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Retour de bâton

[Privé avec le Narrateur, la suite sera mi-privée.]

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L’année avait été particulièrement longue pour le peuple zora, entre le départ de ses hommes pour diverses batailles et missions diplomatiques, la perte de certains dans les mêmes circonstances, et les restrictions qui en découlaient dans le Domaine. Ruto avait mis en œuvre ce qu’elle avait toute sa vie rechigné à apprendre : la diplomatie. Elle avait tenté de se rapprocher de leurs différents alliés, parfois avec succès, parfois avec moins.

Ce qu’elle en concluait cependant aujourd’hui, c’était une longue absence de sa part aussi, bien qu’entrecoupée de brefs retours pour être auprès de son père et de ses amis qui s’inquiétaient pour elles et pour leur avenir. Aussi, lorsque ses congénères étaient en fête pour célébrer l’anniversaire de son Père, leur Roi, la Sage de l’Eau se préparait à tout autre chose : un conseil entre les sages zoras, et elle-même. Ils lui feraient part de ce qu’elle avait manqué, et elle devrait soutenir les projets qu’elle avait montés pendant ses voyages.

Face à tout un mur de glace qui tenait lieu de miroir dans sa chambre, elle avait revêtu les bijoux de sa famille. C’était un honneur pour elle de les porter, et pour la première fois, elle n’avait pas l’impression que cette élégance de circonstance venait contrarier son côté intrépide. Elle pouvait être plusieurs personnes à la fois, tout dépendait du lieu et du moment. Mieux valait tard que jamais pour le comprendre.

Oui, la petite princesse avait grandi. La peur et la souffrance avaient sans doute contribué à accélérer le processus. Pourtant, l’angoisse s’amusait à tisser ses toiles dans sa gorge, l’empêchant de respirer. Saurait-elle seulement parler devant ses Aînés ? Elle ne l’avait jamais fait, jusqu’alors. Cela ne les empêchait pas de la connaître par cœur. Voyaient-ils, eux aussi, combien elle avait changé ?


« Princesse, vous allez être en retard.
- J’arrive toujours quand on me n’attend plus, Lyubok, je pensais que tu le savais.
- Le Conseil n’aura certainement pas votre humour.
- Serais-tu en train de me critiquer, insolent ?! lança-t-elle, se retenant de sourire.
- J’adore votre humour, Princesse, je pensais que vous le saviez. »

La plaisanterie la fit sourire. Evidemment qu’elle n’oserait pas tout ceci devant tous ces vieux schnocks. Elle respectait trop les traditions de son peuple pour laisser son sens de la provocation les menacer. Elle rassura néanmoins son ami et protecteur. « J’arrive tout de suite, juste le temps de rassembler mes esprits. » murmura-t-elle. Il l’entendait toujours, de toute manière.

Elle compléta sa tenue traditionnelle par un diadème de la même couleur que ses yeux. Aucun vêtement hylien ne venait cacher son corps de créature aquatique qui ne choquerait la pudeur de personne, ici. Uniquement des bijoux, faits de métaux riches, de coquillages, et de pierres précieuses. Un instant, elle avait eu peur de ressembler à ces décorations de fêtes des grandes villes, dont toutes les couleurs faisaient tourner la tête. Mais non. Tout semblait reposer sur un point d’équilibre résidant dans son air grave de future dirigeante – du moins l’espérait-elle.

Elle rassembla également les quelques feuilles sur lesquelles elle avait noté ses idées, les roula doucement, et les coinça sous le son bras gauche, celui qui ne tenait pas la conque que les enfants lui avaient décorée, et qui symbolisait son rang. Elle soufflerait dedans, un peu plus tard, pour annoncer le début des festivités. Par les Déesses, ce qu’elle avait hâte d’y être. *Je suis prête !* se dit-elle enfin, avant de sortir de sa chambre.

Elle se tenait toujours droite, mais l’appréhension la rendait raide, à présent, lui donnant l’air encore plus hautain que d’habitude.
« Chercherez-vous à les convaincre ou à les dévorer, votre Altesse ? Car à vous voir, on peut se poser la question. » lui souffla Lyubok. Elle retint un petit rire, et sa posture s’améliora légèrement. « Je te remercie, mais j’ai plus l’impression d’être celle qui se fera dévorer… »

Ils entrèrent dans la salle des conseils. Elle était vide. Deux gardes semblèrent perplexes, au vu de l’heure qu’il était déjà. Ruto calma leurs craintes en prenant place comme si de rien n’était dans son fauteuil tout recouvert de nacre. La roche, polie par l’eau, renvoyait la lumière sur toutes les parois de la caverne, et leurs reflets semblaient tous se regarder les uns les autres à l’infini. Ruto adorait cet endroit. Elle leva la tête pour planter son regard dans celui de son reflet, au plafond. « Qui saurait rapporter les mots de ces deux pêcheurs, noyés dans le chant de guerre de la rivière ? » chantonna-t-elle, après quelques secondes.

Les gardes qui l’avaient escortée reculèrent, tandis que son siège s’enfonçait dans le sol de la salle. Elle eut le temps de sourire une dernière fois à son ami, avant de reprendre son air impartial. Elle ferma ensuite les yeux, jusqu’à toucher le fond du lac qui dormait sous leur domaine. Enfin, elle dévisagea chacun des trois sages qui se tenaient devant elle.


« Je suis Ruto, fille du Roi Zora, et siègerai au nom de la famille royale à ce conseil. » déclara-t-elle, la voix légèrement tremblante, avant de disposer tout doucement ses notes devant elle.

Ce compte est un compte narrateur : les personnages joués par le narrateur ne peuvent pas être utilisés par les joueurs ou joueuses dans leur post (sauf autorisation d'un admin) et les jets de dé du narrateur sont contraignants.



Ses doigts palmés cessèrent de jouer avec la hampe froide de sa lance alors qu'il observait la future Mère arriver doucement dans la salle du Conseil. Nije soupira de soulagement, heureux de voir la Princesse de retour, après de si longs mois passés en dehors du domaine. Ainsi que l'exigeait le protocole, il baissa le regard pour ne pas croiser celui de sa souveraine. Ramenant son poing contre son thorax, il s'inclina, achevant sa révérence, comme tous ses paires. Devant lui, les trois Doyens se levèrent de leurs sièges et passèrent devant le tribunal. « Bienvenue, Altesse. » Lança Opes Avo de sa voix à la fois lourde et sereine. Ses lèvres s'étirèrent en un petit sourire sincère, puis les Sages la saluèrent tous ensembles, s'inclinant respectueusement. « Nous sommes heureux et rassurés de vous savoir parmi nous, votre Majesté » commença Taja Napen alors que les trois Zoras reprenaient place derrière la lourde table de nacre bordée d'aigue-marine.  « Nous savons l'importance que revêt ce jour à vos yeux et ne souhaitons pas vous retenir plus longtemps que nécessaire. Le Domaine tout entier vous attend pour débuter la fête », rappela le sage, déployant devant lui quelques tablettes d'argiles échancrées et scellées dans des bordures de bois brun. Après un bref regard sur les nombreux sièges vides, il poursuivit. « Comme vous pouvez le constater, tout le Conseil n'est pas présent. Plusieurs d'entre nous participent à l'organisation des festivités. » Son œil unique épousa un instant la Princesse, avant de revenir à ses notes. « Néanmoins, il est de nombreux sujets qui requièrent votre attention la plus immédiate, Majesté. » Son ton, grave et froid, était à l'image de sa perception de la situation. Le Doyen releva le regard sur Opes Avo, puis sur Malem. Les deux anciens gardaient encore le silence, mais partageaient son avis, il ne le savait que trop bien. Taja Napen ouvrit la première des tablettes qui contenait l'ordre du jour. « Hátign... », commença-t-il, sans trop savoir comment formuler son message. Tous savaient à quel point la nouvelle allaient déplaire à la Princesse. « ... Nous nous sommes entretenus avec sa Majesté votre père pendant votre absence. Nous sommes tombés d'accords sur un sujet essentiel : vous ne pouvez plus quitter le Domaine comme vous l'avez fait. » Un instant, le silence retomba sur le Tribunal des Doyens. Ils ignoraient si Ruto était trop abasourdie pour répondre où si son silence cachait sa rancœur. « Le Domaine est l'endroit le plus sûr pour une personne de votre rang. Votre sécurité est la première de nos préoccupations, Hátign » précisa Malem, cherchant du regard les yeux de sa suzeraine.

De la pulpe du doigt, Opes Avo dessina une esquisse de carte sur un petit angle de la table de Conseil. Les traits prirent vie sur la surface de nacre, précisant les contours du Domaine et de tout le territoire qu'occupaient les Zoras. L'amont du Gyorg, par delà la cascade et l'aval de la rivière, glissant vers les multiples plaines du royaume. Les doigts de l'ancien brillèrent brièvement d'une lueur bleue et le canevas grandit, de façon à être visible par tous les membres du Conseil. « La guerre qui ravage les landes pourrait vous tuer, Altesse. Nous ne laisserons pas un tel drame se produire. » Chacun des membres du Conseil nourrissait pour Ruto une affection et une estime inébranlable. Ils l'avaient vu naître, grandir, mûrir. Ils l'avaient éduquée, chérie, protégée. Mais au delà même de cet amour qu'ils lui portaient, la mort de la Princesse-Mère signifiait la mort de toute la colonie. « C'est auprès de votre peuple que vous devez être, Hátign, nulle part ailleurs. Quand vous partez, les plus jeunes pleurent et les plus âgés se laissent dépérir. Le sort du Domaine tout entier repose sur vos épaules. »Dans un éclat de toux surfait, Opes Avo invita son confrère à se taire, un instant au moins. Malem n'avait jamais été connu pour son tact et quand bien même ses opinions étaient souvent avisés, le Conseil n'avait pas l'autorité suffisante pour ordonner quoique ce soit à la jeune suzeraine. « Ce que Malem cherche à dire, Altesse, c'est que nous avons besoin de vous. Vous serez bientôt en âge de devenir la nouvelle Mère de la colonie et à ce titre, risquer votre vie revient à mettre en jeu tout l'avenir de notre civilisation. » Dans une ébauche de sourire gênée, Opes chercha à rassurer la jeune femme. « Vous comprendrez donc que d'ici à une évolution de la situation extérieure, le Roi souhaite vous préserver du moindre risque. C'est dans ces conditions qu'il a décidé de nous nommer garants de votre intégrité et donc décisionnaires de vos éventuelles sorties au-delà des défenses du Domaine. » Posant le poing sur la table, Taja Napen décida d'intervenir de nouveau. L'ancien général n'avait jamais aimé les discussions trop longues et partageait davantage la philosophie de Malem.  « Sachez, Hátign, que ce point ne souffrira d'aucune contradiction. Dorénavant, vous ne pourrez plus quitter vos appartements sans notre aval. » Par réflexe, sa main gauche s'était refermée sur la fusée de la lame qui ne quittait plus jamais sa hanche. Tous trois savaient le Roi derrière eux dans cette bataille et était conscients qu'ils l'avaient gagné avant même le retour de la Princesse.

"D'autres sujets primordiaux requièrent votre attention, Hátign." Sans laisser de répit à Ruto, le vieux soldat reprit. D'un geste de la main rapide il balaya les tablettes, peu désireux de s'en tenir à l'ordre du jour. « Nous savons vos tentatives pour entrer en contact avec Zelda Nohansen Hyrule et, d'une façon générale, le monde des Hyliens. Cela doit cesser. » Le regard dur du borgne épousa celui gracieux de sa future Reine. « La guerre des Hyliens n'est pas celle des Zoras. Les Gérudos ne viendront pas jusqu'à nous : ils n'en ont pas le besoin ni l'intérêt. » A ses yeux, s'impliquer dans ce conflit ne faisait en aucun partie des devoirs de son peuple. Les Hommes s'étaient engagés dans une guerre stérile et meurtrière qui ne les concernaient qu'eux. « Taja Napen a raison. Nous ne devons rien aux Hyliens et n'avons aucune raison de leur rester serviles. Laissons-les s’entre-tuer si bon leur semble. Ils ne nous sont jamais venus en aides mais envahissent nos terres, dépeuplent nos rivières. Ils peuvent bien mourir et nourrir ce monde qu'ils méprisent. » Malem renifla, profondément agacé. Depuis près de deux cent ans, il cherchait à convaincre le Conseil et le Roi de rompre la vassalité qui les liaient au trône d'Hyrule. D'aucuns soupçonnaient qu'il tuait tous les Hyliens qu'il avait l'occasion d'éliminer – et si c'était vrai, cela aurait constitué un motif d'exclusion du Conseil – mais personne n'avait jamais pu le prouver. Souvent, pourtant, les corps de vagabond était retrouvés pourrissants dans la rivière. Les Octoroks n'avaient pas la force de les massacrer ainsi qu'ils l'étaient mais d'autres créatures marines essuyaient le blâme. Cette fois, Opes Avo ne l'interrompit pas. Aucun Zora n'avait de complaisance pour ceux qui foulaient le monde de la surface. Il n'aurait juste pas osé le formuler aussi durement. « Zelda Nohansen Hyrule et Ganondorf Dragmire sont des idiots dont nous devons nous séparer, Hátign. Nous n'avons pas à mourir pour l'un ou pour l'autre. » Opes bégaya, un instant. « La famille royale d'Hyrule règne sur tout le pays... — » commença-t-il, les écailles rendues scintillantes par l'angoisse. « Alors le Domaine ne fera plus partie d'Hyrule. Je suis prêt à partir en guerre pour nous débarrasser de ces chiens ! » Calmement, Taja Napen rappela Malem à l'ordre. « Cette décision reviendra à son Altesse Royale la Princesse Ruto et à son père. Je ne crois pas toutefois, que le conflit soit nécessaire. Nous pourrions nous contenter de fermer les portes du Domaine. » Du regard, il invita la future Mère à prendre la parole. De nombreux sujets devaient encore être abordés, mais de tous il était probablement le plus important et ne pouvait faire l'économie d'un véritable débat. Le reste pouvait attendre. Éventuellement.

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La Femme-Poisson ne pouvait qu’être perplexe de cette situation qu’elle avait l’impression de vivre à côté de son propre corps tant elle ne se sentait pas à sa place. Ces Doyens qui se tenaient devant elle, avec leur air si solennel l’effrayaient autant qu’ils la rassuraient. Ils avaient été les gardiens de son enfance, et du bonheur qui y était associé, et elle leur en serait toujours reconnaissante. Et ce malgré ses sautes d’humeur et ses caprices incessants de princesse, qui leur aurait donné des cheveux blancs si toutefois un jour quelque système pileux avait touché leurs têtes bien pleines.

Le premier sujet tomba, et la Zora mobilisa tout ce dont elle disposait en elle-même pour ne pas paraître exaspérée. Elle était qui elle était, et s’était souvent convaincue qu’elle ne devait rien à personne hormis son peuple bien aimé. Et pourtant, Papa revenait toujours à la charge pour l’infantiliser, malgré les preuves qu’elle avait tenté de faire de sa loyauté, de son courage, mais aussi de sa prudence. Cependant, un frisson la parcourut lorsque Malem évoqua sa sécurité. Un instant l’air pervers de ce pantin des ombres qu’elle avait affronté au Mont traversa son esprit. Sans qu’elle ne parvienne à se l’expliquer, cet affrontement l’avait marquée plus qu’elle ne s’y attendait. De petites larmes commencèrent à perler le long de ses paupières.


« Sachez, Hátign, que ce point ne souffrira d'aucune contradiction. Dorénavant, vous ne pourrez plus quitter vos appartements sans notre aval. » lui lança Taja Napen après un long silence. Sans doute prenait-il sa décision pour de la contestation ? Elle ne put se retenir d’intervenir. « Je comprends la gravité de vos propos, mes Pères, et respecte cette décision du Roi, bien qu’elle ne m’enchante guère. » Elle respira un instant, pour se contenir comme pour réfléchir. « Mais mes appartements ? Si le Peuple souffre tant de ne plus me voir, pourquoi me cacher à sa vue sauf pour vos grandes occasions ? » Devant la raideur qu’elle sentit en face d’elle, elle ajouta, avec moins de mordant qu’à son habitude, mais sans trop s’effacer : « La survie du Peuple est un argument que je peux entendre, et peut-être même le seul. Alors ne souillez pas vos paroles réputées si sages par un mensonge aussi éhonté sur son amour pour moi. Je sais bien que je ne suis pas la plus Zora des Zoras ici. » Cette dernière phrase avait été énoncée avec un soupçon de tristesse.

Toutes les remarques qu’elle pouvait faire intérieurement à son équivalente Hylienne, elle se les était également faites. Parfois, elle se demandait si les Déesses avaient bien fait de placer un tempérament si Hylien comme le sien dans un corps destiné à un rôle si lourd de traditions. Et ce parallèle avec les autres peuples sembla ne pas avoir échappé aux Doyens non plus, car ils poursuivirent sur ses relations avec le monde extérieur, qu’elle s’était mis un point d’honneur à apaiser au cours de l’année écoulée.
« Mais enfin, ne voyez-vous pas en eux de solides alliés en cas d’invasion ? » s’étonna-t-elle. « La guerre des Hyliens n'est pas celle des Zoras. Les Gérudos ne viendront pas jusqu'à nous : ils n'en ont pas le besoin ni l'intérêt. » Ruto n’était certes pas habituée à ce phénomène, mais elle fut bouche bée face à une réaction si absolue. Et bientôt, elle se sentit invisible dans un débat qu’elle ne comprenait même pas. Fermer le domaine ? Déclarer la guerre ?

Enfin, les regards se tournèrent vers elle, à l’évocation du positionnement de sa famille sur la question. Elle inspira bruyamment, avant d’oser enfin parler.
« J’ai entendu vos conseils avisés, et sachez que je les garde à l’esprit pour venir éclairer nos décisions quand nous en parlerons avec le Roi, mon père. Je ne puis néanmoins m’avancer sur le sujet sans en avoir discuté avec Lui. » Ils semblèrent attendre une suite malgré tout. « J’aurais tout de même tendance à suivre les recommandations de Taja Napen. Trop d’entre nous ont disparu au cours des dernières années, et je ne saurai en perdre davantage dans une guerre plus vengeresse que légitime. » Son ton était redevenu sec. Elle connaissait les rumeurs à propos de Malem et ne l’encouragerait pas dans sa haine à peine voilée. « Par ailleurs, je suis d’accord sur un point : ces Hyliens sont beaucoup trop prétentieux et certains jamais ne se remettront en question. Tâchons à notre tour d’être irréprochables pour éviter de déplacer leur regard si étroit sur d’éventuels défauts de notre part. Nous ne sommes pas les enfants qu’ils sont. Aussi toute décision, quelle qu’elle soit, devra être transmise à Nohansen de façon officielle. C’est là mon unique condition. »
Elle frotta brièvement ses mains, comme pour chasser ses mauvaises émotions, et s’appuya solidement sur le dossier de son siège, le regard fier. Une bataille venait d’être menée, mais elle sentait que la guerre n’était pas finie. De plus, elle avait été éduquée par ces vieillards n’avait que trop intégré leur manière de réfléchir. Ils venaient d’évoquer le problème hylien, et un Hylien parmi les autres était connu dans leur Domaine. Sa main caressa légèrement la reproduction de la Pierre Zora qu’elle portait autour du cou, et qu’un ami très cher lui avait offert.

« Continuons, si vous le voulez bien. » lâcha-t-elle poliment, même si leurs vœux lui importaient peu : elle était celle qui voulait poursuivre.

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Il bouillonnait. Sa fureur n'avait d'égale que son âge et cela faisait maintenant près de treize générations hyliennes qu'il avait ouvert les yeux pour la première fois. S'il aimait Hátign autant qu'un père peut aimer sa fille, il ne supportait pas sa clémence, dès qu'il était question des enfants de la surface. Sans doute était-elle trop jeune pour garder à l'esprit toutes les rancoeurs qu'il nourrissait. Nombreuses étaient celles survenues avant même qu'elle ne vienne au monde. Parfois, elles prenaient racine dans un passé plus ancien que le couronnement de son propre père.

Le doyen garda néanmoins le silence. Elle avait beau n'être qu'une jeune fille immature et innocente, elle demeurait l'avenir de leur peuple. Sur son échine pesait une tradition dont aucun d'entre eux ne soupçonnait réellement le poids. Pour cela – et pour une multitude d'autres raisons – elle méritait le soutien de l'intégralité des âmes qui vivaient sous sa protection. Elle avait droit à leur respect indéfectible. Et elle avait le sien. « Comme il vous plaira, Altesse », souffla-t-il simplement, balayant la table d'un bref geste de la main. Sur la nacre, la carte ne tarda pas à s'agrandir, révélant en détail un pan de la rivière Zora. « Je doute toutefois que les sujets qui suivent vous plaisent », reprit-il. A ses côtés Opes Avo avait du mal à camoufler sa gêne. Tous savaient que des deux sujets qu'il restait à aborder, aucun ne saurait tirer un sourire à la souveraine. « Il y a encore au moins deux sujets que nous nous devons d'aborder avant de vous libérer et de vous laisser officier la cérémonie », reprit-il néanmoins, soucieux de ne pas laisser Malem commencer. Il craignait son manque de diplomatie. D'un regard aussi ferme que le lui permettaient ses yeux globuleux il tacha de lui faire comprendre qu'il prenait la suite.

Alors que Taja Napen faisait signe à l'une des cinq sentinelles qui encadraient le Cercle des Doyens, le plus large des sages repris. « Majesté, par avance veuillez nous pardonner. Nous aurions préféré ne pas avoir à gâcher les festivités », la voix de la Raie manquait d'assurance, certes, mais elle était surtout teintée d'une tristesse qu'il peinait à masquer. « Une vingtaine des nôtres ont été tués, il y a un peu plus d'un mois maintenant. Kodah, ainsi que de nombreux enfants, ont été retrouvés. » Opes Avo marqua le silence. La dernière génération de Zora, née des années après Ruto, approchait désormais les trente hivers. Ils semblaient tous plus jeunes qu'un Hylien venant de passer son cinquième printemps. « Nous avons fait du mieux que nous pouvions, Hátign, mais il n'a pas été possible d'accorder à toutes les dépouilles les rites qu'elles méritaient », trancha l'ancien soldat, plus froid. Il se refusa, dans un premier temps à donner davantage de détails concernant l'amie de la future Reine-Mère. « Les corps étaient souvent trop mutilés pour le permettre », expliqua-t-il tout de même. Le garde avec qui il avait échangé un peu plus tôt reparut sur sa gauche. Il portait, entre ses mains palmées, les restes d'un petit contenant de fer ou d'argent, partiellement éventré. « Nous avons d'abord cru que c'était l'oeuvre d'un Rà'ak particulièrement agressif ou d'un groupe de jeunes Araknes. Il n'en est rien. »

Se saisissant du morceau de métal, l'ancien général y jeta un bref coup d’œil avant de le tendre à la souveraine en devenir. « Ce que vous voyez-là en est certainement la preuve », fit-il, dès lors que Ruto récupéra l'objet. « Observez bien les inscriptions, sur la portion qui n'a pas été déchiquetée : c'est de l'ancien Hylien », asséna-t-il, sévère et imperturbable. « Ce chicot de fer a été retrouvé sur le corps de Laruta. Il était logé dans la déchirure de ses omoplates. » Il se tut, un instant. Il savait pertinemment qu’il venait de lui annoncer – sans doute un peu crûment – la mort de deux proches amies. Après presque une minute, il reprit. « Nos artisans et nos artificiers sont sans appel : il s’agit d’une bombe, conçue spécialement pour pouvoir détonner sous l’eau. Elle a été pensée pour nous tuer », asséna-t-il, avec son calme froid habituel. En silence, Malem approuva d’un signe de tête. Taja Napen ordonna au jeune soldat de s'éloigner. C’était un homme de confiance, certes, mais hormis le Sénat et la famille royale, tous ignoraient les détails de cette tragédie. Aucun Doyen n’avait jugé utile d’affoler la population avant le retour de la Princesse. « C’est peut-être un peu précipité, nous ne savons-nous pas comment cette bombe est arrivée jusque dans les eaux du Domaine », tempéra Opes Avo, toujours aussi mal à l’aise. Il se dandinait presque sur son siège de pierre. « Cessez de vous faire plus aveugle que vous ne l’êtes vraiment, Opes », trancha sèchement Malem. Avec le temps, il supportait de moins en moins ce qu’il percevait comme de la naïveté chez son cadet. De la naïveté et une certaine mollesse qui pouvait être dangereuse. « Je ne vous permet pas d’employer ce ton avec moi ! » Maugréa le large conseiller du roi. Les deux hommes-poissons échangèrent un regard noir. « Du calme, mes amis », lança le vieux général, sa voix accompagnée d’un geste de la main. « Trop de sujets demeurent pour que nous ayons le temps pour vos querelles d’enfants. » Il marqua un silence. « Votre altesse souhaite-t-elle que son peuple apprenne l’affaire dans ses moindres détails ? Le Sénat n’a pas jugé opportun de semer plus de trouble que nécessaire avant votre retour », reprit Opes Avo. « Il nous faut aussi décider quelles mesures nous allons prendre selon les résultats que donneront l’enquête. Si les Hyliens sont véritablement impliqués dans ce bain de sang... » Taja Napen laissa sa voix mourir, en suspens. Une fois de plus, la parole était à la future Reine-Mère.

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La jeune Princesse était solidement appuyée contre son dossier, un peu comme pour se maintenir le plus loin possible de ces trois hommes dont la sagesse lui semblait n’avoir d’égal que le poids qu’ils représentaient sur ses épaules. Elle était toutefois bien fière et refusait de baisser les yeux, toute enfant irresponsable qu’elle était.

« Je doute toutefois que les sujets qui suivent vous plaisent » enchaîna Taja Napen sans transition. Cette phrase ne surprenait pas Ruto. La lueur dans leur regard avait pris une teinte plus froide. Une chose terrible était arrivée. Elle le sentait jusque dans ses os. Son coeur se serra douloureusement et elle fut soudain terrifiée à l’idée d’être encore plus dévastée après avoir eu le fin mot de l’histoire.

“Ne faites pas davantage de mystère, je vous prie.” trancha-t-elle. Et les minutes qui suivirent furent encore plus atroce qu’elle ne les avait appréhendées.

Kodah. Laruta. Ses oreilles bourdonnaient. Elle sentit toute chaleur abandonner son corps tant elle était bouleversée. Une multitude de souvenirs vint se coincer au travers de sa gorge. Trois enfants; Trois gamines insouciantes qui jouaient à ce qu’elles n’étaient pas. Qui riaient. Se chamaillaient. Pleuraient. Se réconciliaient. Puis riaient à nouveau, encore et encore. A dire la vérité, Ruto s’était sentie seule une bonne partie de sa vie du fait de son rang. Et rien n’avait su combler ce vide en dehors de ces moments si normaux que lui offraient ses amies.

Quant aux enfants…. Elle camoufla un haut-le-coeur tant ce gâchis était monstrueux.
“Je vous avoue ne pas comprendre…” bredouilla-t-elle. “J’imagine particulièrement mal ces deux précieuses femmes mettre nos jeunes en danger dans des eaux troublées de monstres…” Les larmes lui étaient montées aux yeux, et sa voix était tout de suite moins assurée. Envolée la princesse imbue d’elle-même. Elle avait été frappée si fort que son armure d’assurance s’était brisée.

« Nous avons d'abord cru que c'était l'oeuvre d'un Rà'ak particulièrement agressif ou d'un groupe de jeunes Araknes. Il n'en est rien. » Pardon ? La surprise fut telle que le chagrin de la princesse fut soudain interrompu. “Pourriez-vous être plus précis, je vous prie ?” Ils continuèrent à lui exposer la situation. Sans mauvais jeu de mot [HRP : enfin si un peu quand-même… XD], Ruto était médusée. Ils étaient en train de lui dire, ni plus, ni moins, qu’un connard d’Hylien était venu prendre elle ne savait quoi, et que pour cela, les personnes les plus précieuses de son Royaume avaient été sacrifiées. Et par quoi ? Une bombe ? Mais, sous l’eau ?...

« Elle a été pensée pour nous tuer » A ces mots, elle serra si fort ses poings que ses écailles se dressèrent sur ses phalanges. Elle les entendit à peine se disputer tant elle était perdue dans ses réflexions. “Ne soyez pas aussi enfants que votre Reine, mes précieux et estimés Conseillers.” Le ton était redevenu sec. “Il est inutile de nous diviser maintenant. Nous avons tous été aveugles, et je vous prie de me pardonner ces souffrances que vous avez à gérer.” Elle prit une profonde inspiration.

“Qu’il soit animal, zora, hylien ou même Kokiri, celui qui a osé nous enlever nos amis souffrira le double… Que dis-je ? Le triple de ce qu’il nous a fait endurer.” Elle pencha la tête et les regarda avec toute la tendresse dont elle était capable. Le moment était difficile, mais elle avait trois de ses quatre pères devant elle. Que deviendrait-elle si eux-aussi disparaissaient ? “Je sais que vous me trouvez trop souple. Mais convoquez l’Hylienne.” Elle avait sifflé ce terme entre ses petites dents pointues. “Elle est responsable des méfaits de ses sujets, et elle nous doit une aide afin de juger ces traîtres à l’oeuvre des Déesses. Si elle nous refuse son aide, alors soit. Nous adopterons les mêmes méthodes sur les Hyliens que les Hyliens eux-mêmes.”

Elle se leva pour rapprocher son siège de l’immense table autour de laquelle ils étaient. “Et quoi qu’il advienne, nous fermerons le domaine, comme vous l’avez judicieusement proposé.” Un regard sur une pierre qui trainait au sol lui rappela des souvenirs douloureux de soupes de cailloux. Elle pensa à Darunia. “Nous devrions également avertir les Gorons. Aussi grossiers qu’ils puissent être, ils sont peut-être également menacés.”

Elle lissa nerveusement les nageoires qui entouraient son visage. “Avez-vous d’autres points à aborder ?” Il lui tardait plus que jamais à présent de retrouver les siens pour cet événement qui les unirait encore davantage.

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