Posté le 06/05/2012 13:06
Il s'engouffra dans la ruelle qu'il était aisé de qualifier de sombre, en tant de nuit. À cette heure-ci du jour, toutefois, il aurait été particulièrement exagéré de la designer ainsi. Sans être bondée de monde, elle restait relativement visitée : ça et là des commerçants faisant la promotion d'un quelconque article (parfois betterave, tantôt concombre, d'autres fois fraises, parfois dague, bref) à quelque client plus ou moins intéressés. Les moues inscrites sur les visages étaient bien claires : aucun des deux partis n'arrivait à trouver un accord. Ni l'un, ni l'autre n'était réellement satisfait des concessions qu'il proposait.
Les prix avaient flambés. Cela était chose rapide à remarquer, et conséquence directe du harcèlement exercé par le Cavalier du Désert sur la faible Monarchie Hylienne. Mais il était bien d'autres aspects qui témoignaient de ce climat qui harassait sans cesse un peu plus le peuple. Depuis les quelques douzième de cycle qu'il avait passé ici, il lui avait semblé que le Royaume était relativement pacifiste. Et pourtant, désormais s'organisaient des milices de quartiers, dans les endroits où ne pouvaient passer cette fameuse Garde. Ces gugus parés de leurs armures scintillante lui faisait pour la plupart penser à des enfants. Des gosses, déguisés pour une guerre dont ils ne comprenaient pas les tenants, ni les aboutissants. Ils paradaient, aux yeux de l'Occidental, plus qu'ils n'assuraient la sécurité. Mais il savait aussi son regard désabusé, voir parfois réellement dénigrant sur la réalité de la chose. Néanmoins force était de reconnaître que la balance penchait fort en faveur de l'opposition à la Royauté.
Partout fleurissaient aussi quelques armes. De piètre qualité, peut être, mais elles restaient néanmoins la traduction clair d'un ressenti. Peur, insécurité. Ce même genre de sentiment qui les poussaient à s'assurer eux même de leur défense, et ce même genre de sentiments qui pouvaient faire de l'Homme un loup pour l'Homme, somme toute. Car dès lors qu'il était à l'individu de se protéger lui même, nul n'était plus en sécurité.
Pour autant, il aurait semblé exagéré à Septentrion de prétendre qu'Hyrule en était tombé là. Tant que les gardes patrouillaient, vraisemblablement sous les ordres de la Garde Royale, il était clair que l'autorité serait maintenue. Du moins... Tant que le tristement célèbre Ganondorf ne reconcentrait pas son objectif sur la mise à bas des nerfs de la population.
Il laissa ses yeux se promener, un instant, à la recherche d'une échoppe bien précise. Il ne lui restait que peu de Balphas, mais encore suffisamment pour se tenir éloigné – car il lui semblait que ses récents "malaises" venaient de là. Il n'aurait su dire en quoi précisément les deux choses étaient liées, mais... – de ces espèces de crises qui l'avaient frappé. L'envie le prenait pour autant de remplir sa pipe d'un peu tabac, et il savait d'expérience qu'un des vendeurs par ce coin-là avait quelque substance de qualité.
Le bâtard poussa la porte de toile, et fut saisi par toutes les odeurs qui planaient dans la petite boutique. Celle-là n'avait point mur ni fenêtre. Une armature de bois, sur laquelle était jetée une lourde étoffe, cette petite tente était tenue par une Gérudo aux cheveux flamboyants et au tabac gorgé de saveurs d'Orient.
"Mets m'en deux poignées de celui-là et trois de celui-ci." Lâcha-t-il, désignant deux types d'havane du menton. La jeune femme – jolie, force était de le reconnaître – s'exécuta, non sans un petit hochement de tête. Attrapant deux sachets de cuir (sans doute de vachette), elle les remplit d'une main habile et habituée, avant de les tendre à l'Occidental.
"Ce sera 140 rubis, mon bon monsieur." S'empressa d'ajouter la demoiselle, alors qu'il accrochait les bourses à sa ceinture. De la troisième, il tira la somme demandée qu'il donna à la marchande. « Les bons comptes font les bons amis. » Termina la jeune femme, sur un clin d'oeil.
Väals s'en alla ensuite, s'arrachant à ce plaisir du désert pour rejoindre les odeurs nauséabondes de la rue, et les hurlements de certains marchands... Ou pas.
Étrangement tous les cris s'étaient tus. Le seul bruit qui vint briser cet ensemble symphonique et silencieux fut le bêlement d'une chèvre, bien vite couvert du juron de son propriétaire, lequel assena un coup de genou dans la tête de l'animal. Le Calicien resta perplexe. La ruelle semblait s'être gelée, simplement, alors que même la milice retenait son souffle. S'était formée autour de deux jeunes femmes une véritable haie d'honneur, que par malchance ou simplement inadvertance il venait de briser.