Posté le 22/08/2010 21:47
Son ton froid avait déstabilisé le vieux guerrier. « Peut être ai-je une chance, finalement. » Une sorte de tremblement convulsif avait pris pour un court instant le Kokiri, mais peut être était-ce un effet avec la pâle lumière que dégageait la douce Séléné, croissant d’argent dans un ciel de jais. Astre attendit patiemment la suite des évènements avec un calme calculateur, se taisant humblement et fixant son adversaire avec un œil intéressé. Le sieur déchu quant à lui avait l’air de nouveau, comme pendant presque tout le temps de la rixe, plongé dans ses réminiscences. Soudain, la haine qui crispait son visage s’évapora, et il lâcha quelques mots :
-Quel… quel est ton nom ?
Cependant, Astre ne répondit pas. Il pensait se donner une sorte de contenance, de mystère en continuant à œuvrer dans le silence. D’ailleurs, l’Illusion Dépravée ne semblait pas vraiment s’intéresser au nom, mais plus au personnage, ce qui au fond d’Astre flatta son propre orgueil. Car cet Arkhams était quand même un Dieu vivant. Les yeux gonflés, comme s’il allait exploser en pleurs, n’arrivait pas à exprimer ses vœux. Enfin, c’était l’impression étrange qu’il donnait. Ce Seigneur noir serait-il troublé ? Astre n’avait plus l’adrénaline de l’alcool dans le sang, et contemplait son interlocuteur avec un regard chargé d’incompréhension.
- Que veux tu dire par "toi et moi" ... ?
Cela paraissait assez clair pour le jeune mercenaire. On ne peut plus facile, même. Et puis, le corbeau aux iris pourpres n’avait pas envie de perdre son temps en palabres, mais il sentait qu’il allait bientôt devoir s’expliquer. « Foutre dieu de merde ! », tonna intérieurement Astre.
Les traits d’Arkhams se raidirent à nouveau, et son regard reçut une aura de mort punitive. Il faudrait faire attention. Très attention. D’ailleurs, Arkhams le confirma en exprimant ses pensées d’Astre en ce moment-là même.
-Tes réponses scelleront ton sort. Choisis bien tes mots, ils seront peut être les derniers.
« D’accord, mais attends, il faut que je réfléchisse » : le mercenaire avait envie de dire ça, mais n’en fit rien. Au nom des déesses, il jura dans sa barbe inexistante. Ressentant sa tête subir l’assaut de nombreux tics, il laissa son regard dériver. Se ressaisissant d’un secouement de tête, il se prépara à parler, après un gros raclement de gorge bien élégant, et le crachat qui l’accompagne.
-Toi, et moi ? Et bien, nous. Je suis Astre, un mercenaire qui occasionnellement rédige le Journal d’Hyrule. Je ne vais pas me fourvoyer, tu n’es plus que l’ombre de ce que tu fus il y a de cela une dizaine d’années. Mais cela peut changer. En effet, avec l’aide de ton maître, nous pourrions nous recouvrir de gloire et être redoutés. Astre ne savait pas ce qu’il disait, mais il continua sur sa lancée. Nous deviendrions les instigateurs de la mort, nous ferions renaître les Profondes Ténèbres.
Ce qui n’était qu’une sorte de tromperie visant à trahir Arkhams finit par le tenter, excitant son désir d’aventure et quelque part de vengeance sur le peuple hylien comme la poitrine d’une femelle pointant légèrement hors du corsage. Mais il n’avait pas fini.
-Ne sois pas dupe, Arkhams. Je ne te décevrai pas.
Que lui prenait-il ? C’est comme si le mal s’insinuait dans ses veines comme de la lave en fusion, mais sans le brûler ni le blesser. Son regard prit la teinte de l’envie de meurtre, et Astre comprit enfin de quelle gorge venait le rire : le Sire du Malin, Ganondorf.