Rescapé.

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Héros du Temps

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La pluie les harcelaient depuis trois jours et trois nuits, presque sans discontinuer. Le vent et le froid venaient ensuite, et ces larmes du ciel aux reflets verglacés le gelaient tant et si bien qu'il avait parfois l'impression qu'il laisserait bientôt un pouce ou des bouts d'oreilles tout de glace sur le coin de la route. Au moindre de ses pas, l'Hylien devait retenir un frisson et se concentrer sur la route pour ne pas grelotter, à mesure que les bourrasques pourtant si chaudes d'ordinaire ne s'infiltrent entre les plis de ses étoffes. Ses doigts firent rouler le cuir des brides, comme pour s'assurer qu'il pouvait encore les bouger. Rude hiver. Triste hiver ! Les neiges semblaient pousser partout, çà et là, où la glace n'avait su prendre. Il soupira, tout en avançant encore et son souffle se fit fumée blanche. Ephémère et splendide, comme avait pu l'être Hyrule avant que ne frappe Ganondorf, avant que la guerre ne la déchire. Sans un mot, il renifla avant de cracher dans la poudreuse qui bordait les sentiers vers la Citadelle d'Hylia.

Il jeta brièvement un regard dans son dos ; inquiet pour le Chancelier. S'il avait déjà affronté le froid jadis, et parfois bravé le blizzard, il ignorait ce qu'il en était du Sheikah. Et pour avoir déjà lutté contre la grêle, et la vivacité du givre, il savait qu'il n'y avait pas pire ennemi. Quoi de plus trompeur que cette blanche fourrure qui enveloppait tout Hyrule ? Soyeuse, douce et mortelle. Froide et brulante. Il avait appris à l'aimer, mais aussi à s'en protéger. Et cette frêle cape qui recouvrait Orpheos n'avait rien d'une protection décente. Pas plus que les quelques vêtements qu'ils avaient pu lui passer. Le blond fonça les sourcils, avant de jeter un regard à Impa et lui confier son sentiment. Impassible comme toujours. Sa deuxième main vint flatter l'encolure de la jument qui supportait le rescapé de la Forteresse depuis leur retour sur les berges.

Son talon prit appui sur le Pont-Levis, plus mordu par le givre qu'aucune autre structure de bois qu'ils avaient pu croiser. La fine couche de glace se déroba sous son poids avant même qu'il ne puisse jurer. Et quand son poing se referma sur les lacets de cuir, pour s'éviter la chute, l'animal prit de panique se mit à hennir et à ruer. Tout se passa trop vite pour qu'il ne puisse retrouver un soupçon d'équilibre. Bientôt le Verre-d'Hiver eut raison de lui, et il comprit qu'il n'y avait d'autre solution que d'accepter l'inévitable. Il s'effondra lourdement, comme pour faire écho à son dernier plongeon dans les eaux du Fleuve Gérudo. Et cette fois encore, il s'en fallut de peu pour qu'il ne pénètre les douves et s'enfonce au plus profond des fosses du Castel. Dans un réflexe, l'Enfant-des-Bois lança son bras gauche vers les chaînons qui soutenaient l'immense palissade. Ses doigts entrèrent avec le contact du fer gelé, et il tira. Suspendu aux chaines, il roula néanmoins, et percuta le rebord des planches. Son torse le lança un instant, tandis qu'il se hissait, tirant sur ses bras pour remonter. « Funérailles... — » Cracha-t-il, le flanc douloureux, à genoux dans la neige. Déjà, ses jambes le brûlaient.

Le vagabond se releva, doucement. Ils avaient déjà battu la campagne au triple galop, l'état de l'Ambassadeur des Beaux-Arts et de la Culture s'étant révélé trop critique pour qu'ils puissent se payer le luxe de vagabonder sur le chemin du retour. Mais dorénavant, aux portes de la Capitale Royale... Personne ne lui en voudrait pour quelques secondes passées à reprendre son souffle. « Tout doux, tout doux... » Souffla-t-il alors en s'approchant d'une Epona particulièrement paniquée. Ses mains vinrent encadrer tendrement le museau, alors que l'essentiel de ses efforts allaient dans sa tentative de réconfort. C'était pour elle que la traversée avait été la plus éprouvante — et sans elle, ils ne seraient rentrés qu'à deux. Ses doigts vinrent récupérer la hanse en peau tannée, sans que les autres ne s'éloignent des naseaux. Le vagabond choisit alors de progresser à reculons, en dépit des risques qu'il prenait. Si la belle à la robe de feu ne voyait pas son regard, sa panique n'aurait jamais de fin. « Là... Doucement... — » Le givre craqua sous la plante de ses pieds. Il s'arrêta, tant par prudence pour lui même que par crainte que la pouliche ne soit prise d'un nouvel accès de terreur. De la voix, il la berça doucement, et ils repartirent. Bientôt le Pont-Levis et son bois verglacé ne furent plus qu'un mauvais souvenir.

Ils pénétrèrent donc la première enceinte de la Citée-Murée. Le passage et les habitants avaient brassé assez de mouvement pour que la neige fonde et glisse entre les pavés et les interstices de la pierre. Les charrettes, la boue, les chevaux, les ânes, les chèvres et les boeufs — ainsi que les marchands, avaient souillé suffisamment l'éclatante blancheur pour que par endroits, aux angles les plus commerçants et dynamiques, il ne reste guère que d'immondes rejetons noirs, en tout point semblable à l'immense mer qui ensorcelait tout Hyrule, à l'exception de leur couleur et de leur sang. Il se passa les doigts devant les yeux, à mesure qu'il repensait à ce sombre reflet qu'il avait occis, au fond du Lac Hylia.

Mais même les grandes avenues ne jouissaient plus de cet entrain habituel, et quasi constant en dépit du conflit. Car si Ganondorf Dragmire ne parvenait pas encore à effrayer les gens au point de les pousser à se terrer chez eux ; l'Hiver y parvenait et sans doute mieux que jamais. La tranquillité dont ils disposaient, en raison de la tombée de la nuit ne durerait pas. S'ils avaient pu passer sans se faire particulièrement remarquer de la garde, encore leur restait-il à traverser l'ensemble de la ville sans alerter le moindre citoyen. Il en allait, lui semblait-il, de la dignité du Chancelier.

La Grande-Arche du Castel finit par se dessiner sous ses yeux, mais... Plus il s'en rapprochait, plus son coeur lui disaient de partir immédiatement en sens inverse. Il préférait mille fois affronter la pluie, la glace et la neige qui les harassaient depuis des jours et des jours encore. Son malaise grandissait un peu plus à chaque pas, et comme auparavant, il était incapable d'en savoir les raisons... — et peut être était-il terrifié à l'idée de les connaître. Le Sans-Lignage ferma encore les yeux, après s'être arrêté un instant. Il inspira longuement, et ses doigts jouèrent encore et toujours avec le cuir des rênes d'Epona. Aveugle encore, il reprit la route, gravissant l'allée qui menait à l'antique Palais des Rois.

"Hâlte-là !" Mugit un soldat. Avant même de rouvrir les yeux, l'Enfant-des-Bois savait qu'il était tenu en joue. Peut être l'acier d'une lance se tenait sous son menton, prêt à lui percer la gorge. Les suaires de chair dévoilèrent ce regard tout aussi polaire que la saison, sans pour autant parvenir à faire changer d'avis le Garde. Ca n'était pas dans son idée, de toute façon. « Personne rentre, encore moins les clowns dans ton genre qui se prennent pour des Kokiris ! Eul'Castel est sous surveillance après les derniers évènements ! » Le bretteur ne quitta pas l'homme des yeux, et monta sa main droite – la gauche tirant toujours la jument – jusqu'à la pointe qui lui griffait le coup, comme pour la déporter. Mais la sentinelle réagit au quart de tour, le forçant à reculer d'un pas. Un peu plus et un véritable sourire se serait dessiné sous son menton. « Pas d'ça avec moi, racaille ! Retourne d'où tu viens avant que... — » Les yeux du fantassins se firent rond sans qu'il ne sache pourquoi. La longue cape de bure noire qui lui recouvrait l'ensemble du dos et près de la moitié du visage étaient sans doute possible la raison pour laquelle il passait si aisément inaperçu (quand bien même il avait toujours été des plus discrets), aussi il doutait avoir finalement été reconnu. D'un oeil, il suivit le regard de son vis-à-vis. « Dame... Dame Impa ! Mes excuses... Je ne... — » La lance avait regagné sa place, et le soldat courrait déjà faire sonner. « DAME IMPA SOUHAITE ENTRER ! FAITES OUVRIR LES PORTES ! » Hurla-t-il. Link se retourna pour lancer un regard entendu à Impa, avant de reprendre la route, silencieux comme jamais.

L'Hylien s'interdit le moindre regard vers le sol, de peur de voir ressurgir les ombres noir qui s'étaient saisie de son être, la fois passée. Il avait beau n'avoir que des éclairs à lui revenir en mémoire, l'impression était là. Son coeur ne tarda pas à se serrer tandis qu'un sentiment d'oppression s'emparait doucement mais sûrement de lui. Le Fils-de-Personne resta impassible, cachant aussi bien que faire se peut ce qui l'assaillait. La Cour Extérieure l'accueillait officiellement pour la première fois en des années, et il prit le parti de mettre son malaise sur ce compte-ci. Il savait pertinemment que ça n'avait rien à voir, néanmoins, il y avait plus urgent à faire et trop important pour s'arrêter à de si simples détails. « Avec tout ce raffut, un comité d'accueil ne devrait pas tarder... — » Glissa-t-il à Impa, tout en venant soutenir sa tête devenue particulièrement douloureuse. Une migraine, arrivée bien brusquement, mais juste une migraine... —


Llanistar van Rusadir


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« Les derniers rapports ne sont pas encourageants, ser. »

Cerscastel le fixait derrière ses sourcils broussailleux, sa mauvaise humeur clairement apparente sur son visage renfrogné. Plus que tout autre, le vieux chevalier souffrait de la rudesse de l'Hiver, dont l'arrivée avait surprit jusqu'au plus fin connaisseur des nuages et des vents. Le froid, la neige, tout coïncidait pour compliquer la tâche de l'armée et de ses soldats, qui devaient s'efforcer de contenir un mal toujours plus hardi et entreprenant. Ganondorf possédait un contrôle incontesté parce que incontestable sur la vallée gérudo et son influence commençait à s'étendre. Plusieurs fois, des hameaux avaient subis des attaques. On venait même de recenser un village qui offrait vivres et gîtes aux serviteurs du malin de plein gré, afin d'éviter un pillage sanglant.

« Non. Pas encourageants du tout. »

Llanistar prit la cruche de bière posée entre lui et son supérieur et remplit son verre. Assis tout deux à la grande table de la salle de ban, le maréchal et le général scrutaient les rapports et aux nouvelles qui leur étaient transmises depuis plusieurs semaines, essayant de trouver des failles dans leurs plans ou ceux de leur ennemi. Le vieux chevalier restait muet, le regard sombre, la mine fatiguée. Le nordique savait bien que, même si il avait fait preuve d'une grande solidarité avec le général défait, Cerscastel avait été marqué par l'échec de l'assaut sur la forteresse. Sans doute se reprochait il de n'avoir pas été présent ou même d'avoir laissé Llanistar s'y risquer. Ce dernier tirait de l'humeur de son supérieur une honte oppressante. Plus le temps passait et plus il réalisait quelle folie c'était d'oser pareille attaque. Mais lorsque le moment d'un choix vient, il est souvent trop court pour avoir le temps de peser parfaitement une décision. Rompant le silence pesant dans la salle, il poursuivit, sans entrain,

« Des routes encombrées de neiges qui entravent les mouvements de nos troupes... Des stocks de récoltes moins importants que prévus qui demandent un rationnement plus sévère... Des raids à l'ouest qui rendent de moins en moins tenable la position de la moitié de l'armée devant la vallée... Si l'Hiver avait tardé un mois de plus, nous aurions achevé la construction d'au moins deux tours en pierre. Là, le chantier va prendre du retard. Et par dessus le marché, pas de nouvelles du héros comme de Dame Impa depuis leur départ à l'improviste de la citadelle !... Il but une longue gorgée puis reposa lourdement son verre sur la table. ... Je n'aurais rien contre un petit signe des déesses. »

Ses derniers mots, clairement ironiques, provoquèrent un froncement de sourcils de Cerscastel, qui n'appréciait jamais qu'on parle légèrement de sa foi. Avec le vieux chevalier, tout était affaire de principes et de règles. Si Llanistar ne l'appréciait pas, il l'aurait trouvé rigide et borné. De fait, il était empreint d'une rigueur dont les Hyliens avaient besoin en temps de crise comme celui qu'ils vivaient. Cerscastel était comme un pilier soutenant leurs espoirs de jours meilleurs et leur envie de combattre. Un symbole. Le nordique lui n'essayait pas d'en être un ; il s'efforçait de donner le meilleur de lui même pour sa tâche. Finalement, le chevalier lui répondit, d'une voix fatiguée

« L'Hiver n'est pas notre pire ennemi, général. Il paralyse tout autant notre ennemi, malgré la hardiesse que certains de ses raids. La neige ne peut que ralentir la marche des événements, elle nous donne du temps. Voyez y l'aide divine que vous attendiez. »

Llanistar dut reconnaître qu'il n'avait pas tord. De fait, aucune armée ordinaire ne pouvait pénétrer en territoire ennemi, en plein hiver, sauf à être dirigée par un fou... Mais si Ganondorf n'était pas fou, son armée n'était pas ordinaire non plus. Qui savait quels tours le gérudo pourrait utiliser pour briser le siège de la vallée ? Si l'Hiver pouvait leur apporter une aide, il ne devait pas pour autant endormir leur vigilance. Le nordique remit le nez dans ses rapports.
Mais soudain, la porte de la salle de ban s'ouvrit avec fracas. Llanistar se redressa d'un coup, son regard surprit et inquiet braqué sur l'intrus. Un simple soldat, sans grade, qui avait visiblement couru. Entre deux hoquets, il parvint à expliquer,


« Dame Impa...vient d'arriver au château. »

Il n'en fallu pas plus à Llanistar. En un instant, il se leva de son siège et sortit de la salle, ordonnant au soldat de lui guider à elle. Il y avait un temps pour les papiers et un temps pour les nouvelles urgentes. Le retour de la nourrice royale en était une de taille. Les questions commencèrent à bouillonner dans l'esprit du général. Pourquoi s'était elle absentée ? Qu'avait elle fait hors du château ? Etait elle avec Link ? Revenait elle saine et sauve ? Toutes lui brûlaient les lèvres lorsqu'il parvint dans la cour extérieure, où était massés quelques soldats et autres serviteurs. Les rangs de curieux s'ouvrirent sur son passage. Il vit alors que Impa était accompagnée de Link. Soulagé de les revoir chacun en un seul morceau, il couru à eux, sans pouvoir retenir un sourire de soulagement.

« Et bien, mes amis, on peut dire que vous savez vous faire atten... »

Llanistar n'eut pas le temps de finir sa phrase, les mots lui restèrent en travers de la gorge. A l'instant où il le vit, il le reconnu et manqua de défaillir sous le choc de la surprise. Orpheos se tenait là, sur la jument de Link, enveloppé dans une grande cape sombre. Les questions redoublèrent dans son esprit tandis que la situation le laissait indécis, incapable de réagir promptement. Toute sa raison lui hurlait de ne pas céder à son coeur, de ne pas se jeter dans les bras de l'homme qu'il aimait et qu'il avait cru mort si souvent ces derniers temps. Finalement, le général reprit le contrôle. Il fit signe à des écuyers de venir s'occuper de leurs montures et leur déclara,

« Nous parlerons à l'intérieur, venez vous abriter et reprendre des forces. »

Et tandis que Link descendait d'Epona, Llanistar faisait descendre dans ses bras Orpheos, plus glacé et pâle que jamais. Mais il respirait, et tous deux étaient réunis. C'était presque trop pour le nordique qui dut contenir une vague d'émotion qui menaçait de rompre complètement leur secret. Guidant Link et Impa, il se dirigea vers le château et ordonna à un officier d'aller prévenir la reine. Zelda serait sans doute aussi soulagée que lui de les savoir de retour.


Zelda Nohansen Hyrule

Princesse de la Destinée. ∫ Édile de Nayru.

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Sa plume glissait doucement sur le papier au fur et à mesure qu’elle choisissait soigneusement ses mots. Elle savait que son Général et Cerscastel faisaient le point sur la situation militaire, mais elle avait dû se résoudre à leur laisser seuls la gestion des affaires de guerre, occupée qu’elle était à entretenir leurs relations avec les nobles des alentours. Si elle gouvernait le royaume d’Hyrule et pouvait exiger de chaque vassal sur ses terres toute l’aide qu’il pouvait apporter, elle devait aussi s’assurer de leur loyauté et de faire preuve d’assez de diplomatie pour entretenir avec eux de bonnes relations.

Si elle n’était pas en train d’éplucher les rapports, elle en avait lu une bonne partie, et elle n’ignorait pas les difficultés que l’hiver leur apportait. C’était pourquoi il était plus nécessaire que jamais d’organiser une répartition des ressources du royaume, et de demander à chacun des nobles auxquels étaient attribués des parts de terre de participer à l’effort collectif. Elle savait déjà que son annonce risquait d’être mal reçue par certains, aussi préférait-elle en exposer seulement les grandes lignes en invitant ces derniers à la rejoindre au château, du moins pour ceux qui n’y résidaient pas déjà, en personne ou sous couvert d’un représentant, pour discuter de vive-voix des mesures qui pouvaient être prises.

Mais alors qu’elle trempait sa plume dans l’encrier, prête à reprendre les boucles qu’elle traçait sur le parchemin, on frappa à sa porte. Elle releva la tête de ses papiers.

« Entrez. »

Un garde entra dans son bureau, venu de toute évidence pour lui porter un message. Son ventre se serra à la peur d'une mauvaise nouvelle, mais si le garde avait pris la peine de l'interrompre, il n'avait pas non plus l'air de s'être pressé outre mesure de rejoindre sa chambre, ce qui laissait entendre que ce qu'il avait à lui dire étant important sans être non plus trop urgent.

« Le Général m'a demandé de vous prévenir, Dame Impa est rentrée au Château. »

Zelda se leva d'un bond. Voilà déjà plusieurs semaines qu'Impa était partie sans lui avoir expliqué le but de son départ. Non pas qu'il soit dans les habitudes de sa nourrice de toujours lui parler de ses sorties, mais avec le climat actuel qui régnait à Hyrule elle avait pris l'habitude de lui exposer plus souvent ses propres faits et gestes et elle avait été étonnée que la Sheikah n'en ait pas fait de même. Son absence prolongée l'avait rendue curieuse, ainsi qu’un soupçon inquiète, et elle était soulagée de la savoir de retour.

« Merci. Prévenez le Général que je vais arriver. »

Si on avait pris la peine de la prévenir directement, c'était sans doute qu'Impa avait des nouvelles intéressantes à raconter, et qu'elle allait en savoir plus sur la raison de son départ. Une fois le soldat parti, elle mit de côté la lettre en cours de rédaction et rangea rapidement son matériel avant de lui emboîter le pas, des questions plein la tête.

C'est en s'attendant à obtenir le rapport d'une mission de repérage qu'elle arriva dans le petit salon où s'étaient rassemblés le Général et les arrivants. Sans doute la cheminée qui réchauffait la pièce et les fauteuils n’étaient-ils pas étrangers à ce choix, rien de mieux en arrivant de l’extérieur où le froid sévissait de plus en plus fortement les derniers jours. Là son regard repéra assez rapidement Impa, discrète comme à son habitude, mais elle n'était pas seule. Ses yeux parcoururent le reste de la salle et elle sentit son coeur se réchauffer en apercevant Link à ses côtés. Un sourire à destination du jeune homme étira ses lèvres. Mais la surprise ne s'arrêtait pas là, et à côté de lui, elle remarqua qui le Général soutenait contre lui. Le sourire fit place à une expression de surprise.

« Orpheos… ? »

Ses pas reprirent lentement puis plus rapidement jusqu’à ce qu’elle arrive à la hauteur de son ami. Il n’aurait pas été correct de dire qu’elle avait perdu espoir de le retrouver, ou qu’elle en abandonnait l’idée, mais il fallait avouer qu’il s’était avéré impossible de prendre le risque d’envoyer des soldats sur le territoire conquis par Ganondorf et qu’ils n’avaient toujours pas trouvé d’ouverture pour tenter une incursion. Dans ces conditions, et avec le temps qui avait passé, rien n’avait pu lui garantir que le Chancelier était toujours en vie, ni lui permettre d’établir une stratégie pour le tirer de là. Et pourtant il se trouvait là, de toute évidence en bien mauvais état, mais en vie, et hors des griffes du Seigneur du Malin. Son soulagement également sa surprise. Impa était-elle tombée sur lui au hasard, ou était-elle allée le chercher … ? Avec Link … ? Ce ne pouvait pas être un hasard qu’ils rentrent ensemble, mais dans tous les cas, et malgré la situation générale, elle ne pouvait pas empêcher la joie et le soulagement de bondir en elle. Elle conserva néanmoins un calme de façade, consciente du rôle qu’elle avait à présent à jouer.

« Permettez, Général … ? »

Elle savait maintenant ce qu’ils partageaient, de son propre aveu, et elle n’avait aucune intention de le brusquer alors qu’ils se retrouvaient tout juste, aussi lui lança-t-elle un regard rassurant avant de se pencher sur son vieil ami. Ses mains glissèrent doucement contre le torse du Chancelier. Elle voyait bien qu’il aurait sûrement de mauvais souvenirs de son séjour au Désert. Pas plus que pour Nabooru elle ne souhaitait tenter d’imaginer quelles épreuves il avait pu traverser. Mais elle savait ce qu’elle pouvait faire à son niveau. Elle ne le remettrait pas sur pied d’un coup, il lui faudrait du temps, les corps étaient ainsi faits, mais elle pouvait lui rendre des forces. Peut-être même assez pour le faire sortir de l’inconscience dans laquelle il se trouvait. Une douce lueur s’échappa doucement de ses mains, comme pour s’infiltrer dans la poitrine du chancelier. Il lui était difficile de faire attention à ce qui se passait autour d’elle, concentrée sur un corps qu’elle s’attelait à remettre en bonne marche, qu’elle poussait à entamer une reconstruction, sans la précipiter de trop, mais en lançant le petit coup de pouce qu’il manquait et en déployant l’énergie nécessaire.

Elle s’arrêta lorsqu’elle sentit ses propres forces diminuer, un peu fatiguée, la tête qui lui tournait. Incapable de se lever immédiatement, sans même savoir si elle avait réussi à éveiller le jeune homme, elle le serra un instant contre elle en lui chuchotant dans un murmure :

« Bon retour à la maison… »

Se détachant ensuite pour le laisser aux bras de son amant, elle prit appui sur une petite table pour ne pas prendre de risques. Elle avait les jambes en coton. Mais ça ne suffirait pas à ternir sa bonne humeur. Elle allait vite récupérer, et elle espérant que lui aussi.


Orpheos


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Au sommet de la chandelle qu’il tenait au bout de son bras, la flamme naquit et l’obscurité mourut.
Avant que la cire ne lui coule entre les doigts, il disposa ce faible moyen d’éclairage au centre du guéridon, lui-même placé au milieu d’une pièce dont les murs avaient été décorés de peintures archaïques. Elles racontaient la légende de la fondation de leur Royaume.

-Nous pouvons continuer, déclara une voix gutturale face à lui.

De l’autre côté de la table, Ganondorf attendait qu’il redistribue les cartes. Un fil de fer était noué autour de son cou, attaché quelque part dans l’un des recoins sombres de la pièce. Mais cela n’avait pas l’air de le déranger ; au contraire, il le fixait plus intensément que jamais.

-Pourquoi te battre contre moi ? poursuivit le Seigneur du Malin. Tu es conscience de ta faiblesse tout comme de ma force, je ne comprends pas. Tu sais que ton combat est perdu d’avance. Tu le sais depuis le début.

Il lui répondit quelque chose qui fit éclater de rire le Roi du désert.

-Est-ce bien vrai, ce que tu me confies là ?

Pour lui prouver sa bonne foi, il retira alors l’une des cartes du jeu qu’il tenait entre ses mains, la posa sur le guéridon, la fit glisser vers Ganondorf, et la retourna juste sous ses yeux. Ceux-ci contemplèrent un bref instant le motif dessiné sur sa carte, l’icône d’un Dieu issu d’un folklore étranger et lointain… Dieu du Soleil et de l’Amour.
En réponse, Ganondorf fit voler une autre carte de son jeu par télékinésie, l’amena à lui, et la plaqua sèchement sur celle du Dieu des amants. Une tour qui s’écroulait s’offrait maintenant à leurs regards.

-Voilà le sort que je réserve aux naïfs qui prétendent pouvoir me combattre car mus par des idéaux si vains. Maintenant, jouons ta vie.

Un fil de fer s’enfonça légèrement dans la peau de son cou, à l’image de Ganondorf. Derrière eux, une force exerçait une pression telle sur les fils qu’ils pourraient être décapités en un instant.
L’ombre d’une main se faufila ensuite sur le guéridon, et sur le côté, posa un pendentif raccroché à une chaîne en argent. C’était une Triforce de couleur noire.

-Si tu es capable de gagner cette partie, annonça Ganondorf, elles te livreront ce symbole d’appartenance qu’elles cachent dans les profondeurs de leur Maison… Mais as-tu vraiment envie de montrer que tu leur appartiens ?

Il fixa le pendentif noir, puis Ganondorf, avant d’acquiescer.
Tous deux échangèrent alors les cartes, et débutèrent une partie où se jouait l’exécution de l’un d’entre eux par la main de ce qu’ils qualifiaient comme "leurs amies". Le jeu parut durer une éternité…
Et puis soudain, la flamme fut soufflée en une bourrasque, plongeant de nouveau la pièce dans l’obscurité la plus abyssale. Il n’entendit, ni ne vit plus rien. Jusqu’à ce qu’une porte grinçante s’entrouvre derrière lui…

Il se retrouva dès lors dans les couloirs d’un château, nu, essayant de se protéger du froid en plaquant ses bras contre son thorax. Il marchait à la recherche d’une aide. Quelqu’un viendrait-il le sauver du froid, du noir et de la solitude ? Quelqu’un l’écarterait-il un jour de ce chemin si effrayant qu’il avait peut-être trop vite décidé d’emprunter ?
Les couloirs étaient vides et personne ne venait. Peut-être parce qu’il était dépourvu de but, de vêtements et de dignité. Peu importait, il lui fallait continuer de marcher.

Mais de la lumière filtra soudain à travers les meurtrières. Le soleil se levait à l’extérieur, et une sensation d’apaisement s’emparait peu à peu de tout son être. Quelqu’un venait enfin le chercher. Il n’était peut-être plus seul…



-Bon retour à la maison… chuchota à son oreille une voix incroyablement douce.

Où était-il maintenant ? Il devait retourner dans la salle des Ombres jouer contre Ganondorf, afin de gagner leur allégeance… Plus que de la sienne, il en allait de la vie des gens qu’il souhaitait aider.
Il se rendit alors compte qu’il ne voyait plus rien, et que quelqu’un venait juste de desserrer son étreinte autour de lui. Une femme ; quelqu’un qu’il connaissait. Quelqu’un qui projetait une telle aura qu’il sut immédiatement qu’il se trouvait en sécurité. Une sensation renforcée lorsque quelqu’un d’autre le ravit dans une nouvelle embrassade, plus forte encore.

Des paroles furent échangées au-dessus de sa tête, mais il n’y comprit rien. Il se sentait beaucoup trop bien pour émerger et essayer de comprendre, beaucoup trop bien au creux de ces bras puissants qui le tenaient fermement. Cette impression si familière que ces bras et ces mains lui procuraient… Il savait qui c’était.

Ses yeux d’émeraude s’ouvrirent sur le plus bel homme au monde.
Puis ses deux perles grisâtres s’abaissèrent vers lui, et Orpheos sut.


-…Amour ?

Dans les bras de Llanistar, il sut qu’on ne l’avait pas abandonné.

Autour de lui, le Héros du Temps se tenait dans son costume vert détrempé, la chef des Sheikah assistait à la scène bras croisés dans l’angle de la cheminée, et la princesse Zelda avait pris appui sur une petite table pendant qu’elle le regardait. Un sourire s’étira difficilement sur les lèvres gercées du chancelier. C’était trop beau pour être vrai, il devait être encore en train de rêver…
Mais l’aura dégagée par chacun des protagonistes présents lui indiqua le contraire ; un songe n’aurait pu les lui faire ressentir comme il les ressentait. Il était bel et bien de retour, à la maison, entouré des quatre personnes en qui il se savait le plus en confiance.

Il mit quelques instants à se remémorer ses derniers souvenirs. Le cachot de la forteresse, la confrontation psychique avec Ganondorf, la Traque, la chute finale dans la cascade…


-Zelda, je… argh.

Son corps se rappela également à son bon souvenir, et la douleur se réveilla en même temps que lui dans chacun de ses membres, comme si un cheval l’avait piétiné.
Les doigts d’Orpheos se raccrochèrent aux vêtements de Llanistar.


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Héros du Temps

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(vide)

L'air se gelait aussitôt qu'il quittait ses lèvres. L'Hylien resserra sa prise sur la bride, comme pour s'ancrer à quelque chose de connu, dans cette mer qui lui semblait chaque fois plus effroyable. Chaque fois plus hostile, chaque fois plus étrangère. Combien de fois avait-il gagné le Castel ? Sans doute en connaissait-il plus que Llanistar lui même, qui y vivait pourtant au quotidien. Et pourtant, de jour en jour et surtout de visite en visite, tout lui semblait différent. Vicié. Et il connaissait également les rudesses de l'Hiver. Suffisamment pour savoir qu'elles n'y étaient pour rien. Elles l'auraient saisi bien avant son passage sous la Grande-Arche de toute façon. Sans doute n'aidaient-elles pas, mais de toute évidence elles n'étaient pas la source de ses maux. Ce rat qui, il lui semblait, lui rongeait le crâne pouce par pouce venait d'ailleurs.

Dans son regard perçait nettement la mauvaise humeur, due à la douleur, qui s'insinuait au plus profond de son être. C'est de ce même regard plus froid, plus dur et peut être plus agressif qu'usuellement qu'il balayait l'ensemble de cette cour intérieure, recouverte par la neige et peuplée par une garde plus armée qu'il ne l'avait jamais vue. De là à dire qu'elle était plus efficace, il n'en savait rien.

Bientôt, le Nordique lui donna raison, débarquant seul. Certains soldats vinrent à sa suite, s'approchant de la petite troupe qu'ils avaient composé avec Impa. S'il ne les observa pas tous, ceux qui croisèrent le blizzard au fond de ses yeux se pressèrent moins. De toute évidence, il ne partageait pas la chaleur de l'officier. Pas le moins du monde. Et à ses salutations, il ne trouva d'autre réponse qu'un silence habituel, certes, mais froid néanmoins. Il se déporta pour laisser le Général se saisir du Chancelier qu'ils avaient ramené jusqu'ici, non pas par désir de les voir réunis – il ignorait tout des liens entre l'homme d'armes et l'homme de lettres – mais parce que, doucement mais sûrement, le Château lui pesait. Sans qu'il en soit véritablement conscient, il n'avait guère d'autre envie que de s'enfuir aussi loin que possible de tous ces murs plus hauts les uns que les autres.

Llanistar s'exprima encore, sans qu'il n'écoute vraiment ce qu'il disait. Il se surprit en fait à regarder le ciel, sombre. Gris. Loin. Mais quand une main de fer et d'acier attrapa le cuir des rênes,  il revint sur terre, presque immédiatement. « Ca ira. » Grogna-t-il, d'un ton aussi noir que ne l'était son coeur. « Je sais où sont les écuries. » Cracha-t-il, ensuite, alors que le gamin bafouillait timidement quelque chose. Et tandis que Llanistar, Orpheos et Impa s'avançaient vers l'imposante porte de pierre, il se détacha d'eux, et s'en éloigna jusqu'à gagner les étables. A mesure que leurs silhouettes se faisaient plus lointaines, il était pris de cette furieuse envie de monter à cheval, et de faire grand galop vers la Citadelle. De se jeter dans la première taverne venue, et de lutter contre le froid à grand coup de vin chaud. Et il ignorait pourquoi il ne le faisait pas.

"Tu sais, Epona... —" Glissa-t-il, alors qu'il lui venait le besoin de se justifier. Peut être le regard de la jument était trop inquisiteur pour lui. « Je crois que... — Je crois que tu passeras une meilleure nuit ici, que quelque part en ville. Et puis... — » le Fils-de-Personne laissa le silence s'installer, ne préférant pas terminer sa phrase. C'était une évidence, de toute façon. Bien entendu, il avait envie de la voir. Il serait parti depuis longtemps, autrement. « Viens par là. » Souffla-t-il à l'animal, en tirant la porte de l'étable et en la guidant. Son courroux retombait doucement. Il installa son amie dans l'une des loges disponible, et quitta les lieux. Dès lors que son nez fut de nouveau exposé au vent, les doutes l'assaillirent de nouveau. Il glissa ses bras tant bien que mal autour de son torse, tâchant de se protéger du froid, et s'avança vers le Palais des Rois. Sans grande détermination toutefois.
*

Il s'était engouffré dans le Castel et depuis, il se faisait aussi silencieux qu'un chat et aussi discret qu'une ombre. Si les chats lui semblaient particulièrement absents, il n'en aurait pas dit tant pour les ombres. Quand bien même il était dorénavant à l'abri de l'Hiver, il frissonnait encore, arpentant les couloirs qu'il avait déjà traversé, parfois poursuivi par le Parjure ; à l'époque encore Prince, parfois épée en main à la recherche du Seigneur du Malin. Cette fois-ci il ne recherchait pas plus le second qu'il n'était poursuivi par le premier. Si jamais il avait le malheur de tomber sur l'un d'eux entre les murs du domaine de Zelda, ses premières pensées auraient été pour elle, et sa sécurité. Pour l'heure, il se contentait de la chercher, sans s'inquiéter de sa tranquillité. Il ne tarderait, de toute évidence, à la troubler.

Petit à petit, à force d'embouchures et d'allées, l'Enfant-des-Bois progressait au travers du Palais. Il se glissa, suivant tant son instinct que la lumière et les voix, dans un petit salon. Plus richement décoré qu'il n'aurait jamais de pierreries, de gloire ou quoique ce fut... — brodé de pourpre, d'or dg  d'argent ; meublé de façon aussi luxueuse qu'il n'était habitué à l'austérité d'une nuit à la belle étoile. Ses yeux croisèrent ceux de Belle, et il ne put retenir un bref demi-sourire en voyant le sien. L'espace d'un instant, du moins. Avant qu'elle ne lui tourne aussi rapidement le dos qu'elle ne lui avait lancé un regard succinct. Avant qu'il ne disparaisse à nouveau au plus profond de cachots ; là ou sommeillent de sombres choses. Son visage, à nouveau, se referma, tandis que l'âpreté dont il était victime faisait de nouveau surface. En silence, il s'adossa contre le mur, aussi éloigné que faire se peut des regards. Qu'il s'agisse d'Impa, du Rusadir ou de Zelda, tous ne présentaient ni plus ni moins que nuque et séant. Il jeta deux suaires de chair sur des yeux plus gelés que ne saurait l'être le givre.

La Princesse s'agenouilla auprès de son Chancelier, en murmurant son nom, et en le tirant à l'étreinte de Llanistar. Il n'avait guère besoin de le voir pour l'entendre, mais les sons le tirèrent à sa rêverie. Il ne lui fallut pas plus longtemps pour réaliser à quel point il avait cru être d'avantage qu'il n'avait été. Ils étaient trois, présentement, autour de Zelda. Et bien qu'il n'avait jamais voulu le voir, force était de constater qu'il n'y avait personne plus entourée qu'elle. De courtisans, de vassaux et de bannerets ; d'âmes liées par le serment, de garçons et d'hommes prêt à mourir pour elle et pour ce qu'elle représentait... Ses doigts se fermèrent sur une pomme, tandis que de ceux de Zelda fuyait une magie qu'il avait cru connaitre. Son regard glissa sur le fruit qu'il tenait dans son poing. Il n'en avait pas plus envie qu'il ne souhaitait rester. Pris d'une lassitude et d'une fatigue qu'il avait rarement connu, il reposa ce qui aurait pu représenter un diner, dehors.

On aurait pu croire qu'il se fondait avec le mur, mais en réalité il se contentait de se laisser glisser contre la paroi. Appuyé contre une colonne, il se laissait aller là où ce qu'il supposait être la gravité le portait. Et quand Belle souhaita un joyeux retour à Orpheos, il fut peut être le seul – avec le blessé – à ne pas bouger. Les yeux de nouveau clos, il se laissa porter – encore ! – vers les quelques souvenirs qu'il avait de sa maison. Petite, mais haute. Sobre et discrète. Brûlée. Doucement, mais sûrement, il quittait (en pensée, au moins) le Castel et cet univers qui ne serait jamais le sien.


Llanistar van Rusadir


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(vide)

« Orpheos… ? »

Llanistar leva ses yeux embués pour voir Zelda enfin arrivée dans la pièce. Fébrile depuis qu'il avait descendu son amant de sa monture, le nordique n'était pas parvenu à le lâcher et tenait toujours Orpheos dans ses bras, même assis dans ce salon où il avait conduit les arrivants. Prudent malgré tout, il ne voulait pas que son affection soit visible par tous et que les rumeurs ne se répandent. Pas encore du moins. Si le chancelier avait été complètement sauf, le Rusadir n'aurait pas hésité une seconde à s'isoler avec lui pour qu'ils puissent se retrouver sans faux semblants. Mais Orpheos n'était pas tiré d'affaire. Il respirait et Impa tenta de rassurer Llanistar du mieux qu'elle le pouvait. En apparence, son âme soeur semblait endormie, plongée dans un sommeil profond mais ils savaient tous que l'influence d'un ennemi comme Ganondorf ne s'évanouit pas naturellement. C'était pour cela que le général attendait l'arrivée de sa reine, la seule qui puisse faire quelque chose. Il ne savait pas réellement quel pouvoir elle possédait et cela ne lui importait pas. En revanche, il avait vu l'aura qui l'entourait.

Dés qu'elle se manifesta, par réflexe, il ferma la porte de son esprit, protégeant son don de la lumière qui émanait en permanence de Zelda, une lumière qu'il semblait être seul à voir. Elle s'approcha de lui et d'Orpheos, dans ses bras. Un instant, Llanistar réagit par la crainte, resserrant inconsciemment son étreinte. Mais sa reine semblait déjà le connaître et elle ne répondit à cet instinct animal qu'avec douceur et bienveillance. Outre ses gestes, ce fut sa voix qui l'apaisèrent.


« Permettez, Général … ? »

Ce fut un brusque retour à la réalité que d'être appelé ainsi et le nordique réalisa soudain que ni Impa ni Link n'étaient sensés être au courant de son lien avec le chancelier. Tandis qu'il laissait Zelda observer son amant inconscient, Llanistar se demanda si son frère en viendrait à le juger si il comprenait la vérité. Soucieux, il chercha du regard le Héros, adossé à un mur de la salle, et comprit que quelque chose n'allait pas. Link n'avait pas été très bavard depuis son arrivée, c'était un fait. Un fait que le nordique avait mit sur le compte de sa défiance pour le castel et ce qu'il symbolisait. Mais à présent que Link se trouvait dans la même pièce que son frère de sang et celle dont Llanistar soupçonnait qu'elle comptait plus que tout à ses yeux, il semblait plus sombre que le Rusadir ne l'avait jamais vu. Au fond de son regard, on voyait de la lassitude mais aussi une morosité inhabituelle. Le nordique osa un sourire qu'il aurait voulu plus franc mais qui lui parut maladroit et vain. C'est alors que son coeur manqua de jaillir de sa poitrine.

« …Amour ? »

Llanistar n'osait pas réaliser ce qui se passait, craignant d'être dans un rêve trop beau pour être vrai, comme le reflet dans l'eau d'un paysage magnifique qu'une pierre vient troubler et faire s'évanouir. Orpheos avait ouvert les yeux et l'avait appelé par le plus beau mot de toutes les langues du monde. Orpheos que l'on venait de lui ramener. Son amant qu'il pensait disparu à jamais, lui était revenu. Si l'émotion ne le paralysait pas, il aurait bondit de joie en bénissant tous les dieux dont les noms lui seraient venu aux lèvres.

« Bon retour à la maison… »

« Zelda, je… argh. »

La main d'Orpheos se raccrocha à la chemise de Llanistar, crispée par la douleur. Cela suffit à sortir celui ci de sa torpeur. Le nordique enveloppa son amant de ses bras et lui murmura, des larmes aux yeux et une voix tremblante d'émotion,

« Tu es revenu, mon amour. Tu ne crains plus rien. Je suis là. »

Il ne put en dire plus. Tout lui semblait irréel, trop beau. Au fond de lui, Llanistar avait cru s'être préparé au pire au fur et à mesure que les jours s'écoulaient où Orpheos restait entre les mains de l'Ennemi. Mais en cet instant, le nordique comprit que rien ne peut préparer à une telle perte, et que si son esprit trouvait des distractions en se plongeant dans des montagnes de travail, son âme, elle, ne pouvait se résoudre à la mort de son amour. Ce furent ces larmes, celles d'un amoureux désespéré, contenues trop longtemps, qui perlèrent sur les joues de Llanistar. Ces larmes qu'il n'avait versé qu'une seule fois auparavant, lorsque les dieux s'étaient montré moins cléments avec lui. Et il se passa plusieurs longs instants avant qu'il ne puisse les arrêter. Mais lorsqu'il releva la tête, tous purent voir qu'un sourire rayonnant de joie illuminait son visage. Il déposa un long baiser sur les lèvres d'Orpheos, sans honte ni même penser à la présence de ceux qui ignorait leur secret, et lui déclara, tellement sincèrement que ce ne fut pas son esprit mais son coeur qui parla,

« Je t'aime. »

Llanistar ne se rappelait pas lui avoir jamais dit.
Son affection avait grandit avec le temps, comme un arbre avec les années. A présent, il ne pouvait se souvenir à quel moment cette affection était devenue un véritable amour, mais à présent que Orpheos se trouvait enfin auprès de lui, cette certitude venait de le frapper.
Et soudain, une braise claqua dans la cheminée et il prit conscience du monde autour d'eux. De la présence bienveillante de Zelda devant lui, et des deux amis à qui il devait son bonheur retrouvé. Il se tourna d'abord vers Zelda, puis Impa et eut enfin un regard particulièrement reconnaissant pour Link.


« Merci à vous. Tous les trois. Merci. »


Zelda Nohansen Hyrule

Princesse de la Destinée. ∫ Édile de Nayru.

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(vide)

Toujours appuyée sur la table, elle assista au réveil du Chancelier, mais elle l’entendit aussi gémir de douleur. Malheureusement, sa période de convalescence s’annonçait longue avant d’avoir entièrement récupéré ses forces, malgré tout ce qu’elle aurait pu faire.

« C’est normal, il faudra encore du temps avant que la douleur ne disparaisse complètement… »

À en faire trop et trop vite, il était facile d’épuiser un corps tout autant que de le guérir. C’était l’erreur de beaucoup de mages souhaitant bien faire. Mais heureusement pour le Sheikah, il était à présent entre les bras de son amant.

Le baiser entre le Général et le Chancelier lui tira un sourire bienveillant. Voilà qui valait largement le déploiement de magie qu'elle venait d'effectuer, peu lui importait d'avoir la tête qui tournait pour peu que l'effort ait été utile. La scène lui redonnait espoir. Tout n'était pas perdu, même s'ils n'avaient pas remporté toutes les batailles la partie n'était pas finie et chacun devait continuer de protéger ce qui lui tenait à cœur.

Sans qu'elle n'en comprenne la raison, la démonstration de tendresse l'incita à jeter un regard en direction de Link pour chercher à accrocher son regard et ressentir sa présence. Son sourire disparut quelque peu en voyant combien ce dernier semblait renfermé. Elle ne comprenait pas pourquoi il se tenait autant à l'écart, ni pourquoi il ne partageait pas la joie ambiante. Les occasions de se réjouir par ces temps troublés étaient trop rares pour ne pas les saisir. Timidement, elle tendit une main vers lui pour l'inviter, espérant qu'il viendrait la rejoindre.

Alors qu’elle s’interrogeait sur le comportement de son ami, le Général les remercia chaleureusement tous les trois. Elle n’avait pourtant pas le sentiment d’avoir joué un si grand rôle. Elle avait à peine accéléré un peu la guérison du jeune homme afin qu’il ait l’énergie suffisante pour reprendre conscience mais c’était tout, elle ignorait jusqu’à quelques minutes auparavant qu’Orpheos n’était plus au Désert. Elle n’avait pas plus que Llanistar pu ordonner aux soldats de s’y rendre pour une opération de sauvetage, c’eut été de la folie.

« Je n’ai pas fait grand-chose, je pense qu’il faut surtout remercier ces deux-là… »

Et à ce propos, elle restait curieuse. Et si elle ne souhaitait pas interroger le Chancelier sur ce qu'il avait pu vivre, pas si tôt ni sans raisons, il avait sans doute des souvenirs bien peu plaisants, elle souhaitait tout de même en savoir plus sur le miracle qui avait conduit à son sauvetage. Elle reprit donc la parole, mais elle avait beau s'adresser à Link et à Impa, ses yeux restaient principalement fixés sur le jeune homme dans l'espoir de le voir faire un geste vers elle.

« D’ailleurs... Comment avez-vous réussi à le retrouver... ? Est-ce pour cela que vous étiez partis ? Ne me dites pas que... Que vous avez infiltré la Forteresse ? »

Si de toute évidence quels qu'aient été les moyens ils avaient réussi cette mission, son cœur se serrait à l'idée des risques qu'ils avaient pu prendre, et de l'issue moins heureuse qui aurait pu la clôturer. Les derniers rapports indiquaient que Ganondorf avait su consolider ses positions, et malheureusement la zone n'en devenait que plus dangereuse au fil du temps.
Voir Link ne pas esquisser le moindre geste vers elle ne fut pas pour lui réchauffer le cœur. Sa main retomba tristement. Soit il ne saisissait pas l’invitation, soit il ne voulait pas y répondre. Mais il en fallait plus que ça pour la faire renoncer. Ce fut elle qui franchit la distance les séparant, avant d’attirer le jeune homme dans ses bras. De toute façon puisqu’il s’était lui-même coincé contre le mur il n’avait pas d’échappatoire. Même une fois rapprochée, elle le sentait toujours distant, et elle n’aimait pas ça. Ses lèvres glissèrent doucement dans le cou de Link pour y poser un baiser avant qu’elle ne réalise ce qu’elle était en train de faire. Heureusement qu’il ne pouvait pas la voir rougir. Elle se contenta de murmurer à son oreille, alors qu’elle attendait toujours une explication sur ce qui était arrivé pendant leur absence à lui et à Impa, et comment ils avaient pu ramener Orpheos.


« Reste près de moi… »

Elle ne savait pas pourquoi elle avait ce sentiment qu’il s’éloignait d’elle, mais elle ne voulait pas de cette distance.


Orpheos


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Orpheos n’était pas sûr qu’il se soit vraiment réveillé, en fin de compte. Après tout ce qu’il avait vu et enduré ces dernières semaines, il s’était mis à ne plus croire en son possible sauvetage. Ganondorf pourrait très bien l’avoir capturé de nouveau et, pour mieux le torturer, avoir plongé son esprit dans le plus beau des rêves pour l’en arracher finalement. Orpheos serait, cette fois, définitivement détruit par le désespoir.
Cependant, l’aura qu’il percevait de chacun des quatre protagonistes présents ne pouvait le tromper. Il s’agissait bien d’Impa et de Link, tous deux debout derrière une Zelda visiblement fatiguée, mais dont Orpheos reconnaissait l’énergie semblable à la caresse du soleil. Et puis il y’avait Llanistar. Ganondorf n’aurait jamais su recréer ce que ses yeux disaient à Orpheos en l’instant même.


-Tu es revenu, mon amour. Tu ne crains plus rien. Je suis là, le rassura-t-il.

Et Llanistar l’embrassa.
Toute crainte s’envola alors chez Orpheos, à l’image de son cœur qu’il sentit s’envoler dans sa poitrine lorsqu’il joignit ses lèvres sur celles de son amant. Oui, il était bien revenu. Il ne craignait plus rien. Une telle émotion le gagna, au moment où il le réalisa, qu’il faillit pleurer comme Llanistar le faisait déjà.


-Je t’aime.
-…Je t’aime, moi aussi.


C’était la première fois qu’ils se l’avouaient. Depuis quand ce sentiment avait grandi en eux, pourquoi ils avaient si vite partagé une confiance réciproque, le Sheikah n’en savait rien. Depuis Efelron, il n’avait pas voulu retomber amoureux, mais son affection grandissante pour Llanistar avait été la plus forte. Il s’était volontairement laissé avoir, parce qu’il s’était senti renaître avec lui. Lui qui se voyait toujours comme un vagabond en haillons, il se sentait enfin beau dans son regard. Seul Llanistar avait été capable d’apaiser ses maux, et de soigner certaines de ses blessures pourtant profondes.
Orpheos n’était pas certain que ce soit dû à sa faible condition physique, mais il sentait sa tête tourner et son cœur continuer de s’alléger, à tel point qu’il sentait sa poitrine vidée. Soulagé de le retrouver mais craintif de se révéler à lui, surpris aussi de leur aveu mutuel, il était tout de même content, au fond. Pas un seul jour, ni une seule nuit ne s’était déroulé sans qu’Orpheos ne pense à lui et à toutes les choses qu’il n’aurait pas eu le temps de lui dire. En voilà au moins une qui venait d’être mise au jour, aux oreilles de tous…


-Merci à vous. Tous les trois. Merci.

Car le chancelier se rappela soudain qu’ils n’étaient pas seuls. Orpheos regarda Zelda, un peu honteux de s’être livré ainsi sous ses yeux. Au moins, ils n’auraient plus à se cacher d’elle, et ce ne serait pas le Héros du Temps ou la chef des Sheikah qui poseraient problème. Ils aimaient trop la discrétion pour cela.


-Je n’ai pas fait grand-chose, je pense qu’il faut surtout remercier ces deux-là… dit la princesse avec un regard insistant pour le garçon de la Forêt. D’ailleurs... Comment avez-vous réussi à le retrouver... ? Est-ce pour cela que vous étiez partis ? Ne me dites pas que... Que vous avez infiltré la Forteresse ?

La princesse posait là une juste question. Orpheos se demandât également bien pourquoi ces deux personnages aussi importants s’étaient aventurés jusqu’à la vallée pour le sauver, lui, le pauvre chancelier qui s’était fait piéger, mais aussi comment ils avaient fait.

-Je ne suis pas sûr de mériter que vous preniez de tels risques, poursuivit le chancelier, encore dans les bras de son amant. Mais je tiens à vous rassurer, princesse, les derniers souvenirs que j’ai se situent en dehors de la forteresse. Ils ont dû me récupérer sur la rivière qui se jette dans le lac Hylia.

Après l’approbation d’un signe de tête par Impa, Orpheos leur raconta la course-poursuite à laquelle il avait été forcé de se livrer face au Traqueur, et comment il avait cru que sa fin était arrivée, en n’oubliant pas de mentir sur la manière dont il avait pu s’échapper : personne n’était encore au courant du pacte qui le liait aux Ombres -du moins c’était ce qu’il croyait- et Orpheos tenait à le maintenir secret le plus longtemps possible.
Il raconta qu’il avait été maintenu captif dans les geôles de la forteresse, et que juste avant cette course-poursuite, il avait été amené devant Ganondorf en personne.


-Pardonnez-moi, tous… lâcha Orpheos avec remords, après qu’il eut expliqué sa confrontation mentale contre le seigneur du désert. J’étais trop faible, je n’ai même pu résister qu’à un seul de ses assauts psychiques. Il a fouillé mon esprit et je n’ose savoir quels renseignements il a pu en subtiliser. Heureusement que je n’ai pas de responsabilité militaire, car dans ce cas-ci, il aurait pu retirer trop d’informations précieuses quant à nos futures actions.

Orpheos regarda un instant Llanistar. Il se sentit satisfait que ce dernier ne se soit pas fait piéger comme il l’avait été. Contrairement à Orpheos, le général était d’un intérêt vital pour le royaume et sa force armée.
Mais soudain, en fixant les yeux polaires du nordique, un détail crucial revint à la mémoire du chancelier.


-As-tu eu mon message ? murmura-t-il avec empressement. As-tu récupéré mon instrument de musique ?

Orpheos comptait lui expliquer à quel point la possession de sa lyre était cruciale : sur l’instrument se trouvaient le sang séché et les mèches de cheveux des femmes qu’il avait combattues, pendant l’assaut de la forteresse. En les lui laissant, Orpheos avait pris une ultime précaution au cas où il ne reviendrait pas : un magicien pourrait toujours s’en servir contre elles via un sortilège.
Mais le chancelier se rappela par quel moyen il lui avait envoyé sa lyre, et alors qu’il avait voulu éviter toute question sur le sujet, il se prépara à répondre finalement aux interrogations du général.

Il allait peut-être devoir révéler la vérité sur son pacte avec les Ombres.


Llanistar van Rusadir


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(vide)

Llanistar tremblait tandis que son amour faisait le récit des tourments infligés par le roi du désert. Il écumait de rage autant qu'il vibrait d'un soulagement inespéré. Pour une fois, la chance avait été de son côté et le destin, indulgent. Orpheos aurait pu mourir cent fois rien que dans ce jeu cruel du Gérudo, c'était un véritable miracle qu'il soit revenu sauf et rien d'autre ne comptait. En raison de cela, il se contenta de serrer un peu plus dans ses bras son amant lorsque ce dernier s'excusa d'avoir cédé au seigneur gérudo. De fait, le général ne lui en voulait pas le moins du monde, considérant les tortures qu'il avait certainement subies. De plus, le seul secret utile que le chancelier avait pu apprendre à Ganondorf concernait les passages secrets du château. Mais pour les avoir explorés lui même, le nordique savait qu'aucun ne permettait d'entrer et de sortir de la citadelle, seulement de circuler à l'intérieur. Rien de très dangereux puisque l'envahisseur avait entamé une guerre de position, et abandonné sa tactique de raids jusqu'à la ville.

Orpheos lui jeta un regard qui fit fondre Llanistar à nouveau. Même blessé et meurtri, le chancelier lui paraissait toujours aussi beau, voir plus. Cela faisait un certain temps qu'ils ne s'étaient pas retrouvé, puisque le Sheikah avait prit le large avant la bataille, ainsi que l'exigeait sa nature solitaire. Aussi, le nordique retrouvait son amant légèrement différent, avec des traits légèrement plus tirés, une chevelure un peu plus longue... Et tous ces détails le frappaient en plein coeur, tant il trouvait du charme dans le moindre d'entre eux. Une âme amoureuse ne peut mentir.
Mais soudain, Orpheos sembla se rappeler de quelque chose d'important, ses yeux s'agrandirent et la main qui tenait la chemise de Llanistar se crispa légèrement, tandis qu'il demandait avec inquiétude,


-As-tu eu mon message ? As-tu récupéré mon instrument de musique ?

Llanistar acquiesça. De fait, il avait bien reçu le message mais sans savoir comment l'interpréter. Peut être allait il enfin le savoir de manière certaine. Si la lyre avait une importance aux yeux du chancelier, ça n'était sans doute pas uniquement de par ses qualité musicales. Il la détacha de sa ceinture, à laquelle elle était accrochée depuis que l'ombre la lui avait donné, et la donna à son amant, retenant les questions qui lui venaient par dizaines. Il se força au silence, néanmoins, et son regard vint croiser celui de Link. Le général n'aimait pas ce qu'il y lisait, et si Zelda n'avait pas été là, il aurait prit le risque d'approcher le héros avec le don. Mais l'aura divine de la princesse le lui interdisait, de même que la crainte que son frère de sang puisse mal réagir à ce que beaucoup verraient comme une intrusion. Après tout, Link ne devait même pas être au courant de cette capacité chez Llanistar, et si il le captait, il pourrait se sentir trahit. Sans doute un jour viendrait où le Rusadir trouverait les mots pour en parler. Il est toujours difficile de révéler quelque chose qui a toujours été là à des amis qu'on côtoie depuis longtemps, quelque chose dont on ne parlait pas de peur d'être vu comme un monstre, ou un danger.
Constatant que même les mots de Zelda n'avait pas amélioré l'humeur du héros, Llanistar se promis d'aller passer un peu de temps avec lui, le soir même ou le lendemain, afin d'en savoir plus sur ce qui troublait manifestement Link, alors qu'il aurait dû se réjouir de ce qui se passait.


Link

Héros du Temps

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(vide)

L'Hylien se contenta d'hocher la tête, les lèvres vraisemblablement plus pincées que lorsque Ganondorf lui même s'était enquit de la direction qu'avaient pris les cavalières juchées sur l'étalon à la robe de neige. A ceci près qu'il ne tira pas l'acier comme il avait pu le faire jadis. Il n'y avait personne à protéger entre ces quatre murs qui s'acharnaient à l’oppresser. Sans doute. Et moins à affronter. Le silence qu'il offrait à Llanistar était le même quand celui-ci le remercia du regard, mais l'attitude changeait indéniablement. Il avait beau se sentir plus mal-à-l'aise que toutes les autres fois où il avait pu fouler du pieds les ancestrales allées du Castel, il savait pourtant garder à l'esprit que nul n'était son ennemi.

La tête lui tournait cependant alors que le froid s'emparait de lui. Tantôt naturel et provoqué à la fois par l'hiver et ses baignades malheureuses des derniers jours, et un autre qui tantôt échappait à la majorité des notions dont il avait jamais disposé. Et la grogne naissait en son estomac autant que la fatigue ne l'accablait plus férocement qu'il ne pouvait lutter. Le Poisson-Rêve l'appelait autrement mieux que ne le faisait le bras tendu de Zelda. C'est à peine s'il le vit en vérité, alors que le sien retournait à l'assaut des pommes. La faim le tenaillait, et la Princesse pourrait bien attendre. Mais, du reste, le geste le rassurait sans doute plus qu'il n'acceptait de se l'avouer.

"Orpheos dérivait, charrié par la rivière, quand nous l'avons retrouvé." Lâcha-t-il alors, lapidaire, pour appuyer les propos du Chancelier. Il s'était arraché au mur, et ses yeux restaient sans cesse éloignés du petit comité qu'Impa et lui avait su recomposer. Son regard balayait plutôt le petit bureau de bois - qui valait à lui seul plus que tout ce qu'il avait pu posséder, au delà d'Excalibur elle même - sur lequel traînaient encore quelques fruits et agrumes. Ses doigts finirent par se décider et retournèrent à la même pomme qu'ils avaient choisi auparavant. Toujours penché sur le mobilier, il laissa le Sheikah narrer ses récits, d'apparence froid et distant, tandis qu'il cherchait un couteau pour fendre son repas en quartier. Mais, en vérité, si une quelconque lame lui échappait si longuement c'était bien parce qu'il tendait une oreille autrement plus attentive à tout ce que pouvait dire le presque inconnu qu'ils avaient secouru. Et, comme le craignait la Sage de l'Ombre, un certain nombre de détails (que lui même ignorait plus que vraisemblablement, peu habitué aux machinations stratégiques et guerrières, et sans doute aussi peu désireux d'y prendre part) étaient passé à l'ennemi. Chez les deux aventuriers qui s'en étaient allés jusqu'à la Forteresse, le silence fut le seul écho au discours du Dignitaire. D'autres se chargeraient de répondre, de le rassurer. Et si Link ignorait pourquoi Impa gardait le silence, il supposait que c'était sans doute pour les mêmes raisons qui lui intimaient de se taire. Il ne partageait avec Orpheos aucune sorte de proximité, qui aurait pu l'excuser à ses yeux. S'il ne se permettait moralement pas de le juger, ne serait-ce parce qu'il connaissait Ganondorf mieux que quiconque, il restait indéniable que son cœur réagissait indépendamment de ses tentatives de se raisonner.

L'acier incisa la peau puis trancha la chaire blanche du fruit. Il ne doutait pas de la loyauté de l'homme du Général, et pourtant un certain ressentiment restait inexorablement. Il avait beau savoir que le Sheikah ne les avait pas vendus, il lui semblait tout de même qu'il naviguait de parjure en trahison. Ses yeux se déportèrent vers Impa, dont il chercha le regard, avant de piquer de l'estoc le morceau de pomme qu'il avait séparé du reste. Il ne leur restait plus qu'à espérer que le Chancelier avait pu être ramené avant d'en avoir trop dévoilé. Son regard se porta ensuite sur cet homme, entouré et réconforté. Et s'il ne doutait pas de sa hardiesse, et des souffrances qu'il avait du traverser, l'Hylien peina à tenir un reniflement. Il ignorait comment il aurait réagi à sa place, et savait pertinemment qu'il n'était pas de ceux qui pouvaient juger. Et pourtant...

Il préféra se laisser aller à nouveau sur le mur, frappé par un désespoir de plus tandis qu'il réalisait à quel point continuer à plusieurs lui semblait compromis, mais combien faire seul lui apparaissait plus complexe que jamais. Les yeux clos, il glissa entre ses lèvres le quart de fruit. Avant qu'il n'ai eu le temps de l'avaler, cependant, Belle vint se coller contre lui. Sous le coup de la surprise, l'Enfant-des-Bois manqua de perdre son bien, comme le corbeau qui ouvre trop grand le bec laisse aller le fromage. « ... 'Elda ...? » Souffla-t-il alors, tâchant tant bien que mal de ne pas lui cracher un pan de pomme au visage. Elle lui murmura alors ce qui la poussait à venir. La curiosité. La Princesse souhaitait savoir ce qu'Impa et lui avaient enduré également, ce qu'il avait toujours passé sous silence — ce qu'il passerait toujours sous silence. Et si sa main vint doucement rejoindre la hanche de la jeune femme, il n'ajouta rien.


Zelda Nohansen Hyrule

Princesse de la Destinée. ∫ Édile de Nayru.

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Tout en avançant vers Link la princesse avait écouté la réponse d’Orpheos. Bien entendu elle était désolée et choquée du traitement qu’il avait subi même si malheureusement elle n’en attendait pas moins de Ganondorf. Quant aux intrusions dans son esprit, si elle savait combien la magie pouvait être puissante quand elle était aidée de la Triforce et n’en voulait pas à son ami de n’avoir pas pu résister, c’étaient toutefois des nouvelles qui l’inquiétaient. Ils avaient effectivement la chance que le chancelier n’ait pas été mis au courant de manœuvres militaires ou d’informations secrètes, mais qui savait quelles informations le Seigneur du Malin cherchait exactement ? Il connaissait sans doute déjà le château de façon globale pour l’avoir jadis pris d’assaut. Quant aux passages secrets les plus dangereux ils étaient normalement toujours connus d’elle seule, à l’exception de celui qu’elle avait emprunté avec Link. Pourtant Ganondorf avait peut-être une idée en tête et elle restait méfiante même si rien d’essentiel n’avait pas pu être dévoilé par l’esprit du chancelier. Le jeune homme dans les bras duquel elle arrivait en savait infiniment plus sur le château et les secrets qu’elle gardait, et elle se demanda un instant, le cœur serré, s’il aurait pu résister à un tel assaut mental. Elle s’interdit pourtant bien de tenter l’expérience, espérant que la question ne se poserait pas.

Mais arriver dans les bras de Link mit ces inquiétudes de côté. Elle fut soulagée d’enfin le voir réagir et cesser de l’ignorer. Il fallait avouer qu’il n’avait plus tellement le choix. Un grand sourire apparut sur son visage devant l’air surpris du jeune homme, et malgré son silence, la main qui se posa sur sa hanche lui donna une audace qu’elle n’avait pas prévue. Son visage approcha jusqu’à venir mordre un morceau du bout de pomme toujours maintenu dans la bouche du jeune homme. Elle réalisait toujours à peine ce qu’elle venait de faire quand elle s’éloigna, l’air espiègle, et le bout de pomme volé en bouche. Un peu gênée, mais sans regret, elle regarda un instant le jeune homme en silence avant de reprendre la parole.

« Tu ne m’en diras pas plus je suppose ? »

Quelque peu déçue mais elle s’y attendait et ça ne ternirait pas sa joie. Jamais il n’avait accepté de lui raconter les détails de ses voyages. C’était pourtant quelque chose qui l’intéressant, autant parce qu’elle s’intéressait à ses journées que parce qu’elle n’était pas si libre de voyager elle-même.

« Tu crois qu’on pourra discuter un peu, après… ? »

Elle était toujours inquiète de l’attitude qu’il avait eue un peu plus tôt, même si pouvoir se blottir contre lui et avoir récupéré son attention la rassurait. Le moment n’était pas le mieux choisi pour une discussion là-dessus, ou même pour prendre de ses nouvelles plus amplement, elle espérant pouvoir profiter un peu plus de son passage au château.

Toujours appuyée contre lui, elle tourna la tête vers les deux amoureux qui profitaient de leurs retrouvailles inespérées. Elle aperçut le général qui rendait au chancelier sa lyre. Elle se souvint des mots de ce dernier lorsqu’il l’avait amenée jusqu’à sa tente pour la consoler et répondre à ses interrogations. Il avait parlé d’une ombre, et elle savait de quoi il s’agissait, Sheik l’avait appris même si Orpheos ne lui en avait jamais parlé directement à elle. Elle remarqua un silence entre les deux hommes, devinant qu’il y avait des interrogations qui refaisaient surface. Elle garda une oreille attentive à la conversation qui allait suivre. Peut-être que la situation avait évolué depuis la dernière fois. De toute évidence si la lyre avait été transportée par une ombre c’était qu’à défaut de suivre sagement son propriétaire comme toute ombre normale, elle répondait à ses demandes.


Orpheos


Inventaire

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La respiration d’Orpheos se creusa. Llanistar avait bien reçu le message… Et il devrait, tôt ou tard, s’expliquer à ce propos. La magie noire n’était jamais bien vue, en Hyrule ou ailleurs, et le général pourrait peut-être mal réagir en apprenant le pacte que son amant avait scellé avec les puissantes entités de l’Ombre que Ganondorf lui-même utilisait.

-Orpheos dérivait, charrié par la rivière, quand nous l'avons retrouvé, termina Link après les explications du rescapé.

Le Héros du Temps paraissait d’humeur bien maussade, voire sombre. Etait-ce le fait d’avoir dû se mettre potentiellement en danger dans la Vallée pour le ramener ? Etait-ce la pensée de Ganondorf qui avait gagné une autre bataille ? Ou bien en voulait-il, inconsciemment, au chancelier d’avoir été fait prisonnier… ?
En voyant Zelda prendre du recul dans la pièce pour se rapprocher de Link, Orpheos sentit que c’était le moment, pour lui, de s’isoler.


-Je vous expliquerai, davantage en détails, plus tard… Pour le moment, j’aimerais me reposer.

Une douleur dans son abdomen ne fit qu’appuyer son propos. Mais plus que la souffrance physique, les pensées d’Orpheos rôdaient dans son esprit pour le torturer. Il pensait désormais à l’échec qui était le sien. Il avait été sauvé, mais à quel prix ? Il n’avait pu aider à reprendre la forteresse Gérudo, n’avait pu éliminer aucun de ses deux adversaires lors de son combat là-bas, et avait laissé Ganondorf entrer dans son esprit pour lui prendre les informations qu’il souhaitait.
Son échec était aussi cuisant que ses blessures.


-Je vous retrouverai sous peu… murmura-t-il, alors qu’Impa se chargeait de l’emmener en silence hors de la pièce, laissant les trois autres avec leurs doutes et leurs interrogations.