Posté le 07/05/2011 02:36
L'ambiance des lieux était passée d'un silence déchirant combiné aux craquements des branches mortes au moindre mouvement de vent, à une tristesse presque apaisante, composée par une musique douce et tellement émouvante qu'Aegis crut qu'elle allait le toucher à un moment. Lorsqu'il posa ses yeux sur un malicieux esprit, une lueur aussi étrange qu'éphémère avait traversé ses yeux pourtant toujours ternes d'hypocrisie. Les âmes avaient toutes revêtu le masque désespéré du fantôme hurlant, sauf celle au fond, dont le sourire ne présageait rien de bon.
Il ne savait pas réellement pourquoi ils étaient tous ainsi sortis ; généralement, ils ne manifestaient rien en sa présence, le considérant comme l'un des leurs. Le message transmis par ce morceau de musique serait sûrement arrivé à bon port.
L'autre jeune homme se mit finalement à conter sa présumée histoire, bercé par la mélodie. Cela parlait d'une personne maltraitée par la vie dont elle s'est largement vengée par la suite, et Aegis se demanda un instant si le franc-parler du jeune blond était dû à son manque de remords ou à autre chose. Quoi qu'il en soit, l'heure n'était visiblement pas à jouer les justiciers, pour peu que le mage en avait envie. D'ailleurs, l'énigmatique sheikah avait clairement signifié au recherché qu'il était loin d'approuver ses méthodes, mais sans plus. Quelque part, le nécromancien ressentit pour la première fois de la fascination envers un mortel, et se surprit à vouloir en savoir plus sur lui. Mais l'esprit coquin n'était réellement pas de cet avis, se jetant férocement sur Altaranth qui ne put qu'esquiver. Mais que pouvait-il faire pour neutraliser une âme déjà morte ? Lui-même pour être un magicien de l'Ombre ne voyait rien de tel. En fait, même s'il l'avait pu, il n'en aurait rien fait ; la raison est que si les mortels avaient si peu d'intérêt pour lui, ce n'était pas par opposition aux immortels mais bien aux morts.
Maintenant qu'il y pensait, vaincre un de ces esprits en combat permettrait sûrement de lui donner sa liberté, mais sa méthode à lui était toute autre. Le fait est qu'il ne voyait pas comment toucher un esprit qui disparaît avant même qu'une aiguille lancée à toute vitesse ne l'atteigne ?
Une aiguille ?
La lanterne, seul vestige du spectre démontrant sa position, s'avançait vers Sheik, faisant comprendre à Aegis qu'il était l'auteur de l'attaque. Trop absorbé par la contemplation du spectre, il entendit seulement le mystérieux musicien dire :
« Dangereux hein... Par le plus grand hasard, quelqu'un ici saurait-il comment maîtriser une âme en colère ? »
«-La violence est la dernière chose à essayer. »
Presque sans qu'il ne s'en rende compte, il avait prononcé cette phrase en étant posté entre le blond aux yeux rouges et la lanterne. Toutefois, une forte hésitation s'empara de lui lorsqu'il réfléchit à agir, de peur de faire découvrir ses pratiques assez peu appréciées dans la région.
Mais en effet, il ne valait mieux pas lancer un combat ; ni le temps, ni le lieu n'y étaient appropriés, et cela ne ferait qu'augmenter la colère de l'âme. Par ailleurs, celle-ci demandait simplement à être convaincue de la futilité de ses actes, ne pouvant être vraiment qualifiée de mauvaise.
D'un pas calme, il s'avança vers l'esprit qui, lui sembla-t-il, avait ralenti. Il n'avait aucune raison de s'en prendre à lui en fait, sûrement trop habitué à sa présence, mais la raison de cet accès de folie subit laissait le mage perplexe. Tout en murmurant des paroles inaudibles, il se mit à une petite distance du fantôme qui sembla se calmer un minimum.
Le spectre réapparut finalement, s'immobilisant à quelques centimètres du blond qui fit discrètement signe aux autres hommes de ne pas attaquer. Il n'était pas apaisé pour autant, ni encore moins dissuadé de rentrer chez les morts, car ses yeux dégageaient toujours une grande tristesse, de la rancœur aussi, et un trouble énorme.
« Qu'y a-t-il ? » avait-il murmuré très doucement, de façon à ce que lui-même ne s'entende pas assez clairement. Quelque peu peiné, il se demandait réellement ce qui pouvait l'apaiser et lui faire connaître le repos éternel. Sur cela, il devait avouer qu'il comptait sur le musicien talentueux qui saurait certainement la débarrasser de ce poids.