Posté le 29/09/2014 21:50
Negaï se pencha pour admirer ce visage tendu sans défense devant lui. Si ça ne tenait qu'à lui, il se serait fait un plaisir de visiter ces fines lèvres avec les siennes. Il était certain qu'elles avaient encore le goût de la tarte aux pommes que le rouquin avait engloutie quelques minutes auparavant. Mais il avait d'autres plans, il fallait faire mouche.
"Vous êtes encore plus ravissant de prêt que de loin."
Il eut envie de faire courir ses doigts sur les rondeurs de ses jours, l'os de sa mâchoire, le creux de son cou. Il avait toujours été tactile. Se cachant toujours derrière sa répartie, il n'était finalement pas très expansif au niveau de la parole. Tout passait par le toucher, que ce soit de la haine ou quelque chose de plus doux. Une tendre indifférence, c'était tout l'amour dont il était capable. Sauf pour sa maîtresse, mais il en avait plus peur qu'il ne l'aimait. Et pourtant les Déesses savaient qu'il l'aimait.
Mais ça n'était pas parce qu'on était un enfoiré notoire qu'on devait s'empêcher d'être esthète. Ce garde, aussi hautain qu'il pouvait être avait été gâté par la nature. Quelque part, Negaï l'enviait. Cette fragilité qui émanait de lui était tout à fait désirable. N'importe quel prétentieux en quête d'amour, du vrai, celui qui fait naître des papillons dans votre ventre, se verrait happé par ces grands yeux qui manquaient cruellement de confiance en eux malgré le pouvoir qu'ils avaient. Quand on voyait ce type, on voulait l'aimer, être celui qui le protégerait. Et lui, personne ne l'aimerait jamais ainsi.
Il avait oublié de respirer en se perdant dans sa contemplation. Il inspira enfin, en se penchant, ses lèvres assez proches pour que l'autre les sente même si elles ne touchaient pas les siennes.
"Je veux vous montrer quelque chose que j'affectionne tout particulièrement. Et vous serez le premier à qui je me dévoile tant. J'ose espérer que vous en serez satisfait."
Et c'était la vérité. Jamais personne ne l'avait suivi là où il comptait emmener le rouquin. Non pas que ce soit un sanctuaire ou quoi que ce soit. Mais il était souvent seul, lorsqu'il n'avait pas besoin de "compagnie". Là, c'était intéressé. Mais quelque part, il était un peu fier de montrer son petit coin à lui à quelqu'un. Il voulait que le rouquin trouve ça beau. Que quelqu'un pense comme lui, tout bonnement.
"Attention à la caisse... Là... Tenez ma main..."
Il le guida ainsi jusque sur le mur d'une bâtisse abandonnée. Une vieille épicerie, si l'on en croyait les panneaux à moitié effacé en bas. Le mur en question n'était pas bien haut, mais suffisait à dominer les quelques maisons un peu plus bas, et offrait une vue imprenable sur la Plaine, et son horizon qui embrassait le soleil, qui lui-même venait retrouver son lit après une longue journée à avoir brillé de mille feux. Ils arrivaient à temps, il ferait bientôt complètement nuit.
"Vous pouvez rouvrir les yeux."