Posté le 27/03/2013 00:29
Au fond, elle éprouvait de la peine pour ces femmes. Elle connaissait ce sentiment de communauté, de famille même, et pour en avoir fait l’expérience, elle savait combien il était difficile de voir tomber ses sœurs. Pour autant, elle ne comptait pas s'arrêter en si bon chemin, si désolée qu'elle soit pour elles, elle avait sa propre famille à réintégrer. Cela signifiait devoir en sacrifier une autre ? Pourquoi pas, de toute façon il était trop tard à présent.
Restée un peu en retrait pour évaluer la situation, elle s'était écartée peu après avoir suivi jusqu'à la grande cour son nouveau Seigneur. Il lui semblait étrange de se laisser commander par un homme, mais elle s'en accommoderait. Perdue comme elle l’était, c’était loin d’être l’unique détail qui la dépaysait.
Elle jeta un regard périphérique. De là où elle était, un peu en retrait contre la roche, elle avait put repérer les archères qui s'étaient mises en place, tout comme les hordes de guerrières réveillées en hâte pour défendre leur forteresse et leurs vies qui s’en étaient échappées comme d’une ruche. Toute cette agitation lui rappelait de biens mauvais souvenirs sur lesquels elle préférait ne pas s'attarder. Sa main glissa sur le poignard en argent qui ne quittait pas sa ceinture. Dans un épais fourreau, c’était tout ce qu’elle avait emporté en partant de chez elle. Son port la rassurait. Quant à l’autre côté de sa ceinture, une épée s’était ajoutée à sa panoplie. Puisque le Seigneur Sombre payait, elle n’allait pas se priver pour s’équiper avant une attaque. C’était la même raison qui expliquait la cotte de maille cachée sous ses vêtements. Prestement, elle fila le long des murs et s'engouffra dans le premier niveau de la forteresse.
Elle aurait pu combattre à l'extérieur, mais elle n'avait aucune envie d'avoir à surveiller les flèches ni d’épuiser sa magie pour les arrêter, et elle avait du mal à distinguer ses propres alliées de ses ennemies dans la masse rousse qui s'affrontait dehors. Après tout, elle avait passé assez peu de temps avec ces dernières avant l'attaque, et leurs sœurs leur ressemblaient beaucoup trop à son goût. Elle ne souhaitait pas prendre le risque de se battre à l’aveuglette, elle tuerait sans doute, c’était indéniable, mais elle ne tenait pas à se tromper de cible.
Ses mains longèrent doucement les murs. Si on lui avait parlé de la forteresse, elle n’avait pu retenir que l’essentiel, et les couloirs restaient pour elles des labyrinthes. Elle progressait doucement, avec prudence. Le même problème se posait qu’à l’extérieur, et toutes les combattantes lui semblaient si ressemblantes qu’elle n’osa même pas en aider l’une ou l’autre en les dépassant. Elle souhaitait éviter les batailles des jeunes femmes à la tignasse rousse, et pour ça elle remarqua vite que longer les murs avec discrétion ne suffisait pas. Elle ne possédait pas le don de sa sœur pour disparaître, mais elle en avait un autre.
Elle noua ses cheveux en chignon avec le lien qui retenait son actuelle queue de cheval et retira ses petits souliers pointus, les abandonnant sur le sol de la forteresse. Elle en trouverait bien d’autres par la suite. Suite à quoi elle plaqua ses mains contre la pierre, regardant ses ongles s’allonger et se fondre avec ses doigts, avant de les glisser entre les interstices de pierre qui lui offraient une solide prise. Ses pieds subirent le même traitement, et ses serres toutes neuves se faufilèrent entre les renfoncements de la roche qui constituait la demeure des femmes du désert. Avec agilité, elle grimpa jusqu’au plafond, progressant alors rapidement par-dessus les affrontements qui continuait à éclater dans les couloirs. Les mouvements proches d’une araignée, elle semblait à son aise suspendue la tête à l’envers, à courir vivement le long du plafond. Si son avancée n’étaient pas entièrement silencieuse, à cause de sa vitesse de déplacement, elle restait discrète et peu sonore au milieu des bruits de sabres. Elle ralentirait au besoin, mais qui aurait relevé la tête en plein combat ? Elle avait tout le loisir d’admirer le carnage juste en dessous d’elle. Elle ne savait guère qui prenait l’avantage, tout ce qu’elle remarquait, c’était le sang qui maculait les murs et les corps qui jonchaient le sol. Et même si certaines Gerudos préféraient assommer leurs congénères que de les achever, les blessures n’en étaient pas moins nombreuses, après tout aucun des deux camps n’était décidé à se rendre.
Pour sa part, elle avait pris une décision quant à sa destination. Elle grimperait dans la forteresse pour en atteindre le haut, qui donnait une superbe vue pour lancer des sorts. Elle avait même vu ses nouvelles maîtresses s’y diriger, elle pourrait même mêler sa magie à la leur si elles le souhaitaient. Mais avant ça, puisqu’elle passait par là… Elle inspectait le dédale des couloirs à la recherche de proies bien reconnaissables, et la chance lui sourit.
Elle laissa doucement ses yeux s’habituer à l’obscurité de la pièce, seulement éclairée par quelques torches, empêchée de profiter de la clarté de la lune à cause de ses épais murs taillés dans la montagne. Ils lui confirmèrent sa vision première, elle qui avait souhaité une adversaire bien démarquée des rouquines n’aurait pu souhaiter mieux. Son teint pâle et sa longue chevelure lâchée aux reflets bruns suffisaient à lui faire comprendre qu’elle était bien loin des conditions de vie des Gerudos qui peuplaient la forteresse. Du peu qu’elle en avait vu, elle les savait exposées constamment à un soleil de plomb, le teint hâlé et la chevelure coupée court ou toujours attachée, guerrières dans l’âme. Elle pouvait attester n’avoir jamais vu cette fille pâlotte auparavant, ce qui faisait d’elle une ennemie toute désignée. Elle ignorait pourquoi cette dernière avait préféré prendre du recul par rapport aux combats environnants, mais c’était sans importance, elle allait se charger de lui tenir compagnie.
Apercevoir le contenu de la pièce finit de lui tirer un large sourire. Comme son Clan, les Gerudos semblaient adeptes de la sobriété. Ainsi les couloirs qu’elle avait traversés et les pièces qu’elle avait inspectées jusque là suivaient ces mêmes préceptes qu’elle avait connus enfant : à chaque objet sa fonction, pas de décorations superflues. Peut-être certaines pièces étaient-elles arrangées différemment, mais celle-ci n’échappait pas à la règle. Peu décorée, ce qui semblait être une armurerie répondait uniquement à sa fonction première. Sur les murs nus et bruts avaient été entreposées toutes sortes d’armes, de toutes formes et tailles, dont les extrémités de fer brillaient faiblement à la lueur des torches enflammées qui palliaient l’absence de fenêtres. Des lances, des épées, des arcs, des couteaux, en passant par les boucliers, les armures lourdes étaient sans doute les seules à être plus rares, sûrement peu ancrées dans la culture du peuple Gerudo. Bien évidemment, la pièce avait été dévalisée dans l’urgence, et si elle devinait une impressionnante collection, il n’en restait qu’une part minime de ce qu’elle avait dû être avant leur arrivée.
Ses gestes se ralentirent, ses muscles se tendant et se détendant dans le plus grand silence alors qu’elle glissait lentement ses ongles contre-nature entre les fentes du plafond, évitant tout bruit qui aurait pu signaler sa présence. Elle progressa ainsi jusqu’à arriver juste au dessus de la jeune femme. Ses mains se décrochèrent de la roche, et un de ses longs ongles appuya doucement dans son dos au niveau de l’épaule, d’un côté puis de l’autre, plaisanterie de goût douteux, le temps que ses mains reprennent une apparence normale. Retenue à présent uniquement grâce à ses pieds, elle se pencha pour saisir fermement le visage de la jeune femme, les mains plaquées sur les yeux, lui obstruant la vue. Seuls quelques mots furent murmurés à l’oreille de la jeune femme.
« Triste nuit, ma jolie. »
Tout s’enchaina ensuite rapidement, et les armes les plus tranchantes disposées dans la pièce et inanimées quelques instants plus tôt venaient de se lever, portées par une dangereuse magie. Ces dernières, composées de couteaux, épées et lances tranchants et effilés, filèrent alors à toute vitesse vers la jeune brune. Et Songe eut tout juste le temps de se ré-agripper au plafond, lâchant les yeux de la demoiselle pour lui laisser admirer le spectacle qui l’attendait des armes fonçant à toute vitesse sur elle.
Épuisée toutefois par cet enchaînement de magie après sa progression dans la forteresse, elle se laissa tomber au sol après leur passage, reprenant son souffle, et récupérant doucement ses membres habituels.
Elle ignorait ce qui lui prenait. Elle ignorait pourquoi son esprit venait de prendre un tournant aussi monstrueux que ce qui lui servait de griffes quelques instants plus tôt. Mais elle s’était laissée porter. Relevant les yeux, un peu assommée, son regard chercha après ce qui restait de la jeune femme. Par précaution, sa main retira l’épée attachée à sa taille de son fourreau.
[ J’espère que le choix du lieu ne te dérange pas, comme il n’était pas fixé j’en ai choisi un qui me paraissait pouvoir être intéressant :3 ( et désolée d’avoir mis tant de temps à intervenir ;.; ) ]