juste retour en retour de la blessure qu'il leur devait, et qui ne cicatriserait jamais complètement.


« Allons, il faut poursuivre notre route. »

Un dernier regard embrassa le village en flammes, et il se retourna pour continuer. Malgré son enthousiasme, Ganondorf n'était ni stupide ni naïf : il savait que la résistance ne mettrait pas longtemps avant de s'organiser, d'autant que certains semblaient avoir la faculté surnaturelle de toujours se trouver au mauvais endroit au mauvais moment. Même pour une attaque surprise, de nuit avec en usant d'un portail, il s'exposait, lui et ses enfants. Il lui fallait donc en finir au plus vite. Le chemin qui le séparait de sa destination était court à présent, mais il lui faudrait du temps pour y accomplir ce qu'ils avaient prévu.
Son regard s'attarda sur Songe, la sorcière, sur qui allait reposer tant de choses. Au fond, si le gérudo regrettait une chose ces derniers mois, c'était sa négligeance auprès d'elle. Il avait conscience de préférer Swann à ses autres enfants, et pourtant Songe méritait tout autant son attention. Il se promis d'y remédier, tout en sachant que ce qui adviendrait ce nuit là ou le lendemain l'en empêcherait peut être.

A mesure qu'ils gravissaient, lui, la sorcière et ses meilleures gardes, la paroie qui les séparait du cratère, Ganondorf sentit le grondement du volcan qui faissait vrombir la pierre, faisait chuter des vagues de poussière rouge, et remuait jusqu'à ses tripes. La montagne ne s'endormait jamais vraiment, c'était de là que venait son nom : de la mort qu'elle pouvait apporter à tout instant. Soudain, le tonnerre terrestre s'accrut. Le Lion ne put empêcher la peur de l'étreindre. Accroché à une falaise comme il l'était, le moindre glissement de terrain pouvait l'envoyer, et ses filles avec lui, plusieurs toises plus bas. Tachant de ne rien laisser apparaître sur son visage et dans ses gestes, il poursuivit son ascension. Son regard ne quittait plus le haut de la paroie, à l'affut du moindre signe inquiétant, tandis que le volcan continuait à gronder, plus fort que jamais. Il commençait à relacher son attention quand un énorme bloc se descella de la falaise, et tomba, à la verticale, sur sa droite, droit sur Songe. Sans prendre le temps de réflechir, Ganondorf accumula une puissante énergie noire dans son poing et, lorsque le rocher arriva à la hauteur, il le brisa en deux morceaux qui furent éjectés de plusieurs mètres, loin de la jeune femme. Finalement arrivés en haut, il eut un regard inquiet pour elle avant de continuer. Le temps pressait.

La caverne qui permettait d'entrer dans le cratère s'ouvrait devant lui, boyau terrestre d'où jaillissait des volutes d'air brûlant, qui pouvaient incinérer la peau en quelques instants si on n'était pas protégés. Mais Ganondorf savait qu'il n'avait pas à craindre le feu primordial. Après tout, il restait le maître des Ombres et de la Flamme. Ainsi, en plus des médaillons enchantés à la manière des tuniques gorons qu'il avait déjà donné à sa suite, le gérudo fit appel à ses servantes pour le protéger, comme elles l'avaient fait pendant plusieurs mois, alors qu'il sommeillait dans les profondeurs du volcan. Ainsi défendu, il s'avança dans la fournaise, après avoir ordonné à ses gérudos.


« Si un être qui n'est pas de notre clan approche, tuez le. Percez le de vos traits ou attendez que sa tête sorte de la falaise, à votre guise, mais ne laissez personne passer. »

Revoir le cratère lui fit un pincement au coeur. Sans doute était il l'humain qui pouvait se vanter de le connaître le mieux. L'immense lac de lave l'avait toujours fasciné, puisqu'il y sentait toute la force de la nature, de la terre et de feu mêlés en un sang ardent et dangereux. Et pourtant, ce feu là n'était pas l'arme la plus effroyable que refermait la montagne. Dans ses tréfonds reposait quelque chose de bien pire. Quelque chose qu'il entendait bien ramener dans ce monde.
Il commença alors à tracer sur le sol rocailleux les symboles et les cercles nécessaires au rituel, laissant à Songe le temps de se mettre en condition. Lorsque ce fut achevé, Ganondorf Dragmire se plaça au centre, fâce à elle, et lui demanda,


« Sommes nous prêts ? »

Sur sa main, la Triforce rougeoyait.

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Songe Tristenuit


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(vide)

Son guide s'était arrêté un instant, et sans qu'elle y fasse vraiment attention son regard suivit le sien vers l'horizon. De là-haut elle pouvait apercevoir le village qu'ils avaient quitté et les volutes de fumées qui s'en échappaient. Même depuis ce perchoir où elle était on devinait bien le chaos qui régnait en bas. Si ce spectacle semblait plaire au chef du Clan Dragmire, de son côté il lui évoquait plutôt de mauvais souvenirs. La dernière fois qu'elle avait tourné le dos à pareille destruction, elle s'était promis de ne jamais plus faire appel à des forces qui la dépassaient et la voilà qui était en chemin pour retenter pareille folie.

La voix du Gerudo la tira de ses rêveries et elle reprit la route à sa suite. Contrairement à lui elle ne connaissait pas du tout l'endroit. La pierre et l'absence de végétation ne lui plaisaient pas plus que le désert et c'était loin d'être un endroit qu'elle avait projeté de visiter à son arrivée à Hyrule. Elle s'était jusque là contentée d'admirer la montagne depuis le village en contrebas, mais cette fois elle n'avait pas le choix. Et puis à choisir elle préférait se trouver là qu'au milieu des affrontements. Du moins pour l'instant. Une petite voix lui soufflait qu'il n'en serait peut-être plus de même dans les moments qui suivraient.

Elle ne savait pas exactement quand ils arriveraient mais plus ils avançaient et plus son anxiété grandissait. D'ailleurs la progression rapide et pressée de l'homme qu'elle suivait semblait lui indiquer une fin proche à leur voyage. Elle avait beau avoir finalement accepté la tâche qu'on lui destinait, elle n'en était pas plus sûre d'elle pour autant. Bien entendu c'était excitant, la magie l'avait toujours passionnée, dès le plus jeune âge elle avait cherché à en découvrir plus que ce que ses instructrices lui enseignaient et elle restait avide de savoir, mais elle avait reçu quelques bonnes leçons sur le manque de prudence. C'était bien le seul avantage qu'elle voyait à ses affreux cheveux blancs, lui rappeler qu'il valait mieux parfois s'abstenir.

Elle grimpait toujours distraitement quand elle entendit un grand bruit, et en levant la tête elle aperçut un bloc de pierre qui s'était détaché de la falaise et filait sur elle. Avant même qu'elle n'ait le temps de prononcer un mot le morceau de roche fut frappé par un concentré d'énergie magique et même si elle eut le réflexe de se coller à la falaise par sécurité, les morceaux de pierre avaient été éjectés assez loin pour ne même pas la frôler. Non seulement presque aucune plante ne poussait à cet endroit, mais en plus la terre ne restait même pas en place, elle n'en détestait que plus l'endroit.

"Merci."

Elle n'était pas du genre à s'épancher et se contenta d'un remerciement plutôt sobre, elle sentait de toute façon que son guide n'avait pas envie de traîner. Sans doute n'avait-elle plus grand chose à perdre pour ne pas être plus chamboulée d'avoir frôlé la mort, quand bien même elle ne la cherchait pas. Elle savait aussi qu'il y avait bien pire. Au moins cela lui prouvait-il que l'homme qui l'accompagnait s'inquiétait de sa sécurité et maîtrisait ses pouvoirs avec rapidité. Elle espérait juste qu'il en serait toujours de même après qu'elle se soit montrée utile, mais Swann lui avait assuré que tout se passerait bien.

Ce n'était peut-être pas un hasard si elle s'était plus liée à cette dernière qu'au patriarche, même au delà de son côté moins accessible et disponible. Elle avait du mal à faire confiance aux hommes, magie ou pas. Peut-être parce qu'elle avait vécu toute sa vie avec des femmes et qu'on lui avait enseigné que contrairement aux hommes elles étaient prédestinées à la magie et pouvaient obtenir un niveau bien supérieur, peut-être aussi parce qu'avoir envisagé l'inverse était à l'origine de son malheur. Toujours était-il qu'elle restait méfiante et que même si elle avait entendu parler du pouvoir tant convoité qu'était la Triforce et savait qu'elle-même était loin d'avoir terminé sa formation de sorcière, sans doute bien peu d'expérience en comparaison, elle continuait de jauger le sorcier.

Ils finirent enfin par arriver à destination, et Songe dut admettre que la vue à l'intérieur du volcan valait à elle seule le trajet jusque là. Elle examina un instant le médaillon qui lui avait été confié pour supporter la chaleur qu'elle devinait régner autour d'elle. Sans lui, l'endroit aurait été sans doute moins agréable, et la vue une moindre préoccupation. Elle aurait sûrement pu obtenir le même effet avec un sortilège, mais elle allait avoir besoin de mobiliser toute son énergie pour la suite. Elle était seule à avoir suivi Ganondorf jusqu'au milieu de cette fournaise, et ce n'était pas pour profiter de l'endroit. Elle détacha ses yeux de l'océan de lave déchaînée pour tâcher de se calmer pendant que le sorcier préparait le nécessaire. Il n'était plus vraiment temps de se demander si le Clan Dragmire savait ce qu'il faisait, trop tard pour revenir sur son engagement.

Elle détacha la besace accrochée à sa taille. Le patriarche avait déjà commencé à tracer les cercles magiques autour d'eux. Elle ne connaissait pas les symboles qui les ornaient, elle avait déjà eu assez à apprendre sur la suite du rituel, mais on ne lui avait pas confié ce bagage pour rien. Elle tira du sac un os à forme bizarre. Os de Dodongo qu'on lui avait dit, de gros lézards. Elle était plus habituée aux os humains, moins massifs, mais elle ne doutait pas que dans ce cas précis ceux-ci n'avaient pas été choisis au hasard. Elle suivit les cercles qui s'entrelaçaient au sol pour éparpiller les os aux endroits qui lui avaient été indiqués, là où les cercles s'entrelaçaient, au croisement des énergies.
Une fois son travail achevé, elle revint se placer au centre du cercle où Ganondorf la rejoignit peu de temps après, quand tous les symboles au sol furent achevés.


"Nous sommes prêts."

Elle souffla un coup. Concentrée, elle cessa de se questionner sur ces triangles brillants qu'elle connaissait bien peu, et cessa d'admirer la nature brute qui bouillonnait autour d'eux. Seules subsistaient dans sa tête les instructions qu'on lui avait données. Ils étaient là pour un dragon, puissant, assez pour sommeiller au creux de cette lave inhospitalière. Un esprit très ancien, très dangereux aussi. Ses lèvres s'entrouvrirent pour réciter les incantations qu'elle avait dû apprendre, une longue invocation dont elle ne connaissait même pas la langue, mais elle était assez habituée à maîtriser les sonorités de langues inconnues pour l'avoir retenue par coeur. Elle récitait sur un ton monocorde, elle sentait une énergie puissante qui s'ajoutait à la sienne, et elle devinait sa provenance. Elle se devait d'admettre que cette Triforce, d'où qu'elle vienne, dépassait ses propres forces, heureusement ici elle était de son côté.

Autour d'elle, le volcan disparut. Non pas réellement, mais il n'existait plus pour elle. Ses lèvres continuaient à bouger machinalement, mais elle n'y prêtait plus attention, elle se focalisait sur une autre puissance qui venait de faire son apparition. Un long sommeil, une chaleur insoutenable qui bouillonnait autour d'elle. Sa main alla rejoindre le médaillon. Elle savait que cette chaleur n'était pas à la surface du volcan. Mais quelque chose clochait, quelque chose s'opposait à ce qu'elle continue.
Sa bouche se ferma. Les mots ne sortaient plus. Elle transpirait, en proie à une force qu'elle ne contrôlait pas plus que celle qui lui avait prêté main forte.
Lorsque ses lèvres s'ouvrirent à nouveau, ce fut une voix rocailleuse qui en sortait.


[table style="text-shadow:1px 1px 1px black;"]"Qui veut troubler mon sommeil ? PARTEZ."[/table]


« Nous sommes prêts. »

Ganondorf acquiesça, vérifiant du regard que les cercles étaient correctement tracés. Fait rare, il connut un instant de doute, dirigé contre lui même. Un long instant, son regard parcouru les traits au sol, anxieux. Depuis que la Triforce lui procurait un pouvoir défiant les limites de l'humain, le Lion avait perdu l'habitude de telles méthodes. Les sorcières jumelles les lui avaient enseigné mais sa mémoire se trouvait moins assurée qu'il n'avait cru au moment de prévoir le rituel. Et pourtant, il allait bien falloir en passer par là. Pour ce qu'il devait accomplir, et dans le délai qu'il s'était imposé, les cercles seraient utiles, et le rôle de Songe primordial.

Le sorcier noir alla se placer en face d'elle, déjà tout absorbé à sa tâche. La jeune femme ne le remarquerait peut être pas, mais il concentrait déjà son pouvoir en une aura les entourant tous deux. Ainsi, il renforcerait le pouvoir de son acolyte... Et peut être saurait il la protéger. Ganondorf ne lui avait pas menti, il ne le faisait jamais avec ses fidèles : ce que Songe allait devoir vivre n'aurait rien de plaisant et pouvait s'avérer risqué. On ne converse pas avec des puissances ancestrales impunément.

Elle commença les incantations. Aussitôt, Ganondorf reprit ses mots en canon, mêlant le pouvoir de Songe au sien. Autour d'eux, le cercle réagit rapidement, et violemment. Le sol vibra sous l'effet des flux de magie à l'oeuvre, l'air déjà brûlant bouillonna. Le Lion observait tout, gardait ses sens en éveil, guettait le moindre détail d'importance. La sorcière, ou du moins son esprit, semblait loin de ce volcan et du cercle. Le contact allait se nouer, il put le sentir. Puis soudain, la montagne eut un violent sursaut.
Une énorme masse de magma en fusion s'éleva au dessus d'eux et retomba dans le cratère. Le promontoire de pierre sur lequel les Dragmire officiaient trembla, tout comme les parois au dessus d'eux d'où chutèrent des rocs massifs. Le gérudo sut ce que ces signes annonçaient. Il avait raison.


[table style="text-shadow:1px 1px 1px black;"]« Qui veut troubler mon sommeil ? PARTEZ. »[/table]
Une autre voix empruntait la bouche et les lèvres de Songe. Ganondorf tenta de deviner si la sorcière était totalement possédée, et si elle avait gardé en partie le contrôle de son corps, mais il en fut incapable. Tout ce qu'il parvenait à sentir, c'était l'aura démentielle qui se dégageait d'elle à présent et se confrontait à la sienne. Une force de la nature, l'incarnation du volcan lui même. Il ne lui restait plus qu'à la dresser.

« L'élu de Din, maître de la Flamme, venu te tirer d'un repos bien trop long, Volcania. »

Nommer l'esprit, c'était déjà affirmer une emprise sur lui. Et les forces vives n'apprécient pas les entraves.
Aussitôt, le Volcan fut à nouveau secoué, bien plus violemment cette fois ci. Un nouveau geyser de lave envahit le champ de vision du gérudo, qui ne céda pas d'un pouce de terrain. Au contraire, il tendit une main. Un filet de magma tomba dessus, sans le blesser pour autant. Ses flammes y veillaient. Il referma le poing et plongea son regard dans celui de Songe, sachant que son air de défi ne serait pas ignoré.


« Le temps des chaînes est terminé, dragon. J'ai l'intention de te libérer de ta prison. Tu connaîtras à nouveau la jouissance de voler dans le ciel infini, comme aux premières heures de ce monde. »

Les fragments de la Triforce s'illuminèrent au dos de sa main, et son pouvoir envahit l'espace du rituel, s'insinuant vers le dragon. Le lien que l'esprit avait établit avec Songe permettait à Ganondorf de remonter jusqu'à lui, au plus profond de la montagne, dans sa geôle de pierre. Le gérudo se sentait tout proche, déjà.

« Rien ne te résisteras... Surtout pas tes gardiens. Je te les donnerais tous en pâture, dragon. Les Gorons périront sous tes crocs et tes griffes. Vengeance et Liberté, voilà ce que je t'offre. Quelle est ta réponse ? »

Le Lion n'avait pas précisé qu'en acceptant, la bête serait à lui. Qu'il comptait bien en être l'unique maître et en faire la plus terrible arme de guerre qu'Hyrule avait connu depuis des éons. Ca n'était là que juste retour des choses, et à ses yeux, une liberté partielle vaudrait toujours mieux qu'une captivité totale. Lui qui avait passé des années dans le néant pouvait en témoigner plus que quiconque. Pour le reste, rien d'autre que la vérité avait passé ses lèvres. Si le rituel réussissait, un peuple périrait.

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Songe Tristenuit


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Songe avait chaud, très chaud, elle étouffait. Elle avait l'impression de suivre la scène de très loin. Elle tenta de refermer sa main, de sentir la présence de son corps, mais il lui était inaccessible, et sa main resta ouverte, pendue dans le vide. Elle tâcha de garder son calme. Elle ne s'était pas attendue à avoir le contrôle sur la situation, mais elle avait espéré ne pas le perdre complètement. La dernière fois, elle avait vécu la scène de l'extérieur et n'avait pas eu la possibilité d'intervenir avant qu'il ne soit trop tard, mais cette fois elle était complètement mise à l'écart. N'était-il pas possible d'avoir un juste milieu ?

Elle se doutait que la panique était sans doute la moins utile des réactions, mais elle avait du mal à se contrôler. Elle avait peur de ne pas tenir, d'être réduite en cendres avant que l'esprit qui la retenait ne la libère, qu'il n'ait pas l'intention de partir. Elle devait réussir à rester concentrée, à suivre les événements et ne pas rompre le contact, même si elle n'avait envie que de ça en ce moment. Elle ne doutait pas que si elle perdait ce lien, pour peu que l'entité la laisse faire, le rituel était rompu.

Malgré le pendentif qui se balançait toujours à son cou et lui rendait la température supportable, elle arriva à sentir que la chaleur s'était accentuée. Elle entendait la lave bouillonner, une odeur forte de souffre et de brûlé portée à ses narines, et elle vit des flammes et vagues de magma jaillir du fossé qui s'étendait autour d'eux. Au moins, une fois concentrée elle récupérait ses sens, mais elle doutait toujours pouvoir faire un geste si elle devenait la proie des flammes.

[table style="text-shadow:1px 1px 1px black;"]"Apprends, Élu de Din, que je n'ai ni Dieux ni Maîtres. Je suis un Dragon, et ce que je veux j'en dispose comme je l'entends."[/table]Songe reprenait tout juste le fil de la conversation, mais elle entendit un rire caverneux résonner par sa bouche.

[table style="text-shadow:1px 1px 1px black;"]"Tu veux me faire croire que tu as fait tout ce chemin pour m'offrir la liberté ? Billevesées. Tu t'es donné tout ce mal parce que tu as besoin de moi, non l'inverse. Ma vengeance, je l'aurai, et voici la différence entre nous : j'ai tout mon temps. Il y en aura plein qui, comme toi, viendront m'offrir monts et merveilles en échange d'un peu de pouvoir. Ceux qui m'ont enfermé sont déjà morts et leurs descendants paieront un jour cet affront, je suis patient."[/table]Autour d'elle, Songe entendait la roche craquer, et la lave s'agiter. Un pic de pierre tomba dans le magma, provoquant une éclaboussure jusqu'à eux. Si elle avait pu elle aurait soufflé de soulagement de ne pas sentir une goutte de lave lécher son corps. Elle ne pouvait pas baisser la tête pour vérifier, son regard restait fixé droit devant elle.

[table style="text-shadow:1px 1px 1px black;"]"Tu résistes peut-être à mes flammes, mais est-ce le cas de tous ces gens que je sens aux alentours postés sur le Mont, à commencer par cette carcasse qui m'accueille ? Dis-moi, Élu de Din, as-tu besoin d'eux ? Je te conseille de parler sans détours, sans m'offrir ce qui me revient déjà de droit ni oser imaginer m'entraver dans mon sommeil ou mon éveil. Dis-moi, qu'espères-tu tirer de moi en brisant mes chaînes ?"[/table]


Le temps pressait, Ganondorf en gardait une conscience aiguë. Le chef de guerre savait bien que la résistance avait dû fortement s'organiser au village et que sa troupe de choc, réduite, ne tarderait pas à flancher. Déjà, il ne percevait plus l'aura de Négus, auquel il s'était pourtant lié. Ca ne pouvait augurer que du malheur très proche si le dragon ne cessait pas d'opposer de la résistance. Et puis... il restait le problème de Songe. Le gérudo ignorait combien de temps la sorcière serait capable de tenir avant que le dragon ne s'en prenne à elle. La transe qu'elle subissait devait déjà être atrocement douloureuse.

[table style="text-shadow:1px 1px 1px black;"]« Apprends, Élu de Din, que je n'ai ni Dieux ni Maîtres. Je suis un Dragon, et ce que je veux j'en dispose comme je l'entends. »[/table]Volcania partit d'un rire terrible, qui fit à nouveau trembler la roche et provoqua de brusques mouvements de vagues dans le bassin de lave. Si les environs avaient profité un certain temps de la tranquillité du volcan, Ganondorf sut que cette période était révolue. Le dragon agissait sur le magma en fusion, aidé en cela par la puissance qu'il tirait lui aussi du cercle rituel. Le cratère était ainsi parcouru par son pouvoir, autant que par la puissance du Lion.
Le lézard ne s'en rendait peut être même pas compte, mais il était en train d'éveiller le péril qui avait donné son nom à la montagne. Celui ci continuait à narguer le gérudo, sur un ton que ce dernier détestait car il était celui que personne n'osait plus jamais employer à son égard : celui de la condescendance et de la supériorité.


[table style="text-shadow:1px 1px 1px black;"]« Ma vengeance, je l'aurai, et voici la différence entre nous : j'ai tout mon temps. Il y en aura plein qui, comme toi, viendront m'offrir monts et merveilles en échange d'un peu de pouvoir. »[/table]Ganondorf Dragmire grinça des dents sous l'affront. Le dragon semblait le prendre pour un simple mortel, faible et impuissant, en quête d'une puissance qui le dépasserait. Même venant d'un monstre de légende, venant d'un âge ancestral, l'insulte lui fit l'effet d'une gifle insolente qu'il n'entendait pas accepter. Une voix lui vint depuis les tréfonds de son esprit.

[table style="text-shadow:1px 1px 1px black;"]« Je reconnais bien là ces cracheurs de feu impudents. Laisse moi lui parler. »[/table]Le gérudo écarta la proposition du démon, refusant de compter sur un autre pour l'instant. C'était son combat, sa confrontation, de lui à un être enfin à sa taille. Contrairement au dragon, Ganondorf refusait de sous estimer son adversaire, mais il n'était pas prêt à s'abaisser devant lui. Personne en ce monde ne pourrait lui pousser.

[table style="text-shadow:1px 1px 1px black;"]« Tu résistes peut-être à mes flammes, mais est-ce le cas de tous ces gens que je sens aux alentours postés sur le Mont, à commencer par cette carcasse qui m'accueille ? Dis-moi, Élu de Din, as-tu besoin d'eux ? Je te conseille de parler sans détours, sans m'offrir ce qui me revient déjà de droit ni oser imaginer m'entraver dans mon sommeil ou mon éveil. Dis-moi, qu'espères-tu tirer de moi en brisant mes chaînes ? »[/table]« Tous ne me servent pas. Ceux qui le font en connaissent les risques. Ils savent que jouer dans mon camp peut leur apporter beaucoup, à proportion de ce que je leur demande : tout. Et je n'ai pas l'intention de les sacrifier. J'ai pour loi de protéger ceux qui se placent sous la bannière du Lion. »

Ganondorf repensa à ses plus fidèles, à Swann mais aussi à Négus ou sa prêtresse ainsi qu'à l'ombre du héros, qui combattaient sans doute tous âprement. Lui fixait les yeux de Songe, sachant que la sorcière l'entendrait, espérant peut être parvenir à la rassurer. Il ne doutait pas que le rituel devenait de plus en plus rude pour elle, et qu'il faudrait bientôt y mettre fin. Dans le cas contraire, elle vivrait un enfer qui ne manquerait pas de la consumer. Son visage se durcit et son aura s'intensifia, alors qu'il poursuivait,

« Je n'ai fais que te parler sans détour, draeke. Je suis ici pour te libérer et non pour t'entendre pérorer comme un vulgaire phénix ! Tu joues la fierté et ose te moquer de moi mais tu ne me trompe pas ! Tu es une bête en cage, dragon ! Condamné au silence, à l'immobilité et au sommeil au coeur de la terre. Ce qui t'appartient de droit, comme tu dis, t'est parfaitement hors de portée et pourtant tu te permets de poser des conditions ? De me traiter comme un vulgaire apprenti sorcier trop ambitieux ? Ceci t'est il donc étranger ? »

Sur la main que leva le Lion, les fragments de la toute puissance divine s'illuminèrent si puissamment que leur éclat parut éteindre celui du lac de lave. L'aura du gérudo grandissait tandis que sa voix emplie de magie faisait trembler la terre. La demeure de son esprit s'ouvrit à un autre être dont le temps était venu d'entrer en scène.

« Tu me vois au pire en insecte, au mieux en poseur de chaînes. Je ne suis ni l'un ni l'autre. Je suis Ganondorf Dragmire, ton libérateur, la torche qui enflamme les coeurs vaillants et consume les âmes de mes ennemis ! Et si je veux te libérer... la puissance s'intensifia et fut projeté à travers le cercle vers le dragon et ses entraves. Soudain, une deuxième aura s'ajouta à celle du gérudo, une aura plus ancienne même que Volcania, emplie de force et de colère.

[table style="text-shadow:1px 1px 1px black;"]« ...C'est pour voir Hyrule brûler. »[/table]Il ne restait plus beaucoup de temps. Ganondorf allait avoir besoin d'une réponse, d'une ultime réponse.

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Llanistar van Rusadir


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Même débarrassé d'une partie de son armure, Llanistar sentait la douleur poindre dans ses bras et ses épaules, tandis qu'il s'efforçait de placer le maximum de son poids dans ses jambes. Sa main de métal légèrement entrouverte afin de faciliter les prises sur la roche, il s'efforçait de suivre, maladroitement, son amant, bien plus à l'aise. Il se revit quelques minutes plus tôt, considérant avec malaise la falaise à gravir pour accéder au sommet du volcan, leur destination. Le général avait insisté auprès du chancelier afin qu'ils prennent un autre chemin mais ce dernier lui avait fait remarquer que le village ne pouvait attendre qu'ils fassent un détour.
Légèrement honteux de ne pas avoir gardé cet impératif à l'esprit, le nordique avait cédé. Pour ne pas risquer d'échouer dans cette escalade, il avait retiré plusieurs des éléments les plus lourds de son équipements, ne gardant que quelques pièces. Llanistar avait un mauvais pressentiment à ce sujet. Il sentait les regrets poindre en pensant aux gérudos qui les attendraient et... à Ganondorf lui même. Soudain, un hurlement leur parvint, du village, et fit trembler l'une des prises qui le maintenait. Aussitôt, mû par la crainte de la chute, il en changea et retrouva une position stable. Par dessus son épaule douloureuse, il jeta un regard vers Cocorico, et les colonnes de fumée noire qui en montait. Le général savait que ce qui s'y passait n'avait plus rien en commun avec un simple raid, et que l'incendie qui ravageait les maisons ne s'éteindrait pas aisément. Il avait vu la source de ce mal. De très prés.

C'était arrivé à peine un quart de tour d'horloge auparavant, et pourtant le souvenir qu'il en conservait était si irréel qu'il l'eut daté de plusieurs jours. Tandis que lui et son amant montaient sur le chemin s'élevant vers le volcan, rapidement mais avec prudence pour éviter les embuscades, ils avaient brusquement senti la terre trembler sous leur pieds. Llanistar avait tout d'abord cru à une secousse de la montagne mais à mesure que le sol s'agitait de plus en plus fortement, il avait senti un danger arriver. Une conscience extrêmement puissante, primitive et brute, emplie d'une colère sans fin. Lorsque enfin le monstre s'était montré, il n'avait dû son salut qu'à son intuition, et un réflexe de vétéran. Le Dodongo ne s'était pas attaqué aux deux hommes mais sa course infernale avait détaché des blocs de pierre massifs du volcan. Orpheos s'en tira mieux que lui, agile et souple comme il était. Le nordique, lui, parvint à se jeter sur le côté et s'abrita derrière un renfoncement le temps que la pluie rocheuse passe. Dés lors, ils se posèrent la question de rebrousser chemin pour secourir le village, mais les éboulis avaient rendu le chemin impraticable.
Llanistar se maudit à l'instant où il tourna le dos au village. Il détestait l'idée de laisser ses hommes aux prises avec un monstre pareil, mais le choix ne lui était de toute façon pas donné. Tout ce qu'il pouvait faire, c'était d'empêcher ce que le seigneur du désert tentait de faire au sommet du volcan, quoi que cela puisse être comme abomination maléfique. Il lâcha un regard mauvais vers la sinistre silhouette de la montagne décharnée. Bien qu'ignorant, le Rusadir se doutait que quelque chose de néfaste avait cours en haut. Son mauvais pressentiment ne l'avait pas quitté depuis.

Une nouvelle secousse le ramena à la réalité. Ses appuis rendus fragiles, Llanistar s'affola l'espace d'un instant et ne put s'empêcher de regarder en bas. Il le regretta aussitôt, son vertige venant le hanter. Serrant les dents et fermant les yeux, le général aux bras fatigués se sentait incapable de continuer, comme de tenir. Autour de lui, la montagne grondait toujours.
Apparemment, Orpheos s'en rendu compte. Le nordique sentit soudain la main de son amant qui se posait sur la sienne. Il rouvrit les yeux pour retrouver le regard d'émeraude du chancelier, et son sourire encourageant. Les secousses s'apaisèrent, et Llanistar avec elles. Prenant une profonde inspiration, il reprit confiance et leur ascension continua.
Alors qu'ils approchaient du sommet de la falaise, les deux hommes entendirent progressivement des voix de femmes, d'abord faiblement puis plus fort. Elles parlaient en gérudo. Silencieusement, le duo de combattants s'entendit sur la marche à suivre. Lentement, ils gravirent le reste du mur de pierre, et atteignirent le sommet à l'opposé des gérudos. Camouflés par des rochers, ils les contournèrent, jusqu'à pouvoir jeter discrètement un oeil à ces femmes du désert. Elles ne les avaient pas vu. Pleines de joie, elles pointaient Cocorico du doigt, et riaient. Elle se délectaient du spectacle de la mort et de la destruction qui frappait le village. Llanistar sentit la colère poindre dans ses tripes. Il échangea un regard avec Orpheos et constata qu'ils partageaient ce sentiment. Le général lui fit alors un signe sur la marche à suivre, éloquent. Puis, pour se porter chance, il l'embrassa furtivement, avant de lui glisser à l'oreille.


« Je ne voudrais personne d'autre à mes côtés en cet instant. »

Puis, il se lança à l'attaque, mais pas selon ses habitudes et son expérience, de manière frontale et direct. Cette fois, le général fit comme Orpheos lui avait appris, lors de leurs longs entraînements en duo : furtif comme une ombre, silencieux comme un oiseau en vol. Lui et le chancelier s'approchèrent, dans les dos de leurs ennemies, jusqu'à se retrouver proches de deux pas. Alors, poussant brusquement sur ses jambes, l'épaule en avant, Llanistar se projeta contre l'une des sbires de Ganondorf. Celle ci, trop surprise pour réagir, fut éjectée en avant... vers le vide. Son cri retentit plusieurs secondes mais personne n'y faisait attention. Trois des siennes avaient subi l'effet de surprise et l'avaient rejoint. Les deux dernières passèrent rapidement par le fil des deux lames royales.

Llanistar adressa un sourire plein de fierté à son amant. Cette bataille, malgré l'horreur qu'elle apportait, était enfin l'occasion pour eux de mettre en pratique leur entraînement, et leurs tactiques particulières.
Soudain, la montagne fut secoué par un tremblement particulièrement fort. Comme si un titan s'agitait sous la roche millénaire. Le mauvais pressentiment du général refit surface et il se retourna vers l'entrée du cratère, où Ganondorf semblait officier. Tandis que lui et Orpheos s'en rapprochait, en marchant, comme pour retarder la venue de la confrontation, Llanistar mit une main sur son épaule et lui déclara,


« Nous sommes là pour arrêter l'ennemi, par pour le vaincre. Il est trop puissant pour nous. Il s'arrêta un instant, pour trouver les mots justes, J'ignore ce qu'il a pu t'infliger quand tu étais son... prisonnier, mais ne prends pas de risques inutiles. Je t'en prie. »

Puis, ayant jeté un dernier regard vers le village et le ciel étoilé en partie masqué par les colonnes de fumée noire, les deux hommes entrèrent dans l'antre de la bête.


Orpheos


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(vide)

Un regard vers le ciel nocturne inspira à Orpheos, le temps d’une brève rêverie, quelques idées de passer la soirée d’une bien meilleure façon. Ses yeux divaguèrent alors sur l’auguste derrière de son amant… Non, il devait se reprendre vite. Ce ni l’heure ni l’endroit de penser à quelques jeux amoureux : l’escalade des remparts rocheux du mont du péril, à des centaines de mètres au-dessus du village Cocorico en feu, devait nécessiter toute son attention. Il devait stopper toute cette folie, arrêter Ganondorf, et prier pour que le roi Dodongo ne massacre pas tout le monde en bas. Il s’en était fallu de peu pour qu’il écrabouille les deux amants, sur les premiers mètres du chemin du péril. L’éboulement que le reptile avait provoqué, dans une grande confusion, avait bloqué le passage et forçait donc le couple à ne pas rebrousser chemin.

Llanistar peinait clairement à escalader le mont, ralenti par le poids de son corps et de sa fatigue -encore n’avait-il heureusement pas emporté sur lui la totalité de son armure-, mais le regard d’Orpheos l’encourageait régulièrement à continuer de grimper. Ses rappels du regard demeuraient un excellent moyen, pour lui, de communiquer avec le général, et il savait que cela se vérifierait une fois en plein combat.
Le temps de l’action ne tarda pas à venir, lorsqu’ils parvinrent tous deux sur le sommet de la montagne où stationnaient une demi-douzaine de Gérudos s’esclaffant, riant bruyamment du chaos régnant des centaines de mètres plus bas, bien à l’abri sur leur rebord de falaise. Le regard du chancelier devint acéré, et ni celui de Llanistar, ni son baiser, ne parvinrent à le détacher de sa pensée alors unique : neutraliser ces lâches en sarouel. Depuis sa séquestration dans leur forteresse, Orpheos trainait un sérieux litige à régler avec les Gérudos.


-Je ne voudrais personne d'autre à mes côtés en cet instant, souffla Llanistar.
-Concentre-toi, abrégea Orpheos plus froidement qu’il ne l’aurait voulu. Je veux voir le moins de blessures possible sur toi.

Un dernier échange de regard, puis un signe de tête commun, et tous deux partirent à l’attaque. Leur influence réciproque payait déjà : s’approcher tels des ombres, mais ne pas ménager l’usage de la force. Chacun poussa deux Gérudos dans le vide, qui ne durent pas comprendre ce qu’il venait de leur arriver, juste avant de trancher la gorge des deux survivantes. Orpheos et Llanistar gardèrent leurs dagues et épée bien au dehors, en cas de contre-attaque surprise, mais ce fut avec un sourire mutuel qu’ils s’engagèrent vers l’entrée du volcan. Marchant pourtant avec calme, méfiant face aux tremblements de terre qui secouaient ses pas, Orpheos fut rattrapé par la main froide et métallique de Llanistar qui se referma sur son épaule.

-Nous sommes là pour arrêter l'ennemi, par pour le vaincre, lui rappela Llanistar. Il est trop puissant pour nous. J'ignore ce qu'il a pu t'infliger quand tu étais son... prisonnier, mais ne prends pas de risques inutiles. Je t'en prie.

Le général avait sans doute cru deviner certains sentiments qui animaient le cœur du dignitaire, et il avait visé juste. Il savait que le Sheikah n’était pas aussi froid et calme que le suggérait son apparence.

-Je suis justement ici pour l’arrêter, Llanistar, pas pour me venger. Orpheos l’assurait pourtant avec un peu trop de fermeté dans la voix, et dans les yeux, pour être tout à fait crédible. Je ne prendrai aucun risque gratuit.

Orpheos ne pouvait pourtant pas faire oublier ses faits précédents : son pacte avec les Ombres d’abord, et son initiative solitaire dans la forteresse, qui l’y avait mené en prison. Llanistar devait bien savoir que pour Zelda, le Sheikah serait toujours prêt au sacrifice.


Tous deux pénétrèrent l’entrée du volcan avec la même lenteur. La roche vibrait sous leurs pas, et la chaleur échauffa peu à peu leur visage, à mesure qu’ils s’avancèrent dans le couloir, pour se retrouver au-dessus d’un véritable gouffre empli de lave en fusion. Des mèches de cheveux se plaquèrent sur leur front. La canicule était telle que leurs yeux durent se plisser, durant ce trop court moment où, dominant tout le cratère, les deux amants purent se contempler.


-Moi non plus, je ne voudrais de personne d’autre à mes côtés en ce moment, confia Orpheos d’un bref sourire.

Le chancelier tendit sa main pour attraper celle de Llanistar, tandis qu’ils observèrent ce qui se tramait en bas. Deux silhouettes se tenaient au centre du cratère, au milieu de la fournaise et du magma, que le chancelier reconnut trop bien. Ganondorf était là, bien sûr, mais l’autre était une ennemi qu’Orpheos était sûr d’avoir mieux reconnu que Llanistar. C’était la sorcière qu’il avait combattu dans la forteresse Gérudo. Un pincement de colère le toucha au cœur. Son instinct primaire lui rappela de se jeter immédiatement sur elle, en même temps que sur Ganondorf, mais la main de son homme dans la sienne fit appel de sa contenance.


-Cette femme… Orpheos gardait les yeux fixés sur elle. Elle est responsable de mon séjour à la forteresse ennemie. Je propose que tu me venges, pendant que j’occupe Ganondorf sur un terrain magique que lui et moi connaissons bien.

Comme une réponse, l’ombre enchantée d’Orpheos revint depuis l’extérieur du cratère, et se glissa jusque lui pour réimprimer ses pas. Le Sheikah sut alors qu’elle avait rempli sa mission : la prêtresse de Farore se portait bien. Du moins pour le moment, car Orpheos veillerait personnellement à ce qu’on lance une enquête sur elle.

-Va chercher de quoi nous défendre, ordonna le chancelier à son ombre, qui se retira furtivement de lui pour s’éloigner une nouvelle fois à l’extérieur. Ne fais rien devant ce que tu t’apprêtes à voir, ajouta-t-il à l'adresse du général.

Les doigts fins d’Orpheos se resserrèrent sur ceux de Llanistar, juste avant qu’une des Gérudos, égorgée un peu plus tôt par ses soins, n’entre dans le cratère tout en répandant du sang derrière elle. Sa tête penchait dangereusement sur le côté. Ses yeux s’étaient mal refermés.


-Mon ombre a la capacité de manipuler les corps morts, expliqua-t-il devant le général, comme pour s’excuser de l’horreur d’un tel pouvoir.

La Gérudo morte salua Llanistar d’un signe de la main. Un craquement sinistre ne manqua pas de se faire entendre.


-Allons-y, maintenant.

Les trois silhouettes se déplacèrent discrètement dans la pénombre du cratère, parcourant les multiples ponts suspendus qui joignaient les falaises, traversant celles-ci tout en restant hors du champ de vision de Ganondorf, visiblement occupé par la sorcière. Il leur fallait agir tant qu’elle monopolisait son attention, et surtout tant qu’ils ne crevaient pas sous la chaleur ambiante.

La Gérudo morte fut la première à se jeter vers le centre du cratère, flottant d’abord très haut dans les airs de sorte à ne pas être vue, juste avant de plonger en pointant son cimeterre sur le crâne de la sorcière. Suivi de Llanistar, Orpheos surgit lui aussi en hauteur -ayant pris son appui sur un énorme pic rocheux- pour s’attaquer au roi Gérudo. Après que son pied eut tenté un coup expéditif sur la nuque, ses deux dagues Sheikah virevoltèrent afin de le lacérer au visage ou à la gorge.

Orpheos recula ensuite d’un bond, non loin de son ami et amant -accompagné dans son action par la morte- mais surveillant Ganondorf dans l’axe principal de son champ de vision.


-Salutations ô Roi de seconde zone, lui jeta Orpheos comme une déclaration de guerre, masquant sa haine personnelle derrière un sourire terriblement froid et provoquant.


Songe Tristenuit


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(vide)

Le dragon éclata à nouveau d'un rire qui résonna dans le cratère. Songe en aurait sursauté si elle avait eu le contrôle de son corps. Elle aurait préféré ça à cette chaleur engourdissante. Même son esprit s'alourdissait, et elle devait faire tous les efforts du monde pour rester attentive. Si elle avait été rassurée que Ganondorf déclare ne pas vouloir la sacrifier, elle ignorait toutefois jusqu'à quand elle pourrait encore tenir.

[table style="text-shadow:1px 1px 1px black;"]"La dernière fois que j'ai vu ce symbole, il était composé de trois parties. La troisième t'aurait-elle échappé, humain ? Cela ne fait pourtant que prouver la quête de pouvoir que tu poursuis. Si tout cela te suffisait, pourquoi serais-tu ici ?"[/table]
Le dragon sentait bien qu'il avait piqué la fierté de celui qui l'avait invoqué, et il n'avait aucune intention de le ménager pour autant, au contraire. L'aura de l'homme avait beau avoir été rejointe par une autre, plus ancienne, plus puissante aussi, le dragon ne craignait ni Dieux ni Démons. Pas plus qu'il ne craignait la Mort. Sans doute même la préférait-il à la vie servile qu'osait tenter de lui imposer cet homme et ce qui semblait l'accompagner.

[table style="text-shadow:1px 1px 1px black;"]"Je ne suis peut-être pas le seul ici dont les pouvoirs sont restreints. Mais de nous deux tu restes le plus humain, cette engeance déteint sur toi. Si l'esprit qui t'habite a devant lui une vie d'immortelle, la tienne se terminera, et tu souhaites pourtant savourer une victoire de ton vivant. Je te l'ai dit, nous ne raisonnons pas de la même manière. Cette discussion n'est qu'un battement de cil dans mon existence. Je suis prêt à attendre encore plusieurs milliers d'années s'il le faut, mais le jour où je sortirai, ce sera sans la moindre chaîne. Libère-moi si tel est ton souhait, nul doute qu'Hyrule s'embrasera sous le souffle de mes flammes, et tu seras encore là pour profiter du spectacle de ma libération, mais ne t'attends pas à un traitement de faveur ou à une quelconque obéissance, ni même à de la reconnaissance."[/table]
Le dragon ne cherchait même pas à menacer l'homme face à lui. Mais ainsi était sa nature, il n'aurait de compte à rendre à personne. S'il sortait enfin de son long sommeil au sein de la montagne, ce serait pour détruire, tout, sans distinction, et régner sur une foule de proies apeurées.

[table style="text-shadow:1px 1px 1px black;"]"Réfléchis-y, donc, Ganondorf Dragmire, et peut-être que nous nous reverrons. Mais réfléchis bien, ne reviens pas ici pour me faire perdre mon temps. En attendant, on dirait que tu vas avoir à gérer une petite complication."[/table]
Songe sentit sa tête se lever vers le haut du cratère, sans qu'elle y soit pour rien, et elle ne put écarquiller les yeux mais ce n'était pas l'intention qui manquait. De ce qu'elle voyait, ils étaient trois à tomber droit sur eux, et si elle n'avait pas la possibilité de dévisager leurs assaillants, les flammes du volcan qui se reflétaient sur la lame juste au dessus d'elle suffisaient à lui faire comprendre le danger. Ses pieds restaient pourtant collés au sol. Elle était toujours engourdie, n'avait toujours pas retrouvé le contrôle de son corps, et elle commençait à paniquer. La lame se rapprochait, et elle ne pouvait même pas détourner les yeux. Elle essayait, de toutes ses forces, de faire basculer son corps, de se détacher du sol, quand finalement elle sentit le dragon se désintéresser d'elle. Elle eut un hoquet et tout juste le temps de prendre une bouffée d'air avant de se jeter sur le côté, tombant au sol. Ce qui lui avait paru une éternité avait duré à peine un instant.

La sorcière en était encore toute sonnée. Elle ignorait si l'esprit l'avait libéré de lui-même, si elle avait rompu le rituel par son inattention ou si Ganondorf y était pour quoi que ce soit, mais elle devinait qu'il ne reviendrait pas cette nuit-là. Elle tâcha de se relever, malgré ses jambes encore chancelantes. Ses yeux parcourent rapidement le cratère, encore toute surprise que ses gestes obéissent à sa pensée. Encore assez peu renseignée quand à la Cour hylienne, elle ne connaissait le visage que d'un seul des deux hommes, celui qu'elle avait déjà croisé, et il ne lui rappelait pas de plaisants souvenirs. Quant à la chose qui se tenait là où elle-même demeurait quelques instants auparavant à peine, elle n'avait rien d'humain malgré son apparence de Gerudo.

Nul doute que ce qu'on attendait d'elle était de se battre aux côté de Ganondorf qui semblait déjà pris d'assaut par les deux attaquants, mais elle n'en avait plus la force. Rester tenait plus du sacrifice que de la bravoure, et elle n'avait pas prévu d'offrir sa vie au Roi des Gerudos. C'était la différence entre elle et Swann : son amie croyait corps et âme aux idéaux de Ganondorf, mais la sorcière se trouvait seulement là par amitié. Elle était reconnaissante envers le Clan qui l'avait accueillie, mais sans saisir tous les enjeux qui les poussaient à combattre. Elle avait accepté de participer au rituel, et elle avait promis à Swann de faire de son mieux et de veiller à ce que leur chef de Clan ne reproduise pas les mêmes erreurs qu'elle par le passé. Dans la mesure du possible du moins, mais à présent cette menace était passée. Le Gerudo était en meilleure forme qu'elle, et face à de simples hommes il pouvait tenter sa chance seul ou se replier à sa convenance, ce qui était sûr pour elle, c'était qu'elle choisissait la seconde possibilité. Et le compte qu'elle avait à régler avec l'un des hommes présents attendrait, vu l'état dans lequel elle se trouvait, loin de pouvoir faire un plein usage de sa magie.

Elle n'avait donc pas vraiment droit à l'erreur, ni l'occasion de s'éterniser. Ravie de sentir ses lèvres bouger, elle profita que la créature face à elle se soit reculée et récita rapidement la formule de son sortilège, avant de disparaître à la vue de tous. Elle savait toutefois qu'elle ne tiendrait pas longtemps son sort d'invisibilité, aussi ne tarda-t-elle pas à courir hors du cratère, désireuse de s'éloigner assez loin pour ne pas être suivie une fois réapparue.


[table style="text-shadow:1px 1px 1px black;"]« Réfléchis-y, donc, Ganondorf Dragmire, et peut-être que nous nous reverrons. Mais réfléchis bien, ne reviens pas ici pour me faire perdre mon temps... »[/table]Le Lion pris soudain conscience que la situation lui échappait pour de bon. Comme du sable entre ses doigts, il pouvait sentir le dragon filer hors du rituel, hors de sa maigre emprise. Volcania était en train de se refuser pleinement à lui, rendant inutiles et sans valeur tous les risques et les pertes liées à l'entreprise de cette nuit là. Refusant cette idée, Ganondorf Dragmire gronda de toute son autorité et sa force de mortel,

[table style="text-shadow:1px 1px 1px black;"]« Ne fais pas ça. »[/table][table style="text-shadow:1px 1px 1px black;"]«... En attendant, on dirait que tu vas avoir à gérer une petite complication. »[/table]A l'instant où l'esprit millénaire s'en retourna vers le coeur du volcan, et sa prison de roc et de feu, le gérudo explosa d'une fureur intense et sans limites. Le hurlement de rage qu'il poussa, chargé de la puissance du démon et du fragment divin de la Force, fit trembler la terre, et arracha plusieurs blocs aux parois du cratère, qui plongèrent dans le lac de lave en provoquant de nouvelles colonnes de feu liquide. Ganondorf ne pouvait se résoudre à pareil échec. Jamais il n'aurait pu imaginer Volcania lui opposer une telle opposition bornée et stérile. Le vieux lézard avait il perdu la raison ? S'imaginait il pouvoir profiter de beaucoup d'autres occasions comme celle que lui offrait le Lion ? Avait il donc tant changé depuis une certaine époque, et un autre monde pourtant semblable ? Autant de questions qui tourmentaient un seigneur du désert abasourdi, pétrifié par la colère et la déception. Non seulement le refus était clair et net, mais en plus il s'accompagnait d'un outrage inacceptable, devant lequel Ganondorf ne pouvait que perdre la face. Alors, tandis que Songe était relâchée par Volcania, le gérudo brandit son poing au dessus du magma en fusion et cria au monstre légendaire,

[table style="text-shadow:1px 1px 1px black;"]« Nul ne crache ainsi au visage d'un roi tel que moi, vieux lézard ! Tu as perdu aujourd'hui ton unique chance de connaître la liberté ! La prochaine fois que je reviendrais, ça sera pour te poser un collier de fer et t'apposer la marque de mes esclaves ! Je briserais ton impudence ! J'écorcherais ta peau écaille après écaille et te plongerait dans une mer salée ! Je ferais de toi mon chien ! Souviens toi de ces mots, car je n'ai qu'une parole ! »[/table]La sorcière retomba au sol et les cercles du rituel redevinrent de simples symboles inertes. Le démon s'en alla sans un mot, presque aussi déçu que son hôte. A cet instant, Ganondorf sut que quelque chose clochait. Les derniers mots du dragon lui revinrent en mémoire. Il vit une de ses gérudos achever de... chuter de nul part et, par pur réflexe, se retourna en brandissant un bras comme un bouclier. Se faisant, il bloqua le coup de pied qui le visait, mais l'effet du surprise était tel que la vision que le Lion pouvait se faire de l'attaque était floue. Il ne put voir venir les dagues, rapides et sifflantes, lancées dans sa direction. La première érafla son front, avant de finir sa course dans le lac ardent, laissant une entaille conséquente. La seconde manque de peu un des yeux d'ambre du gérudo mais lui ouvrit également sa peau de bronze sur un pouce de longueur. Ganondorf passa sa main sur ses plaies, prenant conscience de sa négligence et de son manque de vision. Ainsi, contrairement à ses plans, ses enfants n'avaient pas retardé les chiens de Zelda bien longtemps... néanmoins cet échec n'importait pas vraiment. Volcania avait refusé, et les royalistes n'avaient rien empêché de concret. Ils venaient juste de se mettre en danger. Un sourire pointa sur les lèvres du Lion lorsqu'il ordonna à Songe, tout constatant qu'elle ne l'avait pas attendu,

« Vas t'en, Songe, hors du champ de bataille. Tu as rempli ton rôle pour cette nuit. »

Rapidement, la sorcière s'effaça à sa vue. Ganondorf restait conscient qu'il ne pouvait rester longtemps en ce lieu de mort mais il comptait bien donner à la jeune fille une ouverture pour fuir avant lui. Après tout, il était le Lion, l'invincible, le maître des flammes, sur le trône du royaume ardent. Pour la première fois, gonflé d'orgueil, le Roi accorda un regard à ses adversaires.

« Salutations, ô Roi de seconde zone ! »

L'insulte le fit ricaner. Le chancelier pouvait bien afficher un calme à peine mêlé d'ironie, il ne trompait personne, et surtout pas Ganondorf qui pouvait sentir sa haine et sa peur, son envie de se venger et la crainte de subir à nouveau les tourments de tantôt. Un regard pour la marionnette gérudo - un sortilège très sombre dont il aimait également user - suffit pour qu'il comprenne qu'Orpheos était prêt à tout, même au pire, pour le stopper. Incorrigible.
Le gérudo ne fut même pas surpris de le retrouver là, bien vivant, malgré la torture et la traque qu'il lui avait infligé et qui avait manqué de le tuer. Depuis longtemps, la nouvelle de son retour à la cour d'Hyrule lui était parvenu, et il y avait quelque chose dans le Sheikah qui le pousserait toujours à revenir au combat. Un grand courage, ou une grande stupidité, au choix. Ganondorf plongea dans ses yeux d'émeraude, tâchant de briser à nouveau ses résistances. Le souvenir des tourments subit par l'artiste étira le sourire du Lion tant ils étaient plaisants à se remémorer. Il se rappelait de l'allure pathétique et de la faiblesse de cette petite chose qui s'était cru assez fort pour tuer sa propre fille. Il se souvenait de son désespoir et de sa détresse. Il se souvint aussi de ce qu'il avait voulu le plus cacher.
Son regard glissa vers le second du duo intrusif, celui que le Roi n'avait jamais rencontré en personne mais dont il n'avait cessé d'entendre les échos. Un étranger inconnu et pourtant catapulté en quelques jours vers le sommet de la cour de son ennemie. Le principal artisan de la nouvelle armée de Zelda. L'homme à la main de métal. Le visage que Ganondorf avait trouvé au plus profond de l'esprit d'Orpheos. Llanistar van Rusadir. Le Lion fit un pas vers les deux combattants, et déclara.


« Et que dois je donc saluer ? Un musicien et un estropié ? Un réfugié et un mendiant ? Un joueur de flûte, ou deux ? Le ton du Lion était moqueur, et son expression ne laissait aucun doute sur le sous entendu de ses derniers mots, et sur ce qu'il savait des deux amants. Crois tu donc que je n'ai cherché que des failles militaires dans ton esprit, Orpheos ? J'en sais beaucoup plus sur toi que tu ne le pense et le voudrait. Bien, je suppose que vous êtes monté jusqu'ici pour vous battre ? »

Ganondorf s'étira, en faisant craquer les articulations de ses doigts. Le Lion avait abandonné ses armes avant l'ascension du mont et ne portait plus que quelques pièces de son armure. Il récupéra alors son casque, posé sur un roc, et enserra sa tête chevelue à l'intérieur. A travers les fentes de la face métallique étaient alors visibles deux billes d'ambre scintillantes, bien plus que des yeux normaux. Le gérudo éleva ses mains, vides, paumes vers le ciel.

« Je ne saurais vous décevoir. »

Le Roi du désert avait souvent prouvé sa valeur de guerrier, mais il restait avant tout un sorcier, l'un des meilleurs, et il comptait bien le rappeler à ses ennemis. Ganondorf concentra son pouvoir dans ses mains, son aura considérablement accrue. Autour de lui l'air se mit à vibrer et le sol trembla si fort que la puissance dessus s'en souleva, dans un cercle de plusieurs mètres autour de lui, aveuglant ceux qui se trouvaient dedans. Profitant de la surprise, le gérudo pointa ses deux bras vers ses ennemis et déchargea brusquement l'énergie concentrée en deux éclairs ravageurs. L'attaque avait plus pour but d'handicaper que de blesser mais lorsqu'il entendit le cri de Llanistar, le Lion sut qu'il avait marqué un point.
Aussitôt, il fonça vers le général, la foudre parcourant son poing fermé. Arrivé à sa hauteur, Ganondorf déplia sa main et l'abattit violemment sur le crâne à nu du nordique. A nouveau, l'énergie le parcouru, le secouant de spasmes tandis que la douleur l'envahissait.

L'instant d'après, le gérudo sentait une lame l'assaillir dans le dos, et entailler son armure. Il se retourna pour constater que la marionnette était plus vive qu'il ne l'avait cru. D'un coup de pied brusque et violent, il l'envoya contre une parois du cratère. Le sorcier tendit à nouveau son bras vers sa cible, mais cette fois, ce fut un torrent de feu qui en jaillit et carbonisa le cadavre sur la pierre, le rendant inutilisable. Ganondorf observait le résultat, satisfait, quand il sentit Orpheos tout proche et se retourna brusquement en crachant des flammes de ses deux mains, à l'aveuglette. Le flot était néanmoins assez fort pour imposer une distance au chancelier. Le Lion se retourna alors vers le général, qui tentait, à genoux et en partie paralysé, de se remettre de la foudre. Dans ses yeux de braise, on pouvait lire une excitation morbide.


« Un précipice vous attends, ser. »

Saisissant Llanistar par sa chevelure, ignorant la piètre résistance du général, il commença à le traîner sur le sol de pierre vers le lac de feu, en maintenant d'un bras le mur entre eux et le chancelier... Du moins là où il pensait que ce dernier se trouvait. A chaque pas, le péril ardent s'approchait, et la fin probable d'une belle histoire de coeur.

Ce compte est un compte narrateur : les personnages joués par le narrateur ne peuvent pas être utilisés par les joueurs ou joueuses dans leur post (sauf autorisation d'un admin) et les jets de dé du narrateur sont contraignants.



Llanistar van Rusadir


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« Un précipice vous attends, ser. »

La chaleur l'étouffait, le sol rocheux lui écorchait la peau de la main et des bras, la poussière qu'il soulevait lui brûlait les poumons et l'empêchait de respirer... Et il y avait cette poigne, qui enserrait sa chevelure et lui faisait mal. Llanistar aurait tout donné pour que son ennemi cesse de le tourmenter par son petit jeu sadique. Mais Ganondorf semblait in inarrêtable, son esprit pervers aussi dur que la force de son poing resserré autour des cheveux du général. Ce dernier savait vers quoi le seigneur du mal l'amenait. Il aurait voulu l'en empêcher, pouvoir se défaire de cette emprise, combattre son adversaire honorablement et non persister dans cette position humiliante... Mais ses efforts semblaient dérisoires.
La foudre projetée par le sorcier maléfique l'avait transpercé. Elle s'était insinuée en lui, l'avait parcourue de par en par, dans tous ses membres. Sur le moment, le nordique avait cru que son crâne allait exploser tant la décharge d'énergie s'était révélée violente, intense. C'était véritablement comme subir de plein fouet la colère du roi des dieux un jour de juillet. Une force de la nature, implacable et infatigable. Elle résidait là, la véritable essence de Ganondorf : une puissance sans limite, qu'on ne pouvait espérer que freiner. Llanistar cessa de se débattre. Le gouffre approchait, il le sentait venir.


*Pourquoi suis je arrivé jusque là ?*

Il se souvint de la fournaise, de l'impression subite qu'il avait subie en pénétrant dans le boyau menant au cratère. La chaleur, immense, intense, qui le faisait cuir dans le peu d'armure qu'il portait et le faisait suer abondamment, qui rendait difficile chaque inspiration et lui donnait l'impression d'avaler du métal en fusion et non de l'air... Dés cet instant là, le nordique avait pensé à s'en retourner. Le volcan n'était pas un lieu pour lui. Aucun homme ne pouvait subir un tel tourment. Lui qui venait des montagnes gelées et ne s'était jamais adapté aux climats chauds, moins que tout autre, ne pourrait supporter cela. Mais il y avait ces hommes, laissés en arrière, sans doute en train de combattre un monstre titanesque au péril de leurs vies. Un général ne pouvait prendre moins de risques que le plus hardi de ses hommes. C'était une question d'honneur.

Ainsi, Llanistar avait avancé, son amant à ses côtés. Bravant tous deux le feu terrestre, ils avaient fait front jusqu'à arriver au dessus de la scène. En observant Ganondorf, pour la première fois réellement, le général avait sentit son angoisse redoubler. Le gérudo paraissait aussi grand que massif, comme taillé dans le roc de cette montagne. Avec sa peau brune et ses cheveux de feu, il ressemblait à un volcan lui même. Et la dernière chose que le nordique se sentait prêt à affronter, c'était bien une telle montagne de périls. Alors pourquoi n'avait il pas refusé de poursuivre ? Llanistar se souvint. Son amant lui avait pris la main et lui avait dit, dans un sourire qui n'appartenait qu'à lui et qui le faisait toujours fondre,

« Moi non plus, je ne voudrais de personne d’autre à mes côtés en ce moment. »

Le dernier des Rusadirs dû se contrôler pour rester concentré sur leurs ennemis en contrebas mais il gratifia toutefois Orpheos lui aussi d'un sourire à la mesure des sentiments qui l'animait à cet instant là, plus forts que jamais. De là où ils se trouvaient, les deux fidèles de Zelda pouvaient entendre la voix de Ganondorf, mais pas saisir le sens de ses mots. Llanistar vit l'élu de Din brandir le poing et fut éblouit par la lueur qui en jaillit. Tout cela ne lui disait rien. La magie, le général s'en était toujours méfié. Elle se faisait discrète au pays d'où il venait, tandis qu'à Hyrule elle était une norme et semblait imprégner le moindre objet, le moindre individu ou la moindre plante. Depuis qu'il s'était installé dans cette contrée, le célèbre Fléau de Markand n'avait toujours pas vaincu sa crainte de cette énergie qu'il ne pouvait contrôler ni cerner complètement. Or, voilà qu'il devait affronter un sorcier apparemment en plein rituel et... Il ne remarqua qu'à ce moment la femme maintenue dans les airs, face à l'Ennemi. Orpheos, comme si il avait lu en lui, déclara alors,


« Cette femme… Elle est responsable de mon séjour à la forteresse ennemie. Je propose que tu me venges, pendant que j’occupe Ganondorf sur un terrain magique que lui et moi connaissons bien. »

« Très bien. »

Llanistar acquiesça, rassuré à l'idée de ne pas se confronter directement au Lion du désert, honteux d'en être rassuré. Il savait que Orpheos prenait le plus de risques mais il avait vu la lueur dans les yeux de son amant, en même temps que son don lui faisait partager la détermination forte du chancelier. Le nordique lui faisait confiance, comme toujours. Du moins à cet instant là. La suite ébranla légèrement cette complicité. Car Orpheos venait de rappeler son ombre, sorte de double malsain qui mettait Llanistar mal à l'aise à chaque fois qu'elle apparaissait devant ses yeux gris. Et en entendant l'ordre donné par son maître, le maléfice s'en alla avec un sourire particulièrement inquiétant.

« Ne fais rien devant ce que tu t’apprêtes à voir »

Le général sentait l'inquiétude de son ami, et la sienne en redoublait d'autant. Si Orpheos ignorait comment il pouvait réagir, ça ne pouvait être sans raison. Quelque chose de dérangeant allait se produire. Quelque chose que Llanistar, bien que les deux amants se soient déjà révélés tous leurs secrets, ne pouvait avoir prévu. Et effectivement, lorsque l'ombre revint sous la forme d'un cadavre de gérudo, en effectuant un geste ironique particulièrement macabre de la main, le nordique manqua de chanceler. C'était véritablement une magie horrible que celle qu'il découvrait là. Il se souvint de la culpabilité du chancelier lorsqu'il lui avait révélé ce pacte passé avec les ombres, la crainte qu'il avait montré d'être rejeté. Tout d'un coup, tout cela fut plus clair, plus compréhensible. Si il avait su, et que son amour s'était avéré moins fort... Et si ce jour là, Orpheos ne lui avait pas tenu la main, si ses grands yeux verts ne lui avaient pas transpercé l'âme et le coeur comme à chaque fois... Llanistar aurait pu s'éloigner, partir en courant, terrifié et outré par un tel sacrilège.
Mais il n'y pensa pas plus longtemps qu'un bref instant. Son amour le poussa à rendre son sourire à l'ombre, à faire comme si il n'était pas touché par la situation. Il étreignit son amant pour se donner du courage et s'éviter un haut le coeur. Puis, enfin, il s'avança avec lui. Et descendit, au coeur du danger.


« N'oublie pas, nous devons empêcher l'avènement de ses plans, pas le vaincre. Nous n'en avons pas le pouvoir. Provoquons le, déstabilisons le, mais surtout... Tachons de rester en vie. »

Llanistar avait glissé ces mots discrètement à son compagnon, tandis qu'ils descendaient discrètement vers leurs cibles. Il espérait ainsi pouvoir profiter de l'effet de surprise et misait en fait beaucoup dessus. Plus la silhouette du gérudo approchait, et moins le général pensait posséder la moindre chance contre lui. A la citadelle, ils avaient dû donner beaucoup pour vaincre un simple spectre à son image, un mauvais reflet, qui n'égalait en rien son maître. Le nordique avait son orgueil comme tout le monde mais restait réaliste : il n'était pas à la hauteur de son adversaire. Alors pourquoi avancer ? Tout l'honneur du monde ne valait pas de mourir ainsi, dans cet enfer brûlant. Et si Orpheos mourrait, l'amour ne vaudrait plus rien non plus. Alors quoi ?

Le gouffre se rapprochait, et Llanistar tâchait de se rappeler ce qui l'avait poussé à continuer. Et soudain son regard se posa sur une des cicatrices de Ganondorf, trace d'une blessure infligée par l'épée de légende... Et Link. Alors il se souvint. C'était l'exemple du héros qui l'avait fait avancer. Le visage de Link, le souvenir de sa détermination et leur rencontre un jour où il allait au plus mal.


« Hé, tu sais quoi ? Je suis persuadé qu'avec ou sans cette lame, tu te défens mieux que moi ! »

Le sourire de Link, dans cette cour du château, gelée. Leur duel. Llanistar ne savait plus qui avait gagné. Ca n'avait plus d'importance. Ce qui en avait, c'était la confiance et l'estime que lui avait donné le garçon béni des dieux, le héros que le nordique aurait tant voulu être, et qu'il avait échoué à devenir. Cette partie de lui pleine d'espoirs et d'idéaux, il n'était pas prêt à la voir disparaître. Ses hommes avaient besoin d'elle. Orpheos avait besoin de lui, et réciproquement. Et Link avait besoin de son frère. Le reste de la scène passa dans son esprit rapidement. Le premier assaut de son amant, la tentative du nordique de se glisser vers la sorcière, la disparition de cette dernière, la joute verbale et puis... les éclairs et la douleur.
Soudain, il se sentit soulevé de terre. La poigne de Ganondorf passa de ses cheveux à sa gorge et Llanistar comprit à la chaleur en dessous de lui que le seigneur du désert le maintenait au dessus de la lave... Pour combien de temps ? Il s'efforçait de ne pas céder à la panique, serrant les dents sous l'étaux qu'imposait la main du gérudo autour de son cou. Si celui ci ne le lâchait pas, le général pourrait bien finir étrangler dans une telle position. Et pourtant, il ne trouvait pas d'échappatoire. Ses membres restaient engourdis par la foudre, son épée hors d'atteinte.


« Regarde, sodomite ! Regarde ton amour sombrer dans le feu éternel ! Observe sa chair fondre et entends ses derniers cris ! Car tu ne peux plus le sauver ! »

« Nous...nous...sauverons...ensemble. »

« ...Qu'as tu dit ? »

« NOUS NOUS SAUVERONS ENSEMBLE ! »

Les runes de la main noire de Llanistar s'illuminèrent tandis que résonnaient les mots destinés à en activer les runes les plus puissantes. La phrase clé fonctionna mieux qu'il ne l'avait espéré et d'un coup, par son don de l'esprit, le dernier des Rusadir gagna le contrôle total de son membre sombre. Tandis qu'il le projetait contre l'un des flancs de Ganondorf, visant la cicatrice la moins propre du gérudo, il hurla,

« ORPHEOS ! MAINTENANT ! »

Sous le choc, le Lion rugit de douleur. La poigne se desserra alors, et sa proie chuta, lourdement, sur le bord du précipice. Malgré la fatigue et l'engourdissement, Llanistar s'efforçait  frénétiquement de trouver des prises sur la roche, mais il glissait, fatalement. A chaque instant, il basculait un peu plus vers le vide. Mais en dessous de lui c'était la mort, et il voulait la vie. De toute ses forces, de tout son coeur et de toute son âme. Il donna tout ce qu'il avait, espérant que son amant pourrait faire le reste.


Orpheos


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Pourquoi le seigneur Gérudo le toisait-il ainsi ? Ce sourire était-il la forme physique de ses souvenirs ou de ses intentions le concernant ? Orpheos parvint à ne pas s'en offusquer. Il savait très bien que Ganondorf serait toujours le plus fort, il l'acceptait humblement, mais il savait aussi très bien que ce serait cette même arrogance qui le perdrait. Un jour, peut-être pas si lointain. Orpheos l'espérait, du moins.

Les yeux profondément noirs du seigneur du désert s'ancrèrent en ceux du chancelier, et tout à coup, celui-ci ressentit la même pression maléfique de leur dernière fois. Cette énergie sombre qui enserrait son cerveau, son cœur et ses os, semblable à celle des Ombres dont le chancelier usait, aussi vile et prometteuse de mort. Il sentit à la fois ses pieds s'enfoncer dans la terre du volcan, et son esprit se décrocher du reste de son corps. Ses yeux le brûlèrent. Toutefois, Orpheos se tenait dans une trop bonne forme mentale et physique pour se laisser vaincre, et il poussa le seigneur Gérudo hors de son esprit en quelques instants. Ses jambes vacillèrent malgré tout dès que la pression psychique eut quitté son corps, mais ce fut là sa seule résistance qui montra signe de faiblesse. Le regard, lui, ne ternit pas.
Ganondorf se tourna alors vers Llanistar.


-Et que dois je donc saluer ? Un musicien et un estropié ? Un réfugié et un mendiant ? Un joueur de flûte, ou deux ? Il se reporta ensuite sur Orpheos qui l'observait froidement. Crois tu donc que je n'ai cherché que des failles militaires dans ton esprit, Orpheos ? J'en sais beaucoup plus sur toi que tu ne le pense et le voudrait. Bien, je suppose que vous êtes monté jusqu'ici pour vous battre ?
-Seriez-vous assez magnanime pour répondre à notre demande ?
-... Je ne saurais vous décevoir.


Ganondorf venait d'enserrer un casque de couleur noire, mais il ne masquait nullement son regard flamboyant. Orpheos se tint prêt, apaisant son cœur le plus possible à l'idée qu'il s'apprêtait à combattre le sorcier le plus puissant d'Hyrule.
Sauf qu'avant même de tout comprendre, l'énergie du Roi Sombre s'était concentrée dans ses grandes mains, et s'était accrue autour de son corps. L'air suffoquant du cratère vibra mieux qu'avec la chaleur de la fournaise ; son sol trembla sans que le Sheikah ne soit sûr que l'origine en soit sismique. Une rafale d'air brûlant vola en pleine face du Sheikah qui dut plisser les yeux, faisant là sa première erreur car permettant à Ganondorf de lui balancer une rafale d'énergie électrique. Orpheos voltigea plusieurs mètres en arrière comme une poupée de chiffon.


-Attaque...!

L'ordre du chancelier à son ombre s'était échappée en un seul souffle. Sa tête ne se releva du sol bouillonnant qu'au moment où le seigneur Dragmire se débarrassait de la Gérudo morte, juste avant de la carboniser dans un torrent de flammes. Il était puissant... peut-être trop puissant. Mais il était du devoir d'Orpheos de le combattre !
Son ombre venait à peine de regagner les pieds du Sheikah qu'ils décollèrent du sol, en avant vers Ganondorf, mais la vue de Llanistar blessé par ses mains le déconcentra, et le fit décélérer en plein milieu de son déplacement ; seconde erreur. Le roi des Gérudos fit volte-face assez vite pour le tenir à l'écart, s'aidant de sa formidable puissance magique de feu dont deux torrents jaillirent de ses mains, et forcèrent Orpheos à plonger derrière un rocher pour s'abriter. Le métal doré de sa lyre accrochée à sa ceinture était bouillant.


-Llanistar ! s'écria-t-il alors que des flammes continuaient de passer au-dessus de sa tête.

Le dignitaire de Zelda rampa sous le torrent de feu, et s'écarta du rocher juste à temps pour voir le géant Dragmire tenailler la longue chevelure noire du générale. Il était en train de le traîner d'une main vers le rebord de la plateforme sur laquelle ils se trouvaient...


-NON !

Orpheos rampa le plus vite qu'il put sous l'immense mur de feu que Ganondorf continuait de lui imposer. Sa première idée fut d'ordonner à son ombre d'attraper une des deux dagues accrochées avec la lyre à sa ceinture, et d'attaquer Ganondorf tant que lui-même ne le pouvait pas, mais le désespoir se saisit de lui. Ni lui, ni son ombre n'y parviendrait à temps ! Llanistar allait périr de par son impuissance lamentable et insupportable !

-LLANISTAR !!

Miraculeusement -peut-être fut-ce grâce à son cri ?- Llanistar se ressaisit, et balança au Gérudo un coup de poing traversé d'une force incroyable, en plein dans le flanc du sorcier. Simultanément, le torrent de flammes s'évanouit, l'ombre d'Orpheos glissa vers Ganondorf muni de son couteau, et le fléau de Markand hurla à son attention :

-ORPHEOS ! MAINTENANT !

L'ombre fut la première arrivée, et sa dague -paraissant du coup en pleine lévitation- se planta hargneusement dans le haut du bras à découvert de Ganondorf ; celui qui tenait brutalement Llanistar en respect, jusqu'à ce qu'il le relâche sous le choc de la douleur et de la surprise. Orpheos fila à sa suite en un éclair, armé de la deuxième dague.

-Aide Llanistar ! cria Orpheos à son ombre.

L'ombre s'écarta du Gérudo en laissant la dague plantée dans son bras musculeux, tandis que son maître restait accroché à son immense carrure, la main serrée sur le manche de son poignard qu'il enfonça brutalement à travers l'épaulière de son armure, et l'autre main crochetée à l'ouverture de son casque pour tenter d'enfoncer deux de ses doigts dans ses yeux.


-Mes respects à vous et votre fille ! grinça le chancelier.

Orpheos refusa de descendre du dos de Ganondorf, tant qu'il avait prise sur le poignard qui transperçait sa protection en acier, pendant que son ombre posséda celle de Llanistar pour le faire voleter et atterrir en douceur, et surtout en sécurité, loin du rebord, devant son amant aux prises avec leur ennemi. Ses dents se serrèrent et ses yeux se plissèrent, tant sous l'effort que sous la chaleur intenses, alors que son ombre revint à lui. D'un instant à l'autre, Ganondorf voudrait le faire passer par-dessus son épaule, et il espérait que Llanistar parviendrait à l'en empêcher.


« LLANISTAR ! »

La détresse dans la voix du Sheikah, la souffrance sur le visage du général, le tragique de la scène, tout contribuait à mettre le Lion en joie. Presque euphorique, celui ci ne s'inquiétait même plus des vibrations qui parcouraient de plus en plus régulièrement le sol et faisait s'effondrer des parois de lourds rocs. Un de ces blocs, en chutant dans la lave, fit s'élever une nouvelle colonne de feu qui retomba à moins de deux pieds de Ganondorf, mais il s'en fichait. Un sourire et un regard déments accompagnait son rire sombre et démoniaque. Enfin, c'en était fini des joutes verbales humiliantes avec des lézards millénaires ! Enfin, il en revenait à son domaine, ce à quoi il excellait, ce pourquoi il était né. Ecraser ses ennemis.
Rien ne serait plus facile, en ce concernait cet étranger. Le gérudo l'avait tout de suite senti, ce Llanistar le craignait au point de ne plus rien avoir en commun avec le guerrier qui avait mis en déroute sa propre fille, plusieurs mois auparavant. Ce général de pacotille n'avait même pas tenté de lui résister réellement. Il se savait inférieur, et savait son destin scellé. Ganondorf avait prolongé son tourment pour l'unique raison qu'il voulait que son amant le voit périr. Qu'il entende ses cris. Qu'il l'observe tandis que la lave le prendrait, le ferait littéralement fondre et réduirait ses cris d'agonie à l'ultime silence. A présent, ce moment était venu. L'instant tragique de cette scène. Il resserra son emprise sur la gorge du nordique, préparant le geste qui l'enverrait rejoindre le coeur de la terre. Et soudain.


« Nous...nous...sauverons...ensemble. »

« ...Qu'as tu dit ? »

« NOUS NOUS SAUVERONS ENSEMBLE ! »

Ganondorf savait que sa foudre pouvait paralyser un homme pendant plusieurs heures. Il en avait souvent fait l'expérience et il conservait une entière confiance en sa magie, et en lui même. Ce fut son erreur.
Llanistar, en usant de runes inconnues, parvint à envoyer son membre de métal contre le flanc du Lion. Un coup pareil, donné par une main de chair , n'aurait pas provoqué plus qu'un sourcillement chez le maître du désert. Mais le général avait frappé dur, fort, et sur une de ses blessures les plus récentes. La douleur explosa dans son flanc, et Ganondorf hurla sous le choc.


« ORPHEOS ! MAINTENANT ! »

Presque au même instant, l'ombre du chancelier de Zelda planta férocement une dague dans son bras, transperçant la chair sur plusieurs pouces. Aussi surpris que meurtri, le Lion en lâcha sa proie, qui parvint à se raccrocher au bord. Et tandis qu'il s'efforçait d'encaisser au mieux la souffrance soudaine mais intense, il n'entendit pas le harpiste arriver dans son dos.
Au moment précis où le gérudo allait envoyer un féroce coup de pied à un Llanistar tout occupé à sa survie, pour en finir avec lui, Orpheos parvint jusqu'à lui, et lui asséna un nouveau coup rageur de sa seconde dague. Par chance, la lame se planta dans l'épaulière d'acier, assez épaisse pour amortir une grosse partie du coup et empêcher l'arme de percer jusqu'au poumon. Toutefois, elle s'enfonça assez profondément pour le faire rugir une seconde fois.


« Mes respects à vous et votre fille ! »

Ce fut l'humiliation de trop, l'outrage que Ganondorf ne put encaisser en gardant la tête haute. Le chancelier accroché à son dos, essayant de lui percer les yeux, labourant son épaule en s'accrochant à sa dague... Le roi des rois ne pouvait supporter pareil affront, et son démon le savait. Alors que le cri puissant et rauque du Gérudo ne s'était pas encore éteint dans sa gorge, le monstre saisit sa chance. Aussitôt, le Lion sentit la demeure de son esprit prise d'assaut, ébranlée par les coups de boutoirs de la présence maléfique.
Dans l'instant même, il commença à se transformer. La corruption jaillit de son coeur, envahissant son corps et semblable sur sa peau à une nécrose accélérée. L'influence néfaste gagnait rapidement du terrain, s'emparant de son torse, de ses bras, rampant sur sa nuque, s'approchant de sa tête. Le cri de Ganondorf devint un râle terrifiant digne de quelqu'un d'autre... d'autre chose. Au dernier moment, le gérudo érigea ses barrières et parvint à se sauver, mais il n'était déjà plus lui même. Et il suffisait de croiser son regard de braise, dont l'éclat à travers de son casque évoquait deux astres rouges brillants au milieu de la nuit. Lorsqu'il ouvrit la bouche, de la fumée de charbon en sortit, en même temps que ces mots,


[table style="text-shadow:1px 1px 1px black;"]« Nous te saluons... En retour. »[/table]Tordant son bras droit dans un angle impossible, le sorcier agrippa un des pieds d'Orpheos, l'enserrant fermement, et donna un violent coup de son autre bras dans la tempe du chancelier, afin de lui faire lâcher sa dague. Puis, il ramena son bras droit devant lui, détachant le laquait de Zelda de son dos et le maintenant la tête en bas au dessus du sol. A la lueur du feu terrestre, on pouvait voir sur son visage un sourire mauvais. La voix qui s'éleva n'avait plus rien d'humain, elle semblait venir de plus profond que la prison de Volcania même.

[table style="text-shadow:1px 1px 1px black;"]« A terre... devant ton roi.[/table]Faisant tournoyer son bras et le chancelier avec, il l'abattit violemment vers le sol, envoyant ainsi Orpheos percuter la roche de son dos, sans pour autant le lâcher. A nouveau, il le maintint au dessus du sol, jouissant de son pouvoir, riant de cette voix d'outre tombe, d'outre monde. Il darda un regard vers Llanistar tout prés, qui s'était relevé mais semblait tituber, et vers l'amant de ce dernier à sa merci.

[table style="text-shadow:1px 1px 1px black;"]« Si faibles... Vous ne méritez pas notre attention. »[/table]Et, négligemment, comme un enfant jette son jouet au loin après avoir fini de s'amuser avec, le Lion projeta Orpheos sur le côté, à l'endroit où avait eu lieu le rituel. A ce moment là, pour la première fois, l'être qu'il était devenu écarquilla en grand ses yeux enflammés. Il n'aurait pas dû faire ça.
Le souffle de la déferlante magique fut saisissant. Comme une tempête de vent apocalyptique, d'autant plus stupéfiante qu'elle se déversait brusquement dans un cratère à la chaleur stagnante et d'ordinaire dénué de la moindre brise. Tentant de résister de son mieux au choc, Ganondorf se mit à genoux et tenta de faire face aux rafales qui l'assaillait, les unes après les autres. Plus qu'une simple explosion comme pouvait en provoquer une bombe, le gérudo devait encaisser un maelstrom d'énergie, libéré lorsque Orpheos, en atterrissant sur le sol, avait rompu le cercle du rituel, en effaçant certains des symboles. N'importe quel sorcier savait bien qu'un cercle de rituel ne peut être brisé sans délier toutes les énergies qui avaient été soumises pour l'accomplissement de l'acte magique. En l'occurrence, la puissance demandée pour cet échange avec Volcania était si massive que la déferlante avait la force d'une tempête déchaînée en pleine mer.

Soudain, le vent cessa, et Ganondorf réalisa qu'il avait reprit le contrôle. Comme soufflé par les rafales, le démon s'était réfugié dans les abysses de son esprit et ne semblait pas prêt à tenter à nouveau de le dominer. Le gérudo réalisa que l'esprit maléfique avait sans doute encaissé le plus gros du choc. Ironiquement, il lui devait sans doute une fière chandelle. Soupirant de soulagement, il se releva et aussitôt, la réalité s'imposa à lui, de toute sa force. Son épaule irradiait de douleur, tout comme son bras et son flanc gauche. Bloquant sa respiration, Ganondorf arracha à sa chair une dague puis la seconde, serrant les dents sous le tourment, s'efforçant de garder la tête froide. Cette nuit était décidément maudite. Il était temps d'arrêter les frais.

N'apercevant pas Llanistar là où il se trouvait avant la tempête, le Lion regarda autour de lui, inquiet, mais il finit par réaliser que le général se trouvait... en dessous du chancelier. Il en devina que ce dernier s'était sans doute trouvé soufflé dans les airs par le maelstrom et que son amant était parvenu à foncer pour amortir sa chute, quelques instants après.
Sa blessure à l'épaule lui tira une grimace et il jura sous la douleur. Sa voix était un murmure que les deux dignitaires ne pouvaient entendre, lorsqu'il déclara,


« J'ai sous estimé la force du lien entre vous. J'ai fait erreur. Pas deux fois. »

Malgré la sueur qui perlait sur son front et la fatigue qui ralentissait ses gestes, Ganondorf Dragmire s'approcha des deux hommes en concentrant à nouveau la foudre dans ses mains. Cette fois, la force du trait les transpercerait tous les deux, et il n'y aurait plus de seconde chance ou de sauvetage. C'était la fin qui approchait, son lot de consolation pour avoir échoué dans ses plans de dragon et de feu de joie.

[table style="text-shadow:1px 1px 1px black;"]* Conserve tes forces et vas t'en donc ! *[/table]« Quoi ? »

[table style="text-shadow:1px 1px 1px black;"]* D'autres arrivent. Il y a deux sages parmi eux. Et si tu gaspille ainsi le peu de forces que le rituel et le combat t'ont laissé, tu ne pourras plus leur échapper. *[/table]Ganondorf bouillonnait intérieurement. Un regard mauvais vers les deux serviteurs de Zelda, il resta indécis plusieurs instants, qui lui semblèrent durer une éternité. Et finalement, le Lion ré-absorba l'énergie et lança le juron le plus vulgaire qui lui vint à l'esprit avant de s'en retourner. Dans son sillage, le sang coulait abondamment.
Tournant le dos aux deux hommes, il ne leur laissa pas le temps de le pourchasser. A la manière de Songe avant lui, il lança un sortilège et disparut à leurs yeux. Derrière lui, il ne laissait que quelques signes cabalistiques, tracés sur la pierre. Ses armes s'évanouirent et seule la fureur du cratère, proche de l'éruption, devait permettre de deviner qu'un dragon avait approché la liberté et qu'il avait craché à la gueule d'un Lion.

Ce compte est un compte narrateur : les personnages joués par le narrateur ne peuvent pas être utilisés par les joueurs ou joueuses dans leur post (sauf autorisation d'un admin) et les jets de dé du narrateur sont contraignants.



Llanistar van Rusadir


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Llanistar se maudissait d'avoir gardé les quelques pièces d'armures qu'il portait encore, tant leur poids l'entraînait inéxorablement vers le précipice. Sa main noire était toujours agrippée à un roc dépassant du sol, mais sa fixation au bras du général faiblissait, la vis tirant dans la chair de ce dernier à cause de la charge. Cette défaillance s'accompagnait ainsi d'une violente douleur, mais malgré ses efforts, le nordique ne parvenait pas à trouver une prise solide avec sa main de chair. Plusieurs fois, il crut pouvoir se remonter en s'appuyant sur un morceau de rocher mais l'appuie lui resta dans la main et il retomba au même point, au bout de ses bras. La falaise qui le séparait de la lave elle même étant inclinée dans le mauvais sens, Llanistar ne parvenait pas à reposer ses pieds dessus et il sentait ses forces le lâcher.
Et puis, brusquement, le général sentit qu'il s'allégeait. Comme si la force qui poussait tous les êtres vivants et les objets vers le sol avait cessé d'agir sur lui. Il s'éleva même rapidement dans les airs, contre sa propre volonté, et crut un instant à un sortilège de Ganondorf qui le ferait léviter pour mieux le lâcher au milieu du cratère... Mais il fut déposé, au contraire, à l'abri, au dessus de la roche, non loin de la silhouette massive du gérudo.

Llanistar ne comprenait rien à ce qui lui était arrivé, puis il se sentit redevenir lourd à nouveau. Il lui sembla que tout le poids du monde venait de retomber d'un coup sur ses épaules. Il fléchit sous le choc et ne put relever la tête qu'après quelques instants, éreinté par la fatigue et toujours engourdi par la foudre du sorcier. Il vit alors l'ombre se tenir à ses côtés, se pencher vers lui comme pour vérifier son état.
Le général se sentit plus troublé que jamais. Devant lui se tenait le reflet sombre de l'homme qui l'aimait, et pourtant ça n'était pas Orpheos mais bien un être à part, qui lui obéissait. Un être qu'il avait déjà vu sans savoir réellement qui il était, lorsque l'ombre lui avait apporté la lyre du chancelier. A présent, ils s'observaient mutuellement et Llanistar ne savait plus quoi penser. De tout son être, le nordique craignait et détestait ces formes de magies noires, tout comme il se défiait de ce qu'un homme pouvait accomplir et qui sortait de ce qu'il considérait comme "ordinaire". Mais l'ombre venait de le sauver, même par obligation cela le forçait à réviser son jugement. Une magie noire bien utilisée pourrait donc s'avérer bénéfique ? Il se promis d'y réfléchir et, se relevant, gratifia son sauveur dans un murmure étouffé,


« Merci. »

Mais alors qu'il relevait la tête et pointait son regard vers son ennemi, ce fut une vision de cauchemar qui s'offrit à lui. Ganondorf Dragmire n'avait plus grand chose de celui qui avait manqué de le tuer quelques instants plus tôt. Son corps semblait corrompu, comme dans un état de nécrose comme le général en avait parfois observé sur des blessés très gravement. Sauf que le gérudo ne paraissait ni agonisant ni même affaiblit. Au contraire, dés qu'il ouvrit son esprit et son don, Llanistar sentit une immense aura déferler sur lui. Comme pour Zelda, cette aura témoignait de l'extraordinaire pouvoir de la Triforce... Mais à la différence de la princesse, elle n'aveuglait pas le nordique. Elle menaçait de l'engloutir.
Si l'aura de Zelda était un phare, un éclat de lumière pur, celle du Lion était un abysse sans fond, un puits de profondes ténèbres. Et en le scrutant, Llanistar sentit aussitôt une présence, autre que le gérudo. Une puissance qui lui rendait son regard. Il la sentit approcher, ramper hors de son trou, tendre une main vers lui... Au moment où elle jaillit de l'abysse, le nordique eut l'extrême réflexe de refermer son esprit. La vision disparu et il revint à la réalité, pour voir son amant violemment projeté sur le sol.


« Non. »

Ganondord, ou quoi qu'il put être réellement, maintint sa poigne sur la cheville du chancelier, apparemment prêt à le malmener à nouveau. Llanistar acheva de se relever, aussi droit qu'il le put. Ereinté, encore affaiblit par la magie de son ennemi, il savait ne plus pouvoir le vaincre. Ce combat était perdu, et sans doute l'était il dés le départ. Il ne pouvait rien contre les pouvoirs du gérudo. Orpheos était mieux armé mais il lui aurait fallu un rempart pour l'aider. Le dernier des Rusadirs n'avait pas réussi à incarner ce rempart. Peut être pourrait il au moins sauver l'homme qu'il aimait.
Son regard cherchait son épée sur le sol quand il vit que l'ombre, derrière lui, était allé la chercher pour lui et la lui tendait. Il ne prononça pas un mot, conscient qu'ils étaient inutiles pour ce reflet si étrange, mais empoigna l'arme. Une épée de héros, peut être, si il s'avérait assez fort pour la brandir contre un pareil ennemi. La valeur d'un homme se mesure à celle de ses ennemis, lui avait un jour appris Alvar. Il pouffa en jetant un regard à Ganondorf.
Au moins serait il le plus valeureux des hommes, quelques instants.


[table style="text-shadow:1px 1px 1px black;"]« Si faibles... Vous ne méritez pas notre attention. »[/table]L'enfant du Nord sentit les yeux de braises de l'Ennemi se poser sur lui, et ne trembla pas. L'heure de la faiblesse était passée, comme la pluie sur les montagnes. Faisant fi de la fatigue, il brandit la lame vers le démon, et chargea. Ce dernier jeta alors Orpheos non loin.
Et la tempête éclata.

Llanistar, longtemps, ne comprit pas ce qui s'était réellement passé à partir de ce moment là. Lorsque le corps de son amant retomba sur le sol, ce fut comme si la nature elle même se déchaînait contre les abominations de Ganondorf. Un véritable ouragan d'énergie magique déferla sur eux, depuis cet endroit où le Lion avait tenté son rituel.
La première rafale manqua de renverser le général, malgré sa course en sens inverse. Ce fut comme un mur contre lequel il rentra violemment en collision. Aussi surprit qu'enragé, il mit toutes ses forces dans la bataille pour conserver son équilibre, le corps penché en avant pour ne pas s'envoler vers l'arrière. Il y eut une seconde rafale, qui lui décolla un pied de terre. Réagissant par pur réflexe, Llanistar le reposa en position d'escrimeur, en angle droit avec le premier, afin de s'assurer le meilleur appuis possible.
La tempête continuait rageusement mais il parvint à faire quelques pas, jusqu'à la troisième rafale, la plus forte. Là, ses deux pieds décrochèrent du sol. A ce moment, forcé de lever les yeux vers le ciel, il vit que son amant était projeté et maintenu en l'air par l'ouragan. La peur de la rage et du désespoir l'envahit alors qu'il se sentait projeté en arrière par le vent surnaturel. Et puis, brusquement, il atterrit, en ressentant la même impression de ne plus dépendre des lois de la nature et de son poids. Un coup d'oeil derrière lui confirma son soupçon : l'ombre d'Orpheos l'aidait à aller sauver son maître.

Même transporté par la force de l'ombre, Llanistar dut batailler violemment contre le vent, mais cet appui lui permis de contrer la violence de la tempête comme aucun homme seul ne l'aurait pu. Un pas après l'autre, avançant en perçant le mur de vent avec une épaule, puis l'autre, soutenu et poussé par une force extraordinaire derrière lui, il parvint à dépasser Ganondorf, lui même en difficulté. Mais alors, aussi soudainement qu'elle avait éclaté, la tempête s'arrêta. Le vent disparut, et Orpheos retomba vers le sol.
Le souffle coupé par l'angoisse, le dernier des Rusadirs fonça, l'ombre le soutenant toujours, et sauta finalement à quelques mètres du point où le chancelier devait retomber. Une telle souplesse n'était pas digne de lui, et jamais Llanistar n'aurait pu se retourner en plein saut comme il le fit, sans l'aide du reflet de son amant. Mais ainsi aidé, il parvint à accrocher ce dernier dans ses bras et, lorsqu'ils atterrirent finalement, le général encaissa le choc, moindre pour lui. Tandis qu'il gisait là, son homme au dessus de lui, ravagé de fatigue et perclus de douleur, son coeur ne commença à battre qu'après avoir entendu les battements de celui qu'il aimait plus que tout.
Néanmoins, tous deux n'étaient pas sauvés. Loin de là, même, puisque Ganondorf semblait redevenu lui même et approchait. Son regard était mauvais, son bras emplis de sa magie foudroyante. Llanistar serra un peu plus Orpheos dans ses bras, conscient qu'il ne pourrait plus se battre à présent. Au moins finiraient ils leur passage sur cette terre ensemble.
Et puis, le gérudo sembla hésiter. Il répondit à des mots que personne n'avait prononcé, et parut contrarié d'une réponse qui n'existait pas. Finalement, avec une frustration visible, il ravala sa magie en même temps que son orgueil et s'en alla, laissant un général en proie à une immense perplexité. Ce dernier fit doucement glisser son amant sur le sol et se redressa sur son fessier pour observer la scène vide, où s'était déroulé un des plus rudes combats de sa vie. Toute trace du gérudo avait disparue. Il se tourna vers le chancelier et tendit une main vers sa chevelure,


« Tu vas bien ? »

La question était légitime, après ce qu'ils venaient de traverser.
Pourtant, les deux hommes n'eurent pas le répit qu'ils étaient en droit d'attendre, car le cratère résonna alors d'un chant funèbre et grondant, qui permis à Llanistar de comprendre un peu mieux l'attitude étrange de Ganondorf. Si le volcan était en plein réveil, il valait en effet mieux ne pas traîner. Se relevant avec difficulté, il aida Orpheos à faire de même et, plaçant de ses bras sur son épaule, entreprit de sortir de cet enfer brûlant où il se sentait de plus en plus en danger, et où l'air commençait à manquer à ses poumons.

Tandis qu'il gravissait la pente menant à l'extérieur de la montagne, le général entendit celle ci gronder, comme un géant tiré de son sommeil. Un regard en arrière lui fit forcer le pas. La lave du cratère montait, et des geysers jaillissaient jusqu'à plusieurs mètres au dessus de la scène de leur combat. Finalement, le ciel nocturne s'ouvrit au dessus d'eux et le vent frais lui fit du bien. Poussant sur ses dernières forces, Llanistar dirigea son amant vers un endroit où il pensait pouvoir être en sécurité, le temps de vaincre la fatigue ; un endroit en surplomb mais couvert par un immense rocher capable de les protéger de toute chute de pierre.

Là, il déposa Orpheos et s'autorisa enfin à se détendre.
Au dessus d'eux, en dessous, Llanistar pouvait sentir le volcan gronder. Sans doute ne mettrait il pas longtemps à se réveiller pleinement, mais au moins étaient ils saufs. Saufs, ce mot lui arracha un rire nerveux tant il n'aurait jamais cru y penser encore, quelques minutes auparavant. Les occasions où le nordique avait risqué autant sa vie qu'en cette nuit se comptaient sur les doigts de sa main, il avait sans doute affronté son plus terrible adversaire... mais ils étaient saufs. Rien ne comptait plus, au final, que cela. Sa main glissa vers celle d'Orpheos prés de lui.
Les autres devraient se débrouiller seuls. Malgré son soulagement, le général ne pouvait s'empêcher de craindre pour la vie de ses hommes cependant... Il était temps qu'ils agissent de leur propre chef. Cette nuit lui avait appris une leçon au fer rouge : l'Ennemi était largement en mesure de le supprimer, et donc de priver Hyrule de ses services. Ce royaume devait apprendre à se défendre seul, car son bouclier ne serait pas éternel. Soudain un rocher vola dans le ciel, non loin d'eux. Le réveil commençait, mais Llanistar se savait en sûreté.

Son regard s'éloigna, vers le village loin en contrebas. De là résonnaient toujours les affres de la bataille, les colonnes de fumée noires et les cris de l'immense bête lâchée par le gérudo mais lui et le chancelier n'y pouvaient de toute façon rien. Dans leur état, il était exclu de reprendre la route du village, et quand bien même, ils ne feraient que risquer leurs vies. Non, pour eux, la bataille était finie. Ganondorf n'avait pas obtenu ce qu'il désirait, et c'était bien l'essentiel. Llanistar gardait l'intuition que le rituel, si il avait aboutit, aurait provoqué un cataclysme supérieur à tout ce que le gérudo avait pu déchaîner sur Hyrule jusque là.
Il eut envie de remercier l'ombre de son amant pour toute l'aide qu'elle lui avait apporté, mais celle ci avait rejoint son maître et il ne fit que croiser le regard d'émeraude d'Orpheos, qui le fit fondre aussitôt. Le nordique se pencha alors sur lui et, osant faire glisser une main sous ses vêtements, lui déclara,


« Toutes nos félicitations, très cher. Il semble que vous ayez accomplit un exploit cette nuit. Llanistar posa ses lèvres sur la nuque du chancelier et dit finalement, après l'avoir embrassé, Notre part est faite. Autant en profiter un peu. »


Orpheos


Inventaire

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(vide)

Orpheos ignorait s’il avait rêvé les dernières minutes, ou bien si elles s’étaient réellement écoulées sur le fil du temps, ce fil qu’il avait perdu dès lors que son ennemi avait décidé de riposter. Les projections, les coups, les effusions de lave, la respiration saccadée de Llanistar qui l’avait apparemment sauvé : tout ceci n’était qu’un magma confus dans sa mémoire, ne s’y clarifiant que sous la forme d’un puzzle en pleine reconstitution.

Le magma, justement, avait fait fuir le chancelier et son amant. Il croyait se souvenir que le volcan avait montré les prémices d’une nouvelle colère bouillonnante, et que le seigneur Gérudo avait curieusement pris la fuite à ce moment, alors que les envoyés du Castel étaient eux-mêmes en position de faiblesse. Orpheos ignorait totalement pourquoi il leur avait laissé la vie sauve. Tout ce qu’il savait, en ressortant de ce cratère du Péril portant plus que jamais bien son nom, c’était que son homme était sauf, avec lui. Et c’était ce qui lui importait le plus cette nuit.

Celui-ci venait délicatement d’allonger Orpheos sur la roche chaude du volcan, dans un endroit situé en hauteur, où ses yeux discernèrent les incendies qui rongeaient Cocorico loin en contrebas. Les échos de la bataille vinrent également à ses oreilles pointues, et lui firent reprendre véritablement conscience. La bataille n’était pas terminée.
Cependant, Llanistar lui fit comprendre, d’une simple main glissée sur la sienne, qu’il leur serait stupide de vouloir s’y précipiter. Leurs corps venaient d’être brutalement affaiblis par la monstrueuse puissance magique et physique de Ganondorf. Que pouvaient-ils faire dans leur état ? Rien. Alors même qu’ils venaient probablement d’empêcher l’avènement d’une catastrophe. Un simple échange de regard, avec Llanistar, permit à Orpheos de savoir qu’il s’agissait là de son exacte pensée.


-Toutes nos félicitations, très cher. Il semble que vous ayez accomplit un exploit cette nuit. Notre part est faite. Autant en profiter un peu.

Le jeune homme embrassa le général, mais son esprit demeurait inquiet, il ne pouvait pas s’en empêcher. Il ne pourrait jamais considérer avoir accompli un exploit, même si cela s’avérait vrai. Le village, en bas, subissait une nouvelle destruction dont tous se seraient passés. Llanistar, toutefois, avait raison. Leur part était faite, et ils devaient confier à tous les autres le soin de protéger ce village bâti par la supérieure d’Orpheos, Impa.

-Je ne saurais profiter de rien ce soir… souffla le chancelier, dont le corps résonnait encore sourdement de toute la douleur infligée par les coups de Ganondorf – ses muscles comme son crâne étaient lourds comme du métal. Un autre coup d’œil vers Llanistar, néanmoins, lui arracha le plus doux des sourires. Si ce n’est de te savoir en vie, contre moi, et d’avoir la certitude que ni la mort, ni le danger ne pourront me séparer de toi.

Seulement, un mouvement négligeant du chancelier, porté très innocemment sur la cuisse du général pour marquer son propos, lui fit réaliser dans quelle situation ce dernier se trouvait.
Leurs yeux se croisèrent encore une fois.


Beaucoup plus tard dans la nuit, lorsque la lune eut défilée et que le nuage autour du volcan se soit estompé, les deux amants furent assez revigorés pour décider de partir. Les signes de bataille à Cocorico s’en étaient allés avec la nuit, qui vivrait bientôt sa dernière heure au moment même où le général redressa le chancelier contre lui, perchés sur leur rocher, à l’abri d’une fin d’éruption qui les avait de nombreuses fois secoués. D’ailleurs, ils ne s’en étaient presque pas souciés.
Et afin de rejoindre le village plus vite, Orpheos eut une idée qui l’amusa d’avance, et qui lui permettrait de ne pas fatiguer davantage son corps éprouvé.

-Profitons que le ciel d’encre ne soit pas encore dilué… Porte-moi, et laisse-toi porter.

Le Sheikah s’agrippa dès lors autour du corps musculeux de Llanistar qui, comme lorsqu’il avait été sauvé dans le cratère, se remit à flotter dans les airs. Matérialisée par les ultimes rayons de la Lune qui ne tarderait pas à se coucher, l’ombre du Sheikah se chargea de les faire descendre tous les deux à plusieurs mètres au-dessus de la pente abrupte du Mont, abrités des regards par l’obscurité.
Quand bien même ils n’avaient pas pied, avant de devoir redescendre sur terre, tous les deux se permirent un dernier long baiser quand ils eurent l’impression de pouvoir s’envoler assez haut pour toucher les étoiles.


La réalité rattrapa bien vite le chancelier, lorsque lui et Llanistar reçurent le récit complet de la bataille, lorsqu'ils eurent vent des ennemis qu'on avait fait prisonniers, des morts rapportés, et des dégâts constatés. Les maisons autour de la place centrale avaient été incendiées, écrasées par une gigantesque créature descendue de la Montagne, et tâchées du sang des soldats qui avaient offert leur vie pour les protéger. Orpheos se sentit mal pour les habitants qui devraient, une fois de plus -de trop- ne pas se décourager pour tout rebâtir.

Un détail crucial parvint toutefois à tirer Orpheos de sa consternation, lorsqu’il se souvint de la présence des prêtresses cette nuit. Aussitôt, il vint trouver les soldats pour quérir tous les renseignements possibles, et le rapport collectif fut sans appel : la prêtresse de Farore avait été enlevée par l’un des Dragmires. Les deux autres étaient emportées, inconscientes mais non blessées, là où on pourrait les soigner.
Et alors qu’un silence accablé s’était emparé de tout le village, sous le choc de l’après-combat, Orpheos s’écarta de la foule de soldats qui s’étaient massés autour de Llanistar pour en recevoir les directives. Il s’écarta si loin qu’il partit à l’opposé, jusqu’à l’entrée du village donnant sur la plaine.

Et devant les premières lueurs de l’aube qui détaillaient de mieux en mieux ce vaste horizon, Orpheos se jura d’utiliser tous les moyens en place pour la retrouver. Car sous ses yeux, cette nuit, la prêtresse de Farore avait tenté d’assassiner, et si la justice ne pouvait la rattraper, lui au moins le ferait. Et n'était-ce pas lui qui s'était chargé tout seul de la protéger ? Pour ce motif, il détenait une lourde responsabilité par rapport à elle. La protection de cette femme avait dépendu de lui, et puisqu'il avait échoué, il se sentait le devoir de rattraper son erreur. Il devait absolument la sauver.


-Pars en éclaireur. Ne reviens me voir que lorsque l’auras débusquée.

A nouveau, l’ombre du Sheikah se détacha de ses pieds pour glisser furtivement sous ses yeux, vers la plaine d’Hyrule qu’un soleil sanglant éclairait. Elle fila si vite que son maître la perdit de vue après quelques instants.
Choisissant de ne pas se trahir, le sans-ombre repartit discrètement là où le soleil ne l’atteindrait point, avec deux principales pensées : aider à rebâtir le Village, comme il le désirait originellement en venant ici, et retrouver la prêtresse criminelle aussi vite qu’il le pourrait, par toutes les façons qu’il imaginerait.

Après avoir aidé le général à rassembler les villageois et soldats survivants, Orpheos s'éclipsa incognito à la fin de cette fraîche matinée, en ne lui laissant que des explications lapidaires pour justifier son échappée. Il partait sur les traces du Dragmire séquestreur, seul dans le Royaume, car seul il agissait. Il ne reviendrait au Castel, habitué à ses absences, qu'une fois accompagné de la Dame en Vert car jusqu'à la venue de ce jour, la sauver demeurerait sa priorité.

A son tour, le Sheikah disparut.